Avis JDP n° 540/18 – MATERIAUX DE CONSTRUCTION – Plainte fondée

Avis publié le 11 octobre 2018
Plainte fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • et après en avoir débattu dans les conditions prévues par l’article 12 du règlement intérieur,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 4 août 2018, d’une plainte émanant d’un particulier, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité diffusée en presse, en faveur d’une société de matériaux de construction, pour promouvoir sa fabrication de carrelages, faïences et pierres.

Le visuel publicitaire en cause présente une femme, intégralement nue, se tenant debout, de dos, dans un intérieur dont le sol est revêtu de carrelage.

Le texte accompagnant cette image est « Il y a la gueule de bois, il y a la langue de bois et le carrelage aspect bois ! ».

2. Les arguments échangés

– Le plaignant considère que cette publicité est sexiste.

– La société annonceur a, par courrier recommandé avec avis de réception du 9 août 2018, été informée de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle fait valoir que, dans la publicité, il y a deux éléments : le premier est un jeu de mot sur les expressions utilisant le mot « bois », en l’espèce « gueule de bois », « langue de bois » et « carrelage aspect bois », tandis que le second met en scène une jeune femme sortant d’une salle de bain, tenant à la main un peignoir, cheminant sur le carrelage que la société commercialise. Cette mise en scène se veut esthétique et sans vulgarité.

Selon la société, le fait de montrer une personne nue n’induit pas l’irrespect de la femme. Ni sa posture ni le texte ne sont irrévérencieux. Il s’agit d’un contexte de représentation dans une salle de bain, pièce de la maison importante pour les carrelages.

Bien que l’objectif n’ait jamais été de heurter les sensibilités, l’annonceur présente ses excuses.

Dans le plan de communication, cette publication était la dernière avec cette image. A partir du mois de septembre, une publication nouvelle et différente est prévue dans le journal.

3. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle que la Recommandation « Image et respect de la personne » de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP), dispose que :

« 2.1 La publicité ne doit pas réduire les personnes humaines, et en particulier les femmes, à la fonction d’objet ».

Le Jury relève que la publicité en cause montre une jeune femme nue, présentée de trois quarts dos, dont la posture cambrée laisse apparaître la forme du sein droit. Ses cheveux blonds bouclés tombent sur les omoplates, sa main gauche est relevée dans les cheveux et la main droite traîne derrière elle une serviette de bain blanche. Cette image, qui occupe plus d’un tiers du visuel, est encadrée, à gauche, de dessins humoristiques caricaturant la « gueule de bois » et la « langue de bois », à droite, d’indications promotionnelles et d’une photographie de salon meublé et, en bas, sous la mention « et le carrelage aspect bois ! », des coordonnées de la société.

Il estime que ce visuel, en présentant une mise en scène photographique centrée sur un sein et les fesses de la jeune femme, utilise l’image nue de celle-ci à l’appui d’une publicité destinée à promouvoir un produit de carrelage dénué de lien avec le corps.

Cette instrumentalisation de l’image de la femme la réduit ainsi à la fonction d’objet et porte atteinte à sa dignité.

En conséquence, le Jury est d’avis que la publicité en cause méconnaît le point 2.1 de la Recommandation « Image et respect de la personne » de l’ARPP.

Il prend acte toutefois de ce que ce visuel ne sera plus utilisé.

Avis adopté le 7 septembre 2018 par Mme Lieber, Présidente, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mme Drecq, MM. Acker, Benhaïm, Depincé, Lacan, Leers et Lucas-Boursier.