DPD – Véhicule publicitaire – Plainte fondée

Avis publié le 6 septembre 2021
DPD – 752/21
Plainte fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • et après en avoir débattu dans les conditions prévues par l’article 12 du règlement intérieur,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 10 avril 2021, d’une plainte émanant d’un particulier, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur, d’une publicité diffusée sur un véhicule de la société DPD, pour promouvoir son offre de véhicules électriques.

La publicité en cause est apposée à l’arrière et sur le flanc d’un véhicule DPD, où figurent les mentions : « Livraison 100% verte dans votre ville », « 100% électrique » et « Zéro émission » ainsi que le dessin de feuilles d’arbres, de couleur verte.

2. Les arguments échangés

Le plaignant considère que ces éléments ne respectent pas la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP, en particulier le point 2 relatif à la Proportionnalité des messages. La propriété « zéro émission » ne concernant qu’une étape du cycle de vie du véhicule, son fonctionnement, cela devrait être précisé.

De plus l’allégation “Livraison 100% verte” est globalisante.

Cette publicité ne respecte pas non plus le point 7 « Présentation visuelle ou sonore » de la Recommandation, la fabrication, l’usage et la fin de vie d’un véhicule, même à motorisation électrique, ayant de multiples impacts sur l’environnement.

Enfin, l’utilisation des feuilles d’arbres et de la couleur verte sur un tel véhicule est abusive.

Par ailleurs, le plaignant relève que le JDP a rendu le 14 août 2020, un avis de plainte fondée pour un marquage tout à fait similaire sur un autre camion du groupe DPD. Il regrette que l’annonceur n’ait pas tenu compte des remarques du Jury.

La société DPD a été informée, par courriel avec accusé de réception du 5 mai 2021, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle a été également informée que cette affaire ferait l’objet d’un examen dans le cadre de la procédure simplifiée prévue à l’article 12 du règlement intérieur du Jury.

Elle fait valoir que DPD France est une filiale détenue à 100% par GeoPost, elle-même détenue à 100% par le Groupe La Poste. GeoPost détient également Chronopost.

DPD France, comme Chronopost, appose de la publicité sur les véhicules qui réalisent les opérations de transport pour son compte.

La photographie jointe au dépôt de plainte présente un véhicule FN-177-PN portant à l’arrière du véhicule la mention « Livraison 100% verte dans votre ville », « Prestataire », « 100% électrique » ne serait pas un véhicule effectuant une prestation de transport pour le compte de DPD France.

En effet, la commune de SCEAUX est couverte par l’agence DPD France – 094 qui a précisé  qu’à date le secteur est livré uniquement au moyen de véhicules thermiques. Par ailleurs, les éléments de publicité utilisés par DPD France font mention de : « livraison 0% émission » ; « 100% électrique ». Il pourrait s’agir d’une publicité mise en œuvre par Chronopost.

La société DPD a donc informé la Direction de la société Chronopost de la saisine du Jury.

La société Chronopost explique qu’elle est une filiale de GeoPost/DPDgroup spécialisée « dans le transport express de colis de moins de 30 kilogrammes en France et à l’international pour le compte de ses clients professionnels et de leurs clients destinataires professionnels ou consommateurs ».

Chronopost exerce son activité de livraison de colis dans le cadre réglementaire de transporteur et de commissionnaire de transport. L’accès à ces professions est réglementé respectivement aux articles R.3211-7 et R.1422-2 du code des transports.

Pour son activité, Chronopost utilise, directement ou par l’intermédiaire de transporteurs sous-traitants, des véhicules utilitaires légers. Mais les véhicules ne sont pas, en tant que tels, le produit ou service dont il est question dans la communication litigieuse.

En outre, cette communication diffusée par affichage mobile avait pour but de promouvoir la continuité des prestations de transport de Chronopost pendant la crise sanitaire et non pas, le type de véhicule utilisé.

