Avis JDP n°364/15 – SITES DE RENCONTRES – Plainte fondée

Avis publié le 11 mars 2015
Plainte fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

 – Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,

– les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,

– et, après en avoir débattu dans les conditions prévues par l’article 12 du règlement intérieur,

rend l’avis suivant :

1. La plainte                      

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi le 28 janvier 2015 d’une plainte émanant d’un particulier, afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’un courrier publicitaire adressé par la société annonceur pour son site internet de rencontres.

Cette publicité se présente sous la forme d’un courrier électronique comportant en objet, le texte « J’ai craqué pour toi » et en expéditeur la mention « Margot » <newsletter@shoppingrelax.fr ».

Le contenu du mail comporte deux images d’une jeune femme brune portant un haut blanc. Le texte accompagnant cette image est « Coucou, Moi c’est Margo, je cherche à faire une rencontre sur X. Je suis marrante et profite de la vie sans me prendre la tête ! Je cherche une belle aventure à vivre intensément !! 😉 Si j’habite près de chez toi, on pourrait faire connaissance ? Rejoins-moi !! ».

En bas de l’annonce figurent l’adresse du site internet et le slogan « Le moteur de recherche de vos rencontres » ainsi que la mention « 1 seul site pour plus de possibilités ».

2. Les arguments échangés

Le plaignant considère que la publicité ne respecte pas l’article D1 du Code ICC consolidé sur les pratiques de publicité et de communication commerciale et la Recommandation « Communication Publicitaire Digitale ». En effet, l’expéditeur est “Margot” et le titre du mail est “J’ai craqué pour toi“, comme s’il émanait d’une amie faisant une déclaration sentimentale à l’expéditeur.

Par ailleurs, dans la publicité, un lien est disponible “voir sa fiche” qui peut laisser supposer qu’on va pouvoir accéder directement à la fiche précise de cette demoiselle. Or ce lien permet d’accéder à la page d’accueil du site qui donne accès à 4 sites de rencontres (tiilt.fr, rdv libertins, hugavenue.com, amoureux.com) et non pas à la fiche personnelle. Cette publicité n’est donc pas loyale, contrairement au paragraphe 4 de la Recommandation.

Enfin, une fois arrivé sur cette page d’accueil lié au mail publicitaire, il n’y a aucun accès aux mentions légales permettant clairement d’identifier l’annonceur. Dans la mesure où cette information n’est pas davantage précisée dans le message, celui-ci méconnaît le point 1/2 de la Recommandation. 

La société a été informée par courrier recommandé avec avis de réception du 9 février 2015 de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle a été également informée que cette affaire ferait l’objet d’un examen dans le cadre de la procédure simplifiée prévue à l’article 12 du règlement intérieur du Jury.

Elle indique à titre liminaire que la plainte, anonyme et similaire à une autre plainte du même jour, vise manifestement à porter atteinte à ses intérêts et doit donc être rejetée.

Elle fait valoir que la publicité en cause a été adressée par voie d’email par le site tiers ShoppingRelax.fr. Contrairement à ce qui est indiqué, il ne s’agit pas d’un spam, puisque le message mentionne que l’adresse est inscrite dans le fichier membres de ShoppingRelax.fr. En outre, l’expéditeur du message est Margot « newsletter@ ShoppingRelax.fr » ce qui identifie clairement le message comme une publicité adressée par ShoppingRelax.fr à ses membres, avant même qu’il ne soit ouvert.

Une fois le message ouvert, les mentions en en-tête précisent : « Vous recevez ce courriel en tant que membre de ShoppingRelax », avec les liens de désinscription. Le bas de page reprend ces mêmes liens et indique, dans une forme parfaitement lisible que « Cette newsletter contient des cookies destinés à personnaliser les annonces commerciales sauf opposition de votre part. Pour en savoir plus, suivez ce lien. »

Cet ensemble vient encadrer le corps du message et indique très clairement sa nature promotionnelle.

Le corps du message est constitué d’un bloc carré comprenant, outre le message lui-même, le logo du site dont la promotion est faite : le moteur de vos rencontres. 1 seul site pour plus de possibilités. Cet ensemble occupe 15 % du cadre principal et est présenté en gras et en rouge, dans une typographie parfaitement lisible.

Le reste du message reproduit la fiche d’un membre telle qu’on peut la trouver sur un site de rencontre. Un lien « Voir la fiche » est même proposé.

Pour la société, il s’agit donc de façon explicite d’un message faisant clairement la promotion du site qui offre l’accès à des fiches de personnes inscrites sur des sites de rencontre. 

