ILLICADO – Internet – Plainte fondée

Avis publié le 5 décembre 2022
ILLICADO – 877/22
Plainte fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • et après en avoir débattu dans les conditions prévues par l’article 13 du règlement intérieur,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 26 septembre 2022, d’une plainte émanant d’un particulier, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité en faveur de la société Synedis, pour promouvoir sa gamme de cartes cadeaux Illicado.

La publicité en cause, diffusée sur la page Linkedin de la société, montre une carte sur fond de feuillage vert.

Les textes accompagnant ces images sont :

  • au-dessus de l’image : « Illicado – La carte Illicado passe au vert – Découvrez notre nouvelle gamme de cartes papier zéro plastique : Fabrication française – Production éco-responsable – Recyclage à faible impact environnemental – Toutes nos cartes illicado.com – #madeinfrance #impact #responsable #environnement » ;
  • au-dessous de l’image : « Fabrication française et éco-responsable », « Réduction de l’empreinte carbone », « Recyclage à faible impact environnemental».

2. Les arguments échangés

Le plaignant considère que la communication est disproportionnée par rapport à l’impact de l’action qui n’est par ailleurs pas affiché.

Illicado fournit en effet des cartes cadeaux pour de multiples enseignes en incitant ainsi à l’achat de biens de consommation. L’impact de la carte cadeau en elle-même est totalement négligeable (~5g CO2eq) par rapport à l’impact de l’achat (exemple : 100kg CO2 pour une console, soit 7500 fois plus) et induit le consommateur en erreur sur l’empreinte environnementale engendrée par les bons d’achats.

La communication emploie par ailleurs des termes flous et non expliqués tels que « production éco-responsable » et « recyclage à faible impact environnemental ».

La société Synedis a été informée, par courriel avec avis de réception du 10 octobre 2022, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle a été également informée que cette affaire ferait l’objet d’un examen dans le cadre de la procédure simplifiée prévue à l’article 13 du règlement intérieur du Jury.

La société fait valoir que la responsabilité sociale et environnementale est un sujet qu’elle prend à cœur. C’est pour cette raison qu’elle accorde une attention particulière à la fabrication de ses cartes, en passant du plastique au papier fabriqué en France.

Elle explique que sa volonté, lors de cette communication sur LinkedIn, était de partager cette toute première étape de la démarche RSE de l’entreprise avec ses clients. Cette action s’inscrit dans le cadre d’une démarche en cours beaucoup plus globale sur la RSE et sur la réduction de l’empreinte carbone. La société explique s’être engagée dans une démarche d’audit et de labellisation RSE avec la société Positive Workplace pour identifier les pistes de transformation de son activité pour améliorer son impact.

Dans la même dynamique, elle est également engagée depuis peu dans la réalisation d’un bilan carbone complet de ses activités avec Hello Carbo afin de construire un plan de réduction des émissions associées.

La société fait valoir que sa démarche, en postant une information sur sa nouvelle « carte papier », était sincère et n’avait pas pour objectif d’induire les consommateurs en erreur sur la véracité de ses actions RSE, ni d’exprimer une promesse globale en ne traitant qu’une étape de la démarche.

Elle a cependant pris conscience de l’importance de bien communiquer sur le sujet environnemental et sociétal : elle prendra en compte les recommandations du Jury pour ses prochains messages et veillera à mieux valoriser sa démarche dans ses futures communications. Elle sera notamment sensible à l’utilisation d’un vocabulaire approprié en justifiant des formulations globales telles que « vert » « éco-responsable » ou les relativisera dans ses communications.

La société Synedis souligne avoir d’ores et déjà retiré sa bannière afin de prendre en considération les recommandations déontologiques.

A la suite du post, elle a pris également contact avec une association luttant contre le « greenwashing » et a approfondi ses connaissances sur la communication portant sur les démarches RSE en étudiant des documents tels que le guide anti-greenwashing de l’ADEME et le document de sensibilisation et d’explications sur le Greenwashing et les règles de déontologie associées.

La société s’engage à prendre conseils auprès d’autres parties prenantes telles que l’ADEME, les associations de consommateurs et les organismes de promotion du développement durable.

3. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle que la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP, prévoit que :

  • au titre de la proportionnalité du message (point 3) :

« 3.1 Le message publicitaire doit exprimer avec justesse l’action de l’annonceur ou les propriétés de ses produits, en adéquation avec les éléments justificatifs transmissibles. (…) /

3.2 Le message publicitaire doit être proportionné à l’ampleur des actions menées par l’annonceur en matière de développement durable ainsi qu’aux propriétés du produit dont il fait la promotion. (…) ».

  • au titre du vocabulaire (point 7) :

« 7.1 Les termes et expressions utilisés ne doivent pas induire le public en erreur sur la nature et la portée des propriétés du produit ou des actions de l’annonceur en matière de développement durable.

7.2 Lorsque les termes et expressions utilisés font l’objet d’une définition fixée par une norme, ils doivent être employés dans un sens qui correspond à cette définition.

7.3 Dans le cas où il serait impossible de justifier des formulations globales (ex. : écologique, vert, éthique, responsable, préserver, équitable, durable, …), la publicité doit les relativiser en utilisant des formulations telles que “contribue à”.

7.4 Les termes, expressions ou préfixes utilisés ne doivent pas traduire indûment une absence d’impact négatif du produit ou de l’activité de l’annonceur.

7.5 Le vocabulaire technique, scientifique, ou juridique, peut être utilisé s’il est approprié et compréhensible pour les personnes auxquelles s’adresse le message publicitaire.

  • au titre de la « Présentation visuelle ou sonore » (point 8) :

« Sans exclure leur utilisation, l’emploi d’éléments naturels ou évoquant la nature ne doit pas induire en erreur sur les propriétés environnementales du produit ou des actions de l’annonceur ; ».

Le Jury relève que la publicité en cause fait la promotion d’une carte-cadeau fabriquée en France sans utilisation du plastique.

Le propos de cette publicité n’est pas d’évoquer l’incidence environnementale des biens et services qui peuvent être achetés grâce à la carte-cadeau, et aucune règle déontologique ne faisait obligation à l’annonceur de l’évoquer, le produit promu étant uniquement le support physique lui-même. La plainte ne peut donc être accueillie sur ce point.

En revanche, le Jury relève que cette publicité allègue que la carte « passe au vert » et est issue d’une production « éco-responsable », ces allégations étant renforcées par l’arrière-plan du visuel composé d’un feuillage vert, de deux pictogrammes végétaux et le « #responsable #environnement ». En dépit de l’allégation « Réduction de l’empreinte carbone », qui permet de comprendre que la fabrication et la distribution de la carte ne sont pas dépourvus de toute incidence en matière d’émissions de gaz à effet de serre, le Jury estime que cette présentation est disproportionnée au regard de la réalité de l’impact environnemental de l’activité promue, et qu’elle recourt à des formulations globales non relativisées et non justifiées. La présence très visible des feuilles vertes en arrière-plan de la carte constitue en outre l’emploi d’éléments naturels de nature à induire en erreur sur la portée des actions de l’annonceur.

En conséquence de ce qui précède, le Jury, qui prend note du retrait de cette communication à l’annonceur et des efforts qu’il indique avoir engagés tant pour réduire son impact sur l’environnement que pour se conformer, dans ses communications commerciales, aux règles de la déontologie publicitaire, est d’avis que la publicité en cause méconnaît les points précités de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP.

Avis adopté le 4 novembre 2022 par M. Lallet, Président, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mmes Lenain et Boissier, ainsi que MM. Depincé, Le Gouvello, Lucas-Boursier et Thomelin.


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