LEAGRANIOUOFF

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Plainte fondée

Avis publié le 6 juin 2023
LEAGRANIOUOFF – 918/23
Plainte fondée

 Le Jury de Déontologie Publicitaire,  

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • et après en avoir débattu dans les conditions prévues par l’article 13 du règlement intérieur,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 19 mars 2023, d’une plainte émanant d’un particulier, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur de publications émanant de l’influenceuse dont le pseudonyme est Léa Graniou.

Les publications en cause, diffusées sur le compte Instagram de l’influenceuse « @leagraniouoff », mettent en scène la jeune femme montrant un produit de la marque Iren Shizen appartenant à la société Ikeda Group.

2. Les arguments échangés

Le plaignant considère que la « story » de l’influenceuse ne fait pas mention d’un partenariat rémunéré, alors qu’elle fait la promotion d’une marque avec pour seule mention le hashtag de la marque « #irenshizen » mais reprenant la même construction de post qu’une autre influenceuse, notamment une série de trois emoji « cœur » de couleurs différentes chacun associé à un sérum de la marque.

Un faisceau d’indices concordant semble confirmer que la marque « IREN Shizen France » opère de manière répétée de manière contraire aux règles déontologiques de l’ARPP, en raison notamment de l’émoji « cœur bleu » associé sur les deux publications des influenceuses au sérum « Hydratant » et de l’émoji « cœur violet » associé sur les deux publications d’influenceuses au sérum « Anti imperfections ».

Selon le plaignant, cette association d’éléments (liste de 3 sérums + 3 emojis cœurs + des couleurs d’émojis associées à des produits identiques) ne saurait être fortuite ou issue d’une pure coïncidence.

Lea Graniou, interrogée en amont sur l’existence d’une collaboration commerciale entre elle et la marque Iren Shizen, transmet un document attestant du caractère bénévole de cette collaboration. Il s’agit d’un « Contrat de marketing d’influence » entre elle et la société Ikeda Group.

Elle explique avoir échangé avec la marque le 9 février, afin de collaborer sur leur type de sérum. Il lui a été proposé de choisir un lot de 3 sérums à essayer et tester. Elle ajoute n’avoir aucune contrainte dans le choix de la photo ou dans le choix des mots à utiliser concernant la publication des contenus.

La société Ikeda Group a également été informée, par courriel et par courrier recommandé avec accusé de réception du 3 avril 2023 que cette affaire ferait l’objet d’un examen dans le cadre de la procédure simplifiée prévue à l’article 13 du règlement intérieur du Jury.

Elle n’a pas présenté d’observations.

3. L’analyse du Jury

3.1. Sur les règles applicables aux communications des influenceurs et la compétence du Jury

Le Jury rappelle que la Recommandation « Communication publicitaire numérique » prévoit en son point 1.1 « L’identification de la publicité » :

« La publicité doit pouvoir être clairement identifiée comme telle, et ce quelle que soit la forme sous laquelle elle se présente.

Cette identification peut se faire par tout moyen nettement perceptible permettant de rendre d’emblée non équivoque pour le public la nature publicitaire du message.

On distinguera deux cas de figure :

a/ cas où le caractère publicitaire du message est manifeste, que ce soit par le recours à un format publicitaire usuellement utilisé par la profession ou bien par le contenu du message. Il n’est alors pas nécessaire de prévoir d’éléments supplémentaires d’identification.

b/ cas où le caractère publicitaire du message ne se manifeste pas clairement :

b1 – Il est alors recommandé d’adjoindre une indication explicite permettant d’identifier la publicité comme telle. Lorsque le message est diffusé au milieu d’informations ou d’articles rédactionnels, il doit être présenté de manière à ce que son caractère publicitaire apparaisse instantanément. Cette indication doit être lisible ou audible, et intelligible.

b2 – Lorsque le mode de communication employé est, par nature, incompatible avec une identification instantanée du caractère publicitaire, cette identification sera mise en œuvre conformément aux recommandations décrites dans la grille d’interprétation figurant en annexe.

