Décision publiée le 22.10.2010
Plaintes fondées
Le Jury de Déontologie Publicitaire,
– après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
– après avoir entendu successivement les représentants de l’ARPP et de l’agence de communication représentant également la société annonceur, présents à la séance ;
– et après en avoir délibéré, hors la présence de l’ARPP et des parties,
rend la décision suivante :
1.Les faits
Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi par deux plaintes de particuliers les 6 et 7 août 2009, portant sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’un spot publicitaire, diffusé à la télévision, en faveur des bonbons de la société annonceur. Ce spot diffusé au mois de juillet et d’août 2009, montre notamment un enfant qui manipule une arme de jeu et qui met en joue sa mère laquelle reçoit une flèche au milieu du front. Celle-ci, d’abord effrayée, retrouve le sourire grâce aux bonbons de l’annonceur.
2.La procédure
Les plaintes ont été communiquées à l’annonceur, à l’agence de communication et au syndicat représentant les chaînes de télévision par lettre RAR du 21 septembre 2009, les informant de la date de la séance.
3.Les arguments des parties :
Les plaignants considèrent que le film critiqué, dans lequel un enfant jouant au cow-boy, vise le visage de sa mère avec un pistolet à fléchettes et lui tire une flèche sur le front, est représentatif d’un comportement dangereux, le jouet utilisé présentant selon eux un caractère de dangerosité évident et ayant déjà causé des accidents domestiques.
L’ARPP précise que s’agissant d’un spot télévisuel, elle a eu à examiner cette publicité avant sa diffusion. Elle rappelle qu’après avoir recommandé, dans un premier temps, de modifier ou supprimer cette scène, elle a délivré in fine à ce spot un avis favorable, sans restriction de diffusion, pour tenir compte des contraintes économiques et de délai, liées à la programmation de la campagne de son adhérent, l’agence de communication.
Le syndicat représentant les chaînes de télévision, rappelle que les avis rendus par l’ARPP, dans un premier temps « à modifier », du 13 juillet 2009 avaient sensibilisé les régies publicitaires aux dispositions des recommandations « Enfant » et « Sécurité ». Les avis de diffusion « favorables » du 15 juillet 2009 ont ensuite conduit les régies à diffuser cette campagne à partir de cet été.
Le Syndicat fait remarquer que, depuis cette date et à ce jour, le CSA n’est pas intervenu auprès des diffuseurs au regard de l’application du décret n°92-280 du 27 mars 1992 qui impose notamment à son article 4 que « La publicité doit être exempte de toute scène de violence et de toute incitation à des comportements préjudiciables à la sécurité des personnes… ».
C’est pourquoi, tout en confirmant l’avis de l’ARPP, le syndicat représentant les chaînes de télévision s’en remet, comme l’annonceur et l’agence, à la sagesse du Jury.
L’annonceur n’a pas présenté d’arguments mais a précisé, dans son courrier adressé au secrétariat, avoir pris contact avec l’agence de communication qui a réalisé ce spot et s’associer à sa défense.
L’agence de communication explique qu’elle fait partie des agences qui réalisent le plus de films publicitaires pour la télévision et qu’elle est donc particulièrement attentive aux préconisations de l’ARPP avant toute réalisation de ces films. En l’espèce, les procédures de contrôle interne ont été défectueuses et la préconisation de suppression ou de modification de l’ARPP n’a pas été prise en compte en temps utile. Lorsque ce manquement a été décelé, il aurait été trop tard pour procéder aux modifications nécessaires, ce qui explique également la position alors prise par l’ARPP. L’agence fait néanmoins valoir que ce film aurait, au cours des pré-tests réalisés auprès de mères de famille, emporté leur pleine adhésion. Selon l’agence, cette campagne n’est plus diffusée mais sera reprise à la fin de l’année et au mois de janvier; elle ne comportera plus alors les scènes incriminées et sera soumise pour avis préalable à l’ARPP.
4.Les motifs de la décision du Jury
Il résulte des dispositions déontologiques et notamment de la Recommandation « Enfant » que « La publicité s’adressant aux enfants doit présenter les produits dans un environnement et des situations répondant aux règles de sécurité prévues par les normes en vigueur. » et que « La publicité ne doit pas donner l’impression qu’un comportement dangereux ou imprudent est acceptable et peut être reproduit, dans quelque situation que ce soit, y compris dans le cadre de jeux. »
D’autre part, il résulte de la Recommandation « Sécurité » que : « La publicité, sous quelque forme que ce soit, ne doit pas porter atteinte à la sécurité des personnes et des biens et doit donc respecter les règles déontologiques suivantes : Sauf justification d’ordre éducatif ou social, la publicité ne doit comporter aucune présentation visuelle ni aucune description de pratiques dangereuses ou de situation où la sécurité et la santé ne sont pas respectées”
Une prudence particulière s’impose aux publicités utilisant des enfants ou des adolescents ou s’adressant à eux. »
Le Jury relève que la publicité en cause, bien que construite selon un scénario mettant en évidence une scène de jeu, n’est pas dispensée du respect des règles précitées.
Le Jury considère que ce film publicitaire, qui met en scène un enfant qui vise sa mère avec un pistolet ou une carabine et qui l’atteint d’une flèche au front, ne respecte pas, alors même qu’il s’agirait d’une flèche équipée d’un embout de mousse, les deux recommandations citées ci-dessus.
Le Jury a pris note des engagements de l’agence de communication en ce qui concerne les modifications qui seront apportées à cette campagne publicitaire lorsqu’elle fera l’objet d’une rediffusion.
5.La décision du Jury
– Les plaintes sont fondées.
– Le Jury demande au directeur général de l’ARPP de veiller à ce que cette publicité ne soit plus diffusée en l’état et, si cela était le cas, d’en ordonner immédiatement la cessation de la diffusion.
– La décision du Jury sera communiquée aux plaignants, à l’annonceur, à l’agence de communication, au syndicat représentant les chaînes de télévision et au directeur général de l’ARPP; elle sera diffusée sur le site internet du JDP.
Délibéré le vendredi 16 octobre 2009 par Mme Hagelsteen, présidente, Mme Drecq et Mrs Benhaïm, Carlo, Lacan et Leers.