CLIPPER – Catalogue – Internet – Plainte partiellement fondée

Avis publié le 14 août 2020
CLIPPER – 665/20
Plainte partiellement fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire, 

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • après avoir entendu les représentants de la société Flamagas et de l’association France Nature Environnement lors d’une séance tenue sous la forme d’une visioconférence,
  • et après en avoir débattu,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 28 mai 2020, d’une plainte émanant de l’association France Nature Environnement, afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur de publicités diffusées sur le catalogue, sur les sites et les réseaux sociaux de la société Flamagas, pour promouvoir ses briquets de marque Clipper.

Le catalogue publicitaire en cause montre l’image d’une planète plantée d’arbres associée aux textes « Clipper protège la planète », « Clipper, le briquet réutilisable, rechargeable gaz et pierre, évite la prolifération des déchets plastique » et « Clipper contribue aussi à la reforestation de la planète ».

Le site Internet www.clipper.eu, qui s’ouvre sur une page portant la mention « Clipper protects the planet », propose un accès « Clipper France » dont l’onglet « écologique » permet d’accéder au texte suivant « Chez Clipper, nous sommes sensibles à l’impact environnemental, pour cela, nous offrons un produit durable qui incite la réutilisation et aide à réduire la contamination. Prenons soins de notre planète ! » et « Plus écologique de recharger que de jeter. Tous les ans, plus de mille millions de briquets jetables sont vendus, cela consommant un grand nombre de ressources naturelles. Clipper est le seul à être l‘authentique briquet rechargeable donnant l’option de ne pas être jetable et de le substituer par un autre ».

Le site renvoie également vers la page Facebook de Clipper France qui contient une vidéo publicitaire de trente secondes dont les plans successifs montrent des images de pollution assorties des textes « UNE PLANETE DEGRADEE PAR LE REJET MASSIF DE DECHETS PLASTIQUES, COMMENT L’EVITER » puis celles de forêts et de paysages naturels  associées aux mentions « EN UTILISANT DES PRODUITS NON JETABLES, COMME CLIPPER CLASSIC […] C’EST LA SOLUTION SUR UN MARCHE MASSIVEMENT JETABLE […] CLIPPER CONTRIBUE AUSSI A LA REFORESTATION DE LA PLANETE, EN PLANTANT DES MILLIERS D’ARBRES PAR AN » et se concluant sur le texte « PROTEGEZ LA PLANETE ».

2. Les arguments échangés

L’association plaignante soutient que le fait que le briquet Clipper puisse être rechargé en gaz et en pierre ne suffit pas à démontrer que l’acte d’achat d’un tel briquet « protège la planète ».

Selon l’association France Nature Environnement, il en est de même de l’assertion suivant laquelle « Clipper contribue aussi à la reforestation de la planète » qui laisserait croire que l’acte d’achat d’un briquet a un lien direct avec la reforestation.

L’association indique que le catalogue contient également en pied de page, la représentation symbolique d’une feuille entourée de la mention « Environmental Friendly Way », aux côtés de références à des normes ISO. Ce logo ne fait référence à aucun organisme certificateur et ne confère aucune garantie de conformité à une réglementation protectrice de l’environnement. Ce logo est trompeur dès lors qu’inséré aux côtés des normes ISO : il peut donner l’impression que les briquets Clipper bénéficient également d’un label de certification environnementale. Le catalogue de briquets de la marque Clipper indique en dernière page de couverture les coordonnées de trois sites Internet. Le premier de ces sites est celui de l’importateur et distributeur en France, la Société Pipière de Paris : www.laspp.com. Le deuxième site est celui de la marque Clipper, le troisième est celui de la société Flamagas, le fabricant, qui coédite le catalogue avec l’importateur : v.flamagas.com.

