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Plainte non fondée

Avis publié le 13 mars 2023
FNPSMS – 900/23
Plainte non fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • et après en avoir débattu dans les conditions prévues par l’article 13 du règlement intérieur,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 25 novembre 2022, d’une plainte émanant d’un particulier, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité en faveur de la Fédération nationale de la production des semences de maïs et de sorgho (FNPSMS).

La publicité en cause, diffusée sur Instagram par le média Kombini, est une vidéo dans laquelle deux personnes, un homme et une femme, s’expriment face à la caméra.

Les textes apparaissant en incrustation à l’écran sont : « Le maïs, sauveur de la planète ? », « Le maïs capte du gaz carbonique, le met dans le sol et en plus il sert à alimenter l’humanité toute entière », « Le maïs, c’est vraiment la céréale qui va capter le plus de CO² et elle va pouvoir le stocker dans les sols. », « par le mécanisme de la photosynthèse, elle va pouvoir capter ce CO² aussi bien voire mieux qu’un hectare de forêt »,

Le texte accompagnant la vidéo, sur la droite de la publication est : « Des forêts de maïs pour capter le carbone ? », « En partenariat rémunéré avec AGPM. »

2. Les arguments échangés

Le plaignant énonce que la publicité met en avant une supposée capacité du maïs à capturer le carbone présent dans l’atmosphère, le présentant ainsi comme une méthode performante de réduction de l’impact du changement climatique. Or, cette allégation n’est pas vérifiée scientifiquement.

Selon le plaignant, si le maïs peut parfois participer au stockage du carbone, ce n’est en aucun cas généralisable. Il s’agit donc d’une fausse information scientifique.

La Fédération nationale de la production des semences de maïs et de sorgho (FNPSMS) a été informée, par courriel avec avis de réception du 6 janvier 2023 ainsi que par courrier recommandé avec avis de réception, distribué le 13 janvier 2023, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Sur la forme, elle s’étonne tout d’abord du choix fait par le Jury d’examiner la plainte en procédure simplifiée (sans audience contradictoire) du fait du prétendu « manquement flagrant aux dispositions déontologiques en vigueur ».

Sur le fond et d’un point de vue scientifique, les propos tenus sont en tous points justifiés.

Concernant l’allégation selon laquelle le maïs capte du CO² : la photosynthèse est un procédé naturel biologique de captation du CO² atmosphérique pour fabriquer de la biomasse. Les végétaux présentent la particularité de transformer l’énergie solaire en énergie chimique, permettant ainsi de synthétiser de la matière organique, notamment des sucres, à partir de l’eau (H2O) puisée dans le sol par les racines et du dioxyde de carbone (CO²) capté dans l’air par les feuilles. Par ce procédé naturel, du carbone présent dans le compartiment atmosphérique sous forme de CO² est ainsi transféré vers le compartiment terrestre sous forme de matière organique constitutive des plantes. Le maïs en tant que végétal capte donc du CO², ce qui n’est pas une supposition mais une réalité scientifique. (Source: https://planet-vie.ens.fr/thematigues/manipulations-en svt/la-photosynthese-generalites).

Concernant l’allégation selon laquelle le maïs est la céréale qui capte le plus de CO² : la quantité de carbone captée s’apprécie à la quantité de biomasse produite par hectare de culture. Dans le cas du maïs, la masse des atomes de carbone représente 44% de la biomasse sèche (grains, feuilles, tiges, racines). A noter qu’elle est de 45% pour les céréales à paille et protéagineux et 40% pour les oléo protéagineux. La production de biomasse dans le secteur agricole s’apprécie, quant à elle, parle rendement par hectare. Ainsi, sur la période 2017-2021, le rendement moyen du maïs en France conduit à une estimation de captation de 30,8 tonnes de CO²/ha (grains, feuilles, tiges, racines) et 24,7 tonnes de CO²/ha sans la partie racinaire. Pour le blé tendre, ce chiffre est de 24 tonnes de CO²/ha (grains, feuilles, tiges, racines) et 20,3 tonnes de C02/h8 sans la partie racinaire. Le maïs étant la céréale la plus productive en moyenne en France, c’est donc la céréale qui capte le plus carbone. (Sources : ARVALIS – Institut technique des céréales, à partir des données du modèle AMG construit avec INRAE sur le stockage de carbone dans les sols -Rendements via AGRESTE).

