Avis JDP n°489/17 – RESTAURATION RAPIDE – Plaintes irrecevables

Avis publié le 28 décembre 201
Plaintes irrecevables

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • après avoir entendu la représentante de la société annonceur,
  • et après en avoir débattu,

rend l’avis suivant :

1. Les plaintes

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 18 octobre 2017, de deux plaintes émanant de particuliers, afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité en faveur d’un restaurant situé à Paris.

Cette publicité présente, sous forme d’affichage au dessus des caisses du restaurant, le dessin d’une femme, vêtue d’une robe et d’un chapeau, tenant un panier empli de légumes. Cette image est accompagnée du texte : « Il y a trois choses qu’une femme est capable de réaliser avec rien : un chapeau, une salade et une scène de ménage – Mark Twain ».

2. Les arguments échangés

– Les plaignants considèrent qu’il est choquant, qu’en 2017, de voir ce genre de slogan figurer dans une chaîne de restaurant internationale. Ils estiment que cette publicité est insultante, sexiste et rabaisse les femmes.

– L’annonceur a été informé, par courrier recommandé avec avis de réception du 6 novembre 2017, des plaintes dont copies lui ont été transmises et des dispositions dont la violation est invoquée.

Son responsable expose que le visuel contesté n’est pas une publicité mais un élément de décor du restaurant. Dans chaque restaurant de la chaîne, se situe, au-dessus des cuisines ouvertes, le « Menuboard », frise décorative peinte à la main par un artiste et personnalisée en fonction du lieu d’implantation du restaurant. Cette frise s’inspire des monuments, mais également des artistes locaux ou internationaux qui ont écrit ou parlé à propos de la ville ou encore du type de plats servis sur place (Marcel Pagnol, Sacha Guitry, Coluche, Jules Verne etc.). Il souligne que les phrases sélectionnées sur ces frises ont pour objectif de faire sourire la clientèle et doivent être lues avec second degré, légèreté et dérision.

En l’occurrence, la citation contestée vient de l’écrivain et humoriste américain du 19ème siècle Mark Twain (Les Aventures de Tom Sawyer).

Sur cette même frise située dans le restaurant de la rue Marbeuf à Paris, apparaissent également les citations suivantes :

  • Sacha Guitry : Être parisien, ce n’est pas être né à Paris, c’est y renaître.
  • Maria Callas : Paris dicte la mode au monde entier.
  • Henri de Toulouse-Lautrec : Of course one should not drink much, but often.
  • Salvador Dali : La beauté sera comestible ou ne sera pas.
  • Jacques Tati : La vie, c’est très drôle, si on prend le temps de regarder.

A Nantes, par exemple, Coluche a été cité avec la phrase : « c’est joli la Bretagne et puis c’est pas loin de la France » sans que cela ait provoqué de plaintes des clients bretons et ce depuis plus de 2 ans. Au restaurant des 4 Temps à la Défense, est citée une phrase de Sophia Loren : « everything you see, I owe to spaghetti ». Il ajoute que ces citations font partie intégrante du décor du restaurant, il ne s’agit en aucun cas de publicité sur le lieu de vente mais, selon lui, d’une œuvre artistique.

L’annonceur regrette néanmoins que cette citation ait été mal comprise ou mal interprétée par des clients et affirme qu’il sera plus vigilant pour ses prochaines ouvertures. Il précise qu’il s’agit de la première plainte qu’il reçoit alors que 4 millions de clients ont fréquenté les 16 restaurants de l’enseigne au cours de l’année écoulée.

3. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle que son règlement intérieur dispose :

– à son article 2, que « Le Jury a pour mission de se prononcer sur le respect des principes déontologiques dans les messages publicitaires diffusés (…) » ;

– à son article 3, qu’il « intervient à la suite de plaintes portant sur des publicités effectivement diffusées, au cours des deux mois précédant la réception de la plainte, sur le territoire français, que ces publicités présentent ou non un caractère commercial, à l’exception du traitement des plaintes transfrontalières (…) ».

En l’espèce, le Jury relève que le visuel en cause est une citation de l’écrivain Mark Twain selon laquelle « Il y a trois choses qu’une femme est capable de réaliser avec rien : un chapeau, une salade et une scène de ménage », apposée à côté du dessin d’une silhouette de femme, vêtue d’un manteau et d’un chapeau et portant un petit panier de légumes. Ce visuel figure sur un mur du restaurant, en hauteur, au-dessus de l’endroit où les clients commandent et récupèrent leurs plats.

Ce visuel relève donc d’un élément de décor du restaurant, et son contenu n’a d’ailleurs pas pour objet de promouvoir ni le restaurant lui-même, ni ce qui peut y être servi. Il ne peut dès lors pas être considéré comme une publicité.

Par conséquent, le Jury n’est pas compétent pour rendre un avis sur ce visuel.

Avis adopté le vendredi 1er décembre 2017 par Mme Michel-Amsellem, Présidente, Mme Lieber, Vice-Présidente, Mmes Drecq et Moggio, MM. Carlo, Depincé, Lacan et Leers.