MARCEL – Internet – Plainte partiellement fondée

Avis publié le 7 juin 2022
MARCEL – 836/22
Plainte partiellement fondée

 Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • après avoir entendu la représentante de la société Marcel, lors d’une séance tenue sous la forme d’une visioconférence,
  • et après en avoir débattu,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 21 mars 2022, d’une plainte d’un particulier, afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité en faveur de la société Marcel, pour promouvoir son offre de véhicules avec chauffeurs.

La publicité en cause, diffusée sur la page du réseau social Linkedin de la marque, montre une main ouverte tenant des graines à planter. En bas à droite de l’image, trois arbres stylisés de couleur verte accompagnent la mention « marcel x ecotree ».

Les textes accompagnant cette image sont : « Du 21 mars au 22 avril, Marcel et EcoTree France deviennent partenaires pour contribuer à la conservation et à la sauvegarde patrimoniale des forêts françaises et des écosystèmes associés. Pour chaque course effectuée sur la période et quelle que soit la gamme de véhicule choisie par le client, nous nous engageons à reverser 1€ à EcoTree France pour la plantation d’arbres. Un projet français qui permet de répondre à une problématique environnementale majeure via la reforestation, la préservation de nos forêts et de la biodiversité. « Cette opération ponctuelle permet d’agir efficacement dans un contexte de changement climatique. Grâce à notre partenariat avec EcoTree France, se sont plusieurs centaines d’arbres qui pourront être plantés au sein de forêts françaises.” – Audrey Goudin (Cahan), directrice Générale Marcel. En savoir plus https://bit.ly/3ueFccf #moisdelaforet #journeedelaterre #engagement #Marcel #Ecotree ».

2. Les arguments échangés

Le plaignant dénonce l’utilisation d’allégations de réduction de l’impact environnemental grâce à la plantation de quelques arbres, pour un service de VTC qui utilise des véhicules thermiques.

La société Marcel a été informée, par courriel recommandé avec avis de réception du 5 avril 2022, de la plainte dont copie leur a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle admet que le secteur du transport dans lequel Marcel évolue n’est pas sans impact sur l’environnement.

La société fait valoir que, depuis son lancement en 2014, elle prend des engagements concrets pour construire un modèle durable et économiquement viable, en limitant son impact environnemental et en valorisant son impact sociétal.

La démarche RSE de l’entreprise est ancrée au cœur de son ADN et s’articule autour de trois piliers :

  • environnemental : Marcel a à cœur de contribuer à la neutralité carbone mondiale via différentes actions concrètes en interne et à l’externe avec ses partenaires. Depuis 2019, la société compense l’intégralité des émissions de CO2 générées par ses trajets grâce à la Fondation GoodPlanet de Yann Arthus Bertrand ;
  • sociétal : les collaborateurs, premiers acteurs du succès de la société, sont l’une de ses préoccupations essentielles. Marcel s’engage à renforcer leur employabilité, à favoriser l’égalité des chances et la diversité, et apporte une attention particulière à leur bien-être au travail.
  • économique : Marcel s’efforce de construire un modèle gagnant pour l’ensemble des parties prenantes : clients, chauffeurs et Marcel. À l’écoute de ses chauffeurs partenaires et de ses clients, la société tient à proposer un service de qualité, à un prix juste et optimisé, avec l’une des commissions les plus basses du marché (20% TTC).

A travers ses engagements environnementaux, elle contribue à la neutralité carbone. Chaque année, une mesure des émissions de CO2 générées par ses activités est réalisée. Elles sont ensuite intégralement compensées via des investissements dédiés à des projets à impact positif pour la planète.

A l’occasion du mois de la forêt, Marcel a décidé de s’engager aussi auprès d’EcoTree pour contribuer à la création de puits de carbone via la conservation et la sauvegarde patrimoniale des forêts françaises et des écosystèmes associés. En plus des émissions compensées par les trajets réalisés durant la période de l’opération (du 21 mars au 22 avril 2022 inclus), Marcel reversera un euro par course réalisée, quel que soit le type de véhicules choisi par les clients pour participer à la gestion durable de la forêt française.

Ce projet est né quelques jours après le rapport du GIEC qui rappelle la nécessité de poursuivre la baisse des émissions carbone. En mettant en place cette opération, Marcel souhaite répondre à une problématique environnementale majeure grâce à la création de puits de carbone par l’entretien et le renouvellement de la forêt et de sa biodiversité.

Ce projet défend des valeurs environnementales et aussi sociétales permettant ainsi le maintien d’emplois locaux au sein de la filière forestière française.

3. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle que la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP dispose :

  • au titre de la véracité des actions (point 2) :
    • « 1. La publicité ne doit pas induire le public en erreur sur la réalité des actions de l’annonceur ni sur les propriétés de ses produits en matière de développement durable ;
    • 2. Les actions des annonceurs et les propriétés de leurs produits dans ce domaine doivent être significatives pour pouvoir être revendiquées ;
    • 3. L’annonceur doit être en mesure de justifier les arguments ayant trait au développement durable au moyen d’éléments sérieux, objectifs et vérifiables au moment de la publicité (…) »
  • au titre de la proportionnalité (point 3) :
    • « 1. Le message publicitaire doit exprimer avec justesse l’action de l’annonceur ou les propriétés de ses produits, en adéquation avec les éléments transmissibles. / La réalité de ces actions ou propriétés peut s’apprécier au regard des différents piliers du développement durable, des différents types d’impacts possibles et des différentes étapes de la vie du produit ;
    • 2. Le message publicitaire doit être proportionné à l’ampleur des actions menées par l’annonceur en matière de développement durable ainsi qu’aux propriétés du produit dont il fait la promotion; »
  • Au titre des dispositifs complexes (point 9) : « Certains dispositifs reconnus peuvent reposer sur des démonstrations très techniques ou sur des montages complexes dans lesquels le bénéfice en matière de développement durable est indirect (ex. dispositifs dits “électricité verte”, “compensation carbone”, “Investissement Socialement Responsable”, etc.). / Lorsque la publicité fait référence à ce type de dispositif :
    • 9.1 Elle doit veiller à ne pas induire le public en erreur sur la portée réelle du mécanisme. /
    • 9.2 Si elle utilise des raccourcis simplificateurs à visée pédagogique, elle doit apporter au public les explications nécessaires, aux conditions définies par l’article 4.4 de ce texte.
    • 9.3 L’avantage procuré par les dispositifs de nature à compenser indirectement l’impact négatif d’un produit ou d’une activité ne doit pas être attribué directement au produit ou à l’activité. »

Le Jury relève que la publicité litigieuse fait la promotion d’un partenariat entre l’annonceur, la société Marcel, et la société EcoTree, par lequel le premier s’engage à verser un euro à la seconde pour chaque course effectuée entre le 21 mars et le 22 avril, en vue de planter des arbres dans les forêts françaises.

Le Jury considère que les règles déontologiques précitées ne font pas obligation, de manière générale, à un annonceur qui entend valoriser un programme de compensation carbone de préciser dans la publicité en cause le bilan carbone de son activité ou de rappeler le caractère polluant de celle-ci, qui se déduit logiquement de la conduite même de ce programme. Il doit en revanche faire preuve d’une particulière vigilance dans la promotion d’un tel programme afin de ne pas induire en erreur le consommateur sur la portée réelle du mécanisme, et veiller à ce que le message ne comporte pas d’assertions disproportionnées au regard de son impact réel, lequel doit être significatif.

En l’espèce, le Jury relève que la première partie de la publicité critiquée présente l’opération promue en des termes mesurés, l’ambition du partenariat étant de « contribuer à la conservation et à la sauvegarde patrimoniale des forêts françaises et des écosystèmes associés ». Le Jury comprend en outre que le « projet français qui permet de répondre à une problématique environnementale majeure via la reforestation, la préservation de nos forêts et de la biodiversité » ne vise pas l’opération elle-même, mais l’action d’Eco Tree, partenaire de Marcel. Dans ces conditions, cette partie de la publicité n’apparaît pas critiquable au regard des règles déontologiques.

En revanche, la partie de la publicité qui se présente comme une citation allègue que « cette opération ponctuelle permet d’agir efficacement dans un contexte de changement climatique », dès lors que « plusieurs centaines d’arbres (…) pourront être plantés au sein de forêts françaises. ». Toutefois, la seule plantation, ponctuelle, de quelques centaines d’arbres (428 selon le site internet de l’annonceur) apparaît peu significative et, en tout état de cause, n’entraîne qu’un impact très limité sur le changement climatique alors au demeurant que l’activité de l’annonceur contribue quant à elle à ce changement dans la durée. Si l’annonceur indique par ailleurs compenser intégralement les émissions de CO2 liées aux trajets effectués par les VTC qu’il gère, il résulte des termes mêmes de la publicité mise en cause que seul le partenariat avec EcoTree en vue de la plantation d’arbres pendant un mois est visé par les allégations litigieuses. Par suite, le Jury estime que cette partie de la publicité, en ce qu’elle attache des vertus excessives sur le plan environnemental à l’opération promue au regard de la réalité de ses effets en la matière, méconnaît l’exigence de proportionnalité du message posée au point 3.2 de la Recommandation « Développement durable ».

En conséquence de ce qui précède, le Jury est d’avis que la publicité en cause méconnaît, dans cette dernière mesure, ces dispositions déontologiques.

Avis adopté le 6 mai 2022 par M Lallet, Président, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mmes Lenain, Boissier et Charlot ainsi que MM. Depincé, Le Gouvello, Lucas-Boursier et Thomelin.

Pour visualiser la publicité Marcel, cliquez ici.