Aucune des conditions d’accès aux professions de transporteur et de commissionnaire de transport ne concerne l’utilisation de véhicule électrique.

Chronopost a décidé d’investir dans des véhicules électriques qui n’émettent aucune émission de CO2 à l’occasion des services qu’elle rend. Elle le fait savoir – comme d’ailleurs ses concurrents – par les mentions « véhicule électrique » et « zéro émission » sur ses véhicules électriques.

A supposer que de telles mentions sur ses véhicules puissent être qualifiées de publicitaires, elles sont exactes et proportionnées au sens de l’article 2 de la Recommandation Développement Durable rapportées à l’activité de Chronopost.

Sachant que la Recommandation propose des définitions in fine :

« Produit : tout bien et service. » En l’espèce, il s’agit du service de livraison de colis de Chronopost.

« Cycle de vie : étapes consécutives et corrélées de la vie d’un produit, depuis le stade de sa production jusqu’à celui de son élimination finale. » En l’espèce, les différentes étapes du service sont : la commande de livraison de colis, le transport de colis, et la livraison de colis, le véhicule étant utilisé dans le cadre des prestations de transport.

« Impact : influence sur l’environnement ou sur la société, préjudiciable ou bénéfique, qui résulte entièrement ou partiellement des activités ou produits d’un annonceur. Par exemple, s’agissant d’environnement, l’impact négatif peut s’exprimer en termes de pollution, d’émissions de gaz à effet de serre ou de réduction de biodiversité, entre autres. » En l’espèce, le message est « zéro émission » de gaz à effet de serre.

« Annonceur : la marque au titre de laquelle est émise la publicité et, le cas échéant, l’entreprise à laquelle elle appartient, si et seulement si cette appartenance est revendiquée. » En l’espèce il s’agit de Chronopost.

Un annonceur ne doit donc pas mettre en avant les bénéfices pour l’environnement d’un produit ou service si, par ailleurs, à d’autres étapes du cycle de vie du produit ou service, il aurait des aspects négatifs. C’est le service de livraison de colis de Chronopost qu’il faut considérer, en lien avec lequel les messages incriminés se rapportent. Or tout au long de la vie de ce service, l’utilisation des véhicules sur lesquels les mentions incriminées sont apposées occasionne « zéro émission » parce qu’ils sont « 100% électrique ». Ces mentions sont vraies et proportionnées en lien avec le service considéré.

La prise en compte de l’activité de l’annonceur dans l’appréciation des éléments publicitaires doit conduire le Jury à considérer que les mentions incriminées sont proportionnées aux actions de Chronopost.

Un consommateur raisonnable ne peut être trompé sur le sens de ce message : il verra qu’il est lié à l’activité de services de livraison de colis, c’est-à-dire uniquement pendant la phase de roulage des véhicules. Il n’est donc pas justifié de reprocher à Chronopost de ne pas avoir apporté cette précision car Chronopost n’est pas impliquée dans les autres phases de la vie des véhicules, notamment dans sa phase de construction.

Quant aux éléments visuels, la présence d’une « feuille d’arbre stylisée » n’est nullement trompeuse ou disproportionnée, elle se borne à évoquer le bénéfice indéniable des véhicules « 100% électrique » et donc « zéro émission » en lien avec le service de livraison de colis de Chronopost.

L’annonceur considère en conséquence que les éléments publicitaires ne semblent pas relever d’un manquement aux règles professionnelles et déontologiques, et encore moins, d’un « manquement flagrant » au sens de l’article 12 du Règlement intérieur du JDP.

Enfin, le plaignant indique que DPD n’aurait pas pris en compte les remarques du JDP et son avis rendu à l’encontre de DPD France le 15 mai 2020. Cependant, l’annonceur affirme avoir pris des mesures depuis le mois d’avril 2021, pour améliorer le sens de ses messages et a décidé de modifier les éléments de langage qui figurent sur ses supports de communication.

