KYMCO – Internet – Plainte fondée

Avis publié le 9 octobre 2020
KYMCO – 674/20
Plainte fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • et après en avoir débattu dans les conditions prévues par l’article 12 du règlement intérieur,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 8 juillet 2020, d’une plainte émanant d’un particulier, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur de publicités, diffusées sur Internet en faveur de la société Kymco, pour promouvoir des scooters de cette marque.

Les publicités en cause montrent différents modèles de scooters, à l’arrêt. Au-dessus ou à côté de ces reproductions figure une boîte de conserve largement ouverte à l’aide d’une clef à sardines, dans laquelle sont alignées quatre sardines. Ces visuels sont accompagnés d’informations concernant les offres et du texte : « Choisissez des transports moins serrés ».

2. Les arguments échangés 

Le plaignant estime que cette publicité est contraire au point 9 (Impacts éco-citoyens) de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP, en particulier au point 9.2 : « La publicité ne doit pas discréditer les principes et objectifs, non plus que les conseils ou solutions, communément admis en matière de développement durable ». Elle donne en effet une image négative des transports en commun (métro, RER, bus…), dans lequel les passagers seraient « serrés comme des sardines », et les incite en conséquence à privilégier le transport en scooter et incite à acheter et utiliser un scooter, qui est un mode de transport bien plus polluant.

La société Kymco a été informée, par courriel avec accusé de réception du 30 juillet 2020, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle a été également informée que cette affaire ferait l’objet d’un examen dans le cadre de la procédure simplifiée prévue à l’article 12 du règlement intérieur du Jury.

La société fait valoir que la campagne publicitaire mise en cause n’a pas pour objet de dénigrer spécifiquement les transports en commun, mais vise tout type de transport collectif, y compris l’automobile et les deux-roues motorisés en duo. Elle vise à valoriser les moyens de locomotion individuels, en cohérence avec les recommandations gouvernementales contre la pandémie de covid-19. Elle relève par ailleurs que les publicités concernant ses concessionnaires de province ne sauraient jeter le discrédit sur l’usage du RER et du métro, qui n’existent pas localement. Elle ajoute que la métaphore de la boîte de sardines présente un caractère humoristique.

La société précise qu’elle n’est pas opposée à renoncer à ces visuels s’ils devaient être interprétés comme dénigrants à l’égard des transports en commun.

3. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle que le point 9 de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP, dans sa version applicable jusqu’au 31 juillet 2020, repris en substance au point 1 de la même Recommandation, dans sa version applicable depuis le 1er août 2020, prévoit que :

  • « La publicité doit s’inscrire dans un contexte de responsabilité sociale en tenant compte notamment de la sensibilité du corps social à un moment donné et du contexte de diffusion de la publicité. »;
  • « La publicité doit proscrire toute représentation susceptible de banaliser, et a fortiori valoriser, des pratiques ou idées contraires aux objectifs du développement durable. A titre d’exemple : / a/ La publicité doit bannir toute évocation ou représentation de comportement contraire à la protection de l’environnement et à la préservation des ressources naturelles (…), sauf dans le cas où il s’agit de le dénoncer. / b/ La publicité ne saurait inciter, directement ou indirectement, à des modes de consommation excessive ou au gaspillage d’énergies et ressources naturelles. (…).
  • et « La publicité ne doit pas discréditer les principes et objectifs, non plus que les conseils ou solutions, communément admis en matière de développement durable. (…). ».

Le Jury relève que les publicités visées par la plainte entendent clairement opposer l’ergonomie et le confort de l’utilisation des scooters de la marque à la promiscuité et aux désagréments liés à l’utilisation d’autres modes de transport. Il ne peut être sérieusement soutenu que ces derniers feraient notamment allusion à la voiture. Le visuel litigieux et le texte qui l’accompagnent, qui évoquent l’expression « serré(e)s comme des sardines », font clairement référence, dans les représentations collectives, aux transports en commun bondés à certaines heures de la journée. La circonstance, mise en avant par la société Kymco, que ces publicités s’adressent pour partie à des consommateurs résidant dans des villes de province dépourvues de RER et de métro est dénuée de pertinence sans incidence. Outre que certaines de ces villes disposent d’un métro, elles sont toutes dotées d’un réseau de bus susceptible de connaître des épisodes de saturation.

Dans ces conditions, le Jury considère que ces publicités présentent un caractère dénigrant à l’égard des transports en commun et incitent à un comportement contraire à la protection de l’environnement et de nature à contribuer au gaspillage de ressources naturelles en invitant les consommateurs à utiliser des scooters, plus polluants, de préférence aux transports collectifs, pour des trajets qui pourraient être accomplis au moyen de ces derniers.

En conséquence de ce qui précède, le Jury est d’avis que ces publicités méconnaissent le point 9 de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP, repris au point 1 de cette Recommandation dans sa version en vigueur depuis le 1er août 2020. Il prend note de l’intention de la société de ne plus recourir à ce message dans ses futures communications commerciales.

Avis adopté le 10 septembre 2020 par M Lallet, Président, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mmes Charlot, Drecq et Lenain, MM. Depincé, Lacan, Leers et Lucas-Boursier.

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