DEVOLA – Internet – Plainte fondée

Avis publié le 24 juillet 2020
DEVOLA – 670/20
Plainte fondée 

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • et après en avoir débattu,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 23 juin 2020, d’une plainte émanant de l’Association Force Ouvrière Consommateurs, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité diffusée sur le réseau social Facebook, en faveur de la société Devola.

La publicité en cause se présente comme un lien vers un formulaire du site « dispositif-national.fr » rédigé ainsi : « Ce formulaire permet de réclamer une baisse de ses crédits (déployé en urgence) * Conformément aux dispositions de la Loi Informatique et libertés du 6 janvier 1978, le traitement automatisé des données nominatives… dispositif-national.fr ».

Le texte est associé à la photographie soit d’un homme portant une robe d’avocat, dans les couloirs d’un tribunal, soit d’une femme qui pleure.

2. La procédure

– L’article 17 du règlement intérieur du Jury prévoit que : « Dans le cas d’un manquement manifestement grave et sérieux, qu’il convient de faire cesser rapidement, le Président de l’ARPP ou, par délégation, son Directeur Général, peut, conformément à la procédure d’urgence prévue par le règlement intérieur de l’ARPP, prendre sur le champ les mesures qui s’imposent, notamment en adressant une demande de cessation de diffusion aux professionnels concernés (annonceurs, agence, médias). Il en informe le Président du Jury. En cas de plainte, le cas est présenté pour délibération au Jury lors de la séance qui suit cette intervention. Sa décision fait l’objet d’une publication aux conditions prévues à l’article 21. ».

Le 25 juin 2020, le Directeur général de l’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité (ARPP) a, par lettre recommandée avec avis de réception, demandé à la société Devola, annonceur, la cessation de la diffusion de cette publicité, puis en a informé la Présidente du Jury, dans les conditions prévues par l’article 17 de son règlement intérieur.

L’ARPP a tout d’abord précisé que cette communication intitulée « dispositif d’urgence » proposait aux lecteurs de faire une demande en ligne afin de pouvoir bénéficier d’une baisse des mensualités des crédits à la consommation. Pour cela, elle incitait l’internaute à remplir un formulaire en transmettant ses données personnelles, afin de vérifier s’il était éligible au dispositif.

Elle a relevé que la communication portait l’appellation « dispositif national » et utilisait le drapeau de l’Etat français, éléments de nature à faire croire aux lecteurs qu’ils se trouvaient sur un site gouvernemental, de sorte de la communication pouvait induire en erreur l’internaute sur l’identité de l’annonceur.

L’ARPP a ensuite exposé dans sa lettre que cette publicité, par la dénomination de la landing page « mesure-urgence.fr » et l’allégation « demande à faire avant le 28 juin », induisait un sentiment d’urgence et incitait l’internaute à remplir le formulaire en lui faisant croire qu’il s’agissait d’une offre unique et de courte durée.

L’ARPP considérait, en conséquence, que cette présentation était donc contraire aux dispositions du Code ICC sur la Publicité et les communications commerciales relatives à la véracité et à la loyauté ainsi qu’à celles de la Recommandation de l’ARPP « Communication publicitaire digitale » notamment le point 1 sur l’identification de l’annonceur et le point 4 relatif au respect d’une publicité loyale, véridique, honnête, et demandait à la société de cesser la diffusion de cette publicité.

La société Devola a été informée, par courrier recommandé avec avis de réception du 8 juin 2020, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle a été également informée que cette affaire ferait l’objet d’un examen dans le cadre de la procédure simplifiée prévue à l’article 12 du règlement intérieur du Jury.

3. Les arguments échangés

Le plaignant relève que cette annonce surfe sur la crise actuelle pour des opérations de rachat de prêts présentées comme des dispositifs d’aide d’Etat, en méconnaissance des règles déontologiques.

La société Devola indique qu’elle pensait, de bonne foi, avoir pris les précautions suffisantes afin qu’aucun grief ne puisse lui être opposé dès lors, d’une part, qu’elle n’évoquait aucun dispositif étatique, gouvernemental ni aucune mesure d’aide mise en place par l’État, d’autre part, qu’une mention précisait « Ce site n’est pas avalisé par l’État français et n’émane pas de lui ».