Concernant l’allégation selon laquelle le maïs permet de lutter contre le changement climatique : les grandes cultures, dont le maïs fait partie, fixent annuellement en France, sur 14 millions d’hectares, environ 250 millions de tonnes d’équivalent CO², ce qui est évidemment considérable et représente de l’ordre de 10 fois les quantités émises pour les produire. Chaque année, la plante maïs grain restitue en moyenne 3,6 tonnes de CO² sous forme de carbone humifié qui sert donc à fabriquer l’humus, qui est la forme de stockage de carbone organique dans les sols. C’est ce qui reste après la dégradation naturelle des racines et des résidus de culture après la récolte. L’humus est du carbone sous une forme plus pérenne qui peut donc s’accumuler dans le sol. La fonction de stockage dans les sols d’une partie de ce carbone absorbé est évidemment stratégique pour lutter efficacement contre le changement climatique. Par ailleurs, la contribution de ces cultures à l’atténuation des gaz à effet de serre ne s’arrête pas là puisqu’une part croissante de leur production permet également d’élaborer des produits biosourcés, substituables aux produits d’origine pétrolière. Par cette fonction de puits de carbone, les grandes cultures contribuent aux objectifs de l’initiative « 4p1000 » lancée par le ministère de l’Agriculture visant précisément à réduire l’impact du changement climatique. Le maïs est donc à ce titre un véritable atout contre le changement climatique, renforcée par les performances développées au point précédent (Source : https://www.arvalis.fr/infos-techniQueslvaloriser-Ia-fonction-puits-de carbone-des-cultures)

En conséquence des arguments qui précédent et de toute la littérature scientifique existante et facilement accessible sur la question, qui démontre que la publicité ne comporte pas de « fausse information scientifique », la FNPSMS demande le rejet de la plainte.

La société Kombini a également été informée de la plainte.

Elle fait valoir que la vidéo en cause a été diffusée dans le cadre de l’activité publicitaire de Kombini et non de l’activité éditoriale.

Lorsque les vidéos portent sur les sujets liés à l’environnement et au développement durable, la société demande toujours à l’annonceur s’il est en mesure de justifier les informations et éléments dont il va faire état dans la vidéo. En l’espèce, les propos tenus ont été justifiés par l’annonceur. Ainsi, l’annonceur a fourni à Kombini, les justifications qui correspondent en substance aux observations retranscrites ci-dessus.

La société indique avoir mis en place un processus avant diffusion de la vidéo afin d’éviter que le message véhiculé par l’annonceur ne soit contraire aux recommandations publicitaires, et notamment à celle du développement durable. Kombini demande à l’annonceur que le message qu’il souhaite diffuser exprime avec justesse son action. L’objectif est que le message soit clair et n’induise pas en erreur le public.

Kombini va également demander à l’annonceur si les arguments et les faits énoncés dans la vidéo sont exacts et justifiables avant de procéder à la diffusion. Si l’annonceur assure et justifie que cela est le cas, Kombini procède à la diffusion.

Enfin, la société ajoute qu’il n’est pas dans l’intention de la société de diffuser une vidéo qui ne serait pas respectueuse de la réglementation publicitaire sur le développement durable. Elle fait en sorte que ses vidéos respectent au mieux les recommandations publicitaires émises par l’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité. Pour ce faire, elle met régulièrement en place des formations sur les règles applicables en matière publicitaire.

3. L’analyse du Jury

A titre liminaire, le Jury rappelle que l’article 13 de son règlement intérieur lui permet de traiter en procédure simplifiée des plaintes contre des publicités qui paraissent constitutives d’un manquement manifeste aux règles déontologiques, au vu des éléments dont il dispose – c’est-à-dire, à ce stade de la procédure, de la plainte, des éléments fournis par le plaignant et d’informations librement accessibles en ligne. Le traitement en procédure simplifiée ne préjuge toutefois pas du sort réservé à la plainte, l’avis du Jury tenant compte, le cas échéant, des observations présentées par les responsables de la publicité. Il y a lieu de rappeler que, conformément au même article 13, ces derniers peuvent demander, dans les quinze jours suivant la réception de la plainte, à être entendus par le Jury. Dans ce cas, l’affaire est examinée dans le cadre de la procédure normale. Les intéressés ne sont donc privés d’aucune garantie.

