NEXITY – Affichage – Plainte fondée

Avis publié le 4 mai 2022
NEXITY – 832/22
Plainte fondée

 Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • après avoir entendu les représentants de la société Nexity et les observations du directeur général de l’ARPP,
  • et après en avoir débattu,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 4 mars 2022, d’une plainte d’un particulier, afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité en faveur de la société Nexity, pour promouvoir son offre de promotion immobilière.

La publicité en cause, diffusée en affichage, montre le visage d’un homme souriant.

Les textes accompagnant cette image sont :

  • En accroche, en gros caractères : « Ce n’est pas demain la veille que vous allez investir dans un logement bas carbone. C’est maintenant »,
  • En dessous dans un encadré vert : « Investissez Nexity, promoteur n°1 de l’immobilier. Bâtiment bas carbone depuis 2018. Nos logements sont durables et abordables »

2. Les arguments échangés

Le plaignant énonce que l’allégation « nos logements sont durables » est globalisante et induit le public en erreur. Elle devrait être relativisée avec une formulation du type « plus durables » conformément au point 7 de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP.

De surcroît, la « durabilité » ne se réduit pas à l’aspect « bas carbone ». La construction d’un logement produit potentiellement de nombreux autres impacts sur l’environnement et la société : emprise sur des terres agricoles, déplacement de véhicules de chantiers, conditions de travail et de rémunération des ouvriers de différents corps de métiers…

L’annonceur ne donne aucune information sur ces éléments qui pourraient justifier en quoi le logement serait « plus durable » que d’autres (point 3 « Proportionnalité » de la Recommandation).

La société Nexity a été informée, par courriel recommandé avec avis de réception du 14 mars 2022, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle a été également informée que cette affaire ferait l’objet d’un examen dans le cadre de la procédure simplifiée prévue à l’article 13 du règlement intérieur du Jury.

La société Nexity a sollicité la tenue d’une séance.

Son représentant assure de sa volonté de respecter l’ensemble des règles applicables en matière de déontologie publicitaire.

Il confirme que la campagne publicitaire mise en cause a fait l’objet de vérifications, pour s’assurer de sa conformité au regard des recommandations de l’ARPP, notamment pour que la présentation de « logements durables » respecte bien les trois piliers du développement durable (environnemental – économique – social).

Il soutient que la définition de ses logements durables et l’ensemble des informations relatives à ses logements figurent sur la page https://logement-durable.nexity.fr. En matière environnementale, plusieurs labels attestent de la performance environnementale des logements, dont le label BBCA, mis en avant sur l’affiche. Le Label Bâtiment Bas Carbone (BBCA) est un label créé en 2016 qui mesure l’empreinte carbone du bâtiment sur tout son cycle de vie, de sa construction à son exploitation, dont l’évaluation repose sur 4 piliers (construction raisonnée -exploitation maîtrisée – stockage carbone – économie circulaire). Le label, décerné par l’Association Bâtiment Bas Carbone, valorise les projets qui contribuent au développement des bonnes pratiques bas carbone sur le cycle de vie d’un bâtiment.

Il relève que c’est dans ce cadre que l’argument selon lequel Nexity est le « Promoteur n°1 de l’immobilier Bâtiment Bas Carbone » est avancé.

Le site internet de la société donne la liste des autres certifications environnementales dont les programmes immobiliers de la société bénéficient, parmi lesquels les labels EcoQuartier ou BiodiverCity.

Sur les volets économique et social, les mentions légales viennent préciser que, « le développement durable vise à concilier développement économique, protection de l’environnement et équité sociale. Retrouvez tous les engagements de Nexity en matière de développement durable sur notre site internet : Nos engagements (ou pour encore plus de détails, dans notre rapport https://media.nexity.fr/upload/ged/pdf/NEX_2020_URD_FR_21_04_08_MEL.pdf). ».

Selon l’annonceur, par ce renvoi, les consommateurs sont à même d’identifier les engagements du groupe Nexity en matière économique et sociale, pouvant attester que le groupe s’inscrit dans une démarche de développement durable pour la construction de ses logements. A titre d’exemple en matière sociale, le groupe Nexity est partenaire du logement social en France, avec une part de logement social s’élevant à 23% de sa production de logements résidentiels en 2020.

