WINAMAX – Internet – Affichage – Plainte non fondée

Avis publié le 5 octobre 2021
WINAMAX – 770/21
Plainte non fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • après avoir entendu les représentants de la société Winamax et de l’ARPP, par visioconférence,
  • et après en avoir débattu,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 5 juillet 2021, d’une plainte émanant d’un particulier, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une campagne publicitaire de la société Winamax, pour promouvoir son application mobile, à l’occasion de l’Euro de football 2021.

La publicité diffusée sur les réseaux sociaux de la marque, utilise les textes : « Pour l’Euro, c’est jusqu’à 200 € offerts sur Winamax ! Installez l’appli et profitez de l’offre exceptionnelle. », « L’Euro, c’est l’occasion parfaite pour en faire », « Jusqu’à 200€ offerts direct – Winamax – Grosse cote, gros gain, gros respect » – j’en profite »

L’affiche publicitaire en cause, diffusée sur le réseau métro et bus parisien, utilise le texte
« Ma devise dans le foot c’est l’argent », suivi de la signature « Winamax – Grosse cote, gros gain, gros respect ».

2. Les arguments échangés

Le plaignant considère que lorsque Winamax fait le syllogisme « Grosse cote, gros gain, gros respect », la marque incite à prendre des risques pour miser sur des « cotes élevées », soit plus hasardeuses, mais elle suggère également que le respect s’acquiert à travers la prise de risque et les paris gagnés.

Le plaignant pose la question suivante : Cela induit-il que selon Winamax un parieur qui ne prend pas de risques ne mérite pas le respect ?

Ce discours est, selon lui, dangereux et intervient alors que l’on assiste à une prise de conscience collective, notamment au travers des médias, des risques de surendettement et d’addictions aux paris sportifs. Mettre en avant le pari risqué comme étant une solution pour obtenir de « l’argent facile » serait nier la dure réalité des risques encourus.

La société Winamax a été informée, par courriel avec accusé de réception du 22 juillet 2021, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Son représentant fait valoir que la plainte traduit une profonde méconnaissance du secteur du pari sportif et repose sur une confusion entre les notions de « risque » et de « comportement à risque ».

Il rappelle qu’une cote est la rémunération d’un risque. Mathématiquement, une cote est l’inverse de la probabilité associée.

Si la cote de l’événement sur lequel le pari est à 10, cela signifie que l’opérateur estime qu’il y a 10% de chance que cet événement se produise. Il rémunère donc cette prise de risque au niveau de 10 fois la mise. Inversement, si la cote est à 1,25, l’opérateur estime qu’il y a 80% de chance que l’événement se produise et adapte son niveau de rémunération.

Il considère que ce qui peut être problématique sur ce marché n’est pas le risque en soi. Le risque fait partie du pari. Il est pour les joueurs la probabilité de perdre.
Ce qui peut l’être en revanche, c’est le rapport entre la mise et le risque.

Selon lui, si parier une somme raisonnable sur un risque que l’on sait important (une grosse cote) n’aura jamais de conséquences, parier une somme importante sur un risque que l’on pourrait juger faible (une petite cote) peut s’avérer être un comportement dangereux. A ce titre, plus les parieurs ont conscience du risque – et plus la cote est grosse plus c’est le cas – plus ils sont prudents dans leur mise.

La société estime que centrer le discours sur le fait de rentrer une « Grosse cote » engage les joueurs à un comportement raisonnable en assumant le risque intrinsèque à ces paris.

Concernant la signature « Grosse cote, gros gain, gros respect », elle relève que, même si les gains ne sont pas toujours impressionnants, une « grosse cote » est celle qui offrira toujours le gain relatif le plus important au parieur. Sur un marché encore récent où la notion de cote n’est pas toujours bien comprise, « Gros gain » permet de clarifier ce bénéfice.

Elle ajoute que cette signature résume une vision de la performance du parieur. Avant même toute considération de mise ou de gain, ce qui inspire le respect des parieurs, c’est de pronostiquer un événement sportif inattendu. C’est le sens de ce « Gros respect ». Comme une marque de reconnaissance face à la clairvoyance sportive initiale d’un joueur.

