Avis JDP n°116/11 – PRET A PORTER – Plainte fondée

Décision publiée le 18.05.2011
Plainte fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

– Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,

– La partie mise en cause, avertie de la plainte et de la date de la séance par lettre recommandée avec accusé de réception du 8 avril 2011 et les parties plaignantes, averties de la date de la séance par lettre recommandée avec accusé de réception du même jour, étant absentes ;

– et, après en avoir délibéré,

rend la décision suivante :

1.Les faits

– Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, les 17, 18 et 20 mars 2011, de plusieurs plaintes émanant de particuliers, afin qu’il se prononce sur la conformité, au regard des règles déontologiques en vigueur, d’une vidéo publicitaire pour une marque de vêtements, diffusée notamment sur le blog de la marque.

Cette vidéo intitulée « Following the shadow » met en scène deux jeunes personnes prénommées Warren et Margaux, qui se poursuivent dans les rues, la nuit. La jeune fille présente une maigreur excessive, visible au niveau de son visage, mais également de son buste et de ses membres.

2.Les arguments des parties

– Les plaignants dénoncent l’exploitation de la maigreur de la femme pour une publicité de vêtements dont la marque cible notamment des jeunes filles.

Ils considèrent que cette publicité est de ce fait scandaleuse et dangereuse dans la mesure où la marque bénéficie d’une grande notoriété auprès des jeunes filles et que la mise en scène d’une jeune femme qu’ils qualifient d’anorexique est susceptible d’inciter à ce type de comportement.

L’un des plaignants ajoute que le blog officiel de la marque comprend également de nombreuses photos de la jeune femme dans des poses mettant en évidence son extrême maigreur. Ce même plaignant renvoie par ailleurs à l’application des règles que se sont données les professionnels de la mode et de l’alimentation dans le cadre du code de la CCI ainsi que les engagements pris par les professionnels de la mode concernant l’image du corps.

– L’annonceur fait valoir qu’il n’avait pas conscience que les images de Margaux pouvaient choquer une partie du public. Il affirme avoir retiré toutes les photos litigieuses de son site Internet et décidé de mettre un terme à sa collaboration avec les bloggeurs qui ont fait l’objet des plaintes.

3.Les motifs de la décision du Jury

Le Jury rappelle que les dispositions relatives aux enfants et adolescents contenues dans le Code de la CCI et reprises dans la Recommandation « Enfant » de l’ARPP prévoient que :

La communication de marketing ne doit comporter aucune déclaration ou aucun traitement visuel qui risquerait de causer aux enfants ou aux adolescents un dommage sur le plan mental, moral ou physique (article 18 du code CCI et 2/2 de la Recommandation Enfant).

Par ailleurs, le 9 avril 2008, les professionnels, utilisateurs ou faisant usage de l’image du corps, actifs dans les domaines de la mode, des médias et de la communication ont signé, sous l’égide du Ministère de la santé, de la jeunesse et des sports, une Charte par laquelle ils se sont, notamment, engagés à veiller à ne pas promouvoir par leur action les modèles d’une extrême maigreur.

Enfin, les dispositions de la recommandation « Comportements alimentaires », dans sa partie valeurs sociales, directement inspirées par cette Charte sur l’image du corps précisent que :

 1/6  Valeurs sociétales

a/ La publicité doit éviter toute forme de stigmatisation des personnes en raison de leur taille, de leur corpulence ou de leur maigreur.

Le Jury relève que les captures d’images du film diffusé sur le blog en cause, ainsi que les photos apparaissant sur le site publicitaire de la marque, montrent, en dépit des allégations de l’annonceur, une très jeune femme, prénommée Margaux, dont le buste et les membres sont d’une maigreur extrême.

Ces images diffusées pour valoriser les vêtements d’une marque qui s’adresse plus particulièrement aux jeunes et, notamment, aux adolescentes, est de nature à faire de ce type de physique un modèle et à induire des troubles du comportement alimentaire, dont les dangers pour la santé physique et mentale ont été, à maintes reprises, signalés par la communauté scientifique.

Il résulte de ces constations que la publicité pour la marque de vêtements en cause ne respecte pas les articles 18 du code CCI et 2/2 de la Recommandation Enfant de l’ARPP.

 

4.La décision du Jury

– La plainte est fondée ;

– Il est demandé au Directeur général de l’ARPP de prendre toutes mesures permettant de faire cesser cette publicité ;

– La présente décision sera communiquée aux plaignants, ainsi qu’à la société annonceur;

– Elle sera diffusée sur le site Internet du JDP.

Délibéré le vendredi 6 mai 2011 par Mme Michel-Amsellem, Vice-Présidente, suppléant la présidente empêchée, Mmes Drecq et Moggio, ainsi que MM. Benhaïm, Carlo, Lacan, Leers et Raffin.