PLASTIC OMNIUM – Internet – Plainte non fondée

Avis publié le 16 juin 2021
PLASTIC OMNIUM – 727/21
Plainte non fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • après avoir entendu le plaignant et les représentants des sociétés Plastic Omnium New énergies et BETC,
  • et après en avoir débattu,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 12 décembre 2020, d’une plainte émanant d’un particulier, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité de la société Plastic Omnium, pour promouvoir sa solution de motorisation des véhicules à l’hydrogène.

La publicité en cause, diffusée notamment sur le compte Twitter de la société, présente un verre d’eau, accompagné du texte : « Voilà tout ce qu’on rejette en roulant à l’hydrogène ».

En dessous, en caractères plus petits, il est précisé : « Rouler à l’hydrogène, c’est ne rejeter que de l’eau, sans émission de CO2. Dès aujourd’hui Plastic Omnium propose aux constructeurs une solution hydrogène globale, depuis le stockage jusqu’au système à hydrogène intégré, en passant par la pile à combustible. »

2. Les arguments échangés

Le plaignant estime que l’expression « rouler à l’hydrogène » ou « en roulant à l’hydrogène » ne fait pas référence à la seule phase de roulage du véhicule et à l’absence d’émission de gaz carbonique lors de son utilisation, mais, plus largement, à l’acquisition d’un véhicule à l’hydrogène. De la même façon, une publicité qui contiendrait l’expression « en mangeant de la viande » renverrait évidemment à l’acte d’achat de la viande et non son ingestion proprement dite.

Or la production et la distribution de l’hydrogène, la construction, la distribution et la gestion de la fin de vie du véhicule s’accompagnent de nombreuses émissions polluantes.

Il considère que la circonstance que l’offre promue s’adresse aux seuls professionnels est sans incidence dès lors que la publicité est vue par le grand public, qui n’a pas cette information.

Par suite, le plaignant estime que cette publicité suggère indûment une absence totale d’impact négatif et est de nature à induire le consommateur en erreur. Elle contrevient donc selon lui au point 3 de la Recommandation Développement durable de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP).

La société Plastic Omnium a été informée, par courriel avec accusé de réception du 10 mars 2021, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle rappelle que le groupe Plastic Omnium, équipementier automobile, a développé une expertise dans la mobilité par hydrogène, en proposant aux constructeurs automobiles une nouvelle solution basée sur cette technologie. La campagne publicitaire en cause vise à faire connaître cette solution à des publics cibles que constituent les acteurs économiques du secteur automobile, les analystes financiers et les investisseurs, et non au grand public.

Elle soutient que cette publicité cible précisément la seule phase de roulage par l’expression « en roulant à l’hydrogène » et par la mention explicative qui énonce que « Rouler à l’hydrogène, c’est ne rejeter que de l’eau, sans émission de CO2 ».

Le principe de proportionnalité du message formulé par la Recommandation « Développement Durable » de l’ARPP n’interdit pas à un annonceur de communiquer sur un produit dont il ne maîtrise pas le cycle de vie en entier : il lui demande de limiter son propos à ce qu’il est en mesure de justifier, ce qu’a fait le groupe en expliquant sa technologie et ses avantages en termes d’émissions de CO2 lorsqu’un véhicule roule à l’hydrogène.

Il est en effet avéré que les véhicules à hydrogène n’émettent pas de CO2 en phase de roulage. Il convient de relever à ce titre le rapport du CEA et la DGEC daté de 2017 pour le Ministère pour la transition écologique et solidaire, qui qualifie le véhicule à hydrogène comme un « véhicule zéro émission ». C’est ce constat que la publicité critiquée entend relayer.

La société considère que cette annonce est conforme à l’interprétation du JDP du point 3 de la Recommandation Développement Durable sur la proportionnalité des messages publicitaires, notamment au regard de l’avis « RENAULT ZE – 701/20 » publié sur le site internet du JDP le 4 janvier 2021, et qui accueille une plainte contre une publicité de Renault comportant l’allégation suivante : « Renault ZE 100% électrique. Une gamme de véhicules zéro émission pour tous ». Il ressort de l’avis que le manquement constaté est fondé sur l’absence de référence à la phase de roulage, donnant le sentiment que l’absence d’émission concernait l’ensemble du cycle de vie du véhicule.