L’association précise que le site Internet www.clipper.eu propose dès sa page d’accueil, la publicité en langue anglaise sous le titre « Clipper protects the planet ». Un onglet permet également de la télécharger au format PDF en anglais et en espagnol. Depuis la page d’accueil du site, un onglet « CLIPPER World » propose l’accès à des sites par pays. Le site consacré à Clipper France http://clipperbriguets.fr/ contient un onglet intitulé « A propos de nous » puis « nos valeurs » (http://clipperbriguets.fr/nos-valeurs). Il est notamment indiqué que « Clipper est une marque pionnière de haute qualité qui prend très au sérieux la qualité de son produit ». Les valeurs sont déclinées en trois propositions « Unique, Sécurité, Ecologique ». Le lien « écologique » ouvre une nouvelle page qui indique « Chez Clipper, nous sommes sensibles à l’impact environnemental, pour cela, nous offrons un produit durable qui incite la réutilisation et aide à réduire la contamination. Prenons soins de notre planète ! » et « Plus écologique de recharger que de jeter. Tous les ans, plus de mille millions de briquets jetables sont vendus, cela consommant un grand nombre de ressources naturelles. CLIPPER est le seul à être l‘authentique briquet rechargeable donnant l’option de ne pas être jetable et de le substituer par un autre ».

L’association France Nature Environnement signale que ce site propose également un lien vers la page Facebook de Clipper France sur laquelle on accède à une vidéo publicitaire de 30 secondes. La vidéo se compose de plans successifs accrocheurs sur lesquels sont superposées des phrases « choc » en gros caractères. La simple description détaillée de ces plans rend l’opération de « greenwashing » évidente selon le plaignant :

– Images de camion déversant des déchets plastiques dans une décharge à ciel ouvert, cheminées d’usines crachant des fumées puis une canalisation déversant des eaux souillées dans une rivière et enfin des déchets plastiques flottant sur l’océan accompagnées du texte en majuscule et en gras : « UNE PLANETE DEGRADEE », « PAR LE REJET MASSIF DE DECHETS PLASTIQUES »;

– Image de tapis roulant de tri couvert de déchets directement suivie de paysages de montagne, accompagnées du texte : « COMMENT L’EVITER » ;

– Image de forêt vierge éclairée par un rayon de soleil accompagnée du texte « EN UTILISANT DES PRODUITS NON JETABLES », « COMME CLIPPER CLASSIC » ;

– Image de forêt dense à perte de vue sur laquelle est superposée un dessin de briquet duquel jaillit une feuille verte en guise de flamme, assortie du texte « LE BRIQUET REUTILISABLE RECHARGEABLE GAZ » ;

– Image de forêt sur laquelle est superposée un dessin de briquet dont la pierre est retirée puis replacée et dans lequel sont produites des bulles montant comme pour s’échapper du briquet (que l’on associe à l’oxygène des arbres apparaissant en transparence), assortie du texte «ET PIERRE » ;

– Paysage de champs verdoyants, assortie du texte « C’EST LA SOLUTION SUR UN MARCHE MASSIVEMENT JETABLE » ;

– Gros plan sur une main qui apporte une goutte d’eau à une jeune pousse sortant de terre, assortie du texte « CLIPPER CONTRIBUE AUSSI A LA REFORESTATION DE LA PLANETE » ;

– Image d’une forêt, assortie du texte « EN PLANTANT DES MILLIERS D’ARBRES PAR AN » ;

– Image d’une forêt à moitié dévastée suivie d’un nouveau gros plan sur une main qui plante une jeune pousse qui devient ensuite un jeune arbuste ;

– Même image de forêt éclairée par un rayon de soleil que précédemment, accompagnée du texte « PROTEGEZ LA PLANETE » suivie d’un paysage de forêt sur lequel est superposé le logo « CLIPPER THE REUSABLE LIGHTER ».

Selon France Nature Environnement, la page Facebook de Clipper France, comme le catalogue, associent de façon systématique la possibilité de réutiliser ses briquets à la sauvegarde de l’environnement. Il s’agit, d’une part, d’un dessin de briquet associé à l’image d’une feuille verte représentant une flamme (que l’on retrouve sur le catalogue, les PLV et même les emballages des briquets), d’autre part, du logo qui associe le terme « jetable » a une feuille de couleur verte, présente sur toutes ses PLV et emballages de produits commercialisés en France.

L’association en déduit que la communication de la marque Clipper cherche ainsi à associer la possibilité qui est offerte de réutiliser son briquet en rechargeant la pierre et le gaz qu’il contient et la protection de l’environnement qui en résulterait, sans toutefois jamais fournir la moindre indication précise concernant cet impact supposé.

France Nature Environnement estime donc que les publicités et énonciations litigieuses contreviennent de manière évidente aux principes déontologiques établis par l’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité (ARPP) et par ceux établis par la Chambre de Commerce Internationale (CCI).

