AMERICAN VINTAGE – Internet – Plainte fondée

Avis publié le 29 octobre 2021
AMERICAN VINTAGE – 782/21
Plainte fondée 

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • et après en avoir débattu dans les conditions prévues par l’article 12 du règlement intérieur,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 31 août 2021, d’une plainte émanant d’un particulier, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité de la société American Vintage France, pour promouvoir sa collection automne-hiver de vêtements.

Le visuel publicitaire en cause, diffusé sur la page d’accueil du site Internet de la marque, présente une jeune fille allongée sur un canapé, sur le côté, regardant l’objectif. Elle porte un haut, dénudant son ventre, un short, des chaussettes bleues et des baskets. Sa jambe droite, croisée par-dessus la gauche, est relevée, laissant apparaître son entrejambe.

Cette image est accompagnée du texte « Automne/Hiver 2021/22 ».

2. Les arguments échangés

Le plaignant relève que cette publicité montre une petite fille allongée sur son côté gauche, sur un canapé lit. Son regard présente des signes de tristesse évoquant contrainte et soumission. Son corps est en partie dénudé. Elle est prise en photo dans une pose sexuellement très suggestive, notamment dans la manière dont les jambes se croisent, en présentant sa totale “intimité” offerte.

La société American vintage a été informée, par courriel avec accusé de réception du 13 septembre 2021, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle a été également informée que cette affaire ferait l’objet d’un examen dans le cadre de la procédure simplifiée prévue à l’article 12 du règlement intérieur du Jury.

Elle fait valoir que la mannequin représentée sur la photographie mise en cause n’est pas une enfant mais une personne majeure.

Elle n’est pas dénudée mais vêtue des vêtements de la collection mise en avant dans ce shooting et n’est en aucun cas réduite à un objet.

En outre, la photographie ne représente aucun signe de soumission ou de contrainte mais simplement une jeune femme allongée nonchalamment sur un canapé dans une position n’ayant aucune connotation sexuelle ou à caractère provocant.

3. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle à titre liminaire que le point 18.1 du code de communication « ICC Publicité et marketing » de la Chambre internationale de commerce et d’industrie dispose que : « Un soin particulier doit être mis en œuvre dans la communication commerciale ciblant ou faisant apparaître des enfants ou des adolescents », le terme « adolescents » renvoyant aux personnes de 13 à 17 ans. Pour l’application de ces dispositions, il importe peu que le modèle représenté dans la publicité soit en réalité majeure. L’élément déterminant à cet égard est la perception du public.

En outre, la Recommandation « Image et respect de la personne » de l’ARPP dispose :

  • En son point 1.1., que la publicité ne doit pas être susceptible de heurter la sensibilité ou de choquer le public en propageant une image de la personne humaine portant atteinte à sa dignité et à la décence ;
  • et en son point 4.1 que « La publicité doit éviter d’induire une idée de soumission ou de dépendance dévalorisant la personne humaine et en particulier les femmes».

Le Jury rappelle que les règles déontologiques qui viennent d’être citées ne font pas obstacle à ce que des publicités en faveur de vêtements et d’accessoires de mode représentent des modèles dans des poses séductrices mettant en valeur ces produits et ceux qui les utilisent, en cohérence avec l’une des fonctions qui leur sont assignées, pour autant, notamment, qu’il ne soit pas porté atteinte à la dignité ou à la décence dans des conditions de nature à heurter la sensibilité ou choquer le public, notamment par le recours à une nudité excessive, et que le visuel n’induise pas d’idée de soumission ou de dépendance dévalorisant la personne humaine.

Le Jury relève que la publicité litigieuse représente une jeune fille allongée sur un canapé, sur le côté, regardant l’objectif. Sa jambe droite, croisée par-dessus la gauche, est relevée, laissant apparaître son entrejambe. Elle porte un haut laissant apparaître son ventre dénudé, un short, des chaussettes bleues et des baskets.

Si l’annonceur indique dans ses observations que la personne représentée est en réalité majeure, sans d’ailleurs en donner l’âge exact, elle est manifestement susceptible d’être perçue par le public comme une personne mineure, eu égard à ses traits, à sa coiffure, à sa faible corpulence et à la tenue qu’elle porte. Dans ces conditions, sa pose lascive, allongée sur un canapé et les jambes croisées, et l’angle de vue utilisé, qui offre à la vue de l’internaute son entrejambe et une partie de sa culotte sous son short, le haut de la culotte étant visible au-dessus du short sous son abdomen dénudé, forment un ensemble visuel propageant une image de l’adolescente qui porte atteinte à la décence et qui est de nature à heurter la sensibilité du public, dans un contexte social marqué par une grande sensibilité de l’opinion publique sur ces questions.

Le Jury considère en revanche que ce visuel n’induit pas une idée dévalorisante de soumission ou de dépendance, en dépit de la relative mélancolie qui se dégage du regard de la jeune fille, aucun élément dans la publicité ne donnant à penser qu’elle subirait une contrainte ou une emprise quelconque, ainsi que le soutient l’annonceur.

En conséquence de ce qui précède, le Jury est d’avis que la publicité en cause méconnaît uniquement le point 1.1 de la Recommandation « Image et respect de la personne » de l’ARPP.

Avis adopté le 8 octobre 2021 par M. Lallet, Président, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mme Boissier, ainsi que MM. Depincé, Le Gouvello, Lucas-Boursier et Thomelin.

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