DESIGUAL

Internet

Plainte fondée

Avis publié le 13 mars 2023
DESIGUAL – 891/22
Plainte fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • après en avoir débattu dans les conditions prévues par l’article 13 du règlement intérieur,
  • l’avis délibéré ayant été adressé aux plaignants ainsi qu’à la société Desigual, laquelle a introduit une demande de révision,
  • la procédure de révision prévue à l’article 22 de ce règlement ayant été mise en œuvre,
  • après avoir invité les personnes intéressées à faire valoir leurs observations et avoir entendu, lors de la seconde séance tenue par visioconférence le 3 mars 2023, les conclusions de M. Grangé-Cabane, Réviseur de la déontologie publicitaire, ainsi que les représentants de la société Desigual,
  • et, après en avoir débattu, dans les conditions prévues à l’article 22 du règlement intérieur,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 1er novembre 2022, d’une plainte émanant d’un particulier, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité en faveur de la société Desigual pour promouvoir son sac à mains Mantis.

La publicité en cause, diffusée sur les réseaux sociaux de la marque, montre une photographie en noir et blanc de l’artiste Nathy Peluso, égérie de la marque, nue, à genoux, un bras positionné devant ses seins, l’autre tenant le sac à mains jaune devant son sexe.

Le texte accompagnant cette image est : « Conçue par Maîtrepierre et réalisé en cuir, découvrez « Mantis » le sac vedette de notre campagne avec Nathy Peluso ».

2. Les arguments échangés

La plaignante considère que cette publicité est irrespectueuse de la femme, voire choquante pour les jeunes filles.

La société Desigual a été informée, par courriel avec avis de réception du 3 novembre 2022, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle a été également informée que cette affaire ferait l’objet d’un examen dans le cadre de la procédure simplifiée prévue à l’article 13 du règlement intérieur du Jury.

La société n’a pas présenté d’observations.

3. L’avis délibéré par le Jury le 2 décembre 2022

Lors de sa séance du 2 décembre 2022, le Jury a adopté un avis qui conclut que la publicité en cause ne respecte pas les points 1.1, 1.2 et 2.1 de la Recommandation « Image et respect de la personne » de l’ARPP.

4. La demande de révision et les conclusions du Réviseur de la déontologie publicitaire

Lors de la séance du 3 mars 2023, le Réviseur de la déontologie publicitaire a présenté les conclusions suivantes :

A) Procédure :

Le Jury de Déontologie Publicitaire (JDP) est saisi, le 1er novembre 2022, d’une plainte émanant d’un particulier, afin de se prononcer sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité en faveur de la société Desigual pour promouvoir le sac à mains Mantis de cette dernière.

La publicité en cause, diffusée sur les réseaux sociaux de la marque, montre une photographie en noir et blanc de l’artiste Nathy Peluso, égérie de la marque, posant de face, intégralement dévêtue, à genoux, un bras positionné devant ses seins nus, l’autre tenant le sac à mains jaune.

Le texte accompagnant cette image est : « Conçue par Maîtrepierre et réalisé en cuir, découvrez “Mantis”, le sac vedette de notre campagne avec Nathy Peluso ».

Par courriel avec avis de réception du 3 novembre 2022, l’annonceur Desigual est informé de la plainte, dont copie lui est transmise, ainsi que des dispositions dont la violation est invoquée. Il est également informé de ce que cette affaire ferait l’objet d’un examen au titre de la procédure simplifiée prévue à l’article 13 du règlement intérieur du Jury (sauf demande de Desigual de tenir une séance du JDP).

Le Jury n’ayant pas reçu d’observations de l’annonceur, il rend, le 2 décembre, un avis aux termes duquel il estime que la publicité en cause ne respecte pas les points 1.1, 1.2 et 2.1 de la Recommandation ‘Image et respect de la personne’ de l’ARPP”.

Le 12 décembre, soit quatre jours après avoir reçu communication de cet avis, Desigual saisit le Président du JDP d’un courriel par lequel :

  • il conteste que, dans l’avis, soit “indiqué que DESIGUAL n’a présenté aucune observation”, ajoutant que “cette information n’est pas correcte” ; il précise que “le lundi 21 Novembre, quatre jours avant la date limite accordée, DESIGUAL a présenté des observations et documents en défense de sa campagne « NATHY PELUSO » via l’email ci-joint” ;
  • par conséquent, il demande “qu’un nouvel avis soit rendu à cet égard, tenant compte des éléments présentés”.

