MERCEDES CLASSE G – Internet – Plainte non fondée

Avis publié le 5 décembre 2022
MERCEDES CLASSE G – 883/22
Plainte non fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • après avoir entendu les représentants de la société Mercedes-Benz France lors d’une séance tenue sous la forme d’une visioconférence,
  • et après en avoir débattu,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 10 octobre 2022, d’une plainte émanant d’un particulier, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité en faveur de la société Mercedes-Benz France, pour promouvoir son modèle de véhicule Mercedes Classe G.

La publicité en cause, diffusée sur la page Instagram de la marque, montre le véhicule, face à l’objectif, circulant sur une route au coucher du soleil. En bas à droite de l’image, figure l’étiquette indiquant, sur la dernière flèche, de couleur rouge, la classe d’émissions de CO2 du modèle, à savoir « G 336gCO²/km ».

Le texte accompagnant cette image énonce : « Peu importe où la nuit vous emmène, la légendaire Classe G se distingue toujours ».

2. Les arguments échangés

Le plaignant dénonce la mise en avant, par le constructeur, de son « monstre fossile », qui mérite amplement l’étiquette CO2 de la catégorie G et ce, en pleine sobriété demandée par l’Etat.

La société Mercedes-Benz France a été informée, par courrier recommandé avec accusé de réception du 12 octobre 2022, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Son représentant fait valoir que la société Mercedes-Benz France collabore très régulièrement avec l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) pour s’assurer que ses publicités sont toujours conformes à la règlementation et à l’esprit de ses recommandations.

Il souligne que, pour être recevable, une plainte doit « … être clairement motivée, c’est-à-dire indiquer de façon précise en quoi la publicité mise en cause soulèverait un problème déontologique ». (Article 11 du Règlement intérieur adopté par le Conseil d’Administration de l’ARPP le 9 juin 2021). En l’espèce, la plainte de trois lignes est succincte, non motivée et ne vise aucun manquement à une règle déontologique particulière. La description accompagnant la plainte : « Le constructeur expose avec fierté son monstre fossile, qui mérite amplement l’étiquette C02 de la catégorie G (…) » n’est pas davantage motivée, aucune règle déontologique n’y étant visée. Les reproches visent le véhicule et non le contenu publicitaire de celui-ci. Il est ainsi difficile de répondre précisément à une plainte pour laquelle aucun manquement déontologique n’est visé.

Il convient de préciser d’emblée qu’il n’existe aucun lien entre l’appellation « Classe G » du véhicule de Mercedes-Benz France et son Score-Carbone G. Il s’agit en réalité de la gamme de véhicules dit « tout-terrain » de la marque Mercedes-Benz France, qui existe depuis 40 ans.

Aucune des recommandations « développement durable v3 » élaborées par l’autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) n’a été violée par la société Mercedes-Benz France. Celle-ci a respecté l’article 2.1 intitulé : « Véracité des actions » et notamment en ce qu’il précise que : « La publicité ne doit pas induire le public en erreur sur la réalité des actions de l’annonceur ni sur les propriétés de ses produits en matière de développement durable. ». En effet, le Score-Carbone, mis en place par l’article L. 229-64 du code de l’environnement figure distinctement sur la publicité. Il est à noter que rares sont les constructeurs qui se conforment scrupuleusement au respect de cette règlementation sur les réseaux sociaux, pourtant obligatoire depuis le mois de mars 2022.

Aucune violation des articles relatifs à la clarté du message (Art.4) à la loyauté (Art.5), ou encore aux règles propres au vocabulaire (Art.7) ne peut davantage être constatée.

La publicité n’induit aucunement en erreur le consommateur et ne cherche pas plus à minimiser l’impact écologique du véhicule. En exposant clairement le Score-Carbone sur sa publicité et en ne faisant aucune allégation sur des vertus environnementales dans son message publicitaire, la société Mercedes-Benz France ne trompe à aucun moment le consommateur.

Ainsi, et pour illustration, les termes « la légendaire Classe G se distingue toujours » font uniquement référence au caractère emblématique et unique du véhicule et aucunement à l’impact écologique du véhicule.

La société Mercedes-Benz France respecte notamment l’article 1. e/ des recommandations, qui est une reprise de l’article L. 362-4 du code de l’environnement prévoyant que : « La représentation d’un véhicule à moteur sur un espace naturel est interdite. En revanche, sa représentation sur une voie ou zone publique ou privée ouverte à la circulation, reconnaissable comme telle et se distinguant clairement de l’espace naturel est admise. »

En l’espèce, Mercedes-Benz France a bien placé le véhicule sur une voie ouverte à la circulation, aisément reconnaissable comme telle.

La société respecte encore l’Article L. 328-1 du code de la route qui porte obligation pour toute publicité en faveur de véhicules terrestres à moteur d’être accompagnée d’un message promotionnel encourageant l’usage des mobilités actives ou partagées ou des transports en commun. En effet, en commentaire, il est bien fait référence au message suivant : « Pensez à covoiturer. ».