Enfin, l’association relève que sur la page de son site Internet (Clipper.eu), la marque Clipper se présente comme une marque qui se soucie particulièrement de l’environnement. Dans la rubrique consacrée aux valeurs de la marque, trois propriétés sont mises en avant pour caractériser les briquets : « uniques, sûrs et écologiques ».

S’agissant du critère « écologique », la marque Clipper le justifie en arguant du fait que chaque année, des milliards de briquets jetables sont vendus qui consomment un nombre important de ressources naturelles. Elle ajoute que « CLIPPER est le seul briquet véritablement rechargeable, le seul briquet en plastique réutilisable. Il vaut toujours mieux recharger que jeter ».

L’association plaignante relève qu’aucune de ces assertions n’est étayée d’une démonstration chiffrée et précise comme le prévoit l’article 3.6 de la recommandation thématique développement durable. En particulier, la société Flamagas affirme que son briquet est le seul « véritable briquet rechargeable » et le « seul briquet réutilisable » mais ne fournit aucun élément chiffré permettant de vérifier la réalité de cette assertion. Ainsi, selon l’association plaignante :

  • Aucune information précise n’est ainsi fournie concernant la réutilisation « effective » des briquets plastiques vendus sous la marque Clipper, ni combien de fois ils peuvent être rechargés en respectant les normes techniques et de sûreté existantes.
  • Aucune indication n’est donnée sur les pollutions générées par le processus de recharges lui-même (fabrication, transport et élimination des recharges de gaz et de pierres), ni sur le devenir des briquets plastiques en fin de cycle.
  • Dans sa vidéo promotionnelle, Flamagas, introduit le concept du « briquet non jetable » censé répondre aux rejets massifs de plastique dans l’environnement. Or, d’un strict point de vue juridique, aucun produit ne peut revendiquer son statut « non jetable » par destination.

Ainsi, selon France Nature Environnement, il convenait de rapporter la preuve du caractère effectif de la réutilisation vantée par Flamagas dans ses publicités en accord avec les dispositions de l’article 1.4 et 3.6 de la recommandation développement durable de 1’ARPP.

L’association plaignante ajoute que, sur son site, la marque (Clipper.eu) prétend avoir un impact social et environnemental positif, planter des milliers d’arbres tous les ans ce qui favoriserait à la fois la biodiversité et la subsistance soutenable des générations futures et apporter le bien-être et la qualité de vie à ses voisins avec les forêts « Clipper ».

De même, selon elle, les publicités présentes sur le catalogue distribué en France, sur la page Facebook de Clipper France reprennent les termes de cette communication environnementale sans fournir au consommateur le moindre élément objectif permettant de se faire une idée précise du bienfait environnemental apporté par le briquet en question.

La plaignante considère qu’une allégation telle que celle qui apparaît en ouverture de la vidéo publicitaire « protège l’environnement », constitue à l’évidence une allégation floue et trompeuse au sens de l’article 2.1 de la recommandation « Développement Durable » de 1’ARPP qui requiert justesse et justificatifs. De telles allégations sont également contraires à l’article Dl du code de communications de la Chambre de commerce internationale. La CCI rappelle dans cet article que les allégations environnementales générales doivent être évitées sauf à ce qu’elles puissent être qualifiées à l’aide d’un niveau de preuve très élevé.

Pour la plaignante, les allégations générales telles que « protège l’environnement », « Clipper protects the planet » et « environmental friendly way », contreviennent au principe essentiel suivant lequel la publicité doit être véridique et non trompeuse.

Par ailleurs, elle soutient que ces allégations sont également contraires à l’article 3.6 de la recommandation thématique développement durable de l’ARPP en ce que tout argument de réduction d’impact ou d’augmentation d’efficacité doit « être précis et s’accompagner de précisions chiffrées ».

La communication publicitaire de Clipper attribue des qualités environnementales très importantes à ses briquets, puisqu’elle n’hésite pas à les présenter comme étant LA solution pour combattre les rejets massifs de matières plastiques qui dégradent la planète.

L’association considère cette communication outrancière en ce qu’elle utilise tous les outils permettant de créer un univers vert : logos comportant une feuille sur tous les supports, visuels de planète caricaturaux, vidéos culpabilisantes, mises en scène des actions de reforestation.

