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Plainte fondée

Avis publié le 31 janvier 2024
QUIPO – 984/24
Plainte fondée 

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • après examen des éléments constituant le dossier de plaintes,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • après avoir entendu le représentant de l’association plaignante Two Sides France, lors d’une séance tenue sous la forme d’une visioconférence,
  • et après en avoir débattu,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 27 novembre 2023, d’une plainte émanant de l’association Two Sides France, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur de publicité en faveur de la société Quipo, pour promouvoir son offre de ticket de caisse dématérialisé.

Les publicités en cause, diffusées sur le site Internet ainsi que sur les pages Linkedin et Instagram de la société, montrent un écran de téléphone portable, sur fond d’arbres, accompagnés des textes auxquels sont associés des pictogrammes de planète Terre, goutte d’eau, feuille…etc:

  • Sur le site Internet : « Quipo est la solution la plus écologique et la plus économique de dématérialisation des tickets de caisse », « Beaucoup plus éco-responsable », « Combien d’arbres Quipo peut-elle sauver chaque année »…
  • Sur la page Linkedin : « L’Impact Écologique de QUIPO : Transformons les Tickets en Gouttes d’Eau non gaspillées! Chez QUIPO, nous sommes engagés envers un avenir plus durable, et nous savons que chaque petit geste compte. On est super fiers de vous annoncer aujourd’hui notre toute nouvelle fonctionnalité “Mon Éco Impact” ! À chaque fois que vous scannez un ticket de caisse avec QUIPO, vous faites un geste noble pour la planète. Chaque ticket scanné équivaut à une petite goutte d’eau ajoutée à notre bouteille virtuelle. Mais, attention, ce n’est pas tout ! Dans notre joli cadran “Mon Éco Impact,” nous calculons en temps réel l’économie que nous faisons ensemble pour sauver notre planète : Eau Économisée : On vous dit combien de litres d’eau vous sauvez grâce à moins de tickets papier.GES Non Générés : Les émissions de gaz à effet de serre que vous évitez grâce à moins de production de papier. Arbres Sauvés : Le nombre d’arbres qu’on préserve en évitant la déforestation nécessaire à la production de papier. Déchets Non Générés : La quantité de déchets en moins grâce à moins de tickets papier. … vous pouvez découvrir combien coûtent réellement les tickets de caisse papier à notre planète. C’est une façon puissante de sensibiliser tout le monde à l’impact de nos choix sur l’environnement. Ensemble, nous pouvons faire une différence significative pour notre planète.  Rejoignez-nous dans cette quête pour un monde plus propre et plus vert en utilisant #quipo #écoimpact #sauvonslaplanète #durabilité #innovation ».

Existe également une vidéo qui contient plusieurs messages de même nature par image.

  • Sur la page Instagram : « Découvrez “Mon Éco Impact” par QUIPO : Transformez vos tickets en gestes écolos ! Chaque scan de ticket équivaut à une goutte d’eau virtuelle pour notre planète. En temps réel, découvrez les économies réalisées : Eau Économisée, Moins d’émissions de GES, Arbres préservés, Réduction des déchets… Ensemble, agissons pour un monde plus propre avec QUIPO ».

2. Les arguments échangés

L’association plaignante énonce que la loi promulguée le 10 février 2020, dite loi AGEC, prévoit à son article 49 que l’impression et la distribution systématique de tickets de caisse est interdite, sauf demande contraire du client. En conséquence, un décret d’application a été publié le 14 décembre 2022. Cette mesure est ainsi entrée en vigueur le 1er août 2023 après plusieurs reports successifs. Depuis la publication du décret, plusieurs start-ups ont initié des campagnes de publicité faisant la promotion des tickets électroniques comme alternative écologique à l’usage de papier.

Parmi celles-ci, Quipo a récemment communiqué sur le lancement d’un calculateur « mon éco-impact » faisant partie intégrante de son application et constituant de ce fait une caractéristique essentielle du service proposé par la société.

L’association considère que ces communications publicitaires ne respectent pas la législation en matière de communication environnementale, et ne respectent pas la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP.

