LEA NATURE – Presse – Plainte partiellement fondée

Avis publié le 2 avril 2020
LEA NATURE – 631/20
Plainte partiellement fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • après avoir entendu la représentante de la société Léa Nature et les représentants de la Fédération des entreprises de la beauté, plaignante,
  • et après en avoir débattu,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 9 décembre 2019, d’une plainte émanant de Fédération des entreprises de la beauté (FEBEA), afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité en faveur du Groupe Léa Nature, diffusée en presse.

Cette publicité montre une femme qui tient devant son visage un panneau portant l’inscription « Vous avez le droit de savoir ! », une flèche extraite du panneau désignant un pot de cosmétique sur lequel figure une étiquette « 0 % silicones / parabens / phenoxyéthanol ».

Les textes accompagnant ce visuel sont notamment « SO’BiO étic® vous dit tout ! En République française, aucun texte de loi n’interdit le droit à l’information. Nous subissons pourtant des pressions visant à nous faire enlever de nos produits les termes « sans » ou « 0% », permettant à nos consommateurs de visualiser clairement l’absence d’ingrédients dans les produits cosmétiques. Est-il acceptable qu’on veuille nous empêcher d’informer les consommateurs ? Ces mentions sont-elles dénigrantes ? Nous ne le pensons pas et tenions à vous le faire savoir. / SO’BiO etic® a toujours appliqué le principe de précaution et retiré de ses formules certains ingrédients, notamment d’origine pétrochimique. La transparence vis-à-vis du consommateur est une de ses valeurs fondatrices. / SO’BiO etic® et les autres marques de cosmétiques de LEA NATURE ont décidé de continuer à afficher clairement leurs Bio-garanties. ».

2. Les arguments échangés

La fédération plaignante estime que le message véhiculé dans cette publicité est contraire au Code de communications ICC publicité et marketing, ainsi qu’aux recommandations déontologiques de l’ARPP sur les produits cosmétiques.

En premier lieu, elle indique que le Code de communications ICC publicité et marketing rappelle, parmi ses principes élémentaires, que toute communication commerciale doit être conçue avec un juste sens de la responsabilité sociale et professionnelle, doit être conforme aux principes de la concurrence loyale, et qu’en outre, aucune communication ne doit être de nature à dégrader la confiance que le public doit pouvoir porter au marketing.

Or la fédération estime que le message affirmatif au caractère vague et général par lequel Léa nature dit subir des pressions, dénué de précisions venant fonder et étayer cette affirmation, jette une forme incontestable de discrédit sur l’ensemble des concurrents de Léa Nature mais aussi sur les autorités de contrôle et de régulation.

Elle estime également qu’en associant sa démarche à de la transparence vis-à-vis du consommateur, laissant entendre que ses concurrents respectueux de la recommandation de l’ARPP ne le seraient pas, Léa Nature aggrave de façon conséquente le caractère dénigrant de sa publicité.

En second lieu, sur la méconnaissance des recommandations déontologiques de l’ARPP sur les produits cosmétiques, la FEBEA constate que la publicité en cause met en valeur l’absence d’un ou de plusieurs ingrédients, autorisés par la réglementation en vigueur, dans deux produits cosmétiques (vendus sous la marque SO’BIO étic, « Précieux Argan Crème de Jour Anti-Âge » et « Douche Crème LAIT D’ANESSE ») et que cela constitue l’argument principal de ladite communication. Cette publicité ne répond pas aux critères communs cités dans la Recommandation de l’ARPP : « conformité avec la législation, véracité, éléments probants, sincérité, équité, choix en connaissance de cause ».

La publicité en cause précise que de telles allégations sur les produits cosmétiques ne sont pas dénigrantes, sans qu’il ne soit apporté de nuance ou de précision à ladite information.

De façon générale, cette publicité ne contribue pas à une image valorisante des deux produits présentés, et plus largement des produits cosmétiques, puisqu’elle se centre sur des arguments exclusivement négatifs. Elle est donc construite sur des arguments dénigrants visant les produits vendus par les sociétés concurrentes de Léa Nature.

Le Groupe Léa Nature a été informé, par courrier recommandé avec avis de réception du 10 janvier 2020, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Le Groupe Léa Nature considère que la publicité contestée présente une information objective et avérée qui ne constitue en aucun cas un acte de dénigrement et est conforme, en tout point, aux règles déontologiques applicables aux professionnels de la publicité sur les produits cosmétiques.

