McDONALD’S

Cinéma

Plainte non fondée

Avis publié le 10 mai 2023
McDONALD’S – 911/23
Plainte non fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • après avoir entendu le plaignant et les représentants de la société McDonald’s France, lors d’une séance tenue sous la forme d’une visioconférence,
  • et après en avoir débattu,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de déontologie publicitaire a été saisi, le 27 février 2023, d’une plainte émanant d’un particulier tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité en faveur de la société McDonald’s, pour promouvoir la vaisselle réutilisable utilisée dans ses restaurants.

Le film publicitaire en cause, diffusé au cinéma, met en scène plusieurs clients d’un restaurant McDonald’s utilisant la vaisselle réemployable. Ils sont présentés dans différentes situations de consommation correspondant à leur profil ou leurs habitudes de vie.

Le texte accompagnant ces images est : « Chez Mc Do maintenant, il y a de la vaisselle, comme au restaurant. Enfin, un restaurant où…. McDonald’s, un restaurant pas comme les autres, maintenant avec une vaisselle pas comme les autres ». Le texte incrusté à l’image au début du film indique « Conformément à la réglementation en vigueur au 1er janvier 2023 ».

Le plan de fin montre les différents contenants réutilisables, avec la signature : « Venez comme vous êtes ».

2. Les arguments échangés

Le plaignant estime que l’ensemble de la publicité laisse entendre que McDonald’s est en fait à l’initiative de cette vaisselle réutilisable. La phrase de fin « un restaurant pas comme les autres avec une vaisselle pas comme les autres » le confirme, alors que la réglementation impose dans les faits l’utilisation de vaisselle réutilisable. De plus, ses concurrents ont des vaisselles tout à fait similaires.

En s’appropriant les bénéfices d’une vaisselle réutilisable imposée par la réglementation, McDonald’s enfreint le principe de loyauté de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP, en particulier les points 5.1 et 5.2.

Cette campagne contrevient de deux manières au principe de loyauté.

Premièrement, la marque promeut ici l’adoption d’une vaisselle réutilisable, imposée par la législation par la loi « Anti-gaspillage et Economie circulaire » depuis le 1er janvier 2023. Cette mesure est décrite à la page 9 du document de référence fourni par le ministère de la transition écologique de septembre 2021. Ceci contrevient au point 5.2 de la Recommandation précédemment citée.

Deuxièmement, étant donné qu’il s’agit ici d’une mesure imposée, les concurrents de McDonald’s ont adopté des vaisselles du même type, l’attribut « pas comme les autres » pour la « vaisselle » de McDonald’s ne fait alors plus sens. Ceci contrevient au principe de loyauté tel qu’explicité par le point 5.1 de la même Recommandation.

Une telle présentation est trompeuse car elle améliore sans motif l’image de marque via l’utilisation de cette adoption faussement spontanée d’un dispositif plus respectueux des impératifs de circularité comme un argument traduisant une politique sincère de prise en compte des enjeux socio-écologiques actuels. De surcroît, elle discrédite implicite les concurrents de la marque.

Lors de la séance, le plaignant a repris en substance son argumentaire. Il a pointé l’absence de toute référence, dans la publicité, au design et à l’esthétique de la vaisselle, laquelle est uniquement présentée comme réutilisable, comme le montre le lave-vaisselle représenté.

La société Mc Donald’s a été informée, par courriel avec avis de réception du 9 mars 2023, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle fait valoir au préalable que ce film publicitaire, comme l’ensemble des campagnes créatives de McDonald’s, a été soumis pour conseil avant diffusion à l’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité par l’intermédiaire de son agence de publicité DBB Paris, conformément à l’article 6.1 du règlement intérieur de l’ARPP.

Le message publicitaire en cause vise à conforter la relation privilégiée que l’enseigne entretient avec ses clients en règle générale, y compris à l’occasion d’un changement de mode de consommation avec la vaisselle réutilisable dans le cadre réglementaire. Il vise en priorité à mettre en lumière la démarche entamée par McDonald’s depuis de nombreuses années afin de s’ancrer dans les codes de la restauration, comme en témoigne la récurrence tout au long de la publicité de l’emploi du terme « un restaurant » (employé à dix reprises).

Cette campagne valorise ainsi, de façon volontairement décalée, les nombreux changements (service à table, nouveaux décors, gamme…) mis en œuvre au fil du temps par McDonald’s pour permettre à ses clients de se restaurer de façon conviviale et confortable dans ses établissements et, de fait, conduit à présenter la nouvelle vaisselle réemployable de l’enseigne.