L’annonceur considère donc que communiquer sur des cotes perçues « sans risque » inciterait indirectement les joueurs à miser davantage. Ainsi, valoriser les paris vécus comme « plus risqués » plutôt que les paris « sûrs », est paradoxalement une posture responsable que Winamax assume, de même que l’absence de référence à la notion de mise.

Il ajoute que l’Euro 2021 fut un moment de très forte pression publicitaire du secteur, notamment en télévision. Cette surexposition, logique en raison de la saisonnalité de l’activité et du nombre important de concurrents actifs, a pu donner le sentiment d’une sur-incitation.
Les médias y ont répondu par la mise en lumière des risques de surendettement et d’addiction – des sujets complexes sur lesquels Winamax travaille par ailleurs toute l’année.

Il estime cependant qu’il serait simpliste de voir une causalité basique entre ces sujets.
Le pari « risqué » (dont la probabilité est faible) n’amène pas à un comportement à risque et ne saurait – par définition – en aucun cas offrir de « l’argent facile ».
Sachant que, par ailleurs, rien dans la communication ne saurait suggérer que parier permette de « facilement » gagner de l’argent.

La société Médiatransports a également été informée, par courriel avec accusé de réception du 22 juillet 2021, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle fait valoir que la signature/slogan « Grosse cote, gros gain, gros respect » a été déposée à titre de marque par Winamax, sous la forme verbale et semi-figurative. Elle est présente sur une grande majorité des affiches Winamax diffusées sur les réseaux Médiatransports depuis 2019, notamment sur l’affiche arborant l’accroche « Ma devise dans le foot c’est l’argent », affiché sur les réseaux Médiatransports en 2019 et l’accroche « L’Euro, c’est la parfaite occasion pour en faire », affichée sur plusieurs de ses réseaux : en gare, dans le métro parisien et sur les bus d’Ile-de-France au cours du premier semestre 2021.

Elle rappelle que ces affiches ont été acceptées au vu du conseil rendu en 2019 par l’ARPP sur huit projets d’affiche, comportant tous la signature/slogan « Grosse cote, gros gain, gros respect » accompagnée des accroches « Ma devise dans le foot c’est l’argent », « Ils plantent des buts, je récolte du blé », « C’est à la 3ème mi-temps que je suis le meilleur », « But en or, montre en platine », « Ici, on dépoussière les lucarnes et les comptes en banque », « Devenir riche sur un coup de tête », « Obliger de courir après un ballon pou gagner des millions pauvres joueurs » et « Un poteau peut vous rapporter une barre ».

Dans son conseil en date du 2 août 2019, l’ARPP a considéré les huit projets d’affiches conformes aux dispositions déontologiques en vigueur, en particulier celles contenues dans la Recommandation « Jeux d’argent » et n’a fait aucun commentaire particulier sur la signature/slogan « Grosse cote, gros gain, gros respect ».

Médiatransports indique suivre les conseils de l’ARPP. La société relève l’absence d’observations de l’ARPP sur une éventuelle contravention de la signature/slogan « Grosse cote, gros gain, gros respect », avec la Recommandation, et plus particulièrement son point 1.4 relatif au jeu responsable. Il n’apparaît à l’afficheur aucune incitation démesurée à une pratique du jeu excessive, immodérée, susceptible de mettre le joueur en péril financier, social ou psychologique.

La société relève que l’objet même des publicités pour les paris sportifs, dès lors que ces publicités ne font pas l’objet d’une interdiction absolue, est de promouvoir les jeux et les gains qui y sont attachés et que la promotion doit intervenir dans le cadre défini par la profession.

Or, selon l’annonceur, la critique soulevée par le plaignant sur le fait que cette signature/slogan suggère que le respect s’acquiert à travers la prise de risque et les paris gagnés n’est pas directement visée par la recommandation.

Il considère donc que la plainte, qui doit porter sur la conformité de la publicité avec les règles déontologiques de la profession, n’est pas justifiée en l’état de la rédaction de la Recommandation sur les jeux d’argent.

L’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité (ARPP) indique ne pas avoir été interrogée pour conseil préalable, en 2021, concernant cette nouvelle campagne de publicité de Winamax, diffusée à l’occasion de l’Euro de football.

