INVERS – Internet – Plainte fondée

Avis publié le 4 janvier 2022
INVERS – 799/21
Plainte fondée

 Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • et après en avoir débattu dans les conditions prévues par l’article 13 du règlement intérieur,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 28 octobre 2021, d’une plainte émanant d’un particulier, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité diffusée sur la page Facebook de la société Invers, pour promouvoir son offre de produits d’alimentation pour chiens et chats.

La page Facebook de la société montre un chien en train de manger des croquettes dans une écuelle.

Le texte accompagnant cette image est « Des croquettes qui font du bien à votre chien & à la planète, tout simplement. Découvrez Invers ».

2. Les arguments échangés

Le plaignant relève que cette publicité pour des croquettes à base d’insectes vante un effet positif sur la planète alors que la fabrication d’aliments pour animaux de compagnie à base d’insectes n’est pas dépourvue d’impact négatif.

D’autre part, le plaignant relève qu’aucune écuelle d’eau n’est présente sur la photographie alors que la publicité met en scène un chien en train de manger.

La société Invers a été informée, par courriel avec accusé de réception du 8 novembre 2021, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle a été également informée que cette affaire ferait l’objet d’un examen dans le cadre de la procédure simplifiée prévue à l’article 13 du règlement intérieur du Jury.

La société Invers présente en premier lieu ses excuses quant à la diffusion de cette publicité.

Elle fait valoir qu’elle a effectivement lancé, sur une période de quatre semaines, une campagne de test de messages et publicités sponsorisées sur Facebook pour mettre en avant ses croquettes pour chiens et chats.

L’entreprise se lance tout juste sur ce type de canal et malgré ses rappels à la vigilance sur le vocabulaire utilisé, cette publicité a été diffusée sans son filtre.

La société comprend que le message « des croquettes qui font du bien à votre chien et à la planète, tout simplement » peut être perçu comme excessif. Elle est consciente de l’impact de l’activité humaine sur l’environnement et travaille chaque jour à limiter cet impact environnemental.

Invers, qui trouve son origine dans la volonté de ses fondateurs d’inverser le cours des choses, soutient et développe une nouvelle filière innovante de production d’insectes pour l’alimentation animale.  Son métier est de produire au sein de son territoire un insecte, le ver de farine, et de le valoriser dans l’alimentation animale en mettant l’agriculteur au cœur de notre modèle. Pour cela, la société a développé, depuis sa création, des ateliers d’élevage à la ferme pour faire grandir ces insectes. Elle fournit aux agriculteurs la solution d’élevage (l’atelier) et les micro larves d’insectes. Les agriculteurs poursuivent le cycle de croissance de l’insecte au stade larvaire pour l’amener à maturité, puis la société les récolte pour les valoriser.

Aujourd’hui, la valorisation s’effectue à travers ses insectes déshydratés qui sont le premier ingrédient de ses formules. L’objectif est celui d’une alimentation plus durable pour les filières avicoles et piscicole de la région. Lorsque le modèle sera validé sur le territoire, Invers souhaite le développer et l’implanter sur les territoires où ce type d’élevage est possible et où les filières utilisatrices sont présentes. Le modèle de la société permet de valoriser des déchets céréaliers peu ou mal utilisés, via l’insecte – qui produit des protéines de bonne qualité et des acides gras (oméga 3, 6 et 6). Au cours de sa croissance, l’insecte produit des déjections ou guano, éligible en agriculture biologique pour amender les sols des agriculteurs et ainsi réalimenter le cycle.

En outre, la société s’efforce de tracer toutes les matières premières de ses formules pour chien et chat afin d’avoir 80% de ses ingrédients produits en Auvergne. Enfin, la société a cherché des packaging biosourcés à plus de 65% et recyclable.

