VANESSA WU – Affichage – Plaintes fondées

Avis publié le 31 mars 2021
VANESSA WU – 719/21
Plaintes fondées

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • après examen des éléments constituant le dossier de plaintes,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • après avoir entendu deux plaignants, le représentant de la ville de Paris et le représentant de l’agence de communication Bel-Ami, lors d’une séance tenue sous la forme d’une visioconférence,
  • et après en avoir débattu,

rend l’avis suivant :

1. Les plaintes

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 15 janvier 2021, de plusieurs plaintes émanant de particuliers, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité diffusée en affichage, sur les emplacements situés à la sortie de métros parisiens, par la marque de vêtements Vanessa WU.

Le visuel publicitaire en cause montre une femme vêtue d’un long manteau et de bottes. Elle marche sur un trottoir, le visage tourné vers le mur sur lequel est apposée une affiche, ou trois affiches accolées, portant la marque Vanessa Wu, au-dessus de laquelle figure l’inscription « Défense d’afficher ».

2. Les arguments échangés

Les plaignants, particuliers, énoncent que cette publicité met en valeur et légitime la pratique de l’affichage sauvage, qui est contraire au code de l’environnement et au règlement local de la publicité.

L’un des plaignants ajoute que la Ville de Paris tente de lutter contre ce fléau très coûteux pour le contribuable parisien. Il signale que la marque VANESSA WU a eu recours à ces pratiques en novembre 2020, recouvrant d’affiches des murs de boutiques fermées, des barrières de chantier et des panneaux d’information et de signalisation. Dans ces conditions, si la pratique d’affichage sauvage représentée dans la publicité critiquée n’est pas réelle, mais « virtuelle », elle fait écho à des agissements réels de cet annonceur.

En conséquence, cette campagne VANESSA WU ne respecte pas l’article 2 du code ICC.

La société Vanessa Wu a été informée des plaintes, dont copies lui ont été transmises, et des dispositions dont la violation est invoquée, par courriel recommandé avec avis de réception du 10 février 2021.

Elle fait part de son étonnement à la réception des plaintes. En effet, la campagne n’a jamais ambitionné de faire la promotion de l’affichage sauvage. Elle se veut simplement le reflet d’une observation sociétale.

L’annonceur souligne que si l’on observe les murs de nos villes, ils sont couverts de posters, tags, inscriptions en tous genres…, le street-art devenant même l’un des formats artistiques les plus célébrés, comme le montre le succès de l’artiste Banksy. Les murs des villes, depuis la Rome antique, ont toujours été des médias utilisés par le peuple pour faire passer des messages.

A travers la campagne, l’annonceur explique avoir donc voulu jouer l’authenticité avec ce que vivent les gens dans la vraie vie, selon la démarche dite « insight ». De plus, la marque a voulu jouer avec les formats, ce que les professionnels appellent « la créativité media », en faisant rentrer la rue parisienne dans le métro, en jouant sur la mise en abyme.

La société indique qu’en aucun cas, elle ne cautionne la pratique de l’affichage sauvage.

L’agence de communication Bel-Ami a confirmé lors de la séance que l’objectif de cette publicité était de reproduire une réalité urbaine selon la démarche « insight ». Elle précise l’affichage sauvage s’inscrit dans une guerilla marketing pratiquée par d’autres enseignes et que la marque Vanessa Wu s’acquitte systématiquement des amendes qui lui sont infligées en cas d’affichage illicite, de sorte qu’elle est en règle.

– La Ville de Paris est intervenue lors de la séance afin de rappeler sa politique de lutte contre l’affichage sauvage et de soutenir les plaignants. Sa participation a fait l’objet d’une information préalable des parties, qui n’ont pas formulé d’objection.

3. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle que, selon les principes généraux issus du Code ICC consolidé sur la publicité et les communications commerciales de 2018, et en particulier ses articles 1er et 2, la publicité doit être conçue avec un juste sens de la responsabilité sociale et, en particulier, ne semble pas cautionner ou encourager des comportements illicites ou antisociaux.

Le Jury relève que la publicité litigieuse met en scène une femme marchant sur un trottoir, tournant les yeux vers une grande affiche, ou trois affiches accolées, de l’enseigne Vanessa Wu apposée sur le mur d’un bâtiment, surplombée de l’inscription : « Défense d’afficher ».

Ce visuel représente ainsi une pratique illicite, car prohibée par le code de l’environnement et le règlement local de la publicité de Paris. La circonstance que d’autres sociétés se livreraient à de telles pratiques ne saurait légitimer que l’annonceur y ait recours, fût-ce au titre de la « guérilla marketing » évoquée en séance par l’agence de communication responsable.

Aucun élément visuel ou textuel ne donne à penser que l’annonceur entendrait dénoncer cette pratique à travers cette publicité. Il se borne à indiquer, dans ses observations, qu’il aurait entendu représenter fidèlement une réalité urbaine. Si un tel argument aurait pu être admis en présence d’affiches ou d’inscriptions sauvages n’entretenant aucun rapport avec la marque dont il est fait la promotion et constituant de simples éléments de décor d’une publicité portant sur un produit ou un service tiers, tel ne saurait être le cas en l’espèce dès lors que les affiches illégalement apposées qui y sont représentées émanent de la marque Vanessa Wu elle-même, et constituent l’élément central de la publicité critiquée, qui ne comporte aucune autre référence à cette enseigne. Dans la scène représentée, les affiches ont manifestement été collées par ou pour le compte de cette marque, responsable de la publicité litigieuse. Du reste, il a été confirmé en séance par l’agence de communication que l’annonceur avait déjà procédé à de l’affichage sauvage et qu’il s’est acquitté des amendes infligées par la ville de Paris à ce titre.

Dans ces conditions, le Jury considère que cette présentation semble cautionner des comportements illicites et que la publicité en cause est donc contraire aux principes généraux résultant de l’article 2 du code ICC.

Avis adopté le 5 mars 2021 par M. Lallet, Président, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mmes Charlot et Lenain, ainsi que MM. Depincé, Leers, Le Gouvello, Lucas-Boursier et Thomelin.

Pour visualiser la publicité Vanessa Wu, cliquez ici.