De même, la société Mercedes-Benz France n’hésite pas à rappeler en commentaire : « SedéplacerMoinsPolluer ».

Ainsi, la société Mercedes-Benz France veille aussi bien au respect des recommandations déontologiques qu’aux dispositions légales qui lui incombe.

Enfin, il n’existe aucune interdiction à se livrer à de la publicité pour un véhicule neuf, même disposant d’un Score-Carbone classé G. L’objet de la plainte devant le JDP doit par ailleurs porter sur le contenu du message publicitaire et non sur le produit en lui-même (Article 2.1, paragraphe 4 du Règlement intérieur), ce qui ne semble pas être le cas dans cette plainte.

Lors de la séance, l’annonceur a estimé que la plainte, par son laconisme, ne permettait pas de comprendre ce qui est lui reproché. Il a insisté sur le fait qu’il ne s’agissait en aucun cas de faire un jeu de mots sur les termes « classe G ». Il s’agit d’une coïncidence. Il a rappelé que la classe G est un modèle phare de la marque, très apprécié des consommateurs. L’allégation « se distingue toujours » renvoie à l’esthétique particulière du véhicule, très différent des autres modèles, ce qu’on peut distinguer même dans la pénombre de la nuit tombante. La société précise qu’elle commercialise d’autres modèles dont la classe d’émission carbone est G.

3. L’analyse du Jury

3.1 Sur la compétence du Jury et la recevabilité de la plainte

Le Jury rappelle qu’en vertu du point 2.1 de son règlement intérieur, il n’est pas compétent pour se prononcer sur le produit lui-même, mais seulement sur la conformité aux règles déontologiques des publicités qui font l’objet des plaintes dont il est saisi. Toutefois, en l’espèce, la plainte vise clairement une publicité déterminée.

En l’espèce le plaignant décrit la publicité comme exposant avec fierté son « monstre fossile », dont il donne les caractéristiques d’après la source https://lnkd.in/eFA7s6st (-Conso. : 14,7-16,4 l /100 km (WLTP) -Émissions : 335-448 g CO2 /km (WLTP) -Poids : 2,5 tonnes En 2020, la moyenne des émissions de CO2 – au roulage – des véhicules neufs était de 97 g de CO2).

Il reproche au post Instagram en cause de faire « une publicité pour un véhicule classé G en terme de consommation d’essence. En pleine sobriété demandée par l’Etat. Avec un claim radical : peu importe où la nuit vous emmène, la classe G se distingue toujours ».

Comme le prévoit expressément l’article 11 de son règlement intérieur, il appartient au Jury de rattacher les reproches ainsi formulés aux règles déontologiques pouvant correspondre aux développements des plaignants qui ne sont pas des professionnels de la communication ni de la publicité. Le Jury estime que la plainte vise manifestement l’insolence avec laquelle, en période de « sobriété demandée par l’Etat » la société Mercedes se vante d’un modèle (« expose avec fierté ») qui « se distingue toujours » et se trouve « classé G en terme de consommation d’essence », alors même que ce modèle est nommé « classe G ». Cette argumentation se rattache à la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP et, en particulier, à son point 1 consacré aux impacts éco-citoyens.

A cet égard, le Jury considère que la formulation est suffisamment étayée pour rendre recevable sa saisine, laquelle relève de sa compétence.

3.2 Sur les règles déontologiques applicables

Le Jury rappelle que la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP présente dans un préambule son champ d’application en ces termes : « La présente Recommandation a vocation à s’appliquer à toutes publicités utilisant :

  • une présentation d’éléments non compatibles avec les objectifs du développement durable, même sans y faire référence ;
  • un argument faisant référence au développement durable ;
  • un argument écologique, en renvoyant ou non au concept du développement durable ;
  • un argument social, sociétal ou économique présenté comme lié au développement durable. »

La même Recommandation prévoit en son point 1 relatif aux « Impacts éco-citoyens », que :

« La publicité doit s’inscrire dans un contexte de responsabilité sociale en tenant notamment compte de la sensibilité du corps social à un moment donné et du contexte de diffusion de la publicité.

Sans qu’il soit fait référence au concept de développement durable ou à l’une de ses composantes, une publicité doit éviter de véhiculer un message contraire aux principes communément admis du développement durable. Dans cet esprit :

1.1 La publicité doit proscrire toute représentation susceptible de banaliser, ou de valoriser des pratiques ou idées contraires aux objectifs du développement durable. A titre d’exemple :

[…] b/ La publicité ne saurait inciter directement ou indirectement à des modes de consommation excessifs ou contraires aux principes de l’économie circulaire. A ce titre, elle ne doit pas inciter au gaspillage par la mise au rebut d’un produit ou sa dégradation alors que celui-ci fonctionne encore et/ou qu’il demeure consommable, sans tenir compte – lorsque cela est possible – de sa durabilité, de sa réutilisation, de sa seconde vie ou de son recyclage.

c/ La publicité doit éviter, dans son discours, de minimiser les conséquences de la consommation de produits susceptibles d’affecter l’environnement. »

(…)

1.2 La publicité ne doit pas discréditer les principes et objectifs, non plus que les conseils ou solutions, communément admis en matière de développement durable. La publicité ne saurait détourner de leur finalité les messages de protection de l’environnement, ni les mesures prises dans ce domaine ».