De plus, le groupe œuvre pour l’accès au logement avec notamment la production de pensions de famille, lieu convivial à taille humaine où peuvent s’installer, sans limitation de durée, des personnes souffrant d’isolement et rencontrant des difficultés pour vivre dans un logement traditionnel (777 logements au moins au stade de conception en 2019 et 591 logements au moins au stade de conception en 2020). Le groupe participe à l’accompagnement des plus précaires via les heures d’insertion sociale (29 004 heures d’insertion sociale sur les chantiers du groupe en 2020).

En matière économique, le groupe Nexity soutient par ses activités un tissu composé à 80% d’entreprises locales du bâtiment (80 % des 4.700 entreprises du bâtiment avec lesquelles Nexity travaille chaque année sont des PME ou des TPE). Ainsi en 2020, Nexity a signé une charte vis-à-vis de ses partenaires TPE/PME pour soutenir durablement la reprise d’activité en s’engageant notamment à donner aux entreprises une profondeur de carnet de commandes et réduire les délais de paiement pour soutenir la trésorerie des TPE/PME.

En tant qu’auteur de la publicité, la société Nexity estime remplir les critères de l’ARPP en étant précis et accessibles.

Par ailleurs, l’annonceur indique que l’agence de communication vérifie également la conformité des publicités produites avec les recommandations de l’ARPP ; ainsi que les régies publicitaires concernées, qui ont d’ailleurs sollicité l’avis de l’ARPP concernant cette campagne.

Enfin, il est fait mention de logements « durables » et non pas « plus durables » (comme cela est mentionné dans la plainte transmise), pour ne pas induire en erreur le consommateur et laisser à penser que les logements iraient systématiquement plus loin que la réglementation applicable en matière de développement durable. Au contraire, Nexity a pris le soin sur son site internet d’indiquer en quoi précisément ses logements étaient qualifiés de « durables » dans le cadre de cette campagne, et quels étaient les programmes immobiliers concernés.

Lors de la séance, la société Nexity a repris en substance cette argumentation.

La société d’affichage Médiatransports indique que le visuel objet de la plainte qui promeut l’investissement dans les bâtiments Nexity dits « bas carbone » et « durables et abordables » a été affiché du 10 février au 16 février 2022 sur 180 faces des réseaux RATP et SNCF.

Métrobus Ile-de-France qui exploite désormais le réseau RATP et Médiagares sont en effet engagés, en qualité de membres de l’Union de la Publicité Extérieure, par la Charte d’engagement et d’objectifs pour une publicité éco-responsable qui prévoit notamment de « consulter l’organisme français de régulation professionnelle de la publicité, avant toute campagne nationale ayant recours à des arguments écologiques ».

C’est dans ce cadre que le visuel en cause, mettant en avant des arguments écologiques, a été soumis avant sa diffusion à l’ARPP.

L’ARPP, dans son conseil du 20 janvier 2022, a notamment indiqué : « En matière environnementale, il convient que les revendications/présentations faites par l’annonceur soient conformes à la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP et notamment aux principes de véracité des actions et de proportionnalité des messages. L’annonceur doit donc pouvoir justifier son positionnement bas Carbone depuis 2018. 

Le bloc de mentions avec le début d’explication assorti du renvoi à une rubrique dédiée du site internet de l’annonceur doit être significativement plus lisible (Recommandation « Mentions et renvois » de l’ARPP).

Sous ces réserves, les indications « nos logements sont…durables » et « logement durable » méritent d’être nuancée avec une formulation du type « plus durable(s)… ».

Ces éléments ont été transmis à l’annonceur et le responsable juridique de Médiatransports a échangé avec les départements Marketing et Juridique de ce dernier qui lui ont indiqué que les trois piliers du développement durable (environnemental, sociétal et économique) étaient remplis et que, par conséquent, le terme « durable » pouvait être utilisé en l’état. Par ailleurs, le bloc de mentions a été rendu plus lisible.