Le Président du JDP estime que cette critique de Desigual contre l’avis du Jury doit être interprétée comme une demande de Révision de cet avis et, conformément au Règlement intérieur du JDP, la transmet au Réviseur de la déontologie publicitaire. L’annonceur est aussitôt informé de ces décisions du Président du JDP.

En dépit de recherches menées tant par l’annonceur que par le secrétariat du Jury, aucune circonstance ne permet d’expliquer pourquoi le mémoire par lequel Desigual répondait à la plainte que le JDP lui avait communiquée, n’est jamais parvenu au Jury.

A partir de ces éléments, et conformément au Règlement du JDP, le Réviseur se rapproche du Président du Jury et procède avec lui à une analyse contradictoire des faits et arguments sur lesquels le JDP a fondé son avis.

Sur ces bases, le Réviseur ne peut que constater que, lors de l’examen de la plainte initiale :

  • faute d’échanges entre la plaignante et l’annonceur, l’instruction n’a pu être contradictoire,
  • le Jury n’a pas été en mesure d’examiner les arguments de Desigual contre la plainte.

Par suite, la régularité de la procédure à laquelle est tenu le JDP impose de procéder à une seconde délibération, sous la forme d’une séance à laquelle sont conviées, le 3 mars 2023, les diverses parties prenantes à l’affaire.

La plaignante et l’annonceur en sont informés afin de produire, s’ils le jugent opportun, toutes observations utiles ; en réponse, Desigual produit un mémoire complémentaire le 16 février.

Au cours de la séance de seconde délibération du JDP, le Réviseur, sur la demande de Révision, adresse au Jury les conclusions qui suivent.

B) Moyens et arguments de Révision

1) Pour établir les manquements de la publicité Desigual à la déontologie publicitaire résultant de la Recommandation « Image et respect de la personne » de l’ARPP, le Jury, dans son avis :

  • a analysé la composition de la photographie centrée sur “le sac à l’emplacement du sexe” ;
  • a constaté que “la mise en scène du corps de la femme [est accentuée] pour rendre « sexy » et attractif le produit présenté” ;
  • a observé que le “produit présenté” est, s’agissant d’un sac à main, “dénué de rapport avec le corps nu”.

A partir de ces constatations, “le Jury considère que la publicité [Desigual en cause], en renvoyant à des stéréotypes sexistes encore ancrés dans beaucoup d’esprits quant à la place des femmes dans la société, contribue à les perpétuer. Cette utilisation sexualisée de l’image des femmes comme argument de vente d’un produit constitue une instrumentalisation des femmes, ainsi réduites à la fonction d’objet sexuel, et porte atteinte à leur dignité”.

2) L’annonceur commence par contester la recevabilité de la plainte au motif que le plaignant, anonyme, ne précise ni ne développe son argumentation”.

Mais il ressort du formulaire de plainte au Jury (formulaire rendu anonyme par le JDP, conformément à ses usages) que la plaignante estime cette “publicité irrespectueuse de la femme, limite choquante jeunes filles”.

Au regard de l’image de la publicité en cause, ces critiques de la plaignante, pour lapidaires qu’elles soient, permettent toutefois au Jury (et au Réviseur) d’apprécier parfaitement si cette photographie respecte ou non les dispositions de la Recommandation « Image et respect de la personne » de l’ARPP.

De même, le JDP, en transmettant à Desigual la plainte qui le visait, n’a-t-il pas manqué d’indiquer à l’annonceur que le manquement en cause visait la Recommandation Image et respect de la personne de l’ARPP.

Contrairement aux affirmations de Desigual, la plainte initiale était donc recevable.

3) Sur le fond, Desigual, à titre principal, développe de multiples arguments qui, de son point de vue, soutiennent les deux allégations suivantes qu’il juge fondamentales :

  • la femme représentée dans la publicité en cause est “une artiste connue”, photographiée par un “célèbre photographe de mode”,
  • le mannequin représenté est connue pour être “une femme forte, une combattante, une femme courageuse et féministe”, “une femme autonome et sans aucun complexe”.