Le Jury constate que la critique porte sur l’allégation « Peu importe où la nuit vous emmène, la légendaire Classe G se distingue toujours » lue à la lumière du visuel représentant une photographie du véhicule de face, roulant sur une route bitumée phares allumés, où ne figure que l’étiquette CO² imposée par la réglementation, sur laquelle apparaît en rouge la classification G.

Le Jury rappelle que l’étiquette relative à la classe d’émission de dioxyde de carbone des véhicules (étiquette CO²) a été instaurée par la loi du 22 août 2021 dite « loi Climat et résilience » et le décret n° 2021-1840 du 28 décembre 2021 relatif au champ d’application et l’arrêté relatif aux modalités de présentation de l’étiquette. Celle-ci doit être insérée dans toute publicité en faveur d’une voiture particulière sur tous les supports, excepté le support radio ou l’audio digital. La classe d’émission G correspond aux véhicules les plus polluants au roulage.

Le Jury considère que la seule apposition de cette étiquette sur une publicité, quel que soit le niveau d’émission retenu, ne constitue pas un argument écologique au sens de la Recommandation précité, qui rendrait celle-ci applicable, mais la simple exécution d’une obligation légale. Il en va différemment si cette étiquette est utilisée comme argument publicitaire, par exemple lorsqu’une allégation figurant dans la communication commerciale s’y réfère, expressément ou implicitement.

En l’espèce, le Jury, qui doit tenir compte du fait que la dénomination du modèle promu (« classe G ») préexistait à l’obligation d’apposer une étiquette CO² sur une publicité en faveur d’un véhicule automobile, estime qu’il ne peut être reproché à l’annonceur d’avoir à la fois rappelé le nom du modèle et, comme il en avait l’obligation légale, fait figurer sa classe d’émission à travers la reproduction de l’étiquette réglementaire.

Le Jury relève que l’allégation selon laquelle la « légendaire Classe G se distingue toujours » présente certes une ambiguïté en ce qu’elle n’explicite pas les qualités attachées à ce véhicule qui le distingueraient des autres modèles de la marque, alors même que la photographie représente celui-ci roulant dans la pénombre du crépuscule sans aucune mention de ses performances ni mise en valeur particulière de ses attributs esthétiques ou pratiques.

Toutefois, le Jury constate que, ainsi que l’a indiqué en substance l’annonceur en séance, la singularité de la Classe G au sein de l’offre commerciale de ce dernier tient à son format « cubique » évocateur des véhicules militaires, très différent de celui des autres modèles de la marque. Ce caractère distinctif sur le plan visuel est connu du public abonné aux informations du compte Instagram officiel de la marque auquel s’adresse la publicité critiquée. Le Jury constate en outre que d’autres véhicules de la marque Mercedes relèvent de la catégorie d’émission G, de sorte que la voiture Classe G ne « se distingue » pas par son impact carbone parmi l’ensemble des modèles commercialisés par cet annonceur. Dans ces conditions, il considère que cette publicité ne crée pas de lien, explicite ou implicite, entre le fait que cette gamme de véhicules « se distingue » et son caractère particulièrement polluant. Elle ne contient pas davantage d’allégation jetant le discrédit sur les mesures prises par l’Etat dans le domaine de la protection de l’environnement.

Le Jury en conclut ainsi que la publicité en cause n’utilise pas d’éléments non compatibles avec les objectifs du développement durable, ni aucun argument faisant référence au développement durable, ni enfin aucun argument social, sociétal ou économique présenté comme lié au développement durable. Une telle présentation ne relève donc pas du champ d’application de la Recommandation « Développement durable ».

En conséquence de ce qui précède, la plainte n’est pas fondée.

Le Jury précise enfin, en écho aux termes de la plainte, que si aucune règle déontologique n’interdit de faire la publicité d’un véhicule automobile dont la classe d’émission est G, il appartient à l’annonceur de faire preuve d’une particulière vigilance dans la promotion de tels produits eu égard à leur impact environnemental et à la sensibilité du corps social. Cette vigilance s’impose d’autant plus, en l’occurrence, compte tenu de l’homonymie du nom du modèle et de sa classe d’émission.

Avis adopté le 4 novembre 2022 par M. Lallet, Président, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mmes Lenain, Boissier et Charlot, MM. Depincé, Le Gouvello, Lucas-Boursier et Thomelin.


Publicité Mercedes Classe G