Avis JDP n°1/08 – FONDATION DE DEFENSE ET DE PROTECTION DES ANIMAUX – Plainte rejetée

Décision publiée le 09.12.2008

Plainte rejetée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

– après examen des éléments constituant le dossier de plainte,

– après avoir entendu successivement les représentants de l’association « La Fourrure française », de l’ARPP, de la fondation de défense et de protection des animaux et des sociétés d’affichage,

– et après en avoir délibéré, hors la présence de l’ARPP et des parties,

rend la décision suivante :

1.Les faits

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi le 14 novembre 2008 par l’association « La Fourrure française » d’une contestation portant sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une campagne de publicité diffusée par voie d’affichage par une fondation de défense et de protection des animaux et qui vise à sensibiliser le public sur les implications du port de fourrure animale.

Les images de cette campagne de publicité représentent une femme ou un homme portant un vêtement de fourrure ou avec de la fourrure et brandissant une arme (couteau, matraque) vers un animal mort dont la peau sert généralement à fabriquer de tels vêtements. La campagne est accompagnée du slogan « Porter de la fourrure, c’est porter la mort ».

2.Les arguments des parties :

Le plaignant, l’association « La Fourrure française », qui est une association enregistrée en octobre 2008, soutient que cette campagne présente un caractère déloyal à l’encontre du produit et de la filière professionnelle de la fourrure; que le slogan et ses images sont extrêmement agressifs; qu’elle est trompeuse car elle présente l’exploitation de la fourrure de façon calomnieuse et qu’il n’ y a pas de lien entre le vêtement porté et l’animal cité; qu’elle est choquante et susceptible de heurter les personnes sensibles ou trop jeunes; enfin, qu’elle peut inciter à des comportements agressifs.

L’ARPP indique que, interrogée dans le cadre de la procédure de conseil avant diffusion par un afficheur, elle a délivré un conseil favorable s’agissant d’une campagne d’opinion non marchande qui participe à la liberté d’expression et peut bénéficier à ce titre, d’une appréciation plus tolérante dès lors, notamment, que le public est respecté et que sa sensibilité n’est pas heurtée .

L’annonceur fait valoir que la campagne ne fait aucunement référence à la profession de fourreur et à la filière économique de la fourrure et n’est donc pas dénigrante, qu’elle ne fait qu’indiquer que le port d’une fourrure implique l’abattage d’animaux et que la fondation de défense et de protection des animaux, fondation reconnue d’utilité publique qui a pour objet la protection des animaux, ne fait qu’exercer son rôle en dénonçant par son message les violences faites aux animaux. S’agissant du caractère trompeur, la Fondation expose qu’elle détient des éléments démontrant que l’abattage des animaux est cruel. Elle indique enfin que le Jury n’est pas compétent pour se prononcer sur le caractère déloyal de la publicité.

Les afficheurs font valoir qu’ils ont soumis cette campagne à l’ARPP préalablement à sa diffusion et qu’ils ont obtenu un avis favorable.

3.Les motifs de la décision du Jury

Il résulte des articles 3, 5 et 12 du code consolidé sur les pratiques de publicité et de communication de marketing de la Chambre de Commerce Internationale que la publicité ne doit pas abuser la confiance des consommateurs ou ne pas exploiter leur manque d’expérience, qu’elle doit être véridique et ne peut être trompeuse et, enfin, qu’elle ne doit pas dénigrer les personnes, les activités ou les membres d’une profession ;

Il résulte encore de la Recommandation de l’ARPP consacrée à l’image de la personne humaine et de celle consacrée à l’enfant que la publicité doit éviter toute scène de violence, directe ou suggérée, et ne pas inciter à la violence morale ou physique, ni la banaliser, ni donner l’impression que de tels comportements sont acceptables ;

La publicité en cause s’inscrit dans le cadre d’une campagne d’opinion non marchande, mise en œuvre par une association reconnue d’utilité publique.

Elle ne fait que mettre en scène une opinion défavorable à l’utilisation de la fourrure dans l’habillement, au motif que cette utilisation nécessite l’abattage d’animaux; elle ne comporte aucune référence aux professions de la filière de la fourrure et ne les dénigre pas, même indirectement ;

Elle ne présente pas de caractère trompeur en ce qu’elle représente seulement de manière symbolique la mort d’un animal pour la fabrication d’un vêtement en fourrure, ce qui ne constitue pas une inexactitude et ce que l’association s’est donné pour mission de dénoncer ;

Enfin, si cette campagne ne conduit pas à une banalisation de la violence mais bien à la condamnation de celle-ci, le Jury s’est néanmoins interrogé sur le caractère lapidaire et brutal du slogan utilisé qui fait référence à un thème, la mort, particulièrement lourd de sens et d’effets sur la sensibilité des individus. A cet égard, il considère que l’image et le slogan associés de cette publicité sont à la limite de ce qui peut être admis par le public dans le cadre d’une campagne d’opinion.

Le Jury observe enfin qu’il serait souhaitable que l’identification de l’annonceur sur la publicité soit davantage lisible afin de permettre une meilleure information des personnes qui reçoivent ce message.

4.La décision du Jury

– La plainte de l’association « La Fourrure française » est rejetée.

– La décision du Jury sera communiquée au plaignant, à l’annonceur et aux supports de diffusion ; elle sera diffusée sur le site internet du JDP.

Délibéré le vendredi 5 décembre 2008 par Mme Hagelsteen, présidente, Mme Michel-Amsellem, vice-présidente, Mmes. Drecq et Moggio, et Ms. Carlo, Lacan et Raffin.