3. L’analyse du Jury 

Le Jury indique à titre liminaire que, selon l’article 11 de son règlement intérieur, « les plaintes anonymes ne sont pas traitées » et sont donc regardées comme irrecevables. En revanche, dans le cadre de l’examen des plaintes que lui adressent les particuliers, le Jury procède à leur anonymisation afin d’éviter toute pression et de prévenir tout préjudice qui pourrait résulter de leur identification par les entreprises concernées par la publicité mise en cause. En outre, il n’appartient pas au Jury d’apprécier les motivations réelles ou supposées des plaintes qu’il reçoit, mais seulement d’examiner objectivement la conformité des publicités qui lui sont soumises aux règles déontologiques que les professionnels de la publicité se sont prescrites. Dans ces conditions, il estime que la présente plainte, qui faisait apparaître le nom de son auteur avant d’être anonymisée pour les besoins de l’échange contradictoire, est recevable quelles que soient les intentions de ce dernier. 

Le Jury rappelle que la Recommandation « Communication publicitaire digitale » de l’ARPP prévoit que : 

1/1 : L’identification de la publicité.

« La publicité doit pouvoir être clairement identifiée comme telle, et ce quelle que soit la forme sous laquelle elle se présente.

Cette identification peut se faire par tout moyen nettement perceptible permettant de rendre d’emblée non équivoque pour le public la nature publicitaire du message. » 

1/2 : L’identification de l’annonceur

« Tout annonceur, émetteur d’une campagne de communication publicitaire digitale doit être aisément identifiable. Cette identification doit être clairement perceptible et facile d’accès pour le public.

L’identification peut se faire par la/les marque(s) de l’annonceur, ou tout autre signe distinctif rattaché sans ambiguïté à l’annonceur.

En tout état de cause, un message publicitaire ne saurait induire le public en erreur sur l’identité de son émetteur et sa qualité. »

Le point 4 de la même Recommandation, qui traite du « respect d’une publicité loyale, véridique et honnête », dispose que : « La communication publicitaire digitale ne doit pas être de nature à induire le consommateur en erreur sur l’offre réellement proposée et/ou sur l’entreprise à l’origine de l’offre …”. 

De plus, le point 3 de la grille d’interprétation consacré aux « Courriers électroniques » précise que : « Toute communication publicitaire par courrier électronique doit pouvoir être clairement identifiée comme telle. Pour les courriels, cette identification doit être possible dès réception par le destinataire, sans qu’il n’ait à ouvrir le courrier reçu.”. 

D’autre part, le Code ICC consolidé sur les pratiques de publicité et de communication commerciale auquel renvoie le préambule de la Recommandation précitée dispose que :
« Lorsqu’une communication commerciale numérique est individuellement adressée à un consommateur, l’objet du message et le contexte doivent faire clairement apparaître sa nature commerciale. L’objet du message ne doit pas induire en erreur et la nature commerciale de la communication ne doit pas être dissimulée. ».

Le Jury relève que la publicité en cause se présente sous la forme d’un message électronique émanant soi-disant d’une personne prénommée Margot ou Margo, qui aurait « craqué » pour son destinataire. Les mentions écrites qu’il comporte, notamment « Message de Margo », le texte d’accroche décrivant certains traits de sa personnalité et invitant le destinataire à la rejoindre s’il habite près de chez elle et les liens « Voir la fiche » et « Tchatter », ainsi que les photographies censées représenter l’expéditrice laissent nettement entendre au destinataire qu’une utilisatrice réelle du site de rencontres souhaite entrer en contact avec lui personnellement. Or il apparaît que ce courriel permet seulement d’atteindre la page d’accueil de ce site.

Le Jury relève certes que, ainsi que l’indique la société, l’adresse mail de « Margot » (newsletter@shoppingrelax.fr), ainsi que la phrase figurant au bas du courriel selon laquelle «Cette newsletter contient des cookies destinés à personnaliser les annonces commerciales (…) » peuvent laisser entendre au destinataire qu’il s’agit en réalité d’une lettre d’information commerciale émanant de l’annonceur « Shoppingrelax ». Il estime toutefois que ces seules mentions, reproduites en petits caractères et évincées, dans l’esprit d’un lecteur moyen, par le caractère accrocheur du message de « Margo(t) », ne permettent pas de considérer que le caractère publicitaire et commercial du message apparaîtrait clairement. Ce dernier est donc de nature à induire en erreur sur l’offre réellement proposée.

Dans ces conditions, le Jury est d’avis que cette publicité méconnaît les points 1/1 et 4 la Recommandation « Communication publicitaire digitale», précisés par le point 3 de la grille d’interprétation, ainsi que les dispositions précitées du code ICC.

Le présent avis sera publié sur le site internet du Jury de Déontologie Publicitaire.

Avis adopté le vendredi 6 mars 2015 par M. Alexandre Lallet, Vice-Président, Mmes Drecq et Moggio et MM. Depincé et Leers.