Cette communication est axée sur les habitudes des clients qui profitent de ces évolutions depuis plusieurs années et découvrent désormais de nouveaux contenants. Elle met ainsi en évidence la volonté de la société de s’inscrire dans les codes de la restauration avec de la vaisselle sur-mesure présentant un design spécifique sans qu’il ne soit communiqué sur un quelconque bénéfice environnemental.

La vaisselle spécifique de McDonald’s est donc présentée comme l’une des caractéristiques de l’ancrage McDonald’s dans les codes de la restauration et non comme procédant d’une démarche environnementale. Cette publicité vise ainsi à valoriser l’engagement de l’enseigne dans sa relation commerciale avec un design unique et sur-mesure pour sa clientèle, et non à mettre en exergue son caractère réemployable, terme qui n’est d’ailleurs jamais employé. En effet, la vaisselle de McDonald’s a spécialement été élaborée pour l’enseigne par l’entreprise de design Elium. Cette dernière l’utilise, sur son site internet, pour mettre en avant l’originalité de son travail (https://elium.studio/project/mcdonalds-re-use/). Par ailleurs, le design de la cup McFlurry est une marque figurative enregistrée auprès de l’Institut National de la Propriété Industrielle (l’« INPI »). Cette vaisselle spécifique permet d’inscrire encore un peu plus McDonald’s dans les codes de la restauration en la différenciant de ses concurrents qui ont fait d’autres choix de design. En raison de toutes ses spécificités, la vaisselle McDonald’s est donc bien « une vaisselle pas comme les autres ».

La publicité critiquée respecte ainsi scrupuleusement les recommandations de l’ARPP, qui a émis un avis favorable. Conformément au conseil de l’ARPP, la mention « conformément à la réglementation en vigueur au 1er janvier 2023 » apparaît dès le début de la publicité et pendant la durée durant laquelle le consommateur est informé de la mise en place d’une nouvelle vaisselle. Cette campagne porte sur d’autres éléments sans rapport avec l’obligation légale d’utiliser de la vaisselle réemployable (horaire d’ouverture, possibilité de se restaurer rapidement, par exemple), il n’était donc ni utile ni pertinent de faire apparaître plus longuement cette mention. Le message publicitaire véhiculé par ce film est conforme aux règles et principes de l’ARPP.

Lors de la séance, l’annonceur a insisté sur le fait que l’objectif du spot critiqué était de présenter l’activité des restaurants McDonald’s, notamment la vaisselle. Chaque année depuis 2016, la société conçoit une campagne mettant l’accent sur le changement des modes de consommation et utilisant les codes des restaurants traditionnels, tout en valorisant les particularités de McDonald’s. L’utilisation de la vaisselle réemployable, qui est souvent associée aux établissements de restauration traditionnels, s’inscrit dans cette logique.

La société a pointé le fait que le film n’utilisait pas le terme « vaisselle réemployable », que l’essentiel du propos ne portait pas sur la vaisselle, et que, dès le début du spot, le consommateur était informé de ce que l’utilisation de ces matériels répondait à une obligation légale. Elle a précisé que l’objet de la publicité n’était pas de communiquer sur le design de cette vaisselle, même si Mc Donald’s utilise du matériel qui lui est propre, tout en ayant fait le choix de modèles simples et assez génériques, avec des matières résistantes. En outre, l’annonceur a réfuté l’idée que la publicité en litige vanterait les vertus environnementales de sa vaisselle ou qu’elle procèderait à une comparaison avec les concurrents.

La société Médiavision expose que, en qualité de régie publicitaire, elle commercialise les espaces publicitaires de ses clients que sont les exploitants de cinéma, mais n’intervient pas sur la création et la production des créations publicitaires diffusées. Elle est toutefois vigilante quant au respect de la déontologie publicitaire des publicités diffusées sur les écrans cinématographiques dont elle a la concession publicitaire.

Concernant la publicité en cause, l’annonceur ne revendique aucune exclusivité sur l’utilisation de la « vraie » vaisselle mais énumère différentes caractéristiques sur les modes de consommation proposés dans les restaurants McDonald’s. S’agissant de la vaisselle, la publicité indique « Comme au restaurant » de façon générale, sans indiquer qu’il serait le seul à en proposer. La communication indique uniquement que la vaisselle utilisée n’est pas comme les autres, puisqu’il s’agit d’une vaisselle spécifique à McDonald’s.