A l’inverse, la campagne publicitaire litigieuse est tout à fait clair sur l’évocation de la seule phase de roulage.

La société rappelle enfin que cette publicité a été réalisée par l’agence BETC et qu’elle a été soumise à l’ARPP dans le cadre de sa mission de conseil préalable, sans soulever d’objection.

L’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité (ARPP) qui a examiné la publicité pour conseil avant diffusion, confirme avoir émis un avis favorable au regard de la Recommandation « Développement durable » en se fondant sur l’allégation « Voilà tout ce qu’on rejette en roulant à l’hydrogène », la présence du texte explicatif, qui utilise l’expression « rouler à l’hydrogène », ainsi que sur le renvoi à un hashtag « #HYDROGENREVOLUTION powered by Plastic Omnium » permettant de délivrer des explications complémentaires.

L’ensemble de ces éléments confirment que c’est précisément en phase de roulage que les rejets se limitent à de l’eau et non en prenant en compte tout le cycle de vie du produit. Cette allégation n’est donc pas excessive ou de nature à induire en erreur le consommateur sur la réalité de l’impact de cette technologie sur l’environnement.

3. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle que la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP dispose en son point 3, relatif à la proportionnalité du message, que : « 3.1 Le message publicitaire doit exprimer avec justesse l’action de l’annonceur ou les propriétés de ses produits, en adéquation avec les éléments justificatifs transmissibles. (…) / 3.3 En particulier : (…) / b/ Le message publicitaire ne saurait suggérer indûment une absence totale d’impact négatif. ».

Le Jury relève que les formulations « rouler à l’hydrogène » et « en roulant à l’hydrogène » présentent un caractère polysémique. Elles peuvent en effet désigner l’acte même d’utiliser un véhicule fonctionnant à l’hydrogène, et être alors synonyme de « en phase de roulage », ou, plus globalement, le choix d’opter pour l’achat ou la location d’un tel véhicule, ce qui suppose qu’il ait été fabriqué et implique qu’il soit mis au rebut. Il appartient au Jury de déterminer, indépendamment du sens que l’annonceur a entendu leur conférer dans sa publicité, celui que le public perçoit de la manière la plus intuitive. A cet égard, le Jury considère qu’il n’y a pas lieu de tenir compte de ce que l’annonceur est un équipementier qui a entendu s’adresser à des investisseurs ou des constructeurs automobiles, dès l’instant que cette publicité était accessible au plus grand nombre compte tenu de ses supports de diffusion.

Le Jury observe que cette publicité fait référence à deux reprises au roulage (« rouler » et « en roulant ») et au « rejet » d’eau et non de CO2. Or la préoccupation majeure que suscite le transport automobile sur le plan environnemental pour le grand public tient non pas à la fabrication des véhicules et à leur fin de vie, mais à la dégradation de la qualité de l’air qu’il respire en raison du dégagement de substances nocives par les pots d’échappement des véhicules en fonctionnement et leur concentration en milieu urbain. Au surplus, la majorité du public ne paraît pas pouvoir être induit en erreur sur le fait que, à l’évidence, les usines qui fabriquent les voitures, quelle que soit leur motorisation, et l’ensemble des opérations nécessaires à leur mise à disposition et à leur élimination ou leur réemploi impliquent nécessairement l’émission d’autres substances que de l’eau.

Dans ces conditions, et tout en incitant l’annonceur à privilégier l’expression « en phase de roulage » en raison de son caractère plus explicite, le Jury est d’avis que cette publicité ne méconnaît pas les dispositions précitées de la Recommandation « Développement durable ».

Avis adopté le 7 mai 2021 par M. Lallet, Président, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mmes Charlot et Lenain, ainsi que MM. Depincé, Leers, Le Gouvello, Lucas-Boursier et Thomelin.

Pour visualiser la publicité Plastic Omnium, cliquez ici.