Les éléments de la nature sont donc utilisés, selon elle, sans lien direct et vérifiables entre l’objet vendu et l’avantage déclaré, en contradiction avec l’article 7.4 de la recommandation thématique développement durable de 1’ARPP qui vise toute association faite entre un produit qui peut avoir des impacts environnementaux négatifs et un élément de la nature.

En outre, elle estime qu’en exagérant les attributs environnementaux de ses briquets et en présentant une amélioration marginale (la possibilité de remplacer le gaz et la pierre) comme un gain majeur susceptible d’avoir un impact sur la planète, Clipper a induit en erreur le consommateur et a contrevenu à l’article D4 du code de communications de la Chambre de commerce internationale.

Selon France Nature Environnement, ces allégations environnementales concernant certaines propriétés du produit ne tiennent pas compte de l’ensemble de son cycle de vie. Il ne peut pas être affirmé aussi simplement qu’un briquet rechargeable est moins polluant car même si le gaz et la pierre des briquet Clipper peuvent être remplacés, le processus de sourcing des matières premières, les procédés de fabrication, les modes de transport et la recyclabilité sont des paramètres tout aussi importants à pondérer. En outre, le fait que les briquets soient rechargeables ne signifie pas que les consommateurs les réutilisent (compte tenu des habitudes de consommation et du faible prix d’un briquet). En effet, un briquet même rechargeable n’a pas une durée de vie illimitée, il peut supporter un certain nombre de recharge (en gaz et pierre) mais le corps du briquet en plastique sera in fine jeté par le consommateur (du fait de son usure ou de la disparition de son décor).

Par ailleurs, le décor des briquets est un argument marketing important pour Clipper qui développe des collections variées et éphémères incitant les consommateurs au rachat (plusieurs consommateurs présentent ainsi leur collection de briquet Clipper sur leur page de réseaux sociaux).

L’association considère que Clipper induit également le consommateur en erreur, lorsque la marque Clipper annonce qu’elle « contribue à la reforestation de ta planète, en plantant des milliers d’arbres tous les ans ».

A cet égard, l’impact social et environnemental positif mis en avant par la marque Clipper permettrait de créer un lien abusif entre les actions générales de la société Flamagas en matière de développement durable et les propriétés propres à ses briquets. Selon France Nature Environnement, le fait d’associer dans une même vidéo publicitaire un briquet plastique et les actions de reforestation volontaires engagées par la société Flamagas alors qu’il n’existe aucun lien direct entre ces deux actions est de nature à induire le public en erreur sur la réalité des actions de l’annonceur ainsi que sur les propriétés de ses produits en matière de développement durable. Elle en déduit que ce lien est contraire au point 4.3 de la recommandation thématique développement durable de l’ARPP.

L’association plaignante soutient encore qu’à ces manquements, s’ajoute le fait que la marque communique également à l’aide de logos et pictogrammes environnementaux qui sont de nature à suggérer sans fondement une approbation officielle ou une certification par un tiers, contraire à l’article D5 du code de communications de la Chambre de commerce internationale.

La société Flamagas a été informée, par courriel avec accusé de réception du                                   8 juin 2020, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle fait valoir qu’elle prend cette plainte très au sérieux, son engagement pour la protection de l’environnement étant particulièrement important pour la marque et constituant l’un des piliers de son développement depuis de nombreuses années et pour les années à venir.

Le fait que Clipper commercialise un briquet réutilisable est loin d’être anecdotique, mais constitue une véritable rupture sur le marché du briquet en plastique, lequel est très massivement jetable (plus de 90% sur un marché de 13 milliards de briquets en plastique vendus par an).

En premier lieu, la société Flamagas considère que, conformément à l’article 3 de son Règlement Intérieur, le Jury de Déontologie Publicitaire n’est pas compétent pour rendre un avis sur les messages figurant sur le catalogue de la société, ni sur la vidéo publiée sur la page Facebook de Clipper France dès lors que celles-ci ont été émises plus de deux mois avant la date de la plainte et que ces messages ne constituent pas des publicités à destination d’un public de consommateur.

En tout état de cause, la société Flamagas considère que les reproches du plaignant ne sont pas justifiés. En effet, les publicités en question ne sont pas susceptibles de contrevenir aux règles déontologiques de l’ARPP et de la Chambre de Commerce Internationale dans la mesure où les allégations qu’elles comportent sont justifiées et ne sont pas susceptibles de tromper le public.