Toutefois, comme le souligne la société Médiatransports, son adhérent, l’un des deux visuels mis en cause par la plainte lui a bien été soumis, en août 2019. Il s’agit de l’affiche comportant la mention « Ma devise dans le foot c’est l’argent » et la signature « Winamax – Grosse cote, gros gain, gros respect » pour laquelle l’ARPP a en effet délivré un conseil favorable.

Comme toute publicité en faveur de paris sportifs, l’ARPP a vérifié la conformité de ce projet d’affiche avec les dispositions de la Recommandation « Jeux d’argent ». Cette règle déontologique a été voulue par les professionnels réunis au sein de l’ARPP afin de garantir la protection de l’ensemble des publics exposés à la publicité des jeux d’argent et de hasard. Elle fait l’objet d’une vigilance toute particulière dans le cadre de l’examen des publicités de ce secteur, quel que soit le support de diffusion.

Pour l’élaboration de cette Recommandation, l’ARPP a pris en compte les préoccupations de l’ensemble des parties prenantes, notamment celles des associations de consommateurs et familiales, dans le cadre du CPP mais aussi des pouvoirs publics grâce à de nombreux échanges avec l’instance de préfiguration de l’Autorité de régulation des jeux en ligne (aujourd’hui Autorité Nationale des Jeux).

La Recommandation « Jeux d’argent » est construite autour de quatre axes principaux dont font partie le jeu responsable et la responsabilité sociale.

L’ARPP indique que son analyse de cette campagne s’inscrit également dans le cadre des échanges étroits qu’elle mène avec l’Autorité Nationale des Jeux.

L’ANJ a été créée le 1er janvier 2020 et bénéficie de pouvoirs élargis par rapport à ceux dont disposait l’ARJEL qu’elle remplace, concernant la publicité des jeux de loterie et les paris sportifs. Parmi les missions de l’ANJ (prévues par un récent Décret du 4 novembre 2020 encadrant les communications commerciales du secteur) figurent la possibilité de faire retirer toute communication commerciale non conforme d’un opérateur et l’approbation de la stratégie promotionnelle de l’année à venir des opérateurs de jeux d’argent.  Les campagnes de Winamax font, à ce titre, l’objet d’échanges réguliers entre l’ANJ et l’opérateur.

En outre, dès la constitution de l’ANJ, les deux instances ont souhaité renouveler la Convention de partenariat sur les communications commerciales des opérateurs agréés, conclue en 2013 avec l’ARJEL, afin de renforcer les échanges d’informations et de coordonner les actions.

L’ARPP souligne que la Convention prévoit notamment la possibilité pour l’ANJ de saisir le JDP de toute publicité ne lui paraissant pas conforme aux règles déontologiques de l’ARPP. Ce qui n’a pas été le cas en l’espèce.

Un groupe de travail opérationnel ARPP/ANJ a été créé et permet un échange d’expertises sur des cas pratiques. L’ARPP a ainsi pu partager son analyse sur la communication de Winamax en général et plus spécifiquement sur la signature « Grosse côte, gros gain, gros respect » : les deux instances se sont accordées sur sa conformité dès lors que le reste du message ne conduit pas à considérer que la publicité suggère que jouer contribue à la réussite sociale.

Même si ce point de vigilance demeure, l’ARPP a considéré que le visuel qui lui avait été soumis en 2019 était conforme aux règles en vigueur.

3. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle que la Recommandation « Jeux d’argent » de l’ARPP dispose que :

« 1.2 Les valeurs sociales

Toute communication commerciale doit être conçue avec un juste sens de la responsabilité sociale et professionnelle” Art.1 du Code de la Chambre de Commerce Internationale relatif à la publicité.

Ainsi, la publicité pour les jeux d’argent ne doit pas, de quelque manière que ce soit :

b/ dévaloriser l’effort, le travail, les études, par rapport au jeu ;

f/ dénigrer les publics qui ne jouent pas ou, inversement, conférer une supériorité sociale à ceux qui jouent ; … »

« 1.4 Jeu responsable :

La publicité des jeux d’argent ne doit pas valoriser, banaliser ou inciter à une pratique du jeu excessive, immodérée, susceptible de mettre le joueur en péril financier, social ou psychologique.

