Avis JDP n°253/13 – PLACEMENTS FINANCIERS – Plainte non fondée

Décision publiée le 26.06.2013
Plainte non fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

– Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,

– après avoir entendu les représentants de la société plaignante et de l’annonceur,

– et, après en avoir délibéré, hors la présence des parties,

rend la décision suivante :

1.Les faits

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 11 avril 2013, d’une plainte émanant de la société IG Markets afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur de deux publicités en faveur d’une société concurrente, qui propose aux particuliers des services de « trading » sur le marché des devises et des matières premières, diffusées sur un site internet.

Ces publicités se présentent sous la forme de bannières qui mettent notamment en avant, pour la première publicité, l’accroche : « Tradez les CFD, sans recotation » et pour la seconde, « Il est facile de trader l’Euro… ».

2.Les arguments des parties

La société IG Markets, plaignante, énonce que ces publicités ne respectent pas la fiche de doctrine « Publicité des produits financiers – Publicité pour les produits financiers permettant de s’exposer sur le Forex, les indices boursiers, le cours des matières premières avec un effet de levier », notamment sur le caractère équilibré de la publicité, ni les dispositions de la Recommandation « Mentions et renvois » de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité.

Elle fait en particulier valoir que les messages publicitaires en cause tendent à laisser penser aux consommateurs qu’ils peuvent aisément enregistrer des gains (« il est facile de trader… »), que le risque qu’ils courent est limité et que leurs pertes ne peuvent excéder leur investissement initial, ce qui n’est pas le cas comme en atteste le site Internet de la société.

Les avertissements qui apparaissent sur les bannières quant aux risques encourus ne sont pas suffisamment précis au regard de l’ampleur de ces derniers.

La société annonceur fait valoir que chacune des publicités mises en cause comporte un avertissement lisible sur le risque « important » ou « significatif » de pertes. Le consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, ne peut qu’associer le « trading » à un risque financier important, dont l’ampleur n’est en rien occultée ou minimisée.

La société ajoute qu’elle fait figurer sur son site Internet, à la page d’ouverture d’un compte de démonstration gratuit, un message d’avertissement ainsi libellé : « Avertissement sur les risques : le trading sur devises et CFD comporte un haut niveau de risque. De ce fait, vous pouvez gagner ou perdre plusieurs fois le montant de votre capital initial ». Pour autant, elle précise que les risques associés à des investissements sur le Forex et sur le marché des CFD sont pris en compte et traités par elle afin que ses clients ne puissent pas perdre plus que le montant total de leurs avoirs en compte (dépôt et gains éventuels), par l’intermédiaire des fonctionnalités de sécurisation de plateformes de trading, d’une part, et de la garantie contractuelle de limitation des pertes qui figure dans le contrat entre l’annonceur et ses clients – et accessible à l’ensemble de ses prospects avant l’ouverture d’un compte – d’autre part.

La société fait enfin observer qu’il n’est en rien mensonger ou déloyal d’affirmer que l’activité de trading est aisément accessible, puisque toute personne peut s’y livrer, et que ses messages ne consistent pas à insinuer qu’il serait aisé de réaliser des gains dans le cadre de cette activité.

3.Les motifs de la décision du Jury

 Le Jury rappelle qu’aux termes du point 2-1-2 de la fiche de doctrine « Publicité des produits financiers » de l’ARPP :

« 2-1-2 Clarté, loyauté et véracité de la publicité (…)

  1. b) Équilibre de la publicité – « Le contenu de la publicité et des promesses annoncées doit être véridique et répondre au principe de loyauté.

 En ce sens, l’ensemble de la publicité doit être équilibré entre, d’une part, la présentation des performances (gains, rendements y compris sous forme visuelle ou graphique) du produit ou service et, d’autre part, les risques inhérents à la souscription de ce dernier.

 Cet équilibre de la publicité, recommandé par divers régulateurs européens, implique la présence, dans toute publicité, quel que soit le support de diffusion utilisé, d’une information claire, intelligible et parfaitement lisible et/ou audible sur les risques propres à l’activité ou au(x) produit(s) visé(s).

 Lorsque la présentation de ces risques se traduit à l’écrit par une mention, celle-ci devra se distinguer, par tous moyens, des autres informations (et, notamment, ne pas être accolée aux autres mentions) sauf impossibilité technique liée au format et, à l’oral, un énoncé audible devra se distinguer clairement de toutes autres informations.

 Dans tous les cas, la publicité ne peut laisser penser que le consommateur ne prend aucun risque et/ou que son risque est limité. ».

Ainsi que le Jury l’a précisé dans ses décisions du 28 mars 2012 (n° 185/12), du 28 mars 2012 (n° 187/12) et du 21 juin 2012 (n° 199/12), les bannières constituent une forme de publicité appelant par un message accrocheur à se rendre sur le site de l’annonceur, dont la taille réduite ne permet pas d’y mentionner un grand nombre d’informations. Dans la mesure où ces bannières comportent un message d’offre attractive, la règle d’équilibre résultant du point 2-1-2 de la fiche de doctrine précitée doit s’appliquer dès ce stade.

L’annonceur doit donc veiller à ce que, sur ces messages, figure au moins une mention lisible afférente aux risques que présentent les investissements en cause, dont la taille et la précision doivent être proportionnées à l’ampleur et à la probabilité de la promesse de gain éventuellement affichée par la publicité.

En l’espèce, le Jury relève tout d’abord que les publicités litigieuses figurent sur un site spécialisé dans le « trading » de produits financiers, qui comporte des informations et conseils sur cette activité, et s’adressent donc essentiellement à des personnes relativement avisées.

Il observe ensuite que chacune des publicités mises en cause comporte un message d’avertissement lisible faisant état, selon le cas, d’un risque « important » ou « significatif » de pertes.

L’allégation selon laquelle il est « facile de trader l’euro », qui est en rapport avec l’objet du produit consistant à permettre aux consommateurs de disposer d’un « compte démo gratuit » afin de simuler des opérations de « trading », ne peut être regardée comme portant sur l’espérance de gain elle-même.

Eu égard à la taille de ces bannières et en l’absence de toute promesse de gain, il ne peut être reproché à ces publicités de ne pas évoquer l’éventualité, à supposer qu’elle puisse se produire compte tenu des garanties apportées aux clients de la société, que les pertes du client puissent excéder le montant de son apport initial.

Au demeurant, la page Internet de la société accessible à partir des bannières apporte cette précision.

En conséquence, le Jury considère que les publicités en cause ne contreviennent pas aux règles déontologiques rappelées ci-dessus.

4.La décision du Jury

– La plainte est rejetée ;

– La présente décision sera communiquée à l’annonceur, au plaignant et au site sur lequel la publicité a été diffusée;

– Elle sera diffusée sur le site Internet du Jury de déontologie publicitaire.

Délibéré le vendredi 7 juin 2013 par Mme Michel-Amsellem, Présidente, M Lallet, Vice-Président, Mmes Moggio et Drecq, et MM Benhaïm, Carlo, Depincé et Leers.