Sur la remise en cause des allégations « sans » dans le secteur cosmétique et le caractère objectif et informatif de la publicité SO’BiO étic®, l’annonceur estime que les allégations cosmétiques figurant sur les emballages et dans les publicités du Groupe Léa Nature ont pour seul objectif de présenter les caractéristiques d’un produit, de mettre en avant ses qualités et/ou son efficacité, et qu’elles sont donc essentielles à l’information du consommateur.

Il ajoute que l’existence des allégations « sans » et « 0% » semble pourtant aujourd’hui remise en cause, et explique que, par l’annonce de presse en question, le Groupe Léa Nature a simplement souhaité témoigner des pressions multiples visant à faire interdire les mentions « sans » et « 0% » pour ses cosmétiques, alors que ces informations sont objectives et avérées.

Il indique que l’ARPP s’est prononcée sur plusieurs projets de publicités soumis par le Groupe Léa Nature concernant ses produits cosmétiques SO’BiO étic®, en lui indiquant :

– le 24 avril 2019 : « En application de la version v8 de la Recommandation Produits Cosmétiques, il conviendra pour une diffusion à compter du 1er Juillet 2019 de rendre illisible l’indication « sans sulfate » / « sans paraben » présente sur les conditionnements des produits» ;

le 14 juin 2019 : « Il convient de vérifier l’absence de visualisation de revendication « sans » sur les conditionnements » ;

– le 3 septembre 2019 : « En application de la recommandation Produits Cosmétiques dans sa version entrée en vigueur en application au 1er juillet 2019, dans sa partie « allégations sans», il convient de supprimer les références « sans paraben », « sans sulfates » et « sans silicone ». En effet, ces ingrédients étant autorisés, cela contrevient au critère d’équité ».

Le Groupe Léa Nature explique que l’ARPP s’appuie sur la version 8 de sa Recommandation « Produits Cosmétiques », qui reprend en réalité le document technique de la Commission Européenne (annexe E – Commission européenne, Technical document on cosmetic claim, version juillet 2017) relative au règlement (UE) n ° 655/2013 dit « allégations», document qui définit six critères communs (annexe F). Or, ce document n’interdit pas, en soi, l’utilisation des allégations « sans » et « 0% ». Chaque produit doit donc faire l’objet d’une analyse, au cas par cas, de sa présentation et de sa composition.

De plus, si le Groupe Léa Nature a bien conscience que ce document a été intégré dans les règles déontologiques du secteur de la publicité, il convient de souligner qu’il n’a, en tant que tel, aucune valeur juridique et ne constitue qu’un guide quant à l’application des critères communs établis par la Commission. Il s’agit d’un simple document de travail, soumis à interprétation et à de possibles modifications. En toute hypothèse, l’interprétation de la règlementation applicable relève de l’appréciation souveraine du juge. 

S’agissant des pressions exercées par les distributeurs, le Groupe Léa Nature précise qu’elles revêtent plusieurs formes :

  • l’interdiction de certaines matières dans les cosmétiques, conduisant les distributeurs à travailler sur les produits identifiés avec les partenaires fournisseurs concernés en vue de leur reformulation (l’annonceur donne l’exemple d’une liste d’ingrédients « black-listés » donnée le 19 juin 2019, lors de la convention RSE GALEC) ;
  • le refus de référencer des produits présentant des allégations « sans ». L’annonceur cite un email de la SCAPARF du 25 juin 2019, soulignant que « le règlement 655/2013 établit les critères communs auxquels les allégations relatives aux produits cosmétiques doivent répondre. L’un des critères communs établis est le suivant : “Équité : Les allégations relatives aux produits cosmétiques doivent être objectives et ne peuvent dénigrer ni la concurrence ni des ingrédients utilisés de manière légale”. Par ailleurs, le document technique établis par la commission européenne, mis à jour en 2017, précise : “Les revendications « sans » ou les revendications avec une signification similaire ne sont pas autorisées quand elles impliquent un message dénigrant, notamment quand elles reposent principalement sur une perception négative présumée sur la sécurité de l’ingrédient (ou d’un groupe d’ingrédients)”. Ainsi, seules les allégations « sans » et « 0% » permettant aux consommateurs de faire un choix averti vis-à-vis de convictions religieuses ou de terrain allergique et qui ne dénigrent ni les produits concurrents ni certaines substances autorisées par la réglementation, sont acceptables. Par ailleurs, l’ARPP a mis à jour ses recommandations concernant les produits cosmétiques. Ces mises à jour entreront en vigueur le 1er juillet 2019. La publicité doit être essentiellement consacrée aux arguments positifs. Nous tenons donc à vous informer que la SCAPARF ne fera plus de mise en avant de produits portants des allégations non autorisées en prospectus ». L’annonceur cite un autre email du 6 septembre 2019, du GALEC, informant le Groupe Léa Nature du refus d’un échantillon pour cause de mention « sans paraben ».

