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Radio - Publipostage

Plaintes partiellement fondées

Avis publié le 2 janvier 2024
OPTICAL CENTER – 980 / 23
Plaintes partiellement fondées

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • après examen des éléments constituant le dossier de plaintes,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • après avoir entendu le plaignant particulier, lors d’une séance tenue sous la forme d’une visioconférence,
  • et après en avoir débattu,

rend l’avis suivant :

1. Les plaintes

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, les 10 et 16 novembre 2023, de deux plaintes émanant pour l’une d’un particulier, pour l’autre de la société Alpes courtage assurances, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une campagne publicitaire de la société Optical Center pour promouvoir son offre de lunettes.

La première publicité en cause, diffusée sur la face recto d’enveloppes à destination de clients particuliers de la société, montre plusieurs montures de lunettes, accompagnées du texte « Renouvelez vos lunettes gratuitement tous les ans », le terme « gratuitement » étant inscrit en caractères gras.

Concernant le spot radio, une voix de femme énonce : « Renouvelez vos lunettes gratuitement tous les ans ! On a tous une bonne raison de ne pas changer de lunettes… Pourtant, si votre correction a changé, vous pouvez renouveler vos lunettes gratuitement tous les ans chez Optical Center. Bénéficiez sans attendre d’un examen de la vue 100% pris en charge et choisissez vos nouvelles lunettes. Optical Center, voir le beau, entendre le bien … »

2. Les arguments échangés

Les plaignants énoncent que cette publicité est mensongère : une paire de lunettes ne peut être gratuite. Elle peut être sans reste à charge mais il y a une participation des mutuelles complémentaires, lesquelles sont payées par la communauté. Il y a, de plus, une participation de la sécurité sociale (pour la monture, mais aussi le remboursement de la visite de l’ophtalmologiste) qui n’a pas besoin d’une publicité incitant à gaspiller l’argent public.

Le plaignant particulier ajoute lors de la séance que, dans la mesure où tous les opticiens qui appliquent le 100 % Santé sont soumises aux mêmes règles, il n’est pas admissible d’en faire un argument promotionnel.

La société Alpes courtage assurances estime en outre que cette publicité incite à la surconsommation, ce qui est scandaleux.

La société Optical Center a été informée, par courriel avec accusé de réception du 20 novembre 2023, des plaintes dont copies lui ont été transmises et des dispositions dont la violation est invoquée.

La société fait valoir que les plaintes ne sont pas dénuées d’un certain fondement mais se livrent à un mauvais procès en jouant sur les mots. Le terme « gratuitement » signifie que le client n’a rien à lui payer. Le consommateur comprend aisément qu’il n’aura rien à débourser. Ce raccourci de langage est parlant et cohérent avec la communication gouvernementale sur le « 100 % Santé ».

Elle précise que le mot « gratuitement » se retrouve dans de nombreux documents publicitaires qui proposent un second produit gratuit ou un service gratuit. Là encore, la gratuité s’entend du fait que le client ne paye rien. Or il est évident qu’il y a bien une prise en charge par quelqu’un, que ce soit le prestataire, le vendeur ou un autre organisme. La société considère que ses clients, porteurs de lunettes, connaissent suffisamment le fonctionnement des prises en charge par la sécurité sociale et leur mutuelle pour comprendre le sens de l’offre et qu’ils ne sont en rien trompés.

Elle ajoute que les clients cotisent de toute façon à la sécurité sociale et à une mutuelle, qu’ils bénéficient ou non de l’offre.

Tout en maintenant que cette publicité ne présente pas un caractère trompeur, l’annonceur précise qu’afin d’éviter tout malentendu et de montrer sa bonne volonté, il a décidé de changer son verbatim. Du fait des délais de conception et d’impression de nos documents publicitaires, le changement n’apparaîtra toutefois qu’en mai 2024.

La société Radio France, qui a diffusé le spot radio, a également été informée de la plainte mentionnant une diffusion sur France Inter et de son examen par le Jury. Elle n’a pas présenté d’observations.

3. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle qu’il résulte du code « Publicité et Marketing » de la Chambre de commerce internationale (dit code ICC), que :

« Article 1 – Principes élémentaires

Toute communication commerciale doit se conformer aux lois, être décente, loyale et véridique. Toute communication commerciale doit être conçue avec un juste sens de la responsabilité sociale et professionnelle et doit être conforme aux principes de la concurrence loyale telle qu’ils sont généralement admis dans les relations commerciales. Aucune communication ne doit être de nature à dégrader la confiance que le public doit pouvoir porter au marketing. »

« Article 5 – Véracité

La communication commerciale doit être véridique et ne peut être trompeuse.