Les présentations publicitaires de nature à créer une confusion chez le public quant à la nature du message reçu sont à proscrire (ex. : par imitation du graphisme de messages non publicitaires émanant de logiciels installés sur un ordinateur). »

La fiche pratique n° 3 distingue clairement deux hypothèses.

D’une part, une communication réalisée par un influenceur présente un caractère publicitaire lorsque les critères suivants sont réunis de manière cumulative :

  • le contenu est réalisé dans le cadre d’engagements réciproques ; la prise de parole de l’influenceur faisant l’objet d’un paiement ou de toute autre contrepartie telle que, par exemple, la remise de produits ou de services à son bénéfice ;
  • l’annonceur ou ses représentants exercent une validation du contenu avant sa publication ;
  • le contenu de la prise de parole de l’influenceur vise à la promotion du produit ou du service (discours promotionnel, présentation verbale ou visuelle à visée promotionnelle…).

Dans ce cas, l’ensemble des dispositions déontologiques de l’ARPP s’appliquent à une telle communication publicitaire, qui doit faire apparaître l’existence de la collaboration commerciale entre l’influenceur et l’annonceur. Le Jury est compétent pour vérifier, à la demande d’un plaignant, la conformité de cette publicité aux règles déontologiques en vigueur.

D’autre part, lorsque tout ou partie des trois critères énumérés précédemment ne sont pas remplis, la communication n’est pas une publicité mais l’existence d’une collaboration commerciale entre l’influenceur et un annonceur pour la publication d’un contenu doit néanmoins être portée à la connaissance du public par l’influenceur (point 1. du A). A moins que cette identification soit manifeste, la Recommandation prévoit d’adjoindre une indication explicite permettant de l’identifier comme telle, de manière que ce caractère apparaisse instantanément. Cette identification peut se faire par tout moyen (dans le discours, dans le texte accompagnant le contenu, au moyen d’une mention dans la vidéo…) dès lors qu’elle est portée à la connaissance du public quel que soit son moyen d’accès au contenu.

Il résulte de l’article 2 du règlement intérieur du Jury que, par exception au principe selon lequel le Jury n’est compétent que pour connaître des messages publicitaires, il est également compétent pour « examiner l’identification des communications des influenceurs lorsqu’elles s’inscrivent dans le cadre d’une collaboration commerciale avec un annonceur pour la publication d’un contenu, qu’elles présentent ou non un caractère publicitaire au sens de la fiche pratique n° 3 de la Recommandation « Communication Publicitaire Numérique » de l’ARPP ». En revanche, il ne lui appartient pas de confronter une communication d’influenceur qui ne revêt pas de caractère publicitaire aux autres règles déontologiques mentionnées à l’article 2 de son règlement intérieur.

3.2. Sur la communication visée par la plainte

Le Jury relève qu’en l’espèce, le texte diffusé vante les mérites de l’association de trois sérums de la marque Iren Shizen. La communication litigieuse réalisée par « Leagraniouoff », influenceuse, consiste en une promotion de produits de cette marque, dans le cadre d’un  contrat de marketing d’influence qui comporte des engagements à la charge de l’influenceuse, notamment l’obligation de « réaliser un post ou réel de l’affilié avec les produits », comportant certaines mentions, et celle de ne pas citer de marques concurrentes.

Le Jury en conclut que les communications en cause s’inscrivent dans le cadre d’une collaboration commerciale qui n’est ni manifeste ni explicitée par les communications.

Il relève de surcroît que l’une des communications est reprise sur le compte Instagram Irenshizenfr. Ainsi, cette image et les textes associés pour les trois sérums en cause doivent être considérés comme validés ou, à tout le moins, endossés par la marque et forment un message publicitaire au sens des dispositions précitées.

Par conséquent, le Jury est d’avis que la communication en cause méconnaît aussi bien le point 1.1. de la Recommandation « Communication publicitaire numérique » de l’ARPP que l’exigence d’identification résultant de la fiche pratique n° 3 annexée à cette Recommandation.

Avis adopté le 12 mai 2023 par M. Lallet, Président, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mmes Lenain, Boissier et Charlot, ainsi que MM. Le Gouvello, Lucas-Boursier et Thomelin.


Communications @LEAGRANIOUOFF