Il ajoute que la DGCCRF a, pour sa part, considéré que l’utilisation des allégations « sans » restait tolérée, sous réserve qu’elles soient précises, vérifiables et appuyées par de solides preuves, notamment lorsqu’elles répondent à une population spécifique (annexe OGCCRF, présentation sur les allégations dans les produits cosmétiques du 4 juillet 2019 par le bureau des produits et prestations de santé et services à la personne, p. 10), et que cette position est également défendue par COSMEBIO (Communiqué COSMEBIO du 4 juillet 2019).

Il ajoute que de nombreux acteurs du marché de la cosmétique bio, notamment des adhérents de la FEBEA, affichent également les mentions « sans » et « 0 % » (Colgate pour Sanex et Tahiti, Procter & Gamble avec Head & Shoulders, Nivea, L’Oréal avec Cadum ou Narta…).

L’annonceur en déduit que la publicité mise en cause dans la plainte de la FEBEA ne revêt aucun caractère dénigrant, que ce soit au regard du code de la consommation ou des règles déontologiques propres au secteur de la publicité.

Il fait valoir qu’au sens juridique strict, il n’est pas possible de reprocher une pratique commerciale déloyale trompeuse ou fondée sur le dénigrement de concurrents du Groupe Léa Nature. En effet, une pratique commerciale est déloyale lorsqu’elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu’elle altère, ou est susceptible d’altérer de manière substantielle, le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l’égard d’un bien ou d’un service. Constituent en particulier des pratiques commerciales déloyales les pratiques commerciales trompeuses (art. L. 121-1 du code de la consommation). Or la publicité en cause constitue, selon l’annonceur, une information claire et objective du consommateur quant à l’utilisation des allégations « sans » et « 0% » sur les produits de la marque SO’BiO étic®.

De plus, ces allégations ne sont pas interdites en tant que telles, de sorte que la publicité ne peut pas être considérée comme déclarant ou donnant l’impression que la vente d’un produit ou la fourniture d’un service est licite alors qu’elle ne l’est pas. Elle n’est contraire à aucune des pratiques réputées trompeuses (art. L. 121-4 du code de la consommation).

En ce qui concerne le respect des règles professionnelles spécifiques applicables au secteur de la publicité sur les produits cosmétiques, le dénigrement de concurrents du Groupe Léa Nature n’est pas davantage caractérisé.

En effet, le Code de communication ICC publicité et marketing (article 12) précise que : « La communication commerciale ne doit pas dénigrer une quelconque personne ou catégorie de personnes, une entreprise, une organisation, une activité industrie/le ou commerciale, une profession ou un produit ou tenter de lui attirer le mépris ou le ridicule public ».

De manière plus spécifique, le b/ du point 1.1 de la Recommandation ARPP « Produits cosmétiques » prévoit que : « Les messages ne doivent pas être construits sur des arguments dénigrants visant un ou des produit(s) concurrent(s) ».

Les conditions dégagées par l’ARPP pour caractériser un dénigrement sont les suivantes : les arguments utilisés par le message publicitaire litigieux doivent présenter un caractère dénigrant, ce qui suppose une volonté de jeter le discrédit sur un produit, notamment par des allégations erronées ou susceptibles d’induire en erreur le consommateur ; le dénigrement doit porter sur des produits cosmétiques fabriqués ou commercialisés par des concurrents de l’annonceur. Contrairement aux règles encadrant la publicité comparative, la Recommandation n’exige pas qu’une marque ou un annonceur soit nommément désigné ou aisément identifiable. Cette disposition peut donc trouver à s’appliquer lorsqu’est visée une catégorie précise de produits cosmétiques fabriqués ou vendus par différentes entreprises. Enfin, le message publicitaire litigieux doit être « construit sur » des arguments dénigrants, ce qui suppose qu’il en soit le propos principal (Avis JDP n°331/14 du 29 septembre 2014 I distribution alimentaire bio).