Soulignant que le respect de la réglementation fait partie de ses priorités, la société a informé le Jury que :

– Le drapeau français a été immédiatement retiré à réception de la lettre de l’ARPP ;

– La taille des caractères utilisés a été augmentée pour la mention selon laquelle le site n’est pas avalisé par l’Etat français.

La société ajoute que les références textuelles fournies en annexe ont été immédiatement transmises aux services marketing et juridique, dans un objectif de vigilance pour les communications futures et de totale transparence avec les consommateurs.

4. L’analyse du Jury 

Les dispositions déontologiques du code de la Chambre de commerce internationale sur les pratiques de publicité et de communication commerciale prévoient que :

« Article 4 – Loyauté

La communication commerciale doit être conçue de manière à ne pas abuser de la confiance des consommateurs ou à ne pas exploiter le manque d’expérience ou de connaissance des consommateurs. / Tout facteur pertinent susceptible d’influencer la décision des consommateurs doit être signalé d’une manière et à un moment qui permettent aux consommateurs de le prendre en considération. »

« Article 5 – Véracité

La communication commerciale doit être véridique et ne peut être trompeuse. / La communication commerciale ne doit contenir aucune affirmation, aucune assertion ou aucun traitement audio ou visuel qui soit de nature, directement ou indirectement, par voie d’omissions, d’ambiguïtés ou d’exagérations, à induire en erreur le consommateur, notamment, mais pas exclusivement, en ce qui concerne : des caractéristiques du produit qui sont essentielles, ou en d’autres termes, de nature à influencer le choix du consommateur, telles que la nature, la composition, la méthode et la date de fabrication, le domaine d’utilisation, l’efficacité et les performances, la quantité, l’origine commerciale ou géographique, ou l’impact sur l’environnement (…) ».

En outre, la Recommandation Communication publicitaire digitale de l’ARPP dispose, à son point 4 Respect d’une publicité véridique, loyale, honnête, que :

« Toute communication publicitaire digitale doit se conformer aux règles du droit positif, être loyale, honnête et véridique.

Toute communication publicitaire digitale doit être conçue et diffusée avec un juste sens de la responsabilité sociale et doit être conforme aux principes de la concurrence loyale, tels qu’ils sont généralement admis dans les relations commerciales.

 Aucun message publicitaire ne doit être de nature à dégrader la confiance que le public doit pouvoir porter à la publicité. »

Le Jury relève que la publicité en cause se présente comme un lien vers un formulaire du site « dispositif-national.fr » rédigé ainsi : « Ce formulaire permet de réclamer une baisse de ses crédits (déployé en urgence) * Conformément aux dispositions de la Loi Informatique et libertés du 6 janvier 1978, le traitement automatisé des données nominatives… dispositif-national.fr ».

Le texte est associé à la photographie soit d’un homme portant une robe d’avocat, dans les couloirs d’un tribunal, soit d’une femme qui pleure.

Le Jury constate que l’annonce d’une possibilité de « baisse de ses crédits » », à proximité d’une référence au site « dispositif-national.fr », dont les termes évoquent un espace relevant d’une autorité publique nationale, est susceptible d’induire en erreur le consommateur dès lors qu’elle semble renvoyer à un formulaire légal ou réglementaire. L’astérisque qui, sur le site, renvoie aux mentions de la Loi Informatique et libertés du 6 janvier 1978, puis à celle, en très petits caractères, selon laquelle « le site www.dispositif-national.fr n’est pas avalisé par l’état Français et n’émane pas de lui », n’est pas suffisamment explicite pour lever l’ambiguïté.

En conséquence de ce qui précède, le Jury est d’avis que la publicité en cause méconnaît les dispositions précitées.

Avis adopté le 3 juillet 2020 par Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, faisant fonction de présidente, Mmes Drecq et Lenain, MM. Depincé, Lacan, Leers et Lucas-Boursier.

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