Ainsi, dès la page d’accueil du site de Quipo apparaissent les allégations « Enfin une solution de dématérialisation des tickets réellement éco-responsable » et, occupant toute la taille de l’écran : « Beaucoup plus éco-responsable ». Ce type de message est repris dans les publications sur les réseaux. Ces messages ont une portée globalisante et/ou établissent une comparaison sans que l’on puisse en identifier la base. En outre, ces messages ne permettent pas au lecteur de comprendre la portée de l’engagement de Quipo, ou leur donnent une importance ne correspondant pas à la réalité.

Sur LinkedIn du 24 octobre, on peut lire « C’est une façon puissante de sensibiliser tout le monde à l’impact de nos choix sur l’environnement. Ensemble, nous pouvons faire une différence significative pour notre planète. » quand les tickets de caisse papier représentent en réalité 0,1% de la consommation de papier en France et 0,001 % des déchets produits en France. (En effet, selon le calcul présenté plus bas, les quantités de papier utilisées pour les tickets de caisse seraient de l’ordre de 3000 tonnes, soit 0,1 % environ du tonnage de papier consommé en France selon l’étude ADEME « Actualisation 2021 des flux de produits graphiques en France » et représenteraient 0,001 % des 342 millions de tonnes de déchets produites en France selon les chiffres de l’ADEME pour la même année.)

Immédiatement visible dans la vidéo publicitaire, le calculateur « mon eco impact » est mentionné et présenté. Par l’importance qui lui est donnée dans les messages publicitaires, et dans l’application elle-même, ce calculateur constitue une caractéristique essentielle du service proposé par Quipo. Ce calculateur permettrait de quantifier les impacts environnementaux évités grâce à l’utilisation de l’application Quipo. Il ressort de ce film publicitaire, et de l’analyse de l’application elle-même ainsi que du site internet de l’entreprise que :

  • l’entreprise ne fournit aucune indication quant aux sources des données utilisées dans ce calculateur présenté en visuel de ses publicités.
  • les données mises en avant dans l’application (laquelle est destinée à prouver la supériorité de l’offre de Quipo par rapport à un ticket papier) et visibles dans le film publicitaire ne concernent que le papier. En effet, l’intitulé de la page listant des chiffres d’impact mentionne « Combien coûtent les tickets de caisse papier à la planète ». Nulle part on ne peut trouver les impacts environnementaux liés au service promu par l’annonceur, ne permettant pas à un consommateur de disposer d’un véritable calcul du bénéfice environnemental allégué pour l’usage du produit proposé par Quipo.
  • le film présente l’application en prenant pour fond une image de forêt, accompagné d’un émoticône animé très expressif, orientant le message de manière à laisser croire que Quipo est écologique et/ou préserverait les forêts.
  • il apparaît, à défaut de disposer des sources des données, que celles mises en avant sont fausses ou reposent sur des informations dont Quipo aurait facilement pu vérifier la véracité ou la crédibilité.

En particulier, pour les chiffres de 300 milliards de tickets de caisse dans le monde et de 12 milliards de tickets de caisse pour la France : aucune source n’est indiquée et leur origine est inconnue, même si elle a été souvent reprise dans les communications institutionnelles ou par les médias – lesquelles ne constituent pas des sources de référence auxquelles l’annonceur pourrait donner crédit sans vérification.

L’association souligne :

