Décision publiée le 19.05.2010
Plainte rejetée
Le Jury de Déontologie Publicitaire,
– après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
– après avoir entendu les représentants de l’annonceur, de l’agence de communication et du magazine,
– et, après en avoir délibéré, hors la présence des parties,
rend la décision suivante :
1.Les faits
Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 26 mars 2010, d’une plainte d’un particulier, afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur, d’une publicité diffusée par le constructeur automobile pour son véhicule « coupé A » dans la revue.
Cette annonce présente la photo du modèle, accompagné de l’accroche « Vous avez une femme sublime, des enfants magnifiques, une superbe maison ? Faites encore un effort. Le coupé A élue plus belle voiture de l’année 2009. ».
2.Les arguments des parties
– Le plaignant estime que cette publicité est sexiste car elle assimile la femme à un objet possédé par l’homme au même titre qu’une voiture.
– Le constructeur automobile fait valoir que le magazine ayant diffusé la publicité s’adressant à une cible principalement masculine, le message doit être interprété de façon décalée et humoristique en adéquation avec le support et son lectorat de catégorie « CSP+ » et de niveau d’instruction élevé. L’intention était d’évoquer le prix « de la plus belle voiture de l’année » obtenu par la marque dans le cadre du 25ème festival automobile international en jouant sur l’idée de réussite et de valorisation, la cible étant à même de décoder ce second degré.
Selon l’annonceur, l’expression « Vous avez… » doit être lue comme étant celle du langage courant qui ne fait en aucun cas référence à une quelconque notion de possession. Il affirme avoir la préoccupation du respect de la personne humaine et qu’il n’a pas jugé cette publicité comme présentant un caractère discriminatoire ou dénigrant pour les femmes.
– L’agence de communication, qui a réalisé le message, conteste la recevabilité de la plainte au motif que le plaignant n’a pas dévoilé son identité, ni son état civil.
Elle ajoute être particulièrement respectueuse de la déontologie et la prendre quotidiennement en considération.
Elle reprend à son compte les éléments d’explications apportés par la société Peugeot sur l’intention et les objectifs du message.
– La société de publication, éditeur du magazine, reprend également l’argument du contexte de diffusion de la publicité ainsi que l’idée de l’adaptation du message à la spécificité du magazine dont le ton est généralement décalé et humoristique, la devise du magazine étant « le magazine qui parle aux hommes sur un autre ton ». C’est dans ce contexte, que l’annonce incriminée a été acceptée: selon la lecture faite par le support de cette publicité, le slogan visait à exprimer que des hommes qui, à l’image des lecteurs du magazine sont très gâtés par la vie tant sur le plan affectif que sur le plan matériel, pouvaient se montrer encore plus exigeants et vouloir acquérir une très belle voiture.
3.Les motifs de la décision du Jury
Les principes généraux contenus dans la Recommandation « Image de la personne humaine » de l’ARPP disposent que : « La publicité ne doit pas réduire la personne humaine, et en particulier la femme, à la fonction d’objet. »
S’agissant de la recevabilité de la plainte, le Jury constate que celle-ci n’est pas anonyme, mais que le nom de son auteur, personne physique, a été, afin de le préserver, occulté dans la copie adressée aux sociétés en cause; la plainte est donc recevable.
Le Jury constate que si la publicité en cause joue sur des stéréotypes éculés présentant la réussite d’un individu par le fait d’ « avoir » une femme, des enfants et une maison, tous qualifiés au superlatif, le ton employé qui recourt de façon manifeste à l’ironie contre ce stéréotype même, ne peut être interprété comme étant, même indirectement, dénigrant pour les femmes.
Il en résulte que la publicité du constructeur automobile ne méconnaît pas les dispositions de la Recommandation précitée.
4.La décision du Jury
– La plainte n’est pas fondée ;
– La présente décision sera communiquée au plaignant, ainsi qu’à l’annonceur, l’agence, et à la société éditrice du magazine;
– Elle sera diffusée sur le site Internet du JDP.
Délibéré le vendredi 7 mai 2010 par Mme Michel-Amsellem, vice-présidente, substituant la Présidente empêchée, Mmes Drecq et Moggio, MM, Lacan, Leers et Raffin.