La communication commerciale ne doit contenir aucune affirmation, aucune assertion ou aucun traitement audio ou visuel qui soit de nature, directement ou indirectement, par voie d’omissions, d’ambiguïtés ou d’exagérations, à induire en erreur le consommateur (…). »

En outre, la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP dispose :

  • au titre des « impacts éco-citoyens » (point 1) : « La publicité doit s’inscrire dans un contexte de responsabilité sociale en tenant notamment compte de la sensibilité du corps social a un moment donne et du contexte de diffusion de la publicité. Sans qu’il soit fait référence au concept de développement durable ou à l’une de ses composantes, une publicité doit éviter de véhiculer un message contraire aux principes communément admis du développement durable. Dans cet esprit :

1.1 La publicité doit proscrire toute représentation susceptible de banaliser, ou de valoriser des pratiques ou idées contraires aux objectifs du développement durable. A titre d’exemple :

(…)

b/ La publicité ne saurait inciter directement ou indirectement à des modes de consommation excessifs (…) ».

Le Jury relève que les publicités litigieuses font la promotion d’une offre de renouvellement annuel de lunettes en mettant en valeur sa gratuité.

En premier lieu, en ce qui concerne le terme « gratuitement », le Jury comprend que la société Optical Center a entendu faire référence à la relation commerciale qui la lie au client (ou pourrait la lier au prospect) destinataire des communications, en l’informant de ce qu’il n’aura aucun reste à charge à payer, c’est-à-dire aucune somme à verser à l’opticien compte tenu de la prise en charge intégrale des coûts du renouvellement des lunettes par l’assurance maladie et la complémentaire santé (responsable ou solidaire) dans le cadre du dispositif « 100 % Santé ». Toutefois, le Jury rappelle que l’augmentation des dépenses des complémentaires santé résultant d’un renouvellement fréquent des lunettes est susceptible de se traduire par une hausse des cotisations afin de préserver la rentabilité de ces organismes. Ainsi, le renouvellement annuel qu’encouragent les publicités en cause est susceptible d’emporter, indirectement, des conséquences financières pour les intéressés. Dans ces conditions, l’emploi du terme « gratuitement » est de nature à induire en erreur le consommateur sur les conséquences financières de la proposition commerciale qu’il reçoit.

En deuxième lieu, s’agissant de l’incitation à la surconsommation, le Jury constate que le spot radio énonce clairement que le renouvellement annuel ne se justifie que si la correction du porteur des lunettes a changé. La publicité rappelle d’ailleurs que « on a tous de bonnes raisons de ne pas changer de lunettes ». Elle se place donc spontanément dans l’idée qu’il n’est pas forcément nécessaire de changer. Le grief n’est donc pas fondé pour ce qui concerne cette publicité.

Il en va différemment de la publicité distribuée par voie postale, qui invite ses destinataires, sans conditions ni restrictions, à changer de lunettes chaque année. Ni le texte, qui ne fait aucune référence aux besoins du client, ni aucun élément visuel ou de mise en scène ne permet d’exclure un pur renouvellement de « confort », sans aucune nécessité médicale liée à la correction, alors que la fréquence moyenne habituelle de renouvellement des verres est supérieure à un an. Cette publicité incite donc à des modes de consommation excessifs, ce qui est d’autant plus regrettable que, ainsi qu’il a été indiqué, l’acquisition d’une nouvelle paire de lunettes fait l’objet d’une prise en charge collective.

En troisième et dernier lieu, si le plaignant particulier a également reproché à la société Optical Center, au cours de la séance, d’utiliser le dispositif « 100 % Santé », qui fait l’objet d’obligations légales, comme un argument commercial différenciant, ce grief est soulevé trop tardivement pour permettre à l’annonceur d’y répondre. Le Jury ne peut donc l’examiner.

En conséquence de ce qui précède, le Jury est d’avis que les publicités mises en cause sont contraires au principe général de véracité repris à l’article 5 du code ICC et que la publicité postale est contraire au b/ du point 1.1. de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP. Il prend note de la modification que l’annonceur entend apporter à ses publicités à compter du printemps 2024 en ce qui concerne l’utilisation du terme « gratuitement ».

Avis adopté le 8 décembre 2023 par M. Lallet, Président, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mmes Boissier et Charlot, ainsi que MM. Depincé, Le Gouvello, Lucas-Boursier et Thomelin.


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