  • qu’au moment de l’entrée en vigueur du décret d’application de la loi AGEC fin juillet 2023, soit 3 mois avant la communication de Quipo, plusieurs publications de presse ont indiqué l’origine fantaisiste de ces chiffres repris par le Ministère de la Transition écologique et les médias.
  • concernant le calcul selon lequel 12 milliards les tickets papier génèreraient 52 millions de kg de déchets : un calcul simple aboutit au poids de 4,3 grammes par ticket, soit environ le poids d’une feuille de papier de bureau (de format A4 et de grammage 80 g/m²), quand un ticket de caisse est d’une taille 5 à 15 fois moindre, pour un papier d’un grammage 30 à 45 % plus faible. Selon les estimations de Two Sides fournies sur son site internet, le tonnage de ticket de caisses pour 12 milliards de tickets ne serait pas de 52 000 tonnes, mais de moins de 3 000 tonnes, soit 0,1% de la consommation de papier en France, selon les chiffres de l’étude annuelle de l’ADEME sur les flux de papiers graphiques en France.
  • concernant le calcul pour les substances toxiques : son tonnage mondial initial est le même que pour les déchets (1 milliards de kg) mais aboutit à un résultat incompréhensiblement différent ramené à la France (680 000 kg pour les substances toxiques, mais 52 millions de kg pour les déchets).
  • concernant les émissions de GES évitées : Quipo indique 5 g de GES par ticket, quand les chiffres connus sont différents. Le think tank GreenIT a ainsi indiqué que selon ses estimations, non seulement les 5 g de GES par ticket correspondraient aux émissions d’un ticket de caisse numérique, mais qu’elles seraient supérieures de 3 g de GES à celles d’un ticket papier. A cet égard, Quipo ne fournit aucun élément précis justifiant d’un résultat différent applicable à son service.
  • concernant les arbres sauvés : ainsi que le Jury a déjà eu à en délibérer (pour les cas Quipo, Mineralprint et Armen Paper), la production de papier ne repose pas sur l’abattage d’arbres, dans la mesure où la matière première utilisée pour la production de papier, quand il ne s’agit pas de papier qui sera recyclé, provient de sous-produits issus de la filière bois (coupes d’éclaircies réalisées pour l’entretien des parcelles forestières, ou produits connexes de scieries, issues de la production de bois d’œuvre pour la construction notamment). Ces sous-produits, s’ils ne sont pas utilisés par la production de papier, seront utilisés pour la production d’énergie. L’économie de papier promue par Quipo n’a donc aucune portée sur la récolte d’arbres.
  • concernant les barils de pétrole : l’industrie papetière ayant recours, pour 62% de la chaleur qu’elle utilise, à de la biomasse, puis principalement au gaz naturel et à l’électricité, ce calcul donne une impression erronée d’une économie de combustible fossile, selon une base inconnue.

De manière générale, Quipo, mis à part une mention selon laquelle son service n’aurait pas besoin de serveurs pour fonctionner, ne donne aucun détail sur son fonctionnement technique et ses impacts environnementaux. Au contraire, il donne indûment l’impression que sa solution n’aurait aucun impact environnemental :

  • en ne présentant, dans son calculateur « mon eco impact » des chiffres qui ne reposent que sur une économie alléguée de papier (et dont les chiffres sont au moins non sourcés, voire faux, comme indiqué ci-dessus).
  • en attribuant au ticket papier des chiffres qui seraient en réalité ceux du ticket numérique (cf. calcul sur les GES mentionné ci-dessus)
  • en indiquant, sur son site internet « Ne stocke aucune donnée, pas de stockage = pas de surcoût et pas de pollution numérique ». Or il est bien évident que le fonctionnement de l’application sur un smartphone, le stockage des tickets de caisse dans l’application, la nécessité de scanner un QR code chez un commerçant, nécessitent des ressources naturelles.

Two Sides souligne, en outre, que le service proposé par Quipo comporte un dispositif de notifications marketing apparaissant sur le smartphone de l’utilisateur, l’informant de promotions chez des commerçants. Cette communication active poussant à la consommation est une partie essentielle du service proposé par Quipo aux commerçant et rappelée sur ses communications (« donne de la visibilité à vos offres et collecte d’avis vérifiés », « communiquez vers vos clients grâce aux notifications et aux messages personnalisés » sur le site internet ; « Avec Quipo, chaque notification devient une invitation à une expérience shopping sans accroc » post LinkedIn du 21 novembre).

