Avis JDP n° 597/19 – SCIENCES OCCULTES – Plainte fondée

Avis publié le 4 novembre 2019
Plainte fondée

 Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • et après en avoir débattu,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 6 août 2019, d’une plainte émanant du Réseau anti-arnaques, afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité en faveur de la société F.C.M., pour la promotion de son offre de prédictions par X, diffusé par voie de publipostage.

Cette publicité se présente sous la forme d’une lettre de huit pages, diffusée en publipostage et adressée nominativement à son destinataire par X. La lettre, imprimée en couleurs et utilisant plusieurs polices de caractères, est majoritairement dactylographiée mais imite parfois une écriture manuscrite au stylo bleu. Le document est illustré de diverses photographies montrant une bague ornée d’une pierre bleue, un bracelet ou un « Symbole Magique Purificateur » sur la première page d’un livre ainsi que la « photo réelle » de X, voyante numérologue. A onze reprises apparaissent des bannières visuelles, avec l’iris d’un œil en arrière-plan, sur lesquelles sont inscrites les textes « Vous êtes l’innocente victime du mauvais œil », « Le mauvais œil est sur vous. Qui d’autre que moi peut vous aider », ou encore « Grâce à ma cérémonie de désenvoûtement, votre vie va être enfin celle que vous méritez à partir du 16 juillet 2019 !! ». La dernière page se présente comme une attestation du destinataire valant acceptation des offres et comportant la liste des « cadeaux » (une bague, un livre et un « billet de 200 euros porte bonheur »), un bon de commande pour la « cérémonie de désenvoûtement » (la somme de 39 euros étant associée aux « frais de réédition du Livre ») et des mentions relatives à une « garantie légale de remboursement » avec ces derniers mots « je tiens toujours mes promesses ! ».

2. Les arguments échangés

Le Réseau anti-arnaques considère que ce publipostage est de nature à effrayer le consommateur par l’utilisation de formulations expressives : « vous êtes l’innocente victime du mauvais œil », « vous êtes la cible d’une terrible machination », « le mauvais œil est sur vous, qui d’autre que moi peut vous aider… ».

Son représentant ajoute que le choix des couleurs et le graphisme renforcent le perçu de « film d’épouvante ».

Par ailleurs la mention « photo réelle » accompagnant la photo de X reste à démontrer.

La société F.C.M. a été informée, par courrier recommandé avec avis de réception du 9 septembre 2019, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle n’a pas adressé d’observations.

3. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle que l’article 2 du Code ICC sur la publicité et les communications commerciale, dans sa version en vigueur consacrée à la responsabilité sociale, prévoit :

  • d’une part, que « La communication commerciale, sauf raison justifiable, doit proscrire toute exploitation des sentiments de peur, de malchance ou de souffrance »,
  • d’autre part, que « La communication commerciale doit proscrire toute exploitation de la superstition. »

La Recommandation « Sciences occultes » de l’ARPP dispose en outre que :

« Aucune publicité ne doit faire état de :

  • garanties implicites ou explicites de résultat,
  • infaillibilité, promesses impossibles à tenir (“solution à tous vos problèmes”, “réalisation de vos vœux”, etc.),
  • aptitude à dominer le hasard,
  • magie, sorcellerie,
  • influence sur le libre arbitre (envoûtement) ou les sentiments d’autrui (retour d’affection, d’amour, etc.),
  • compétences particulières dans des domaines nécessitant un titre ou des connaissances approfondies (santé justice, affaires, emploi, travail, etc.), “savoirs” ou “sciences” spécifiques, lorsque leur contenu réel n’est pas précisé, diplômes fantaisistes non délivrés par l’Etat,
  • prédictions réalisées, lorsqu’elles ne peuvent être prouvées par des documents publiés ou ayant fait l’objet d’une authentification par officier ministériel, la référence à cette preuve devant être mentionnée explicitement dans la publicité,
  • horoscopes “personnels” lorsque ceux-ci ne font pas l’objet d’une étude individuelle (circulaires, textes standards, etc.)».