Mais l’avis en débat ne conteste nullement ces diverses affirmations ; il les discute d’autant moins que ces points ne font pas partie des éléments sur lesquels le Jury peut se prononcer.

Ce n’est en effet pas la personne représentée sur la photographie en cause, ni sa notoriété, ni sa personnalité, ni ses prises de position, que le Jury doit prendre en compte, car tous ces éléments sont inconnus du public quand il est exposé à ce visuel ; ce que doit apprécier le Jury c’est la perception qu’un “consommateur moyen (c’est à dire normalement informé, raisonnablement attentif et avisé)” peut avoir de la publicité en cause.

Or de ce point de vue, le Réviseur ne peut que constater que le Jury – dans son analyse de la publicité Desigual (rappelée au § B. 1 ci-dessus) – n’a ni procédé à des appréciations, des interprétations ou des constatations manifestement erronées, ni dénaturé les faits de la cause, ni méconnu la portée des dispositions déontologiques sur lesquelles il s’appuie dans l’avis contesté.

4) D’autre part, sont inopérantes, au regard de la mission du Jury, les références à divers textes telles la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ou la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Encore moins peut-on assimiler l’avis du Jury à un quelconque acte de censure, dès lors que le JDP n’a aucun pouvoir pour interdire la diffusion d’un message publicitaire.

5) De même, la circonstance que de nombreux chefs d’œuvre de la peinture mondiale (dont l’annonceur cite quelques-uns) montrent des corps nus de femmes est-elle sans influence sur la présente affaire, dès lors que la déontologie publicitaire ne s’applique pas aux beaux-arts.

6) La nudité à laquelle recourt le cas échéant une publicité ne s’apprécie pas, au titre de la déontologie publicitaire, en fonction du nombre des “parties intimes” montrées, ni de leur dimension, mais de la propension qu’a l’image incriminée, dans son ensemble, à “réduire la personne [représentée] à un objet”, en particulier au regard du lien entre le produit (ou le service) promu et la représentation du corps ; il en résulte que la notion de “semi-nudité” invoquée par l’annonceur ne peut être retenue. Par suite, c’est à bon droit que le Jury a estimé que l’affiche Desigual est notamment contraire au point 1.2 de la Recommandation « Image et respect de la personne » de l’ARPP, portant sur le recours à la nudité.

7) Pour établir un lien entre l’objet promu et le corps féminin nu constituant la photo, l’annonceur soutient que “le sac à mains en cause a la forme d’un sous-vêtement féminin, au cas présent d’une culotte”. Mais cette similitude, si elle est peu contestable d’un point de vue géométrique, ne vaut – au regard de la déontologie publicitaire, notamment quant au lien entre un corps nu et le produit vanté – que si le mannequin représenté sur l’image en cause tient ce sac à mains d’une manière normale ou habituelle ; or, cette façon de porter le sac comme un cache-sexe masquant un bas-ventre dévêtu – avec au surplus la représentation d’une poitrine dont la nudité apparait au moins autant mise en valeur que cachée par le bras du modèle – ne correspond pas à une utilisation habituelle d’un tel accessoire de maroquinerie, lequel n’a normalement pas vocation à être porté par une personne dénudée.

On ajoutera que plusieurs des éléments de la pose du mannequin sur la photo (tête renversée, bouche entr’ouverte, yeux mi-clos, cuisses nues et écartées notamment) suggèrent un climat de lascivité dont on a du mal à penser qu’il puisse trouver sa source dans le port du sac à mains.

C’est donc à juste titre que l’avis critiqué estime que “le choix des couleurs, noir et blanc pour la photographie et jaune vif pour le sac à l’emplacement du sexe, accentue la mise en scène du corps de la femme pour rendre ‘sexy’ le produit présenté”, lequel, s’agissant d’un sac à mains, apparait ainsi “dénué de rapport avec le corps nu”.