L’association conclut que cette communication promotionnelle contrevient à différentes règles édictées dans la Recommandation « Développement durable » notamment en ce que :

  • en présentant pas les impacts de ses produits, l’entreprise minimise les conséquences de la consommation de ses produits susceptibles d’affecter l’environnement en suggérant de fait qu’ils n’en auraient pas, ou moins que l’utilisation de l’alternative papier, sans le justifier. [§1.1.c] et [§3.3.b]
  • en ne présentant pas les impacts environnementaux du produit vendu par Quipo, elle induit le public en erreur sur la réalité des actions de l’annonceur ainsi que sur les propriétés de ses produits en matière environnementale. [§2.1]
  • elle n’exprime pas avec justesse les propriétés des produits de l’annonceur, dans la mesure où cette publicité ne présente que des éléments critiques d’un moyen de communication concurrent sans évoquer à aucun moment son propre impact environnemental. [§3.1]
  • les sources à l’appui des impacts écologiques allégués pour le papier ne sont pas mentionnées. Elles ne sont donc ni claires ni lisibles. [§4.3] et [§4.5]
  • en évoquant les impacts du papier et en suggérant que le recours au produit de Quipo permet « faire une différence significative pour notre planète », elle établit une comparaison sans en indiquer la base. [4.6]
  • les termes et expressions utilisées laissent entendre indûment par défaut et par comparaison au papier une absence d’impact négatif du produit ou de l’activité de l’annonceur. [7.4]
  • l’emploi d’éléments visuels évoquant la nature induit en erreur sur les propriétés environnementales du produit ou des actions de l’annonceur. [8.3]
  • par le rapprochement visuel et direct fait entre les arbres et le papier, Quipo assimile ce dernier directement à un élément naturel sur lequel il aurait un impact négatif. [8.4]

La société Quipo a été informée, par courriel avec accusé de réception du 14 décembre 2023, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

La société fait valoir que ses chiffres proviennent de plusieurs canaux dont plusieurs officiels :

  • une étude d’émissions carbones évitées opérés par un organisme indépendant (greenly) qui a calculé l’impact en équivalent CO2 des tickets de caisse au format papier, mail et la solution Quipo,

Etudes d’émissions évitées grâce à QUIPO:

  • Démarche & périmètre d’étude

Présentation des résultats de l’étude des émissions évitées.

Comparaison des émissions pour les quatre scénarios suivants :

  • Scénario Tickets Papier : tous les tickets en France sont transmis en papier thermique.
  • Scénario Mail : tous les tickets sont transférés par mail
  • Scénario Quipo : tous les tickets sont transférés sur l’application Quipo, via QR code (pas de transfert ni de stockage des tickets)

On s’aperçoit que la solution QUIPO présente une empreinte environnementale bien inférieure aux tickets imprimés. Plus de 98% des émissions de GES sont évitées en CO2e par rapport à la solution ticket en papier thermique.

Par rapport à la solution mail, près de 73% des émissions en CO2e sont également évitées, ce qui démontre que le numérique responsable est possible selon l’annonceur.

  • une étude de l’université de Strasbourg, consultable en ligne : pdf (zds.fr),
  • une étude sur l’utilisation des bisphenols dans la fabrication du papier thermique (The use of bisphenol A and its alternatives in thermal paper in the EU during 2014 -2022 : European Chemicals Agency, 2020 )

Elle cite diverses autres sources telles que Media brut et de nombreuses communications gouvernementales sur les origines de la loi AGEC et ses objectifs (exemple : 24/07/2023 – Tickets de caisse et de carte bancaire : le 1er août, remise à la demande du client – Presse – Ministère des Finances; Tickets de caisse et de carte bancaire : le 1er août, remise à la demande du client/ economie.gouv.fr.)

La société fait valoir qu’elle est une start-up composée d’ingénieurs convaincus, et de bonne foi, que le numérique responsable est possible et souhaitable face à l’explosion de la pollution numérique. Elle cherche à développer des solutions éco responsables, ce qui a été fait pour les tickets de caisse, l’étude d’émission opérée par un organisme indépendant le démontrant.

3. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle que la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP dispose :

  • au titre des « impacts éco-citoyens » (point 1 ) : « La publicité doit s’inscrire dans un contexte de responsabilité sociale en tenant notamment compte de la sensibilité du corps social a un moment donne et du contexte de diffusion de la publicité. Sans qu’il soit fait référence au concept de développement durable ou à l’une de ses composantes, une publicité doit éviter de véhiculer un message contraire aux principes communément admis du développement durable. Dans cet esprit :

1.1 La publicité doit proscrire toute représentation susceptible de banaliser, ou de valoriser des pratiques ou idées contraires aux objectifs du développement durable. A titre d’exemple :

(…)

c/ La publicité doit éviter, dans son discours, de minimiser les conséquences de la consommation de certains produits ou services susceptibles d’affecter l’environnement […]».

  • au titre de la véracité des actions (point 2) :

« 2.1. La publicité ne doit pas induire le public en erreur sur la réalité des actions de l’annonceur ni sur les propriétés de ses produits en matière de développement durable ;

 (…)

2.3. L’annonceur doit être en mesure de justifier les arguments ayant trait au développement durable au moyen d’éléments sérieux, objectifs et vérifiables au moment de la publicité ; / Pour tout message reposant sur une allégation scientifique, l’annonceur doit être en mesure de présenter l’origine des résultats annoncés et la méthodologie ayant servi de base de calcul. / La publicité ne peut recourir à des démonstrations ou à des conclusions scientifiques qui ne seraient pas conformes à des travaux scientifiques reconnus (…) »

  • au titre de la proportionnalité (point 3) :
    • « 3.2. Le message publicitaire doit être proportionné à l’ampleur des actions menées par l’annonceur en matière de développement durable ainsi qu’aux propriétés du produit dont il fait la promotion; »
  • au titre de la « clarté du message » (point 4) :
    • « 4.5. Tout message publicitaire reposant sur une étude scientifique doit en indiquer la source.
    • 6. Tout argument de réduction d’impact ou d’augmentation d’efficacité doit être précis et s’accompagner de précisions chiffrées, en indiquant la base de comparaison utilisée».
  • au titre du « vocabulaire » (point 7) :
    • « 7.1 Les termes et expressions utilisés ne doivent pas induire le public en erreur sur la nature et la portée des propriétés du produit ou des actions de l’annonceur en matière de développement durable /
    • 7.3 Dans le cas où il serait impossible de justifier des formulations globales (ex. : écologique, vert, éthique, responsable, préserver, équitable, durable, …), la publicité doit les relativiser en utilisant des formulations telles que “contribue à” ».
  • au titre de la « présentation visuelle ou sonore » (point 8) :
    • « 8.1 Les éléments visuels ou sonores doivent être utilisés de manière proportionnée à l’argument écologique et aux éléments justificatifs qui l’appuient.

Le Jury relève que les messages « Rejoignez-nous dans cette quête pour un monde plus propre et plus vert en utilisant QUIPO » ou « agissons pour un monde plus propre » sont assortis de pictogrammes symbolisant principalement l’eau et l’arbre. Ils affirment un engagement de l’entreprise pour une « économie que nous faisons ensemble pour sauver la planète ». Cette affirmation est accompagnée, d’abord, d’une invitation pour l’utilisateur de QUIPO à calculer « en temps réel » combien de litres d’eau sont ainsi « sauvés », combien de gaz à effet de serre ne sont pas « générés » ou encore « le nombre d’arbres qu’on préserve en évitant la déforestation nécessaire à la production de papier », puis, ensuite, de la présentation d’une succession de chiffres illustrant les atteintes diverses à l’environnement générées par la production de tickets de caisse en format papier.

Si l’entreprise peut valoriser sa démarche en matière de responsabilité sociale, sociétale et environnementale, elle ne peut le faire sans justifier et relativiser ses propres allégations au regard de son activité et notamment sans minimiser voire occulter son propre impact sur l’environnement.