En outre, s’agissant de l’utilisation en elle-même de « vraie » vaisselle, l’annonceur a pris soin d’ajouter une mention « Conformément à la réglementation en vigueur au 1er janvier 2023 » pour préciser l’origine de ce changement et éviter toute confusion dans l’esprit du public.

La publicité a vocation à informer le consommateur de ce changement comme l’y autorise la Recommandation « Développement durable » : « informer de l’existence d’une réglementation, afin d’en promouvoir la mise en œuvre ou d’inciter le public à y souscrire. »

En tout état de cause, la diffusion de cette campagne est terminée depuis le 28 février et aucune nouvelle diffusion n’est prévue.

3. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle que la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP dispose, au titre de l’exigence de « loyauté » (point 5) que :

« 5.1. La publicité ne doit pas attribuer à un produit ou à un annonceur l’exclusivité de vertus au regard du développement durable alors que celles des concurrents seraient analogues ou similaires ».

5.2 Un annonceur ne peut se prévaloir de certaines actions à titre exclusif alors que celles-ci seraient imposées à tous par la réglementation en vigueur.

Ce principe n’exclut pas que, dans un but pédagogique, une publicité puisse informer de l’existence d’une réglementation, afin d’en promouvoir la mise en œuvre ou d’inciter le public à y souscrire. »

Le Jury relève que le film publicitaire critiqué fait la promotion des restaurants de l’enseigne Mc Donald’s dont il valorise différentes caractéristiques, notamment la vaisselle utilisée. Le propos d’ouverture est ainsi : « Chez McDo maintenant, il y a de la vaisselle, comme au restaurant », qui vient à l’appui d’une séquence dans laquelle l’employée d’un restaurant de la marque utilise un lave-vaisselle. Apparaît en incrustation le texte : « Conformément à la réglementation en vigueur au 1er janvier 2023 », qui fait référence à l’obligation faite aux établissements de restauration, par l’article L. 541-15-10 du code de l’environnement, dans sa rédaction issue de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, de servir les repas et boissons dans des gobelets, assiettes et récipients réemployables et avec des couverts réemployables. Après avoir mis en évidence différents atouts de ces établissements (possibilité de se restaurer à toute heure, très vite ou très lentement, de partager les plats, de manger avec les doigts, de venir nombreux, de faire du toboggan…), le film se conclut par ces propos : « McDonald’s, un restaurant pas comme les autres, maintenant avec une vaisselle pas comme les autres ». Différents plats et desserts sont présentés dans des récipients manifestement réemployables.

Le Jury estime que l’expression « une vaisselle pas comme les autres », sans explicitation de la ou des caractéristiques différenciantes ainsi visées, introduit une ambiguïté quant aux particularités de la vaisselle que l’annonceur entend valoriser, par comparaison avec celle de ses concurrents. Si ce dernier met en avant, dans ses observations devant le Jury, le design particulier de cette vaisselle, conçu par une entreprise spécialisée, la publicité elle-même ne l’évoque à aucun moment, sinon par la simple représentation des contenants, et l’annonceur a au contraire indiqué, lors de la séance, qu’il n’entendait pas mettre en exergue, dans cette publicité, l’esthétique de sa vaisselle, dont il a privilégié la robustesse et la simplicité.

Le Jury observe toutefois que la publicité rappelle expressément, dès le début, que l’utilisation de la vaisselle réemployable répond à une obligation légale. Le consommateur moyen n’est donc pas spontanément enclin à interpréter l’allégation « une vaisselle pas comme les autres » comme se rapportant à son caractère réutilisable. En outre, cette expression, de même que celle qui la précède (« un restaurant pas comme les autres »), présente un caractère très générique et n’est pas en elle-même trompeuse dès lors que la vaisselle utilisée par McDonald’s, qui est d’ailleurs pour partie protégée au titre des droits de propriété intellectuelle, est propre à cette enseigne et, d’ailleurs, différente de celle de son premier concurrent. Il en résulte que cette présentation n’attribue pas à cet annonceur l’exclusivité de l’emploi de vaisselle réutilisable. Par suite, le Jury est d’avis que cette publicité ne méconnaît pas le point 5 de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP.

Avis adopté le 7 avril 2023 par M. Lallet, Président, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mmes Lenain, Boissier et Charlot, MM. Depincé, Le Gouvello et Lucas-Boursier.


Publicité McDonald’s