Par suite, l’avis établit à bon droit que “cette utilisation sexualisée de l’image des femmes comme argument de vente d’un produit constitue une instrumentalisation des femmes, ainsi réduites à la fonction d’objet sexuel, et porte atteinte à leur dignité”.

8) Les comparaisons entre les avis rendus par le Jury dans différentes affaires dont il a été précédemment saisi ne peuvent avoir valeur probante au soutien d’une demande en Révision, dès lors que le JDP se prononce toujours de manière spécifique sur chaque publicité donnée, et que deux campagnes ne se ressemblent jamais parfaitement.

9) Le fait que la publicité en cause “s’adresse directement et exclusivement aux femmes, et notamment aux clientes existantes de la marque Desigual et/ou au public de l’artiste Nathy Peluso” (comme l’affirme l’annonceur) non seulement n’est nullement établi, mais en tout état de cause n’empêche pas ce message de porter atteinte aux dispositions relatives à l’image et au respect de la personne, comme l’a démontré le Jury dans l’avis en litige.

10) L’annonceur entend rappeler au JDP que c’est “le sac à main [qui] est l’objet de la publicité, et non pas la femme représentée par Nathy Peluso”, ajoutant qu’il “ne peut y avoir aucune méprise à cet égard”. Mais une lecture attentive de l’avis en cause ne laisse planer le moindre doute sur ce point : dans la publicité en litige, le produit vanté est bien le sac à mains, lequel est promu par une femme dénudée.

11) Le fait que le Jury espagnol de publicité n’ait (semble-t-il, à partir des textes espagnols fournis par l’annonceur) pas jugé la publicité Desigual contraire aux textes ibériques d’autodiscipline est en tout état de cause sans influence sur la conformité de cette publicité à la déontologie en vigueur en France, telle qu’appréciée par le JDP français, seul compétent dans la présente affaire.

C) Des analyses qui précèdent, le Réviseur conclut que :

  • la demande de Desigual adressée au Président du JDP afin “qu’un nouvel avis soit rendu” doit être considérée comme une demande en Révision ;
  • cette demande est recevable et à ce titre sera mentionnée dans la rédaction finale de l’Avis du Jury ;
  • compte tenu des conditions d’instruction de la plainte en premier examen devant le JDP, il est nécessaire de procéder à une seconde délibération de l’affaire en cause par le Jury ;
  • ni le défaut de procédure allégué à l’encontre de la recevabilité de la plainte, ni la critique sérieuse ou légitime (au sens de l’Article 22.1 du Règlement) invoquée contre l’Avis en litige ne peuvent être considérés comme fondés.

Par suite, le Réviseur demande au Jury, dans son avis définitif, de :

  • confirmer que la publicité en cause ne respecte pas les points 1.1, 1.2 et 2.1 de la Recommandation « Image et respect de la personne » de l’ARPP ;
  • compléter ou corriger son avis initial, dans le sens des observations qui précèdent, afin de prendre en compte les divers moyens et arguments soulevés lors de la Révision.

5. Les arguments présentés lors de la séance du 3 mars 2023

Lors de cette séance, la société Desigual a indiqué que la publicité devait s’analyser dans sa globalité, en tenant compte du jeu de couleurs qui met en avant le sac jaune, et les inscriptions de la même couleur, et non le modèle en noir et blanc. La forme originale du sac à mains est celle d’une culotte : la manière de promouvoir ce produit dans la publicité critiquée est inhérente à ses caractéristiques. Il n’était pas possible de présenter ce sac porté par une personne vêtue.

En examinant précisément la publicité, il apparaît de surcroît que la femme en arrière-plan porte une culotte très fine dont on voit la ficelle. Son épaule relevée montre ses efforts pour masquer sa poitrine, dont les tétons ne sont pas visibles. Il ne s’agit donc pas de montrer le corps nu mais de le cacher. La tête de la femme est renversée vers l’arrière et non penchée vers l’avant – attitude qui induirait une position de soumission. Le modèle est photographié de façon neutre, sans aucune idée de domination.

Ces éléments distinguent la publicité critiquée de celles qui ont donné lieu, par le passé, à des avis du JDP et qui ne présentaient aucun lien avec le produit promu.

