METROPOLE DE LYON

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Plainte fondée / Demande de révision rejetée

Avis publié le 14 mai 2024
METROPOLE DE LYON – 1001/24
Plainte fondée
Demande de révision rejetée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  •  après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • après avoir entendu le plaignant, lors d’une séance tenue sous la forme d’une visioconférence,
  • et après en avoir débattu,
  • l’avis délibéré ayant été adressé à la Métropole de Lyon, annonceur, laquelle a introduit une demande de révision rejetée par la décision du Réviseur de la déontologie publicitaire ci-dessous, annexée au présent avis,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 12 décembre 2023, d’une plainte émanant d’un particulier, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité, en faveur de la Métropole de Lyon, pour promouvoir le tunnel de la Croix Rousse.

La publicité en cause, diffusée sous forme de publication sur le réseau social X, montre la photographie de l’entrée du tunnel vers lequel se dirige un cycliste et à l’entrée duquel d’autres vélos et cyclistes sont stationnés.

Le texte accompagnant cette image est : « Métropole de Lyon – le tube mode doux a 10 ans !… le plus long tunnel dédié aux modes doux en Europe ».

2. La procédure

La Métropole de Lyon a été informée, par courriel avec avis de réception du 14 mars 2024, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle a été préalablement, par courriel du 20 décembre 2023, sollicitée pour apporter des éléments de justification concernant l’emploi de l’allégation « tube mode doux ».

Compte tenu des seuls éléments de réponse adressés par la Métropole de lyon qui n’a pas donné suite aux demandes de précisions complémentaires, son représentant ainsi que le plaignant ont été informés, que cette affaire ferait l’objet d’un examen lors de la séance du Jury du 5 avril 2024.

3. Les arguments échangés

Le plaignant conteste l’emploi de la désignation « tube mode doux » par la métropole de Lyon, pour évoquer ce tunnel, que le tunnel “modes doux” de la Croix-Rousse est emprunté par des bus Diesel. La métropole de Lyon qui est le maitre d’ouvrage du tunnel utilise aussi ce terme dans ses communications.

La Métropole de Lyon fait valoir qu’en sa qualité de collectivité territoriale, elle réalise une communication institutionnelle.

La communication publique est une communication d’intérêt général émise par les administrations, les collectivités territoriales et les organismes publics. Prévue par la loi, elle constitue un service public à part entière. Elle s’adresse à l’ensemble de la population : citoyens, habitants, contribuables, usagers des services publics. Elle touche à tous les domaines de la vie quotidienne. Elle est assurée par des professionnels qui travaillent dans les institutions ou à leur service, et contribuent au bon fonctionnement du service public. L’objectif de la communication institutionnelle est de promouvoir l’image de la collectivité dans sa globalité.

La communication institutionnelle territoriale est la communication portée par l’ensemble des collectivités locales, au rang desquelles figurent la Métropole de Lyon depuis la loi MAPTAM du 27 janvier 2014, et des organismes publics locaux. Elle tient une place particulière. Fortement attachée à des territoires et à des institutions, elle a pour mission l’information des habitants sur les services publics, l’animation du territoire et de la vie démocratique. Le développement des outils numériques de concertation et de participation a renforcé cette fonction. Elle contribue également à la promotion et à l’attractivité des territoires. C’est ce qu’on appelle le marketing territorial. La communication institutionnelle côtoie la communication électorale des élus locaux à laquelle elle évite d’être assimilée. Elle est aussi partie prenante de la communication locale portée par l’ensemble des médias, presse, radios, sites et télévisions locales. Elle se distingue surtout de la communication commerciale ou publicitaire qui cherche à communiquer sur une offre de produit ou de service bien défini.

Concernant le tunnel « tube modes doux », il a été baptisé à l’époque de son inauguration « le tube », sa fonction première étant d’être la galerie de sécurité (obligatoire réglementairement) du tunnel de la Croix Rousse. L’appellation « tube modes doux » n’est qu’un « nom d’usage » donné à une partie d’un ouvrage d’art routier, dont l’usage est d’ailleurs totalement gratuit.

La Métropole de Lyon ne réalise en conséquence aucun publicité pour attirer le public. Elle a souhaité dénommer ce nouvel ouvrage « le tube » pour le distinguer du tunnel routier, qui est interdit aux piétons et vélos. Cela permet de mieux l’identifier un tant que tel et contribuer à éviter les mésusages dans le tunnel routier. L’appellation « tubes modes doux » est d’ailleurs parfaitement entrée dans le langage commun, y compris, sur Wikipedia.

L’information contestée visait uniquement à informer l’ensemble des grands lyonnais de l’anniversaire des 10 ans de ce tube.