Or, au cas d’espèce, en premier lieu, elle laisse croire qu’en n’utilisant pas le papier, non seulement l’utilisateur ne va pas générer de dépenses énergétiques liées à la production de papier, mais plus encore, il va réaliser des économies immédiatement quantifiables pour sauver la planète ou la rendre plus verte, notamment en consommant moins de quantité d’eau et en préservant les arbres, comme le suggèrent, à plusieurs reprises, les pictogrammes représentant ces éléments naturels et accompagnant les messages.

Une telle allégation ne permet pas de savoir sur la base de quels travaux scientifiques reconnus elle se fonde et elle ne renvoie pas, y compris dans les arguments développés pour le Jury, à des démonstrations objectives, vérifiables et suffisamment démontrées, tant sur la méthodologie, les comparaisons proposées que sur les résultats affichés.

En outre, s’agissant des arbres, le jury rappelle que le papier peut être produit grâce à la récupération de chutes de bois de scieries ou avec des arbres abattus au titre de l’entretien nécessaire à la bonne gestion de la forêt.

Ainsi, eu égard aussi au choix du vocabulaire et aux formulations sans nuances, souvent globalisantes, proposées quant au sauvetage de la planète et à la protection des ressources naturelles, les messages sont donc insuffisamment justifiés et disproportionnés au regard de la portée de l’action menée par QUIPO via son application pour produire un ticket numérique.

En second lieu, l’entreprise ne fournit aucun élément précis ni sur l’incidence écologique réelle des solutions numériques qu’elle propose ni sur l’impact de sa propre activité, notamment celle générée, via son application, au profit des utilisateurs.

Ainsi, d’une part, le Jury relève qu’elle entend faire croire que le QR code numérique proposé par son application n’aurait que peu d’incidence environnementale, voire aucune.

Sur une éventuelle absence d’impact écologique, le Jury note que la première page de la vidéo LinkedIn montre un écran de téléphone portable où dans un encadré intitulé « mon ECO impact » s’affichent les mentions « 0 cl H2O 0, 0g CO2, 0 PTS », lesquelles sont de nature à laisser croire qu’il n’existe ainsi aucune production d’activité dans ces domaines.

Une telle allégation est inexacte puisque l’utilisation de l’application n’est pas neutre et implique, au minimum, celle d’un smartphone, d’un terminal et d’un espace au moins minimal de stockage des données.

Le message manque également de clarté car l’affichage d’un bilan neutre, sur cette première page, prête à confusion puisqu’il est contradictoire avec les chiffres affichés sur les pages suivantes relatifs aux économies réalisées sur les dépenses énergétiques de tous ordres par l’application QUIPO, par rapport à l’émission plus polluante d’un ticket en format papier. Elles font, certes, apparaitre un bilan environnemental bien meilleur que le ticket papier, mais elles révèlent, même si on ignore précisément comment elle est calculée, une action sur l’environnement qui n’est pas nulle.

D’autre part, l’entreprise affirme elle-même qu’elle entend, selon son expression, redéfinir l’expérience en caisse grâce à l’efficacité de son application mais elle précise aussi qu’il s’agit d’un avantage complémentaire puisqu’il intervient « au-delà des offres et évènements simplifiés par nos notifications », ce qui implique l’existence d’une activité commerciale générée via les notifications de QUIPO à ses utilisateurs, mais qui n’est nullement quantifiée dans le calcul environnemental présenté dans les messages.

On peut en conclure que cette présentation ne rend donc pas compte de la réalité des actions de Quipo et revêt également, à ce titre, un caractère disproportionné au regard de la réalité de l’impact environnemental de ses activités, susceptible d’induire en erreur le public

Le Jury conclut donc que les messages en cause ne sont pas conformes aux exigences de véracité, de proportionnalité et de clarté précitées (Recommandation 1.1 c), 2.1,2.3, 3.2, 4.5, 4.6, 7.1, 7.3, 8.1, 8.3).

Avis adopté le 12 janvier 2024 par Mme Tomé, Présidente, M. Aparisi, Vice-Président, Mmes Aubert de Vincelles, Boissier, Charlot et Lenain, ainsi que MM. Le Gouvello, Lucas-Boursier et Thomelin.


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