A cet effet, la publicité des jeux d’argent ne doit pas, de quelque manière que ce soit : 

e/ inciter à des mises ou des prises de risque excessives, de nature à mettre le joueur en difficulté ;

g/ suggérer que le jeu est une façon de régler des difficultés financières, passagèrement ou durablement ;

i/ présenter le jeu comme une activité permettant de gagner sa vie plutôt que comme un divertissement ;…. »

Le Jury relève que la plainte porte sur un élément des publicités Winamax qui en constitue le slogan habituel « Grosse cote, gros gain, gros respect », ce slogan ayant été déposé à titre de marque par l’annonceur, sous la forme verbale et semi-figurative.

Le Jury rappelle que le jeu d’argent est fondé sur un pari dont la publicité est autorisée à la condition de respecter les règles précitées.

Le Jury constate que l’association des termes « grosse cote » et « gros gain » relève de la tautologie dès lors que la « grosse cote » exprime la valeur qui conduira au gain relatif le plus important pour le parieur. Dans ces conditions, une telle association, de même d’ailleurs que le nom de l’annonceur (qui peut se traduire par « Gagne un maximum »), se borne à rendre compte de la réalité des conditions du jeu sans aucune incitation particulière.

Le Jury considère que l’adjonction de la formule « gros respect », qui exprime de manière populaire un hommage rendu à celui qui a obtenu de « gros gains » sur une « grosse cote », valorise indéniablement les paris les plus risqués. Toutefois, il y a lieu de relever qu’aucune référence n’est faite à la mise et, en particulier, à son montant ; plus particulièrement, la publicité litigieuse ne comporte aucune incitation à miser une forte somme d’argent sur une « grosse cote » afin de démultiplier ses gains, au risque toutefois de tout perdre et, le cas échéant, de se mettre en difficulté sur le plan financier. En outre, il n’est pas fait allusion à la fréquence de jeu ; à ce titre, ces visuels et le slogan n’excluent pas que les « grosses cotes » ne soient pratiquées que ponctuellement, sur un « coup d’audace ». Par la mention de la cote, la publicité rappelle en outre l’existence d’une prise de risque, ce qui ne serait pas le cas si la publicité se bornait à rapprocher les termes « gros gain » et « gros respect ». Enfin, les publicités de Winamax comportent la mention obligatoire « Jouer comporte des risques : endettement, isolement, dépendance (…) » qui rappelle aux joueurs la nécessité de ne pas se placer en situation de difficulté financière ou d’addiction par la pratique des jeux d’argent. Pour l’ensemble de ces raisons, le Jury estime que cette campagne publicitaire ne peut être regardée comme valorisant, banalisant ou incitant à une pratique du jeu excessive, immodérée ou susceptible de mettre le joueur en péril financier, social ou psychologique, et comme méconnaissant le point 1.4 de la Recommandation.

Le Jury relève enfin que le « respect » supposé n’est pas attribué aux joueurs par opposition aux non-joueurs, ce qui pourrait conférer une supériorité sociale à ceux qui jouent en méconnaissance du point 1.2. de la Recommandation, mais, parmi les joueurs, à celui qui parie avec succès sur une « grosse cote », et qui empoche ainsi un « gros gain ». En outre, comme le souligne l’annonceur, dans le contexte particulier des paris sportifs, le « respect » ainsi valorisé n’est pas seulement l’audace du joueur qui accepte un pari risqué, mais aussi sa capacité à « prédire » le résultat peu probable d’une compétition sportive, alors que la plupart des joueurs – et des non-joueurs – estimaient le résultat inverse peu ou prou acquis, eu égard au niveau respectif des participants ou des équipes en lice.

En conséquence de ce qui précède, le Jury est d’avis que la publicité en cause ne méconnaît pas les points précités de la Recommandation « Jeux d’argent » de l’ARPP.

Avis adopté le 3 septembre 2021 par M. Lallet, Président, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mmes Boissier, Charlot et Lenain, ainsi que MM. Depincé, Le Gouvello, Lucas-Boursier et Thomelin.

Pour visualiser les publicités Winamax, cliquez ici.