Avis JDP n°93/11 – DISTRIBUTION VENTE EN LIGNE – Plainte fondée

Décision publiée le 23.02.2011
Plainte fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

– après examen des éléments constituant le dossier de plainte,

– après avoir entendu les représentants de l’agence de communication,

– et, après en avoir délibéré, hors la présence des parties,

rend la décision suivante :

1.Les faits

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi le 20 novembre 2010, d’une plainte émanant d’un particulier, afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une vidéo diffusée sur Internet durant l’automne 2010 en faveur d’une société de vente à distance.

Ce film met en scène, à la manière d’une caméra cachée, une jeune femme qui fait l’objet d’un contrôle de police par de faux agents représentant la « Police nationale du style » lui reprochant sa tenue vestimentaire.

En conclusion, le propos de l’un des agents est « … je vais la gifler ».

2.Les arguments des parties

– Le plaignant considère que ce message porte atteinte à la liberté de s’habiller comme chacun le souhaite.

Il considère que la fin de la vidéo est particulièrement choquante et véhicule un message de violence gratuite à l’égard des femmes.

– L’agence de communication rappelle le contexte de la campagne, diffusée uniquement sur Internet, intitulée «Tout est permis» : cette campagne s’est déroulée en deux parties ; une phase qualifiée de « teasing » diffusée mi-octobre 2010 et visant à attiser la curiosité des personnes, suivie quelques jours plus tard d’une révélation de l’identité de l’annonceur.

Elle insiste sur le fait que tous les films sont tournés sur le principe bien connu de la caméra cachée, montrant des situations manifestement absurdes dans lesquelles de faux policiers reprochent à des passants leur style vestimentaire et apparaît le slogan « halte ! aux tyrans du style » immédiatement à la suite des saynètes, levant ainsi toute ambiguïté et faisant comprendre que les films sont à prendre au second degré.

Elle indique que les propos et les mises en scène ont été acceptés par les participants ayant autorisé l’utilisation de leur image.

Sur la liberté de s’habiller, remise en question par le plaignant, l’agence précise que cet argument ne peut être confronté à une disposition de la Recommandation Image de la personne humaine, en ce que cet axe de communication  ne porte pas atteinte à la dignité ou à la décence, qu’il ne fait référence à aucun stéréotype et n’induit aucune idée de soumission, de dépendance ou de violence.

Sur la mention d’une gifle en voix-off, l’agence insiste sur la construction du sketche qui doit   être comprise au second degré: les faux policiers  sont volontairement « lourds » dans leur démarche, bornés et caricaturaux. De plus, cette phrase intervient à la fin du film, et donc après la lecture des écrans de révélation qui permettent aux spectateurs qui en douteraient encore de comprendre que l’ensemble du film est humoristique.

La phrase prononcée à la fin du film n’est donc pas incitative à la violence et, si dans un autre contexte cette phrase aurait pu être mal interprétée, au sein du contexte de ce spot, le deuxième degré ne fait pas de doute. Le film dans son ensemble ne peut être entendu comme véhiculant une banalisation de la violence.

3.Les motifs de la décision du Jury

La Recommandation Image de la Personne Humaine de l’ARPP dispose que :

3/3- « La publicité doit éviter toute scène de violence, directe ou suggérée, et ne pas inciter à la violence, que celle-ci soit morale ou physique. »

Le Jury  considère que les propos tenus par le faux policier qui constituent la conclusion de la vidéo sont de nature à inciter à la violence et que, dès lors, l’excuse d’une lecture au second degré qui devrait être faite du message n’est pas recevable.

Le message final de cette campagne contrevient en ce sens à la règle déontologique rappelée ci-dessus.

Quant au grief avancé par le plaignant sur une éventuelle atteinte à la liberté de s’habiller, il ne trouve de fondement dans aucune Recommandation de l’ARPP.

Le Jury note enfin l’engagement pris par l’agence de ne pas rediffuser ce spot.

4.La décision du Jury

– La plainte est fondée ;

– La publicité en cause contrevient par son message final au point 3.3 précité de la Recommandation « Image de la personne humaine » de l’ARPP;

– Il est demandé au directeur général de l’ARPP de veiller à ce que ce message ne fasse l’objet d’aucune nouvelle diffusion ;

– La présente décision sera communiquée au plaignant, à l’annonceur et à l’agence ;

– Elle sera diffusée sur le site Internet du JDP.

Délibéré le 4 février 2011, par Mme Hagelsteen, Présidente, Mme Michel-Amsellem, Vice-présidente, Mme Drecq et MM Benhaim, Carlo, Lacan, Leers et Raffin.