Pour apprécier l’impact de ces publicités, il convient selon la société de tenir compte du fait que (i) la publicité figurant dans le catalogue n’est pas destinée à un public de consommateurs mais à des professionnels de la vente de tabac et d’accessoires liés au tabac et que (ii) la vidéo publiée sur le compte Facebook de la marque n’était accessible qu’aux abonnées du compte Facebook de Clipper France. En premier lieu, le plaignant reproche à Flamagas de se présenter comme une marque se souciant de l’environnement et aux valeurs « écologiques ». Le plaignant reproche notamment aux communications publicitaires de la marque Clipper de faire un lien entre les briquets qu’elle commercialise et la protection de l’environnement.

Selon la société, ces affirmations sont parfaitement justifiées et peuvent être largement étayées. En effet, la société Flamagas relève qu’elle commercialise l’un des seuls briquets en plastique véritablement réutilisable, c’est-à-dire dont toutes les pièces susceptibles de s’user peuvent être remplacées. Cette technologie offre ainsi aux utilisateurs la possibilité de réutiliser un seul et même briquet pendant plusieurs dizaines d’années, au lieu de le jeter pour le remplacer par de nouveaux briquets. Dans un marché à plus de 90% jetable, la société Flamagas contribue donc inévitablement, à son échelle, à la réduction des déchets plastiques, qui constitue l’un des combats principaux pour l’écologie.

La société Flamagas a d’ailleurs décidé de réduire progressivement sa production de briquets jetables (représentant actuellement 10% de leurs ventes seulement), afin de l’interrompre complètement à compter de 2023. C’est dans cette optique du « tout réutilisable » qu’elle a lancé ces campagnes publicitaires militant pour la protection de l’environnement et incitant les consommateurs à favoriser les produits réutilisables.

Les allégations de la société Flamagas sont donc réelles et étayées et ne sont pas susceptibles d’induire en erreur le public sur la réalité des actions de la société et les propriétés de ses produits, de telle sorte qu’elles sont conformes avec les règles de l’ARPP et de la CCI.

S’agissant de la contribution de la marque à la reforestation, la société Flamagas indique, d’abord, être parfaitement en mesure d’étayer ces allégations. Elle a en effet signé deux contrats (l’un en 2018 et l’autre en 2020) avec l’association Areas Verdes, association de lutte contre le changement climatique et la désertisation à travers la création de nouvelles forêts et champs boisés. Ces contrats représentent plusieurs milliers d’arbres plantés par la société Flamagas.

Ensuite, la société Flamagas soutient qu’elle ne fait aucun lien, ni dans son catalogue ni dans sa vidéo ni sur son site internet, entre ses actions pour la reforestation et les briquets de marque Clipper. Dans la publicité figurant sur son catalogue, la société Flamagas indique seulement « Clipper, le briquet réutilisable, rechargeable gaz et pierre, évite la prolifération des déchets plastique » et, dans un encadré distinct « Clipper contribue aussi à la reforestation de la planète ». Il s’agit donc, selon elle, de deux propositions séparées, qui distinguent sans ambiguïté d’un côté le briquet et de l’autre la marque. En outre, l’utilisation du terme « aussi » démontre bien qu’il s’agit d’une action distincte et accessoire, de sorte qu’il ne saurait y avoir de confusion dans l’esprit du public.

Selon la société, ces allégations sont encore plus claires dans la vidéo publiée sur le compte Facebook de la marque, dans laquelle il est indiqué « Clipper contribue aussi à la reforestation de la planète … en plantant des milliers d’arbres par an ». Ainsi, le public ne saurait penser qu’il existe un lien entre l’achat d’un briquet et la reforestation.

Par conséquent, les publicités de la société Flamagas évoquant sa contribution à la reforestation sont parfaitement conformes avec les règles déontologiques de l’ARPP et de la CCI.

Pour l’ensemble de ces raisons, la société Flamagas demande au jury de déontologie publicitaire :

  • En premier lieu, de se déclarer incompétent pour donner son avis sur le message figurant dans le catalogue à destination des professionnels buralistes de la marque Clipper et la vidéo postée sur la page Facebook France de la marque Clipper ;
  • En tout état de cause, de constater que les publicités incriminées par le plaignant ne présentent aucun manquement aux règles déontologiques édictées par l’ARPP et la CCI.

3. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle qu’aux termes des dispositions de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP :

Dans son point 1 (Véracité des actions) que : « 1.4 L’annonceur doit être en mesure de justifier les arguments ayant trait au développement durable au moyen d’éléments sérieux, objectifs et vérifiables au moment de la publicité.

Pour tout message reposant sur une allégation scientifique, l’annonceur doit être en mesure de présenter l’origine des résultats annoncés et la méthodologie ayant servi de base de calcul.

 (…) » ;

 Dans son point 2 (Proportionnalité des messages) que : « 2.1. Le message publicitaire doit exprimer avec justesse l’action de l’annonceur ou les propriétés de ses produits, en adéquation avec les éléments justificatifs dont il dispose. / La réalité de ces actions ou propriétés peut s’apprécier au regard des différents piliers du développement durable, des différents types d’impacts possibles et des différentes étapes de la vie du produit. »

Dans son point 3 (Clarté du message) que : « 3.6 Tout argument de réduction d’impact ou d’augmentation d’efficacité doit être précis et s’accompagner de précisions chiffrées, en indiquant la base de comparaison utilisée. » ;

Dans son point 4 (Loyauté) que « 4. 3 La publicité ne doit pas créer de lien abusif entre les actions générales d’un annonceur en matière de développement durable et les propriétés propres à un produit. »

Et dans son point 7 (Présentation visuelle ou sonore) que : « 7.4 Lorsque la publicité utilise un argument écologique, l’assimilation directe d’un produit présentant un impact négatif pour l’environnement à un élément naturel (animal, végétal…) est à exclure. »

Aux termes de l’article D1 « Présentation honnête et véridique » du code ICC :

« La communication commerciale doit être conçue de manière à ne pas profiter abusivement de l’intérêt des consommateurs pour l’environnement ou exploiter leur éventuel manque de connaissance sur l’environnement.

La communication commerciale ne doit contenir aucune affirmation ou aucun traitement visuel de nature à induire en erreur les consommateurs de quelque manière que ce soit quant aux aspects ou aux avantages environnementaux de produits ou quant à des actions entreprises par le professionnel en faveur de l’environnement. Parmi ces pratiques figurent en particulier l’exagération d’attributs environnementaux, en présentant une amélioration marginale comme un gain majeur, par exemple, ou l’utilisation trompeuse de statistiques (…).

Toute allégation environnementale doit être pertinente pour le produit spécifique faisant l’objet de la promotion et se rapporter uniquement à des aspects qui existent déjà ou sont susceptibles d’être réalisés au cours de la vie du produit, y compris son élimination. Il convient d’établir clairement ce à quoi l’allégation se rapporte, par exemple le produit ou son emballage, ou l’un de leurs ingrédients spécifiques. (…)

Une allégation floue ou non spécifique sur une qualité environnementale, qui peut donner lieu à plusieurs significations pour les consommateurs, doit uniquement être formulée si elle est applicable, sans explicitation, à toutes les circonstances raisonnablement prévisibles. Dans le cas contraire, une allégation environnementale générale doit être, soit qualifiée, soit évitée. En particulier, une allégation telle que « respectueux de l’environnement », « sûr pour l’environnement », « vert », « durable », « sobre en carbone » ou autres allégations impliquant qu’un produit ou une activité exerce un impact nul — ou un impact positif seulement — sur l’environnement, ne doit pas être utilisée sans explicitation, excepté s’il existe un niveau de preuve très élevé. Aussi longtemps qu’il n’existe aucune méthode définitive généralement acceptée pour mesurer la durabilité ou confirmer son accomplissement, aucune allégation ne doit être formulée sur sa réalisation. »

Le Jury relève que la campagne publicitaire visée par la plainte se décline sur trois supports :

D’une part, un catalogue publicitaire montre l’image d’une planète plantée d’arbres associée aux textes « Clipper protège la planète », « Clipper, le briquet réutilisable, rechargeable gaz et pierre, évite la prolifération des déchets plastique » et « Clipper contribue aussi à la reforestation de la planète ».

