CAMPY CAMPER – Internet – Plaintes non fondées 

Avis publié le 26 juillet 2021
CAMPY CAMPER – 753/21
Plaintes non fondées 

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • et après en avoir débattu dans les conditions prévues par l’article 12 du règlement intérieur,

rend l’avis suivant :

1. Les plaintes

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, les 14 et 19 avril 2021, de deux plaintes émanant de particuliers, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur de publicités de la société Campy Camper, pour promouvoir son offre de location et aménagement de vans.

Les publicités en cause, diffusées sur Internet, sous forme de publication sur le réseau social Facebook, représentent :

  • pour l’une, une femme en train de prendre une douche à l’arrière d’un van stationné sur une prairie. Elle se tient debout et est seulement vêtue d’une culotte. Ses seins sont nus et ses tétons sont masqués par une tache blanche. Cette image est accompagnée du texte : « Le bonheur, quel qu’il soit, apporte air, lumière et liberté de mouvement… ».
  • pour l’autre, un gros plan des fesses d’une femme portant un culotte sur laquelle est inscrite la marque Campy Camper. Cette image est accompagnée du texte : « Pourquoi tirer des lignes droites quand la vie est faite de courbes ?… ».

2. Les arguments échangés

Les plaignants considèrent que ces publicités portent atteinte à l’image de la personne et sexualisent le corps de la femme.

L’une des plaignantes a complété sa plainte par l’envoi d’une tribune co-signée par plusieurs collectifs situés dans le Pays-Basque dénonçant cette campagne, publiée dans le journal Médiabask le 4 mai 2021.

La société Campy Camper a été informée, par courriel avec accusé de réception du 5 mai 2021, des plaintes dont copies lui ont été transmises et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle a été également informée que cette affaire ferait l’objet d’un examen dans le cadre de la procédure simplifiée prévue à l’article 12 du règlement intérieur du Jury.

Elle fait valoir que la société Campy Camper est une très petite société locale qui aménage et qui loue des camping-cars de petite taille et à caractère rétro. Même s’il s’agit de son activité principale, elle commercialise également des produits dits dérivés siglés « Campy Camper » dont des sous-vêtements féminins mis en vente en ligne sur son site dédié www.campycamper.shop, site de vente de textiles, sous-vêtements et produits « outdoor » homme/femme/enfant.

Les comptes des réseaux sociaux de la société sont tenus par les deux associés dont les valeurs correspondent à une philosophie de liberté. Le but de voyager en van est souvent celui de se soustraire aux contraintes des modes de vie classiques et imposées par la société.

Les rares photos montrant des corps d’hommes et de femmes sont prises pour souligner cette soif de liberté et ont un caractère informatif. Elles ne sont pas là pour marchander le corps des femmes. Les plaintes font donc un mauvais procès à la société Campy Camper de sexisme dans son utilisation des réseaux sociaux alors que son cœur de cible sont des trentenaires qui ont cette nostalgie des années 70-80 et qui aiment vivre au plus proche de la nature.

En outre, les vans sont munis d’équipements plus sommaires que ceux des camping-cars plus classiques et les douches solaires ne peuvent se prendre qu’à l’extérieur. La démonstration de l’emploi de ces douches a été faite par deux photos, dont l’une par un homme et l’autre par une femme. Celle qui a été utilisée pour la saisine du Jury a été sortie de son contexte.

Par ailleurs, les premières photos qui ont été présentées par le communiqué de presse, comme utilisées par Campy Camper sont des photos qui avaient été retirées dès 2015 par les nouveaux dirigeants de la société car eux-mêmes les trouvaient inadaptées.

La société estime que la campagne de dénigrement dont elle fait l’objet, qui n’a été précédée d’aucune prise de contact directe avec elle, relève davantage d’une intention de nuire à une petite entreprise dont la volonté n’a jamais été de porter atteinte aux droits de la femme.

L’annonceur se prévaut enfin du principe constitutionnel d’égalité des citoyens devant la loi et précise qu’il est soumis au droit et non à la morale. Or aucune règle juridique n’interdit aux dirigeants de la société d’utiliser des photos pour témoigner d’une philosophie de vie dès lors que celles-ci ne violent pas de droits fondamentaux tels que le droit à l’image. Tel n’est pas le cas en l’espèce.

3. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle à titre liminaire, en écho aux observations présentées par la société Campy Camper, qu’il est une instance associée de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP), dépourvue de caractère juridictionnel. Il ne lui appartient en aucun cas d’apprécier la légalité des communications publicitaires contestées. Conformément aux articles 2 et 3 de son règlement intérieur, son rôle se limite à apprécier le respect, par les publicités visées, des règles déontologiques que la profession s’est prescrite. Une publicité peut ainsi enfreindre une règle déontologique, comme une Recommandation de l’ARPP, sans pour autant être illégale. Le Jury tient à ajouter qu’en tout état de cause, le traitement des plaintes s’effectue dans le plein respect des exigences d’indépendance et d’impartialité, et que, à l’instar des règles déontologiques applicables, son contrôle déontologique est strictement le même quelle que soit l’identité de l’annonceur, de sorte que le principe d’égalité ne saurait en tout état de cause être méconnu par son intervention.

Le Jury rappelle que la Recommandation « Image et respect de la personne » de l’ARPP dispose que : « La publicité ne doit pas être susceptible de heurter la sensibilité, choquer ou même provoquer le public en propageant une image de la personne humaine portant atteinte à sa dignité et à la décence ».

Le point 2 de cette Recommandation prévoit également que :

« 2. Stéréotypes.

2.1 La publicité ne doit pas réduire les personnes humaines, et en particulier les femmes, à la fonction d’objet

2.2. La publicité ne doit pas cautionner l’idée de l’infériorité d’une personne en raison de son sexe, de son origine, de son appartenance à un groupe social, de son orientation ou identité sexuelle ou de tout autre critère de discrimination, notamment en réduisant son rôle et ses responsabilités dans la société.

2.3 La publicité ne peut valoriser, même indirectement, des sentiments ou des comportements d’exclusion, d’intolérance de sexisme. »

Le Jury relève que la première publicité mise en cause représente une femme en culotte, en train de se laver les cheveux à l’aide d’un flexible de douche relié à une réserve d’eau se trouvant à l’arrière d’un van commercialisé par l’annonceur. Ses tétons sont masqués par des taches blanches. Le texte est une citation du philosophe Friedrich Nietzsche : « Le bonheur, quel qu’il soit, apporte air, lumière et liberté de mouvement ».

Le Jury relève que ce visuel illustre l’utilisation du dispositif de douche embarqué qui peut équiper les vans et campings cars loués par les clients auprès de l’annonceur. Il existe donc un lien direct entre le recours à la nudité et au corps de la femme et le service promu. En outre, la scène apparaît réaliste et la pose adoptée par le modèle ne revêt pas un caractère particulièrement provoquant. Enfin, la nudité, inhérente à la prise d’une douche, est tempérée par le port de la culotte et l’occultation des tétons de la femme représentée. Dans ces conditions, et compte tenu du rapport à la nature inhérent à la pratique du caravaning ou du camping, cette publicité n’apparaît pas contraire aux règles déontologiques précitées.

Le Jury constate que la seconde publicité représente partiellement une femme de dos, avec un gros plan sur son postérieur revêtu d’une culotte où figure le nom « Campy Camper » et la représentation stylisée d’un camping-car. Il ressort des observations produites par l’annonceur, corroborées par son site internet, que ce dernier commercialise non seulement des véhicules de tourisme, mais aussi des textiles, notamment la culotte représentée. Si tant l’image que le texte (« Pourquoi tirer des lignes droites quand la vie est faîte de courbes ? ») insistent sur les fesses du modèle représenté, le Jury est d’avis que le lien entre cette publicité, d’une part, et le produit promu ainsi que les tenues vestimentaires classiquement associées à la pratique du camping ou du caravaning, d’autre part, peut justifier une telle mise en scène, qui ne recourt à la nudité que de manière limitée et cohérente avec les produits et services commercialisés. Par suite, le Jury estime que cette seconde publicité ne méconnaît pas les règles déontologiques précitées.

Il résulte de ce qui précède que les plaintes ne sont pas fondées aux yeux du Jury.

Avis adopté le 4 juin 2021 par M. Lallet, Président, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mmes Charlot et Lenain, ainsi que MM. Depincé, Le Gouvello, Lucas-Boursier et Thomelin.

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