La société Médiatransports fait valoir que, concernant la non-conformité évoquée par la plainte au point 7 (Vocabulaire) de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP, dans la mesure où l’annonceur a confirmé que ses bâtiments conciliaient les trois piliers du développement durable, Médiatransports a considéré que cette utilisation du terme « durable » n’induisait pas le public en erreur et qu’il serait donc possible pour l’annonceur de justifier cette formulation.

Sur le point 3 (Proportionnalité des messages), Médiatransports explique que, de même, sur la base de la confirmation de l’annonceur, l’utilisation du terme « durable » pouvait être justifiée et ne nécessitait pas d’être nuancée.

La société d’affichage s’en remet donc aux explications de l’annonceur concernant la véracité des allégations qui relèvent de sa responsabilité.

L’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité (ARPP) a été interrogée pour conseil avant diffusion de cette affiche par la régie d’affichage Médiatransports, en janvier 2022, le visuel en cause correspondant à un projet de campagne publicitaire comportant deux affiches.

Le Directeur Général de l’ARPP rappelle que, de manière générale, son adhérent Médiatransports s’attache à vérifier la conformité de ses publicités auprès des services de l’ARPP. Une attention toute particulière est de plus portée sur les campagnes ayant recours à des allégations environnementales pour lesquelles l’interprofession publicitaire a pris engagement pour les campagnes nationales comportant une allégation environnementale définie dans le champ d’application de la Recommandation déontologique « Développement durable », quel que soit le support de diffusion utilisé, de recueillir l’Avis préalable de l’ARPP.

L’ARPP a examiné la conformité de l’affiche en cause au regard des dispositions déontologiques contenues dans cette Recommandation précitée.

Il a été rappelé que, de manière générale, en matière de publicité en lien avec l’environnement, les revendications/présentations faites par l’annonceur doivent être conformes aux principes de véracité des actions et de proportionnalité des messages contenus dans la Recommandation.

En l’espèce, l’accent a été mis sur la nécessité de pouvoir justifier le positionnement « bas Carbone depuis 2018 » annoncé.

Pour la bonne conformité avec sa Recommandation, l’ARPP a cependant conseillé de nuancer la notion de « logement durable » (par une formulation du type « plus durable(s)… »).

L’ARPP a relevé que, pour la bonne information du consommateur et comme le prévoit la Recommandation, une mention explicative, assortie du renvoi à une rubrique dédiée du site internet de l’annonceur, était bien présente dans la publicité mais devait apparaître de manière significativement plus lisible (Recommandation « Mentions et renvois » de l’ARPP).

A titre plus accessoire, d’autres questions tenant par exemple à la tarification du service téléphonique ont été soulevées.

Sous réserve de ces observations qu’il appartient ensuite au média concerné de mettre en application en fonction des éléments d’information obtenus auprès de son client, la publicité, pouvait, selon l’ARPP, être diffusée.

Toutefois, s’agissant d’un conseil comportant des demandes de modifications et réserves, celui-ci a fait l’objet d’une circularisation auprès des autres afficheurs membres de l’Union de la Publicité Extérieure, comme prévu par une procédure décidée par l’ARPP et l’UPE en 2005.

3. L’analyse du Jury

 Le Jury rappelle que la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP dispose :

  • au titre des « impacts éco-citoyens » (point 1 ) :

« La publicité doit s’inscrire dans un contexte de responsabilité sociale en tenant notamment compte de la sensibilité du corps social a un moment donne et du contexte de diffusion de la publicité. Sans qu’il soit fait référence au concept de développement durable ou à l’une de ses composantes, une publicité doit éviter de véhiculer un message contraire aux principes communément admis du développement durable. Dans cet esprit :

1.1 La publicité doit proscrire toute représentation susceptible de banaliser, ou de valoriser des pratiques ou idées contraires aux objectifs du développement durable. A titre d’exemple :

(…)

c/ La publicité doit éviter, dans son discours, de minimiser les conséquences de la consommation de certains produits ou services susceptibles d’affecter l’environnement […]».