6. L’avis définitif du Jury

A titre liminaire, le Jury rappelle que, selon le 5° de l’article 11 de son règlement intérieur, la plainte, qui doit être rendue anonyme lorsqu’elle émane d’un particulier, doit être clairement motivée, c’est-à-dire indiquer de façon précise en quoi la publicité mise en cause soulèverait un problème déontologique. Toutefois, le plaignant n’est pas tenu, à peine d’irrecevabilité, d’invoquer formellement l’une des règles déontologiques mentionnées à l’article 2.2 du règlement. Il appartient au Jury d’identifier, au vu de l’argumentation soulevée, les règles déontologiques applicables.

En l’espèce, bien que cursive, l’argumentation de la plaignante permet de comprendre qu’elle conteste la conformité de la publicité critiquée à la Recommandation « Image et respect de la personne » de l’ARPP, en ce qu’elle dispose que :

« 1.1 La publicité ne doit pas être susceptible de heurter la sensibilité, choquer ou même provoquer le public en propageant une image de la personne humaine portant atteinte à sa dignité et à la décence. /

1.2 Lorsque la publicité utilise la nudité, il convient de veiller à ce que sa représentation ne puisse être considérée comme avilissante et aliénante et a fortiori ne réduise pas la personne à un objet. / (…)

 2.1. La publicité ne doit pas réduire les personnes humaines, et en particulier les femmes, à la fonction d’objet. / (…) ».

La plainte est donc recevable, contrairement à ce qu’indique l’annonceur. En outre, le Jury rappelle qu’il ne lui appartient pas de mettre en œuvre les exigences constitutionnelles et les engagements internationaux de la France, tels que ceux cités par la société Desigual.

Le Jury relève que l’affiche publicitaire en cause est la photographie d’une artiste argentine entièrement nue, sous réserve, selon l’annonceur, d’une fine culotte quasiment invisible, tenant devant son sexe, ainsi caché, le sac à main promu. Le choix des couleurs, noir et blanc pour la photographie et jaune vif pour le sac à l’emplacement du sexe, accentue le pouvoir d’attraction et de séduction du modèle et la dimension érotique de l’image.

Le Jury estime, à la lumière des observations de l’annonceur, que cette mise en scène n’est certes pas dépourvue de tout lien avec le produit promu dès lors que le sac à main « Mantis » a la forme d’une culotte. Toutefois, ce jeu visuel de substitution du sac à la culotte n’impliquait nullement la nudité du corps et, à tout le moins, celle du haut du corps et, en particulier celle, bien visible, de la poitrine du modèle, renforcée par sa pose particulièrement lascive, alors surtout qu’un tel sac à main n’a pas vocation, en principe, à être porté par une personne dévêtue.

Le Jury considère ainsi que cette publicité, en recourant à une nudité étrangère à la nature et aux caractéristiques du produit promu, accentuée par la dimension érotique de la pose du modèle, réduit la femme à une fonction d’objet de présentation de ce produit, à connotation sexuelle. Elle renvoie ce faisant à des stéréotypes sexistes encore ancrés dans beaucoup d’esprits quant à la place des femmes dans la société, qu’elle contribue à perpétuer, et porte atteinte à leur dignité.

Ainsi que l’indique le Réviseur de la déontologie publicitaire, ni l’identité du modèle et les traits de personnalité qui lui sont prêtées par l’annonceur, ni celle du photographe, ni la représentation fréquente du corps nu des femmes en peinture, ni l’intention de Desigual de ne s’adresser qu’aux femmes, notamment aux clientes existantes de la marque, ni encore le fait que l’organisme homologue du Jury en Espagne a estimé que ce visuel ne contrevenait pas aux règles déontologiques en vigueur dans ce pays, n’ont d’incidence sur l’analyse et ne peuvent justifier le choix de ce visuel, diffusé en France.

En conséquence de ce qui précède, le Jury est d’avis que la publicité en cause ne respecte pas les règles déontologiques citées ci-dessus.

Avis définitif délibéré le 3 mars 2023, en présence du Réviseur de la déontologie publicitaire, et adopté par M. Lallet, Président, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mmes Lenain et Boissier, ainsi que MM. Depincé, Le Gouvello, Lucas-Boursier et Thomelin.


Publicité Desigual