Or l’annonceur estime que ces conditions ne sont pas réunies en l’espèce. En effet, la publicité en cause a pour objectif unique de fournir au consommateur une information sur les produits de la marque SO’BiO étic®, notamment sur la légitimité des informations transmises sur leur étiquetage. Elle ne présente aucune volonté de dénigrement. Les allégations « sans », en tant que telles, ne dénigrent pas les produits concurrents qui en contiennent, mais apportent une indication objective au consommateur concernant la composition du produit. Enfin, l’information transmise par le message publicitaire présente un caractère purement objectif.

A ce titre, il souligne que le Jury de déontologie publicitaire a déjà admis que la simple référence au fait qu’une substance fasse débat, ou soit un sujet à controverse, puisse être vue comme une donnée objective exempte de toute appréciation sur le caractère fondé ou non de ce débat. Cette référence peut seulement renvoyer les consommateurs à se renseigner sur la question sans introduire de dénigrement des produits concurrents (Avis JDP n°257/13 du 26 juin 2013/ « Sans Phénoxyéthanol »).

De plus, le message publicitaire ne permet aucunement d’identifier en particulier un produit, une marque, ou un distributeur, puisque tel n’est pas son objectif. Contrairement à ce que soutient le plaignant, l’absence de « nuance ou de précision » venant étayer le message n’est justement pas à même de caractériser le dénigrement et témoigne de l’objectivité et de la neutralité de la démarche du Groupe Léa Nature.

Enfin, les centrales d’achat, au vu des arguments juridiques précédemment exposés et avec l’appui de la campagne publicitaire, au regard des nombreuses marques mentionnant des garanties « sans » ou « 0% », ont finalement revu leurs positions et intégré ces offres « sans » dans leurs prospectus et référencements. 

Le journal Les Echos fait valoir que l’affirmation selon laquelle Léa Nature subit des pressions visant à ce qu’elle enlève de ses produits les termes « sans » ou « 0 % », alors qu’ils sont un outil de transparence envers le consommateur, n’est pas de nature à dégrader la confiance que le public doit pouvoir porter au marketing. Au contraire, cette affirmation témoigne de la volonté de faire de la transparence un élément central de communication au consommateur et doit par conséquent être considérée comme étant de nature à renforcer la confiance du public dans le marketing.

Aucun concurrent n’est visé par cette affirmation de sorte qu’il est impossible de considérer que Léa Nature discrédite l’un quelconque de ses concurrents ou autorité de contrôle.

S’agissant de la méconnaissance des recommandations déontologiques de l’ARPP sur les produits cosmétiques, l’argument principal de la communication ne porte pas sur l’absence d’ingrédients dans les deux produits, mais sur le droit à l’information, comme en témoignent les phrases mises en valeur « Vous avez le droit de savoir » et « En République française, aucun texte de loi n’interdit le droit à l’information ».

L’allégation remplit tous les critères communs de conformité et notamment s’agissant du choix en connaissance de cause, l’allégation « sans » ou équivalent est autorisée quand elle permet à un groupe ou des groupes cibles spécifiques d’utilisateurs finaux de faire un choix éclairé, ce qui est en l’espèce le cas puisque SO’BiO étic®, en précisant qu’elle applique le principe de précaution concernant les certains ingrédients, notamment d’origine pétrochimique, permet aux consommateurs sensibles aux considérations d’ordre environnemental d’effectuer un choix éclairé.

Le simple fait d’apposer des allégations « sans » ou « 0 % » n’a rien de dénigrant pour les produits concurrents, il s’agit simplement d’informer le consommateur d’une population déterminée. En tout état de cause, aucun concurrent ni aucun de ses produits n’est ni cité ni dénigré dans ladite publicité dont l’unique vocation est de pouvoir informer ses consommateurs.

3. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle que le Code de la Chambre de commerce internationale prévoit que :

« Article 1er : Principes élémentaires.

Toute communication commerciale doit se conformer aux lois, être décente, loyale et véridique. / Toute communication commerciale doit être conçue avec un juste sens de la responsabilité sociale et professionnelle et doit être conforme aux principes de la concurrence loyale telle qu’ils sont généralement admis dans les relations commerciales. / Aucune communication ne doit être de nature à dégrader la confiance que le public doit pouvoir porter au marketing. »

« Article 12 : Dénigrement.

La communication commerciale ne doit pas dénigrer une quelconque personne ou catégorie de personnes, une entreprise, une organisation, une activité industrielle ou commerciale, une profession ou un produit, ou tenter de lui attirer le mépris ou le ridicule public. »

Par ailleurs, aux termes de la Recommandation « Produits cosmétiques » :

« Préambule

(…) Toute allégation doit être véridique, claire, loyale, objective et ne doit pas être de nature à induire en erreur. / (…) Les allégations publicitaires doivent respecter le Règlement (UE) N° 655/2013 établissant les critères communs auxquels les allégations relatives aux produits cosmétiques doivent répondre, ainsi que la dernière version du Manual on the scope of application of the Cosmetic regulation (EC) N° 1233/2099 (art. 2(1) a), disponible sous le lien suivant : http://ec.europa.eu/growth/sectors/cosmetis/products/borderline-products_fr. Ces dispositions visent la communication commerciale qui s’adresse au consommateur quel que soit son mode de diffusion. »

« 1.1. Concurrence.

a) La publicité ne doit comporter aucune mention tendant à faire croire que le produit possède des caractéristiques particulières alors que tous les produits similaires possèdent les mêmes caractéristiques, notamment du fait de la catégorie du produit considéré ou de la simple application de la règlementation en vigueur.

b) Les messages ne doivent pas être construits sur des arguments dénigrants visant un ou des produit(s) concurrent(s).»

« 2.2. Allégations « sans ».

a) Afin de contribuer à une image valorisante des produits cosmétiques, la publicité doit être essentiellement consacrée aux arguments positifs.

b) A ce titre, l’utilisation d’une allégation portant sur l’absence d’un ou de plusieurs ingrédients ou d’une catégorie d’ingrédients n’est possible que si cette allégation respecte les deux conditions spécifiques suivantes :

b.1. Elle ne constitue pas l’argument principal de la communication mais apporte au consommateur une information complémentaire.

b.2. Elle répond à l’ensemble des critères communs établis par le Règlement (UE) n° 655/2013 (conformité avec la législation, véracité, éléments probants, sincérité, équité, choix en connaissance de cause) et aux bonnes pratiques de son application développées dans le Document technique sur les allégations cosmétiques publié le 3 juillet 2017 par la Commission européenne et ses versions ultérieures (cf. traduction reproduite en Annexe).

Le Jury relève que la publicité en cause montre une femme qui tient devant son visage un panneau portant l’inscription « Vous avez le droit de savoir ! », une flèche extraite du panneau désignant un pot de cosmétique sur lequel figure une étiquette « 0% silicones / parabens / phenoxyéthanol / colorant et parfum de synthèse ».

Les textes accompagnant ce visuel sont notamment « SO’BiO étic® vous dit tout ! En République française, aucun texte de loi n’interdit le droit à l’information. Nous subissons pourtant des pressions visant à nous faire enlever de nos produits les termes « sans » ou « 0% », permettant à nos consommateurs de visualiser clairement l’absence d’ingrédients dans les produits cosmétiques. Est-il acceptable qu’on veuille nous empêcher d’informer les consommateurs ? Ces mentions sont-elles dénigrantes ? Nous ne le pensons pas et tenions à vous le faire savoir. / SO’BiO etic® a toujours appliqué le principe de précaution et retiré de ses formules certains ingrédients, notamment d’origine pétrochimique. La transparence vis-à-vis du consommateur est une de ses valeurs fondatrices. / SO’BiO etic® et les autres marques de cosmétiques de LEA NATURE ont décidé de continuer à afficher clairement leurs Bio-garanties. ».

