Avis JDP n°29/09 – FOURNISSEUR D’ACCES A INTERNET – Plainte fondée

Décision publiée le 16.11.2009

Plainte fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

–  après examen des éléments constituant le dossier de plainte,

–  et après en avoir délibéré,

rend la décision suivante :

1.Les faits

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi le 9 septembre 2009, par une plainte de l’Association Force Ouvrière Consommateurs (AFOC), portant sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une affiche publicitaire, en faveur de l’offre Internet de la société annonceur.

La publicité est construite en deux parties, avec sur la partie gauche, une image qui représente un enfant glissant à califourchon sur une rampe d’escalier classique, accompagnée de l’accroche « Il y a internet… » et sur la partie droite, une image qui représente le même enfant à califourchon sur une rampe d’escalier fictive, comportant une boucle en son milieu, accompagnée du texte « …et internet ».

2.La procédure

La plainte a été communiquée à l’annonceur et à l’afficheur par lettre RAR du 6 octobre 2009, les informant de la date de la séance.

3.Les arguments des parties :

L’association plaignante précise en préambule que sa plainte ne porte que sur le visuel de l’escalier et pas sur les autres visuels de cette campagne.

Elle indique également que sa plainte est fondée sur des considérations tirées de la lutte qu’il convient de mener afin de faire reculer le fléau que constituent les accidents domestiques qui sont en France la première cause de mortalité chez l’enfant.

Elle considère que cette image véhicule un comportement à l’évidence dangereux en ce qu’il est susceptible de fortement inciter les enfants qui y seront confrontés, à reproduire le comportement représenté, à savoir, la glissade sur une rampe d’escalier. Si le public adulte, à qui s’adresse cette publicité, est certainement à même de prendre le recul suffisant pour comprendre le caractère allégorique de la glissade d’une part et, de la glissade avec looping d’autre part, il en va tout autrement du jeune public mis en scène par ce visuel très réaliste.

L’AFOC produit, à l’appui de ses affirmations, des chroniques judiciaires relatant le décès d’enfants à la suite de glissades sur des rampes d’escaliers.

Elle invoque les dispositions de l’article 13 du Code de la CCI et les articles 5.2 et 2.4 des recommandations Enfant et Sécurité de l’ARPP.

L’annonceur indique que cette affiche fait partie de sa campagne « il y a internet…et internet » qui s’est déroulée sur une période de courte durée, du 9 au 15 septembre 2009. Le visuel a été affiché en un nombre d’exemplaires restreint, à savoir 117 affiches dans le métro parisien, 46 dans les gares parisiennes, 124 en région parisienne et 118 en province. L’annonceur fait valoir que cette campagne, composée de sept visuels, avait pour finalité de mettre en exergue, de façon humoristique, les qualités de l’internet accessible par X, plus riche, plus dynamique, plus divertissant, par opposition à l’internet en général.

Le visuel visé par la plainte ne fait que reprendre une scène de la vie courante, que l’on retrouve d’ailleurs dans des publicités d’autres annonceurs, celle d’un enfant qui glisse sur une rampe d’escalier. Selon l’annonceur, l’affiche ne représentait pas une situation dans laquelle l’enfant se trouverait en risque particulier, pas plus qu’un enfant qui traverse la rue, qui court dans un escalier ou qui monte sur un mur. Il précise enfin que cette campagne n’est plus diffusée depuis le 15 septembre 2009.

L’annonceur, pour appuyer ses affirmations, a transmis au secrétariat du Jury des publicités diffusées dans la presse en 2002 et en 2006 et qui représentent également, selon elle, des exemples de comportements dangereux.

Quant à la partie du visuel symbolisant le côté plus amusant de l’internet par X, le caractère totalement irréaliste et imaginaire de la forme de la rampe qui y est reproduite n’échappe à personne et ne saurait donc être considéré comme mettant en scène un comportement dangereux.

Les observations de l’afficheur ont été présentées après l’expiration des délais impartis.

4.Les motifs de la décision du Jury

D’une part, il résulte des dispositions de la Recommandation Enfant que « La publicité s’adressant aux enfants doit présenter les produits dans un environnement et des situations répondant aux règles de sécurité prévues par les normes en vigueur. » (5/1) et que « La publicité ne doit pas donner l’impression qu’un comportement dangereux ou imprudent est acceptable et peut être reproduit, dans quelque situation que ce soit, y compris dans le cadre de jeux. »(5/2).

D’autre part, la Recommandation Sécurité dispose que : « La publicité, sous quelque forme que ce soit, ne doit pas porter atteinte à la sécurité des personnes et des biens et doit donc respecter les règles déontologiques suivantes : Sauf justification d’ordre éducatif ou social, la publicité ne doit comporter aucune présentation visuelle ni aucune description des pratiques dangereuses ou de situation où la sécurité et la santé ne sont pas respectées”

Une prudence particulière s’impose aux publicités utilisant des enfants ou des adolescents ou s’adressant à eux. ».

Le Jury relève que la publicité en cause, bien que construite en deux parties dont l’une représente une rampe d’escalier irréelle et improbable, comporte néanmoins dans l’autre partie l’image très réaliste d’une situation pouvant être aisément reproduite par de jeunes enfants dans la vie quotidienne et qui présente pour eux un risque certain.

Le Jury considère que cette affiche publicitaire ne respecte pas les exigences de sécurité que le public est en droit d’attendre pour ce type de campagne qui s’adresse à tous, compte tenu du support de diffusion utilisé, qui met en scène un enfant et méconnaît donc les règles déontologiques rappelées ci-dessus.

5.La décision du Jury

– La plainte est fondée.

– La publicité de l’annonceur contrevient aux Recommandations précitées Enfant et Sécurité.

– La décision du Jury sera communiquée au plaignant, à l’annonceur et à l’afficheur ; elle sera diffusée sur le site internet du JDP.

Délibéré le vendredi 6 novembre 2009 par Mmes Hagelsteen, Présidente, Michel-Amsellem, Vice-Présidente, Drecq et Moggio, et Ms Benhaïm, Lacan, Leers et Raffin.