JAM – Affichage – Plainte partiellement fondée

Avis publié le 7 juin 2022
JAM – 839/22
Plainte partiellement fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • et après en avoir débattu dans les conditions prévues par l’article 13 du règlement intérieur,

rend l’avis suivant :

1. Les plaintes

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 18 mars 2022, d’une plainte émanant d’un particulier, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une campagne publicitaire en faveur de la société JAM, pour promouvoir son robot conversationnel.

La campagne en cause se compose de trois visuels publicitaires, diffusés en affichage :

  • Sur l’un des visuels apparaît le logo de la marque ainsi que le texte : « Retrouvez-nous sur Instagram» ;
  • Un autre visuel indique : « Le chiffre du jour – 62% des jeunes ne sont pas sûrs de passer leur vie dans leur pays d’origine», accompagné du logo JAM.
  • Le dernier visuel mentionne : « Le chiffre du jour – 16% savent qu’il n’y resteront pas », accompagné du logo JAM ;

2. Les arguments échangés

Le plaignant relève que deux des panneaux portent la même mention « chiffre du jour » pour des contenus différents.

Ces « chiffres du jour » sont présentés comme des sondages. Toutefois, les publicités ne font apparaître aucune mention des informations pertinentes comme le périmètre, la période de consultation ou l’échantillon. Le troisième panneau ne donne pas d’autre indication qu’une incitation à s’inscrire à un réseau social.

Cette démarche publicitaire ne respecte donc pas la déontologie, la diffusion des résultats d’un sondage devant contenir les éléments permettant d’en apprécier les fondements, sans être obligé d’entrer dans une démarche de consommation, quelle que soit sa forme.

Par ailleurs, on peut s’interroger sur des libellés qui peuvent faire croire au grand public que ces informations sont issues d’une population représentative, ce qui, en l’occurrence ne paraît pas être le cas, notamment si le champ n’est constitué que de personnes devant faire une démarche d’inscription pour y participer.

En réponse aux observations présentées par les professionnels en cause, le plaignant a produit d’autres publicités du même annonceur s’exposant selon lui aux mêmes griefs.

La société Jam et la société d’affichage Clear Channel ont été informées, par courriel recommandé avec avis de réception du 6 avril 2022, de la plainte dont copie leur ont été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elles ont été également informées que cette affaire ferait l’objet d’un examen dans le cadre de la procédure simplifiée prévue à l’article 13 du règlement intérieur du Jury.

La société Jam admet que l’absence des informations relatives à l’étude relève d’un oubli.

La société Clear Channel fait valoir que l’annonceur, JAM est une filiale de June Marketing qui est membre de Syntec Etudes (syndicat professionnel français des études de Marché et d’Opinion) et, à ce titre, est très attentif à l’élaboration des sondages d’opinion.

La méthodologie des études Jam est éprouvée et sérieuse. Ainsi, les questions sont posées à travers Jam, le chatbot Messenger discutant avec 700 000 jeunes en France. Les personnes questionnées peuvent répondre à travers le chat directement soit en choisissant un des items proposés, soit en réponse libre pour les questions ouvertes. Seules les réponses des répondants correspondant aux tranches d’âge déterminées dans l’échantillon sont prises en compte.

Le panel réalisé est représentatif en âge et en genre de la population des 18-25 ans en France selon les quotas de l’INSEE 2020.

Plus spécifiquement, pour la question « Tu comptes passer ta vie dans ton pays d’origine ? » posée le 26 novembre 2021, il y a eu 2013 répondants au total. Toutefois, n’a été retenu dans le cadre de ce sondage que l’échantillon représentatif en âge et en genre, soit 662 répondants de 18 à 25 ans sur le territoire français, selon la méthode des quotas de l’INSEE 2020.

3. L’analyse du Jury

Le Jury indique à titre liminaire que le présent avis porte exclusivement sur les trois affichages publicitaires mentionnés dans la plainte initiale, les autres visuels produits l’ayant été ultérieurement, en guise d’illustrations des griefs soulevés par le plaignant.

