RELAY

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Plainte fondée

Avis publié le 4 juillet 2023
RELAY – 935/23
Plainte fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • et après en avoir débattu dans les conditions prévues par l’article 13 du règlement intérieur,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 23 avril 2023, d’une plainte émanant d’un particulier, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité du groupe Lagardère Travel Retail France pour promouvoir son offre de produits disponibles dans ses points de vente de marque Relay.

La publicité en cause, diffusée par affichage sur la vitrine d’un point de vente en gare, montre l’image d’une jeune femme s’apprêtant à boire dans une gourde, accompagnée des textes inscrits en gros caractères : « Courir le monde et le préserver. Ça fait partie du voyage », « Produits éco-responsables & emballages recyclables ».

2. Les arguments échangés

Le plaignant énonce que l’annonceur n’explique pas réellement de quelle manière les produits qu’il commercialise pourraient permettre de « courir le monde et le préserver » : ce n’est pas parce qu’on achète des « produits éco-responsables » (comme la gourde représentée sur l’affiche) ou des produits avec des « emballages recyclables » que l’on peut affirmer que l’on « préserve » le monde. Il est évident qu’il y a d’autres impacts significatifs, à commencer par le mode de transport utilisé pour « courir le monde », qui est souvent l’avion.

Ainsi, le visuel contrevient aux points 2 et 4 de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP sur la véracité et sur la clarté du message.

Par ailleurs, l’allégation « produits écoresponsables et emballages recyclables » n’est pas conforme aux points 2 (véracité), 3 (proportionnalité) et 7 (vocabulaire) de la Recommandation :

  • Un produit peut-il être « écoresponsable » en soi ? quels sont les éléments de preuve associés (label…) ?
  • Quels sont les produits « plus » écoresponsables qui sont proposés dans le magasin ? en quelle proportion par rapport à la totalité de l’offre ?
  • Tous les emballages des produits proposés sont-ils effectivement « recyclables » ? sinon, quelle proportion ?

La société Lagardère Travel Retail France a été informée, par courriel avec accusé de réception du 11 mai 2023, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle a été également informée que cette affaire ferait l’objet d’un examen dans le cadre de la procédure simplifiée prévue à l’article 13 du règlement intérieur du Jury.

La société fait valoir qu’elle dispose à ce jour d’un réseau de plus de 850 points de vente de détail sous l’enseigne « RELAY » en France métropolitaine, qui proposent aux consommateurs un large choix de magazines, journaux, livres, confiseries, cadeaux souvenirs, de restauration et de dépannage. Ces points de ventes sont principalement situés sur les réseaux de transports (gares SNCF, métros, aéroports, autoroutes).

La campagne de communication « RELAY, ça fait partie du voyage » a été imaginée lors du lancement du nouveau concept de magasins RELAY « Next Generation » en juin 2020. Comme toute campagne de communication, elle associe un slogan avec des images (non contractuelles) qui expriment les valeurs de l’enseigne.

Cette campagne est dédiée à la RSE (responsabilité sociétale d’entreprise). En effet, la campagne « Courir le monde et le préserver, ça fait partie du voyage » exprime le souhait de la société de favoriser un voyage plus durable, en proposant à ses clients, les voyageurs, des produits plus éco-responsables – telles que les gourdes réutilisables intégrées aux gammes de produits en vente sur les points de vente – mais aussi de nouveaux emballages recyclables (sacs papiers, consommables…). RELAY travaille à plus d’écoresponsabilité avec une offre réinventée qui offre plaisir et dépannage pour les voyageurs, afin de prendre soin de la planète.

Aussi, dès qu’elle le peut, en complément des autres offres présentes sur ses points de vente, toujours avec la même volonté d’être un acteur du voyage plus responsable, la société propose des gammes plus écoresponsables :  avec des aliments sains ou bios, des produits biosourcés, une fabrication française ou locale, plus de gammes équitables, des packaging éco-conçus, des bouteilles RPET (bouteilles plastiques 100 % recyclées et recyclables), plus de matières recyclées ou respectueuses de l’environnement, avec moins de tickets de caisse (impression sur demande) et moins de plastique (sacherie Kraft ou recyclable)…

Par ailleurs, ce slogan exprime une intention et des valeurs partagées. Il ne formule en aucun cas des solutions. Cette campagne est présente pour promouvoir les valeurs d’un voyage plus respectueux de la planète, au sens large et idéologique.

Proposer aux voyageurs d’utiliser et/ou d’acheter des produits plus « corrects » pour impacter le moins possible l’environnement, soit une gourde réutilisable versus une bouteille en plastique jetable, n’engage pas sur le fait que l’offre soit 100% « écoresponsable ». Il s’agit du souhait d’avancer dans ce sens. Le Groupe a d’ailleurs pris des engagements forts comme le démontre la feuille de route RSE Lagardère.

Enfin, « Courir le monde » fait écho au très large maillage territorial des points de vente RELAY situés partout en France en zone de transport. RELAY est également une marque internationale, développée par le Groupe Lagardère Travel Retail, présente dans plus de 42 pays. La société est en effet un acteur majeur du « Travel Retail » (vente en détail pour les voyageurs), avec des implantations en gares, métros et aéroports, mais elle ne fait en aucun cas la promotion de tel ou tel moyen de transport. L’activité est présente sur ces flux et ses communications s’y adaptent dans la volonté d’offrir des produits et services les plus adéquates à ses cibles et populations de clientèles.

3. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle que la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP dispose :

  • au titre des « impacts éco-citoyens » (point 1 ) : « La publicité doit s’inscrire dans un contexte de responsabilité sociale en tenant notamment compte de la sensibilité du corps social a un moment donne et du contexte de diffusion de la publicité. Sans qu’il soit fait référence au concept de développement durable ou à l’une de ses composantes, une publicité doit éviter de véhiculer un message contraire aux principes communément admis du développement durable. Dans cet esprit :

1.1 La publicité doit proscrire toute représentation susceptible de banaliser, ou de valoriser des pratiques ou idées contraires aux objectifs du développement durable. A titre d’exemple :

(…)

b/ La publicité ne saurait inciter directement ou indirectement à des modes de consommation excessifs (…) /

c/ La publicité doit éviter, dans son discours, de minimiser les conséquences de la consommation de certains produits ou services susceptibles d’affecter l’environnement […]».

  • au titre de la véracité des actions (point 2) : « 1. La publicité ne doit pas induire le public en erreur sur la réalité des actions de l’annonceur ni sur les propriétés de ses produits en matière de développement durable» ;
  • au titre de la proportionnalité (point 3) :
    • « 1. Le message publicitaire doit exprimer avec justesse l’action de l’annonceur ou les propriétés de ses produits, en adéquation avec les éléments transmissibles. / La réalité de ces actions ou propriétés peut s’apprécier au regard des différents piliers du développement durable, des différents types d’impacts possibles et des différentes étapes de la vie du produit ;
    • 2. Le message publicitaire doit être proportionné à l’ampleur des actions menées par l’annonceur en matière de développement durable ainsi qu’aux propriétés du produit dont il fait la promotion; »
  • au titre de la « clarté du message » (point 4) : « 1. L’annonceur doit indiquer dans la publicité en quoi ses activités ou ses produits présentent les qualités revendiquées ».
  • au titre du « vocabulaire » (point 7) :
    • « 7.1 Les termes et expressions utilisés ne doivent pas induire le public en erreur sur la nature et la portée des propriétés du produit ou des actions de l’annonceur en matière de développement durable /
    • 7.3 Dans le cas où il serait impossible de justifier des formulations globales (ex. : écologique, vert, éthique, responsable, préserver, équitable, durable, …), la publicité doit les relativiser en utilisant des formulations telles que “contribue à”.».

Le Jury relève que la publicité critiquée fait la promotion du réseau Relay implanté dans les infrastructures de transport (aéroports, gares, métros…) et qui propose des articles au détail pour les voyageurs. Elle comporte l’allégation « Courir le monde et le préserver. Ça fait partie du voyage », qui est explicitée par la mention : « Produits éco-responsables & emballages recyclables ». Cette publicité vise ainsi à valoriser le caractère « éco-responsable » des produits vendus par Relay, dans des emballages recyclables, qui permettraient de préserver la planète que parcourent les voyageurs.

En premier lieu, le Jury estime que l’allégation selon laquelle l’activité de l’annonceur préserve le monde est de nature à induire en erreur le public quant à ses incidences environnementales. En effet, si la mise en œuvre d’une démarche écoresponsable et l’utilisation d’emballages recyclables peuvent contribuer à limiter ces incidences, il ne peut en aucun cas être allégué qu’elles permettraient de protéger l’environnement alors que l’activité de distribution de produits en boutiques est nécessairement à l’origine d’émissions de gaz à effet de serre et d’autres nuisances écologiques. De surcroît, l’allégation litigieuse laisse entendre qu’en recourant aux services de Relay, les consommateurs pourraient sauvegarder l’environnement en dépit de l’empreinte carbone associée à leurs voyages – l’expression « courir le monde » se référant plus intuitivement aux voyages qu’au maillage territorial des points de vente de Relay.

En second lieu, le Jury estime que le vocable général « éco-responsable » ne peut être associé à des produits ni même, en principe, à une entreprise, mais seulement, le cas échéant et sous réserve des justifications appropriées, à une démarche d’ensemble d’une personne présentant de sérieuses garanties en matière de limitation des incidences environnementales de ses activités et, le cas échéant, de compensation. En l’espèce, cette expression n’est pas explicitée autrement que par l’évocation des « emballages recyclables », ce qui, en tout état de cause, ne suffit pas à revendiquer une quelconque « éco-responsabilité ». La publicité critiquée ne précise d’ailleurs pas si l’ensemble des emballages utilisés pour le conditionnement des produits des boutiques Relay sont recyclables, ou seulement une partie d’entre eux.

En conséquence de ce qui précède, le Jury est d’avis que la publicité en cause méconnaît les règles déontologiques précitées.

Avis adopté le 9 juin 2023 par M. Lallet, Président, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mmes Boissier, Charlot et Lenain, ainsi que MM. Depincé, Le Gouvello, Lucas-Boursier et Thomelin.


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