Avis publié le 31 mars 2021
SFR 5G – 716/21
Plainte fondée
Le Jury de Déontologie Publicitaire,
- après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
- les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
- et après en avoir débattu,
rend l’avis suivant :
1. La plainte
Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 22 décembre 2020, d’une plainte émanant d’un particulier, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité de la société SFR pour promouvoir son offre de services 5G.
La publicité en cause, diffusée sur Internet, utilise le texte : « On vous dit tout sur la 5G – Plus rapide, plus réactive, plus connectée, plus écologique ».
2. Les arguments échangés
– Le plaignant considère que la mention « plus écologique », qui n’est pas explicitée, relève de la publicité mensongère car la documentation scientifique prouve le contraire. Il se prévaut à cet égard du rapport du haut conseil pour le climat de décembre 2020 intitulé : « Maîtriser l’impact carbone de la 5G ».
– La société SFR a été informée, par courriel avec accusé de réception du 9 février 2021, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.
Elle n’a pas présenté d’observations.
3. L’analyse du Jury
Le Jury rappelle que la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP dispose :
– en son point 1 (Impacts éco-citoyens) que « La publicité doit s’inscrire dans un contexte de responsabilité sociale en tenant notamment compte de la sensibilité du corps social à un moment donné et du contexte de diffusion de la publicité » et qu’elle doit « éviter, dans son discours, de minimiser les conséquences de la consommation de produits susceptibles d’affecter l’environnement » ;
– en son point 2, relatif à la véracité des actions, que :
« 2.1 La publicité ne doit pas induire le public en erreur sur la réalité des actions de l’annonceur ni sur les propriétés de ses produits en matière de développement durable. /
2.2 Les actions des annonceurs et les propriétés de leurs produits dans ce domaine doivent être significatives pour pouvoir être revendiquées. /
2.3 L’annonceur doit être en mesure de justifier les arguments ayant trait au développement durable au moyen d’éléments objectifs, fiables, véridiques et vérifiables au moment de la publicité. / Pour tout message reposant sur une allégation scientifique, l’annonceur doit être en mesure de présenter l’origine des résultats annoncés et la méthodologie ayant servi de base de calcul. / La publicité ne peut recourir à des démonstrations ou à des conclusions scientifiques qui ne seraient pas conformes à des travaux scientifiques reconnus. ».
– et en son point 3, relatif à la proportionnalité du message, que :
« 3.1 Le message publicitaire doit exprimer avec justesse l’action de l’annonceur ou les propriétés de ses produits, en adéquation avec les éléments justificatifs transmissibles. (…) /
3.2 Le message publicitaire doit être proportionné à l’ampleur des actions menées par l’annonceur en matière de développement durable ainsi qu’aux propriétés du produit dont il fait la promotion. ».
Le Jury relève que la publicité en cause fait la promotion de la cinquième génération des standards de téléphonie mobile, dite 5G, en la présentant notamment comme « plus écologique », le terme de comparaison sous-entendu étant, à l’évidence, la technologie 4G.
Le Jury précise à titre liminaire que le qualificatif « écologique » se rapporte manifestement aux incidences de cette technologie sur l’environnement, et non à la question de l’impact des ondes électromagnétiques sur la santé humaine.
Il ressort des travaux disponibles et, notamment, du rapport du haut conseil pour le climat dont se prévaut le plaignant, que la 5G est susceptible d’avoir des incidences directes et indirectes sur l’environnement, en sens contraires. D’un côté, cette technologie présente une performance énergétique supérieure à la 4G, en ce sens que, pour une même consommation d’énergie, les débits offerts seront nettement supérieurs avec la 5G, et le nombre d’utilisateurs pouvant utiliser le réseau sera ainsi plus important. De même, le mode de fonctionnement des antennes 5G est conçu pour minimiser la consommation d’énergie, notamment en l’absence de trafic. D’un autre côté, le déploiement de la 5G se traduira par la fabrication et la consommation de nouveaux terminaux mobiles et autres équipements compatibles, ainsi que la mise au rebut de terminaux incompatibles, mais encore fonctionnels. Par ailleurs, si la performance énergétique de la 5G apparaît supérieure à celle de la 4G, à usage équivalent, il est très probable que le déploiement de cette nouvelle technologie aura un effet inflationniste sur la consommation de contenus et, partant, entraînera, au final, une consommation d’électricité sensiblement supérieure. Le rapport précédemment mentionné fait ainsi état d’une augmentation de l’empreinte carbone imputable au déploiement de la 5G comprise entre 2,7 et 6,7 Mt équivalent CO2, en l’état du cahier des charges de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse.
Eu égard à ces effets négatifs et, en tout état de cause, aux incertitudes qui entourent l’incidence environnementale de la 5G, en l’absence de documentation scientifique suffisante, le Jury estime que cette technologie ne peut être présentée, de manière générale et sans explicitations, conditions, réserves et/ou précautions de présentation, comme « plus écologique » que la 4G. Une telle affirmation est de nature à induire en erreur le public et les consommateurs sur l’impact environnemental de la 5G, présente un caractère disproportionné, et tend à minimiser les conséquences de la consommation de produits susceptibles d’affecter l’environnement. Le Jury relève de surcroît – et regrette – que SFR n’a présenté aucune observation explicitant la portée qu’il a entendu conférer à cette allégation.
En conséquence, le Jury est d’avis que cette publicité méconnaît les dispositions précitées de de la Recommandation « Développement durable ».
Avis adopté le 5 mars 2021 par M. Lallet, Président, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mmes Charlot et Lenain, ainsi que MM. Depincé, Leers, Le Gouvello, Lucas-Boursier et Thomelin.