Le Jury considère, en premier lieu, que les accroches figurant sur la publicité en cause « Vous avez le droit de savoir ! », « En République française, aucun texte de loi n’interdit le droit à l’information », « Nous subissons pourtant actuellement des pressions visant à nous faire enlever de nos produits les termes « sans » ou « 0% » permettant à nos consommateurs de visualiser clairement l’absence d’ingrédients dans les produits cosmétiques » ou encore « Est-il acceptable qu’on veuille nous empêcher d’informer les consommateurs ? », qui ne retracent pas le contexte dans lequel les mentions « sans » sont discutées, ni les raisons pour lesquelles ces mentions font l’objet de discussions, sont de nature à dégrader la confiance que le public doit pouvoir porter au marketing, en donnant l’impression que des informations particulières seraient volontairement cachées aux consommateurs pour des raisons inexpliquées.

Le Jury relève, en second lieu, que le pot de cosmétique en haut de la publicité est présenté avec les allégations suivantes : « 0 % silicones / parabens / phenoxyéthanol / colorant et parfum de synthèse ».

Il relève également que la Recommandation « Produits cosmétiques » se réfère, à son point 2.2. Allégation « sans », à l’Annexe 3 du document technique sur les allégations cosmétiques publiées le 3 juillet 2017 par la Commission européenne, traduite et reprise en annexe à cette Recommandation. Le Jury constate donc que cette annexe, sans qu’il soit de son office de se prononcer sur sa valeur juridique, est intégrée à la Recommandation.

Cette annexe indique en introduction que : « Dans le cas des revendications « sans », des lignes directrices supplémentaires sont nécessaires pour l’application des critères communs permettant d’assurer une protection adéquate et suffisante des consommateurs et des professionnels vis-à-vis de revendications trompeuses ». Elle est structurée en un tableau de 3 colonnes, respectivement intitulées « critère », « description » et « exemples d’allégations (uniquement illustratives et non exhaustives) et remarques ».

Le critère « équité » fait l’objet de la description suivante : « Les revendications « sans » ou les revendications avec une signification similaire ne sont pas autorisées quand elles impliquent un message dénigrant, notamment quand elles reposent principalement sur une perception négative présumée sur la sécurité de l’ingrédient (ou d’un groupe d’ingrédients) ».

Le Jury en déduit que l’interdiction d’utiliser des allégations « sans » n’est donc pas absolue puisqu’elle ne s’applique que lorsque de telles allégations s’avèrent dénigrantes.

Or, dans la troisième colonne du tableau, ce critère est assorti des remarques suivantes : « Certains parabènes sont sûrs lorsqu’ils sont utilisés conformément au Règlement (CE) n°1223/2009. Compte-tenu du fait que tous les produits cosmétiques doivent être sûrs, la revendication « sans parabènes » n’est pas autorisée car elle dénigre le groupe entier des parabènes. Le phénoxyéthanol et le triclosan sont sûrs lorsqu’ils sont utilisés en accord avec les dispositions du Règlement Cosmétique. Par conséquent, la revendication « sans » ces substances n’est pas autorisée puisqu’elle dénigre des substances autorisées ».

Le Jury en déduit que, selon cette annexe, les allégations « sans parabènes » et « sans phénoxyéthanol » sont considérées comme dénigrantes.

Dans ces conditions, le Jury ne peut que constater que les mentions « 0 % parabens » et « 0 % phénoxyéthanol » figurant sur le pot de cosmétique ne sont pas conformes à la version applicable de la Recommandation « Produits cosmétiques ».

S’agissant, en revanche des mentions « 0 % silicones / colorant et parfum de synthèse », le Jury considère qu’en l’absence de démonstration de leur caractère dénigrant, elles n’apparaissent pas contraires à cette même Recommandation.

En conséquence de ce qui précède, le Jury est d’avis que la campagne de publicité en cause méconnaît l’article 1er du Code ICC et, s’agissant des deux allégations « 0 % parabens / phénoxyéthanol » figurant sur le pot de cosmétique en haut de la publicité, le point 2.2 de la Recommandation « Produits cosmétiques » de l’ARPP.

Avis adopté le 7 février 2020 par Mme Lieber, Présidente, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mme Lenain, MM. Depincé, Lacan, Lucas-Boursier et Leers.

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Consultez la réponse apportée par Monsieur Alexandre LALLET Personnalité indépendante faisant fonction de Réviseur de la déontologie publicitaire.