Invers estime possible d’inverser la dynamique de destruction des écosystèmes en remplaçant les farines de protéines non durables utilisées en alimentation animale, par des vers de farine dont la production épargne les milieux naturels sensibles. Cette production dans des ateliers à la ferme, via un réseau d’agriculteurs/éleveurs interconnectés, plus résilient et respectueux du vivant, permet d’inverser la concentration des moyens de production actuels dans de grosses usines centralisatrices. Cela permet également d’inverser l’usage de coproduits de l’industrie agroalimentaire en leur offrant une seconde vie en tant que matière première de l’alimentation des insectes. La solution de production à la ferme Invers permet également d’inverser le dépérissement des campagnes et la spirale négative de la crise agricole en recréant de la valeur ajoutée au cœur du territoire, en générant un revenu complémentaire pérenne pour les agriculteurs.

Enfin, concernant le second reproche tenant à l’absence d’écuelle d’eau alors que la publicité met en scène un chien en train de manger, la société reconnaît le manquement et s’engage à ne pas le réitérer.

3. L’analyse du Jury

3.1. Sur la méconnaissance alléguée de la Recommandation « Alimentation pour animaux familiers »

Le Jury rappelle que la Recommandation « Alimentation pour animaux familiers » de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP), dispose, dans son point 5. MODALITES DE CONSOMMATION, que : « La consommation d’aliments en croquettes doit être associée à l’absorption d’eau par l’animal / Dans cette hypothèse, si une scène de consommation effective est représentée dans le message publicitaire, un récipient d’eau devra être représenté. Il peut être remplacé par une information explicite, rappelant la nécessité de laisser une écuelle d’eau à disposition de l’animal ».

En l’espèce, le Jury relève que la publicité litigieuse montre un chien en train de manger des croquettes dans une gamelle, sans représenter un récipient d’eau ni comporter d’information explicite rappelant la nécessité de laisser une écuelle d’eau à la disposition de l’animal. Par suite, et ainsi que le reconnaît la société Invers, cette publicité est contraire à cette règle déontologique.

3.2. Sur la méconnaissance alléguée de la Recommandation « Développement durable »

Le Jury rappelle que cette Recommandation prévoit :

  • en son point 3.1. que « Le message publicitaire doit exprimer avec justesse l’action de l’annonceur ou les propriétés de ses produits, en adéquation avec les éléments justificatifs transmissibles» ;
  • en son point 3.2. que : « Le message publicitaire doit être proportionné à l’ampleur des actions menées par l’annonceur en matière de développement durable ainsi qu’aux propriétés du produit dont il fait la promotion».
  • et au b/ de son point 3.3. que «Le message publicitaire ne saurait suggérer indûment une absence totale d’impact négatif ».

En l’espèce, le Jury relève que la publicité critiquée allègue que les croquettes commercialisées par l’annonceur « font du bien à la planète, tout simplement ». En dépit des efforts que la société indique consentir pour limiter son empreinte écologique et de l’intérêt que peut présenter à cet égard le recours à des insectes pour la fabrication d’aliments pour animaux familiers, le Jury considère qu’une telle allégation laisse entendre que l’achat de ces produits permettrait non seulement de préserver l’environnement, mais aussi, au-delà, d’améliorer son état, ce qui n’est, à l’évidence, pas le cas. Une telle formulation présente un caractère disproportionné, ainsi que le reconnaît l’annonceur, et elle est de nature à suggérer indûment une absence totale d’impact négatif voire un impact positif.

Il résulte de ce qui précède que cette publicité méconnaît les règles déontologiques précitées de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP.

En conséquence de tout ce qui précède, le Jury est d’avis que la plainte est fondée. Il prend note de l’engagement de l’annonceur de veiller à un meilleur respect de la déontologie publicitaire à l’avenir, par des contrôles appropriés.

Avis adopté le 10 décembre 2021 par M. Lallet, Président, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mmes Boissier, Charlot et Lenain, ainsi que MM. Depincé, Le Gouvello, Lucas-Boursier et Thomelin.

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