  • au titre de la proportionnalité du message (point 3) :

« 3.1 Le message publicitaire doit exprimer avec justesse l’action de l’annonceur ou les propriétés de ses produits, en adéquation avec les éléments justificatifs transmissibles. (…) /

3.2 Le message publicitaire doit être proportionné à l’ampleur des actions menées par l’annonceur en matière de développement durable ainsi qu’aux propriétés du produit dont il fait la promotion. (…) ».

  • au titre du vocabulaire (point 7) :

« 7.1 Les termes et expressions utilisés ne doivent pas induire le public en erreur sur la nature et la portée des propriétés du produit ou des actions de l’annonceur en matière de développement durable.

7.2 Lorsque les termes et expressions utilisés font l’objet d’une définition fixée par une norme, ils doivent être employés dans un sens qui correspond à cette définition.

7.3 Dans le cas où il serait impossible de justifier des formulations globales (ex. : écologique, vert, éthique, responsable, préserver, équitable, durable, …), la publicité doit les relativiser en utilisant des formulations telles que “contribue à”.

7.4 Les termes, expressions ou préfixes utilisés ne doivent pas traduire indûment une absence d’impact négatif du produit ou de l’activité de l’annonceur. »

Le Jury relève, à titre liminaire, que ni les objectifs et les efforts accomplis par la société Nexity pour améliorer la qualité de ses logements en matière environnementale ni la valeur des labels attestant de la performance environnementale des logements (notamment le label BBCA, créé en 2016 qui mesure l’empreinte carbone du bâtiment sur tout son cycle de vie, de sa construction à son exploitation, dont l’évaluation repose sur 4 piliers : construction raisonnée -exploitation maîtrisée – stockage carbone – économie circulaire) ne sont remis en cause par la plainte qui lui est soumise, laquelle porte uniquement sur la mention « Nos logements sont durables ».

Le Jury constate que cette allégation « durables » est en l’espèce revendiquée par l’annonceur au regard de la performance environnementale précédemment mentionnée, mais également sur ses engagements auprès des TPE/PME locales. Elle fait donc clairement référence au développement durable, et non pas seulement à la solidité du bâti.

Or les logements promus ne sont pas dépourvus de tout impact écologique, ni au moment de leur construction, en termes de consommation de ressources et d’empreinte écologique, ni à l’échelle de l’évolution de ces constructions dans le temps dont rien ne permet de penser qu’elles seraient, par exemple, biodégradables et sans incidence sur l’environnement. A tout le moins, il n’est pas démontré que les matériaux et les techniques de construction utilisés seraient compatibles avec la préservation de l’environnement dans la durée. La seule circonstance que les logements construits seraient « bas carbone » – allégation que rien dans la publicité ne vient d’ailleurs expliciter – ne suffit pas à revendiquer une durabilité écologique. Il ressort en outre des observations présentées en séance par la société Nexity que tous les programmes de logement qu’elle porte ne bénéficient pas d’une certification « durable » – laquelle est distincte de la certification « bas carbone » – susceptible de justifier, le cas échéant, l’utilisation de ce vocable.

Le Jury considère donc qu’en l’absence de démonstration de la compatibilité de cette activité avec la préservation des ressources naturelles pour les générations futures, en sus des enjeux sociaux, sociétaux et économiques qui relèvent du développement durable, l’emploi de la formulation globale et non relativisée « durables » ne peut être regardée comme justifiée. Elle méconnaît donc les points 7.1, 7.3 et 7.4 de la Recommandation « Développement durable » et doit être considérée comme étant de nature à induire en erreur le public sur les propriétés de ces logements, en contrariété aux points 3.1 et 3.2 de cette même Recommandation.

Dans ces conditions, le Jury considère que, sous les réserves exprimées ci-dessus, les publicités critiquées méconnaissent ces règles déontologiques.

En conséquence de ce qui précède, le Jury est d’avis que la publicité en cause méconnaît les dispositions précitées.

Avis adopté le 1er avril 2022 par M Lallet, Président, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mmes Lenain, Boissier et Charlot, MM. Lucas-Boursier et Thomelin.

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