Le Jury rappelle que la Recommandation « Résultats d’étude de marché ou d’enquête » de l’ARPP dispose :

  • En son préambule que : « La publicité qui utilise des résultats d’étude de marché ou d’enquête, visant à mesurer un comportement, une attitude ou une opinion doit, sous quelque forme que ce soit, respecter les règles déontologiques suivantes. (…)
  • En son point 2. IDENTIFICATION que : « Doivent être précisés dans la publicité : / le nom de l’organisme ayant effectué l’étude ou l’enquête, / la date de réalisation, elle peut être complétée par la taille de l’échantillon ».
  • En son point 4 que : « (…) Aucune présentation de résultats chiffrés ne doit laisser supposer que le résultat énoncé concerne une zone géographique ou un échantillon autre que ceux qui ont été l’objet de l’enquête ou étude».

Il résulte en outre d’un principe général dont s’inspire l’article 5 du code « Publicité et marketing » de la Chambre de commerce internationale (dit code ICC) que la publicité doit être véridique et ne peut être trompeuse, et qu’elle ne doit contenir aucune affirmation ou assertion qui soit de nature, directement ou indirectement, par voie d’omissions, d’ambiguïtés ou d’exagérations, à induire en erreur le public.

Le Jury relève que la campagne publicitaire en cause fait la promotion d’un robot conversationnel (chatbot), dénommé Jam, qui propose des conversations courtes aux utilisateurs sur des sujets d’actualité ainsi qu’un service de sondages conversationnels automatisés. Cette campagne illustre ce dernier service par deux « chiffres du jour » issus d’une étude réalisée par le robot auprès des utilisateurs de 18-25 ans, sur la base de la question : « Tu comptes passer ta vie dans ton pays d’origine ? ».

Le Jury constate que deux des trois affichages qui composent cette campagne utilisent des « résultats d’étude de marché ou d’enquête visant à mesurer un comportement, une attitude ou une opinion » au sens de la Recommandation précitée et qu’ils entrent ainsi dans son champ d’application.

En premier lieu, si l’on comprend que les études ont été réalisées par l’annonceur JAM lui-même, ces publicités ne comportent aucune date de réalisation, en méconnaissance du point 2 de la Recommandation. En revanche, le Jury rappelle que cette Recommandation ne prescrit aucune autre mention obligatoire. En particulier, il résulte de ses termes mêmes que la mention de la taille de l’échantillon n’est que facultative. Il ne saurait donc être fait grief à cette campagne de ne pas mentionner cette information.

En deuxième lieu, le Jury estime que la référence aux « jeunes », sans la moindre précision quant à la tranche d’âge des personnes interrogées, ne permet pas de comprendre quel est le périmètre exact de l’étude et, en particulier, d’exclure les adolescents, notamment les 16-18 ans. Or il ressort des explications fournies par la société Clear Channel que l’échantillon utilisé ne porte que sur des personnes de 18 à 25 ans. Dans ces conditions, cette publicité comporte des résultats chiffrés qui laissent supposer, par l’emploi du terme « jeunes », que le résultat énoncé concerne un échantillon plus large que celui qui a été l’objet de l’enquête, en méconnaissance du point 4 de la même Recommandation. Une telle présentation est de nature à induire en erreur le public quant à la portée des résultats affichés.

En troisième et dernier lieu, le Jury constate que la réponse de Clear Channel selon laquelle le sondage en cause a été effectué auprès d’un échantillon représentatif, selon la méthode des quotas de l’INSEE 2020, n’est pas contestée par le plaignant. Dans ces conditions, il estime que cette campagne publicitaire ne méconnaît pas le principe de véracité des messages publicitaires.

En conséquence de ce qui précède, le Jury est d’avis que les visuels faisant état des résultats du sondage méconnaissent, dans les limites rappelées ci-dessus, les règles déontologiques précitées.

Avis adopté le 6 mai 2022 par M. Lallet, Président, Mme Gargoullaud, Vice-Président, Mmes Lenain, Boissier et Charlot, ainsi que MM. Depincé, Le Gouvello, Lucas-Boursier et Thomelin.

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