JULES – Courriel publicitaire – Plainte fondée

Avis publié le 1er juillet 2022
JULES – 846/22
Plainte fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • et après en avoir débattu dans les conditions prévues par l’article 13 du règlement intérieur,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 7 avril 2022, d’une plainte, émanant d’un particulier, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité en faveur de la société Jules, pour promouvoir sa collection de vêtements pour Homme « In progress ».

La publicité en cause, diffusée par courriel publicitaire, montre différents articles de mode masculine, (tea-shirts, polos, jean, sweat-shirts…), accompagnés de leur prix.

Le texte accompagnant cette image est : « Oui à la mode durable et accessible ! », « Parce que nous sommes convaincus que s’habiller responsable ne doit jamais être un luxe… ».

Au-dessous des vignettes présentant les articles, figurent la boucle de Moebius, accompagnant le texte « 15% de coton recyclé » et un pictogramme représentant la Terre, accompagnant le texte « coton issu de l’agriculture biologique ».

2. Les arguments échangés

Le plaignant considère que, sans remettre en cause les efforts de la marque pour proposer des vêtements fabriqués avec des fibres plus responsables (coton biologique ou fibres recyclées), les allégations et les pictogrammes utilisés à plusieurs reprises, en eux-mêmes et également en regard du faible pourcentage de matières recyclées dans la plupart des vêtements proposés (15 ou 30%), ne respectent pas les points 7 (vocabulaire), 3 (proportionnalité) et 8 (présentation visuelle) de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP.

Le public est induit en erreur sur la réalité du moindre impact environnemental des produits proposés par la marque. Ce fait est d’autant plus regrettable que cette marque a déjà fait l’objet d’une plainte jugée fondée en 2020 pour les mêmes raisons.

La société Jules a été informée, par courrier recommandé avec avis de réception du 10 mai 2022, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle a été également informée que cette affaire ferait l’objet d’un examen dans le cadre de la procédure simplifiée prévue à l’article 13 du règlement intérieur du Jury.

La société Jules fait valoir que « Men In Progress » est la signature de l’entreprise. Elle permet de soutenir le point de vue de la marque, à la fois sur la vision d’une nouvelle masculinité et d’une démarche plus responsable.

Consciente des enjeux actuels, la société propose avec sa gamme « In Progress », des vêtements fabriqués avec des matières plus durables comme du coton issu de l’agriculture biologique, du coton recyclé, du polyester recyclé… Cette collection s’inscrit dans une démarche qui contribue à une mode plus responsable, elle est identifiable via les étiquettes vertes en magasin ou par un bandeau vert « in progress » sur le site web.

Dans ce cadre, les communications commerciales mettent en avant les produits issus de cette gamme.

La société précise qu’elle est attachée à une démarche d’amélioration continue et renforce le contrôle de ses communications, plus particulièrement sur les aspects environnementaux.

3. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle que la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP, prévoit que :

  • au titre de la véracité des actions (point 2) :

« 2.1. La publicité ne doit pas induire le public en erreur sur la réalité des actions de l’annonceur ni sur les propriétés de ses produits en matière de développement durable ; / 2.2. Les actions des annonceurs et les propriétés de leurs produits dans ce domaine doivent être significatives pour pouvoir être revendiquées ; / 2.3. L’annonceur doit être en mesure de justifier les arguments ayant trait au développement durable au moyen d’éléments sérieux, objectifs et vérifiables au moment de la publicité (…) ».

  • au titre de la proportionnalité du message (point 3) :

« 3.1 Le message publicitaire doit exprimer avec justesse l’action de l’annonceur ou les propriétés de ses produits, en adéquation avec les éléments justificatifs transmissibles. (…) /

3.2 Le message publicitaire doit être proportionné à l’ampleur des actions menées par l’annonceur en matière de développement durable ainsi qu’aux propriétés du produit dont il fait la promotion. (…) ».

  • au titre des « Signes, labels, logos, symboles, auto déclarations » (point 6) :

« Les signes ou symboles ne peuvent être utilisés que si leur origine est clairement indiquée et s’il n’existe aucun risque de confusion quant à leur signification.

  • au titre du vocabulaire (point 7) :

« 7.1 Les termes et expressions utilisés ne doivent pas induire le public en erreur sur la nature et la portée des propriétés du produit ou des actions de l’annonceur en matière de développement durable.

7.2 Lorsque les termes et expressions utilisés font l’objet d’une définition fixée par une norme, ils doivent être employés dans un sens qui correspond à cette définition.

7.3 Dans le cas où il serait impossible de justifier des formulations globales (ex. : écologique, vert, éthique, responsable, préserver, équitable, durable, …), la publicité doit les relativiser en utilisant des formulations telles que “contribue à”.

  • au titre de la « Présentation visuelle ou sonore » (point 8) :

« Sans exclure leur utilisation, l’emploi d’éléments naturels ou évoquant la nature ne doit pas induire en erreur sur les propriétés environnementales du produit ou des actions de l’annonceur ; »

Le Jury relève que la publicité en cause fait la promotion de vêtements sous la bannière « Oui à la mode durable et accessible ! », explicitée par la formule « Parce que nous sommes convaincus que s’habiller responsable ne doit jamais être un luxe, nous vous proposons une gamme d’essentiels à petits prix […] ».

Le Jury, qui, à l’instar du plaignant, ne remet pas en cause les engagements de la société en matière de développement durable, considère en premier lieu que les expressions « durable » et « responsable », à défaut d’être relativisées, apparaissent disproportionnées eu égard à l’impact écologique de la fabrication de produits tels que les vêtements promus, aux nuisances environnementales qui en résultent et à l’absence de précisions quant au recyclage éventuel. La publicité méconnaît donc à ce titre les points 3 et 7 de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP.

En deuxième lieu, le Jury constate que, sous les photographies des vêtements, figure parfois un logo présentant trois flèches en cercle (boucle de Moebius, pouvant faire référence au caractère recyclé et recyclable du produit) lorsque le texte mentionne « 15% de coton recyclé », « 30 % issu de polyester recyclé » et « rembourrage polyester recyclé ». Or l’association de ces mentions et du logo, sans précision sur les composants précis des textiles, est susceptible d’induire en erreur le consommateur sur la nature des produits composant le vêtement et méconnaît ainsi les points 2 et 6 de la Recommandation précitée.

Le Jury estime en troisième lieu que le pictogramme représentant un globe terrestre, lorsque le texte indique « coton issu de l’agriculture biologique » ou « 15% de coton issu de l’agriculture biologique », établit un lien entre la protection de la planète et l’utilisation, approximative et non explicitée, de tissus issus de l’agriculture biologique, qui est de nature à induire le public en erreur sur la réalité des propriétés environnementales du produit et des actions de l’annonceur en matière de développement durable au sens des points 2.1 et 8 de la Recommandation « Développement durable ».

En conséquence de ce qui précède, le Jury est d’avis que la publicité en cause méconnaît les points précités de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP. Il relève qu’un avis publié le 20 février 2020 (JULES – 630/20) avait déjà constaté la non-conformité d’une publicité analogue de l’annonceur, mais prend acte de l’engagement de la société à communiquer conformément aux Recommandations de l’ARPP à l’avenir.

Avis adopté le 3 juin 2022 par M. Lallet, Président, Mmes Lenain et Boissier, ainsi que MM. Depincé, Le Gouvello, Lucas-Boursier et Thomelin.

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