D’un point de vue plus technique, la moyenne des fréquentations 2023 est la suivante : piétons 203/j ; 5 à 6000 vélos/j, une 100aine de bus C6 par jour, en motorisation diesel. Par ailleurs, les valeurs des capteurs CO sur une semaine type de mars, ne dépassent pas les 5 ppm, le seuil réglementaire en termes d’exposition étant de 90 ppm pour une durée d’exposition de 15 min.

4. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle que la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP dispose :

  • au titre de la « clarté du message » (point 4) :
    • « 4.2 Si l’argument publicitaire n’est valable que dans un contexte particulier, ce dernier doit être présenté clairement.
    • 4.6. Tout argument de réduction d’impact ou d’augmentation d’efficacité doit être précis et s’accompagner de précisions chiffrées, en indiquant la base de comparaison utilisée ».
  • au titre du « vocabulaire » (point 7) :
    • « 7.1 Les termes et expressions utilisés ne doivent pas induire le public en erreur sur la nature et la portée des propriétés du produit ou des actions de l’annonceur en matière de développement durable

En premier lieu, le Jury rappelle que, selon le point 2.1. de son règlement intérieur, il lui appartient de se prononcer sur le respect des règles déontologiques par tout « message publicitaire », commercial ou non commercial, à l’exclusion de la propagande électorale et des documents de nature politique ou syndicale et que, en outre, constitue un message publicitaire tout contenu porté à la connaissance du public par une personne publique ou privée ou pour son compte, et qui a pour objet principal d’assurer la promotion d’une marque que celle-ci exploite, d’un produit ou d’un service qu’elle propose, de cette personne elle-même, notamment son image de marque auprès du public, ou d’une personne qui lui est liée, ou encore d’une action qu’elle mène ou d’une cause qu’elle défend.

Dès lors, comme la Métropole de Lyon le relève elle-même, la présentation du tunnel « tube modes doux » diffusée sous forme d’un message publié sur le réseau social X, lequel se réfère, selon sa propre argumentation, à un « nom d’usage » destiné à le distinguer du tunnel routier interdit aux piétons et vélos et qui constitue un mode de communication institutionnelle dont l’objectif est « de promouvoir l’image de la collectivité dans sa globalité » appartient bien à la catégorie des messages publicitaires sur lesquels le Jury a compétence.

En second lieu, le jury relève que la Métropole de Lyon explique que, d’après ses calculs, la moyenne des fréquentations 2023 serait la suivante : « piétons 203/j ; 5 à 6000 vélos/j, une 100aine de bus C6 par jour, en motorisation diesel (…) » et que « les valeurs des capteurs CO sur une semaine type de mars, ne dépassent pas les 5 ppm ». Il s’ensuit que le recours à l’appellation « tube modes doux » manque donc de clarté en ce qu’il est réducteur quant à la fréquentation du tunnel et de nature à induire en erreur le public quant à son utilisation qui n’est pas réservée aux seuls modes doux, comme son nom semble l’affirmer.

En conséquence de ce qui précède, le Jury est d’avis que le message en cause méconnait les dispositions déontologiques précitées.

Avis adopté le 5 avril 2024 par Mme Tomé, Présidente, M. Aparisi, Vice-Président, Mmes Boissier, Charlot et Lenain, ainsi que MM. Le Gouvello, Lucas-Boursier et Thomelin.


La Métropole de Lyon, annonceur, auquel l’avis du JDP a été communiqué le 8 avril 2024, a adressé, le 17 avril suivant, une demande de révision sur le fondement de l’article 22 du Règlement intérieur du Jury. Celle-ci a été rejetée par la décision du Réviseur de la déontologie publicitaire ci-dessous, annexée au présent avis, laquelle a été communiquée aux parties le 13 mai 2024.

DECISION DU REVISEUR DE LA DEONTOLOGIE PUBLICITAIRE

I) Instruction

Le Jury de Déontologie Publicitaire (ci-dessous « le JDP » ou « le Jury ») est saisi, le 12 décembre 2023, d’une plainte par laquelle un particulier lui demande de se prononcer sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité, diffusée en faveur de la Métropole de Lyon (ci-dessous la « Métropole » ou « l’annonceur »), en faveur du tunnel de la Croix Rousse.

La publicité en cause, diffusée sous forme de publication sur le réseau social X (ex-Twitter), montre une photographie de l’entrée du tunnel vers lequel se dirige un cycliste et à l’entrée duquel d’autres vélos et cyclistes sont stationnés.

Le texte accompagnant cette image indique notamment : « Métropole de Lyon – le tube mode doux a 10 ans !… le plus long tunnel dédié aux modes doux en Europe ».