Le Jury relève que la publicité en cause se présente sous la forme d’une lettre de huit pages, diffusée en publipostage et adressée nominativement à son destinataire par X. La lettre, imprimée en couleurs et utilisant plusieurs polices de caractères, est majoritairement dactylographiée mais imite parfois une écriture manuscrite au stylo bleu. Le document est illustré de diverses photographies montrant une bague ornée d’une pierre bleue, un bracelet ou un « Symbole Magique Purificateur » sur la première page d’un livre ainsi que la « photo réelle » de X, voyante numérologue. A onze reprises apparaissent des bannières visuelles, avec l’iris d’un œil en arrière-plan, sur lesquelles sont inscrites les textes « Vous êtes l’innocente victime du mauvais œil », « Le mauvais œil est sur vous. Qui d’autre que moi peut vous aider », ou encore « Grâce à ma cérémonie de désenvoûtement, votre vie va être enfin celle que vous méritez à partir du 16 juillet 2019 !! ». La dernière page se présente comme une attestation du destinataire valant acceptation des offres et comportant la liste des « cadeaux » (une bague, un livre et un « billet de 200 euros porte bonheur »), un bon de commande pour la « cérémonie de désenvoûtement » (la somme de 39 euros étant associée aux « frais de réédition du Livre ») et des mentions relatives à une « garantie légale de remboursement » avec ces derniers mots « je tiens toujours mes promesses ! ».

Le Jury estime, d’abord, que la publicité, qui fait principalement la promotion d’une cérémonie relevant des sciences occultes et propose un service de « désenvoûtement », est conçue pour effrayer le destinataire afin de le persuader de recourir aux services proposés. Le texte a pour objet de démontrer que la « voyante » a perçu les malheurs et les difficultés d’argent du destinataire, qui est « l’innocente victime du mauvais œil », la « cible d’une terrible machination », dont seule X peut le libérer ( « qui d’autre que moi peut vous aider ? »). Le graphisme et les signes mystérieux, mais surtout la présentation individualisée qui joue sur l’identité précise de la personne en indiquant que les lettres de son nom sont apparues dans le désordre dans une boule de cristal, accentuent l’exploitation des sentiments de peur, de malchance et de souffrance.

Le Jury relève, ensuite, que la lettre contient des garanties explicites de résultat (« une semaine après tout sera réglé », « certificat de garantie : destruction complète du mauvais œil qui vous met en danger »), des promesses impossibles à tenir (« grâce à ma cérémonie de désenvoûtement, votre vie va enfin être celle que vous méritez », « retour de votre santé et de votre bien-être », « retour d’affection », « je tiens toujours mes promesses »), des éléments de magie, de sorcellerie et d’aptitude à dominer le hasard (« la nuit du lundi 17 juin […] j’ai été attirée par une lumière lugubre qui émanait de ma boule de cristal […] c’est alors que sont apparues [les lettres de votre nom]. Vous m’avez alors tout confié »), ainsi que la volonté d’influencer le libre arbitre du destinataire et de mettre en œuvre une « science » venue d’un ancêtre mais dont le contenu réel n’est pas précisé.

Le Jury considère, enfin, qu’aucune des visions ou prévisions mentionnées n’est rattachée à une étude individuelle. S’il ne peut se prononcer sur la mention « photo réelle », il estime que l’ensemble du texte standardisé n’a d’autre finalité que d’exploiter la superstition du destinataire, dans le but de conduire celui-ci à une « participation » pour un montant de 39 euros.

En conséquence de ce qui précède, le Jury est d’avis que la publicité en cause méconnaît l’ensemble des points de la Recommandation « Sciences occultes » et du Code ICC précités.

Avis adopté le 4 octobre 2019 par Mme Lieber, Présidente, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mme Drecq, MM. Leers et Lucas-Boursier.