D’autre part, le site Internet en cause, www.clipper.eu s’ouvre sur une page portant la mention « Clipper protects the planet » et propose un accès « France » dont l’onglet « écologique » permet d’accéder au texte suivant « Chez Clipper, nous sommes sensibles à l’impact environnemental, pour cela, nous offrons un produit durable qui incite la réutilisation et aide à réduire la contamination. Prenons soins de notre planète ! » et « Plus écologique de recharger que de jeter. Tous les ans, plus de mille millions de briquets jetables sont vendus, cela consommant un grand nombre de ressources naturelles. Clipper est le seul à être l‘authentique briquet rechargeable donnant l’option de ne pas être jetable et de le substituer par un autre ».

Enfin, le site Internet renvoie également vers la page Facebook de Clipper France qui contient une vidéo publicitaire de trente seconde dont les plans successifs montrent des images de pollution assorties des textes « UNE PLANETE DEGRADEE PAR LE REJET MASSIF DE DECHETS PLASTIQUES, COMMENT L’EVITER » puis celles de forêts et de paysages naturels  associées aux mentions « EN UTILISANT DES PRODUITS NON JETABLES, COMME CLIPPER CLASSIC […] C’EST LA SOLUTION SUR UN MARCHE MASSIVEMENT JETABLE […] CLIPPER CONTRIBUE AUSSI A LA REFORESTATION DE LA PLANETE, EN PLANTANT DES MILLIERS D’ARBRES PAR AN » et se concluant sur le texte « PROTEGEZ LA PLANETE ».

En premier lieu, le Jury rappelle qu’aux termes de l’article 3 de son règlement intérieur, il « intervient à la suite de plaintes portant sur des publicités effectivement diffusées, au cours des deux mois précédant la réception de la plainte, sur le territoire français, que ces publicités présentent ou non un caractère commercial, à l’exception du traitement des plaintes transfrontalières. / Le délai de deux mois court à compter de la date de la première diffusion de la publicité et en cas de nouvelle diffusion par ou pour le compte de l’annonceur. »

Or le Jury constate que, si les éléments publicitaires du site Internet et du réseau Facebook étaient diffusés à la date de la plainte, l’association plaignante n’apporte aucun élément permettant d’établir que la diffusion du catalogue en cause serait intervenue moins de deux mois avant la réception de la plainte. Dans ces conditions, les critiques portant sur les éléments issus du catalogue ne sont pas recevables.

En deuxième lieu, le Jury retient que les éléments de promotion de la marque de briquets Clipper sur le site Internet précité et sur les réseaux sociaux auxquels renvoie ce site constituent des publicités commerciales de sorte qu’il est compétent pour se prononcer sur leur contenu.

En troisième lieu, le Jury relève la marque Clipper utilise des arguments ayant trait au développement durable tels que « Plus écologique de recharger que de jeter. Tous les ans, plus de mille millions de briquets jetables sont vendus, cela consommant un grand nombre de ressources naturelles. Clipper est le seul à être l‘authentique briquet rechargeable », « c’est la solution sur un marché massivement jetable », « Clipper contribue à la reforestation de la planète en plantant des milliers d’arbres par an » et surtout par la mention « protégez la planète ».

Sans remettre en question ni la volonté de la société Flamagas de réduire progressivement sa production de briquets jetables et d’inciter les consommateurs à favoriser les produits réutilisables ni la légitimité de son action en faveur de la reforestation, le Jury considère que le message publicitaire, qui n’est accompagné d’aucune précision chiffrée, notamment sur la réduction des impacts environnementaux, constitue une allégation imprécise qui n’exprime pas avec justesse l’action de l’annonceur ou les propriétés de ses produits, en adéquation avec les éléments justificatifs dont il dispose.

L’association du texte de la vidéo à des images de forêt primaire, qui accentue à cet égard la disproportion du message « protégez la planète », est de nature à créer un lien abusif entre les actions générales d’un annonceur en matière de développement durable et les propriétés propres du produit promu.

En conséquence de ce qui précède, le Jury est d’avis que la campagne de publicité en cause, telle que diffusée sur les réseaux sociaux et le site Internet et à l’exception des éléments du catalogue publicitaire, méconnaît les points précités de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP et de l’article D1 du code ICC.

Avis adopté le 3 juillet 2020 par Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, substituant la présidente empêchée, Mmes Drecq et Lenain, MM. Depincé, Lacan, Leers et Lucas-Boursier.

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