Le Jury rappelle que la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP, prévoit que :

  • au titre de la véracité des actions (point 2) :

« 2.1. La publicité ne doit pas induire le public en erreur sur la réalité des actions de l’annonceur ni sur les propriétés de ses produits en matière de développement durable ; /

2.2. Les actions des annonceurs et les propriétés de leurs produits dans ce domaine doivent être significatives pour pouvoir être revendiquées ; /

2.3. L’annonceur doit être en mesure de justifier les arguments ayant trait au développement durable au moyen d’éléments sérieux, objectifs et vérifiables au moment de la publicité (…) »

  • au titre de la proportionnalité du message (point 3) :

« 3.1 Le message publicitaire doit exprimer avec justesse l’action de l’annonceur ou les propriétés de ses produits, en adéquation avec les éléments justificatifs transmissibles. (…) /

3.2 Le message publicitaire doit être proportionné à l’ampleur des actions menées par l’annonceur en matière de développement durable ainsi qu’aux propriétés du produit dont il fait la promotion. (…) ».

  • au titre de la clarté du message (point 4) :

« 4.1. L’annonceur doit indiquer dans la publicité en quoi ses activités ou ses produits présentent les qualités revendiquées ; / 4.2. Si l’argument publicitaire n’est valable que dans un contexte particulier, ce dernier doit être présenté clairement. / 4.3. Lorsqu’une explicitation est nécessaire, celle-ci doit être claire, lisible ou audible et, donc, répondre aux exigences de la Recommandation « Mentions et renvois » de l’ARPP (…) ».

Le Jury relève que la publicité en cause présente le maïs comme la céréale qui capte le plus de dioxyde de carbone, dans des proportions équivalentes voire supérieures à un hectare de forêt. Elle suggère, sous la forme interrogative, que le maïs serait un « sauveur de la planète ».

Le Jury observe que le plaignant se borne à mettre en doute la véracité de l’allégation selon laquelle le maïs peut capter du CO2 ou, à tout le moins, soutient qu’une telle assertion ne serait pas « généralisable », cette captation ne se produisant que « parfois », sans plus de précision.

Or il n’est pas contestable que, comme d’autres céréales, le maïs contribue à la captation de CO2, à un double titre : d’une part, lorsque la plante pousse, la photosynthèse permet l’absorption de dioxyde de carbone en contrepartie du rejet de dioxygène. ; d’autre part, la décomposition sur place des résidus de la plante permet leur transformation en matière organique par les organismes vivants présents, et le stockage de CO2 dans les sols. Ce bénéfice est d’ailleurs à l’origine de l’initiative « 4 pour 1000 », entérinée lors de la COP21 de 2015 : l’augmentation de la matière organique des sols agricoles chaque année de 4 grammes pour mille grammes de CO2 permettrait de compenser l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre produits par la planète en un an.

Le Jury constate en outre que le plaignant n’a pas produit d’observations en réponse à celles de l’annonceur, remettant en doute les allégations de ce dernier ou précisant les termes de sa plainte.

Dans ces conditions, et alors que le plaignant ne conteste ni la référence au sauvetage de la planète, ni les différentes comparaisons auxquelles la publicité litigieuse procède (entre céréales et avec la forêt), pas plus qu’il ne lui reproche un quelconque manquement à l’exigence de clarté résultant du point 4 de la Recommandation « Développement durable », notamment l’absence de renvois aux sources utilisées, le Jury est d’avis que la plainte, telle qu’elle est formulée, ne peut être accueillie.

Avis adopté le 10 février 2023 par le Jury de déontologie publicitaire, composé de M. Lallet, Président, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mmes Lenain, Charlot et Boissier, MM. Depincé, Le Gouvello, Lucas-Boursier et Thomelin.


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