Par un avis délibéré le 5 avril 2024, le Jury estime que le message en cause méconnait plusieurs dispositions déontologiques énoncées dans la Recommandation Développement durable de l’ARPP.

Cet avis provisoire, transmis à l’annonceur, fait l’objet de la part de ce dernier d’une demande de Révision, reçue dans les délais.

Par suite, et conformément au Règlement intérieur du JDP, le Réviseur se rapproche alors de la Présidente du Jury, sous l’autorité de laquelle a été adopté l’avis provisoire, et il procède avec elle à une analyse contradictoire des faits et arguments sur lesquels le Jury a fondé son avis.

Sur ces bases, le Réviseur est dès lors en mesure d’apporter les réponses suivantes à la demande de Révision de la Métropole.

II) Discussion

Pour demander la Révision de l’avis, l’annonceur ne soulève que le laconique moyen suivant:

« Je vous informe que la Métropole de Lyon a retiré cette publication du réseau social X : [suit une capture d’écran]
Par la présente, la Métropole de Lyon sollicite la révision de l’avis du Jury n° 1001/24, cette information n’était pas connue à la date à laquelle le Jury a rendu son avis ».

La « capture d’écran » du réseau X qui figure entre ces deux phrases indique au lecteur que : « Hum… Cette page n’existe pas. Essayez de chercher autre chose ».

Cette capture ne mentionne en rien à quelle page du réseau X elle fait référence, ni à quelle date celle-ci est « affichée » ; en outre rien dans la requête en Révision ne précise notamment la date du « retrait » de l’annonce litigieuse allégué par l’annonceur.

A) Par suite, il résulte du caractère particulièrement sommaire de la requête en Révision que celle-ci méconnait le Règlement du Jury, qui, en son article 22.1, prescrit que « le demandeur [d’un recours en Révision] doit fournir une demande argumentée, motivant cette demande de révision ».

Cette demande de la Métropole ne peut donc être qu’écartée, comme irrecevable, pour argumentation insuffisante.

B) Au surplus, la demande de l’annonceur n’établit nullement (comme on l’a vu ci-dessus) la date à laquelle il a été procédé à ce retrait de la publicité allégué.

Pour autant, il ressort du dossier que ce « retrait », même s’il n’est pas daté, est postérieur au dépôt de la plainte initiale devant le Jury, puisque :

  • aucun des mémoires de la Métropole de Lyon adressés au JDP pour le premier examen de la plainte n’y fait référence ;
  • la demande de Révision de l’annonceur elle-même confirme expressément que « cette information [du retrait de la publicité litigieuse] n’était pas connue à la date à laquelle le Jury a rendu son avis ».

Par suite, le retrait de cette publicité, dès lors qu’il est postérieur à l’adoption de l’avis provisoire (et a fortiori au dépôt de la plainte initiale), est sans influence sur la régularité de cet avis. L’argument tiré de ce retrait est donc inopérant pour demander la Révision.

C) Il va enfin de soi en outre que ce retrait de la publicité incriminée ne peut en aucune manière être considéré comme constitutif de la « survenance d’un élément nouveau » (au sens de l’article 22.1 du Règlement du JDP) ; cette « raison » (qui est de nature à fonder une demande de Révision) ne peut en effet viser qu’un élément intervenu antérieurement au dépôt de la plainte, mais pour autant non pris en compte par le Jury (alors qu’il aurait dû l’être). En l’espèce, il n’en va pas ainsi pour le retrait de l’annonce – et la Métropole ne le soutient d’ailleurs pas.

De tout ce qui précède il résulte que l’argument tiré du retrait de la publicité litigieuse que soulève l’annonceur ne peut être retenu pour demander la Révision de l’avis provisoire.

D) Aucun autre argument n’étant invoqué au soutien de la demande de Révision de la Métropole de Lyon, celle-ci ne peut qu’être rejetée.

III) Conclusion

Des analyses qui précèdent il résulte que la demande de Révision de la Métropole de Lyon, qui sera mentionnée dans la rédaction finale de l’Avis du Jury, doit être considérée comme irrecevable.

Par suite, il n’y a pas lieu de procéder à une seconde délibération de l’affaire en cause.

Il n’y a pas lieu non plus de réformer l’Avis provisoire, sauf :

  • pour y mentionner la demande de Révision comme indiqué ci-dessus,
  • pour y adjoindre en annexe la présente réponse.

Dès lors et pour conclure, l’Avis provisoire ainsi complété (pour mentionner le recours en Révision et la présente réponse) deviendra définitif et il sera publié – accompagné de la présente décision, laquelle constitue la réponse du Réviseur de la Déontologie Publicitaire à la demande de la Métropole de Lyon.

Alain GRANGE-CABANE
Réviseur de la déontologie publicitaire


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