Les termes « Livraison 100% verte dans votre ville » et « Zéro émission » sont ainsi remplacés par des messages plus précis et notamment : le terme « Livraison 100% verte dans votre ville» va être remplacé par « Votre ville livrée à 100% en véhicules à faibles émissions», le terme « Zéro émission » est également modifié par celui “Livraison Zéro émission ».

Le marquage des véhicules en circulation va également être adapté par l’apposition d’un sticker « * en phase de livraison » sur la face arrière du véhicule et sur les 2 côtés (pour tempérer la communication antérieure). La mise en place de ce sticker sur les véhicules existants, pour des raisons de coûts et de contraintes techniques, ne pourra cependant se faire sans un certain délai afin de mobiliser plus de 800 véhicules des transporteurs sous-traitants, et ceci toute France métropolitaine. En outre, les délais de production des fournisseurs sont actuellement de plus de 6 semaines, compte tenu des difficultés d’approvisionnement en matières premières.

3. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle que la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP prévoit que :

« 2. PROPORTIONNALITÉ DES MESSAGES

2.1 Le message publicitaire doit exprimer avec justesse l’action de l’annonceur ou les propriétés de ses produits, en adéquation avec les éléments justificatifs dont il dispose. La réalité de ces actions ou propriétés peut s’apprécier au regard des différents piliers du développement durable, des différents types d’impacts possibles et des différentes étapes de la vie du produit.

2.2 Le message publicitaire doit être proportionné à l’ampleur des actions menées par l’annonceur en matière de développement durable ainsi qu’aux propriétés du produit dont il fait la promotion.

2.3 En particulier :/ a) L’argument publicitaire ne doit pas porter sur plus de piliers du développement durable, plus d’étapes du cycle de vie ou plus d’impacts qu’il ne peut être justifié ; / b) Le message publicitaire ne saurait suggérer indûment une absence totale d’impact négatif (…).

7. PRÉSENTATION VISUELLE OU SONORE

7.1 Les éléments visuels ou sonores doivent être utilisés de manière proportionnée à l’argument écologique et aux éléments justificatifs qui l’appuient.

7.2 Ils ne doivent pas pouvoir être perçus comme une garantie d’innocuité si cette dernière ne peut être justifiée.

7.3 Sans exclure leur utilisation, l’emploi d’éléments naturels ou évoquant la nature ne doit pas induire en erreur sur les propriétés environnementales du produit ou des actions de l’annonceur (…) »

Le Jury relève que les mentions : « Livraison 100% verte dans votre ville », « 100% électrique » et « Zéro émission » accompagnées du dessin de feuilles d’arbres de couleur verte, n’indiquent pas qu’il s’agit d’une absence d’émissions de CO₂ pendant la seule phase de roulage, et non sur l’ensemble du cycle de vie du véhicule. Ainsi qu’il l’avait déjà retenu dans l’avis n°659/20 publié le 14 août 2020, il estime que cette mention, non explicitée et assortie d’une feuille d’arbre stylisée, est disproportionnée et suggère indûment une absence d’impact négatif sur l’environnement.

Si la société fait valoir que la publicité litigieuse est liée à sa seule activité de services de livraison de colis et qu’elle concerne donc nécessairement la phase de roulage des véhicules, ces éléments sont sans incidence dès lors que la société a souhaité mettre en avant, pour promouvoir pour son activité de livraison, les caractéristiques environnementales des véhicules électriques qu’elle utilise, qui s’appréhendent sur l’ensemble de leur cycle de vie.

En conséquence, tout en prenant acte de l’engagement de l’annonceur à mettre en œuvre les moyens nécessaires pour que ses campagnes publicitaires soient désormais conformes aux recommandations de l’ARPP, le Jury est d’avis que la publicité en cause méconnaît les dispositions précitées de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP.

Avis adopté le 4 juin 2021 par Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, substituant le président empêché, Mmes Charlot et Lenain, ainsi que MM. Depincé, Le Gouvello, Lucas-Boursier et Thomelin.

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