CÔTE D’OR – Affichage – Plainte fondée

Avis publié le 3 août 2022
CÔTE D’OR – 863/22
Plainte fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • après avoir entendu la représentante de la société Mondelēz, lors d’une séance tenue sous la forme d’une visioconférence,
  • et après en avoir débattu,

rend l’avis suivant :

  1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 13 janvier 2022, d’une plainte émanant d’un particulier, afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité en faveur de la société Mondelēz, pour promouvoir sa barre chocolatée de la marque Côte d’Or.

La publicité en cause, diffusée par voie d’affichage sur un distributeur automatique, montre la barre chocolatée entamée. A l’arrière-plan, un décor de forêt est représenté.

Le texte accompagnant cette image est : « Pour une pause irrésistiblement gourmande ».

En haut à gauche du visuel figurent le logo de Côte d’Or ainsi qu’une pastille verte comportant la mention « Cocoa life » en dessous de laquelle est reproduite l’inscription « Approvisionnement cacao 100% durable ».

  1. La procédure

La société Mondelēz a, dans un premier temps, par courriels du 2 février 2022 puis du 15 mars 2022, été contactée par le Secrétariat du Jury afin de recueillir des précisions concernant le contenu du texte présent à la verticale, illisible dans le fichier joint à la plainte.

En l’absence d’éléments de réponse sur ce point précis, elle a ensuite été informée, par courriel avec accusé de réception du 10 juin 2022, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée. 

  1. Les arguments échangés

Le plaignant énonce qu’aucune explication n’est proposée sur le visuel, ni aucun lien vers un site web, qui permettrait au lecteur de comprendre sur quels éléments repose l’argument de durabilité (« 100 % durable »).

Ce visuel ne respecte donc pas plusieurs points de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP :

  • point 3 sur la proportionnalité du message : l’allégation « Approvisionnement cacao 100% durable » aurait dû être relativisée ;
  • point 4 sur la clarté du message : il n’y a aucune explication sur le caractère plus durable de l’approvisionnement en cacao.
  • point 6 sur les logos : le logo vert de forme ronde fait penser à un éco-label officiel. Son origine n’est pas clairement indiquée. De surcroît, le mot « approvisionnement » n’apparaît pas : cela donne l’impression que le « cacao » dans son ensemble est
    « durable » (en particulier toute la phase de culture), alors qu’il ne s’agit que de la phase « d’approvisionnement ». Ceci est donc de nature à induire le consommateur en erreur ;
  • point 7 sur le vocabulaire.

La société Mondelēz France considère que l’affiche est conforme à la Recommandation « Développement Durable » de l’ARPP, en ce compris les principes de proportionnalité, de clarté, et de véracité et les exigences relatives aux logos.

1/ Cocoa Life est un programme créé par Mondelēz au niveau mondial pour une production de cacao favorisant le développement durable. Il est mis en place dans six pays producteurs de cacao : Ghana, Côte d’Ivoire, Indonésie, République dominicaine, Inde et Brésil.  Avec cette démarche, l’entreprise adopte pour son approvisionnement en cacao une approche durable, qui intègre les facteurs sociaux, économiques et environnementaux. Cocoa Life répond aux défis complexes auxquels les producteurs de cacao et leurs communautés sont confrontés, notamment le changement climatique, l’inégalité des sexes, la pauvreté et le travail des enfants.

Cocoa Life accroît les opportunités en termes d’autonomie, de productivité, d’égalité, de financement, d’éducation et de protection de l’environnement pour les producteurs de cacao et leurs communautés. Mondelēz a investi dans le cadre de ce programme 400 millions de dollars sur 10 ans afin d’aider 200 000 producteurs de cacao à gagner en autonomie, et afin d’améliorer la vie de plus d’un million de personnes dans les communautés cacaoyères.

En pratique, Cocoa Life contribue aux trois piliers du développement durable, et notamment :

  • les agriculteurs avec lesquels Mondelēz travaille ont été formés pour utiliser des pratiques qui préservent les ressources naturelles, y compris la protection et la restauration des forêts (pilier environnemental) ;
  • les agriculteurs et leurs familles reçoivent les connaissances et les compétences nécessaires pour créer des entreprises durables et prospères qui assurent leurs moyens de subsistance (piliers économique et social) ;
  • Mondelēz contribue au respect des droits de l’homme au sein de ces communautés agricoles, qu’il s’agisse de la lutte contre le travail des enfants ou de plus d’autonomie et d’égalité pour les femmes (pilier social et sociétal) ;
  • Mondelēz s’approvisionne en cacao auprès de ces communautés, avec des conditions commerciales transparentes et claires, et des avantages commerciaux tels que des primes et des volumes de cacao convenus à l’avance (pilier économique).

Mondelēz s’assure que le cacao cultivé, de la ferme jusqu’à ce qu’il atteigne les fournisseurs qui traitent les fèves de cacao, soit produit d’une manière durable.

Par ailleurs, les emballages de tablettes de chocolat et barres chocolatées Côte d’Or qui font référence au programme Cocoa Life et au message « Approvisionnement cacao 100% durable », et en particulier la barre chocolatée Lait Noisette 45g qui figure sur l’affiche critiquée, comportent des explications sur leur emballage concernant ce programme et ce message, ainsi qu’un lien vers le site Cocoa Life pour davantage d’information sur les actions et engagements de Mondelēz.

Ainsi, Mondelēz énonce de manière claire et proportionnée sur l’affiche le fait que, dans le cadre du programme Cocoa Life, l’intégralité des approvisionnements en cacao est durable. La mention d’un « Approvisionnement cacao 100% durable » est ainsi proportionnée, claire et véridique.

Cette approche plus durable est vérifiée par des organismes indépendants IPSOS et FLOCERT, qui sont chargés de vérifier l’impact et les progrès du programme Cocoa Life sur les agriculteurs et leurs communautés.

L’effectivité de Cocoa Life est mesurée sur la base de dix indicateurs clés de performance : le revenu net du cacao, la productivité du cacao, l’augmentation de la participation des femmes dans le processus de prise de décision, augmenter la capacité de la communauté à planifier et soutenir son propre développement social, le revenu net de sources autres que le cacao, la réduction de la vulnérabilité face aux chocs externes, la réduction du travail forcé des enfants, l’augmentation des opportunités de carrière pour les jeunes dans le secteur du cacao, l’aide aux futures générations de producteurs par des ressources naturelles durables utilisée dans l’exploitation et l’augmentation de la préservation des forêt et le maintien des écosystèmes.

FLOCERT est un organisme de certification de rang mondial, vérifiant la conformité des producteurs et commerçants à des normes volontaires : cet organisme vérifie le flux d’approvisionnement du cacao des communautés Cocoa Life dans la chaîne d’approvisionnement de Mondelēz et les conditions dont bénéficient les planteurs, tels que les primes et conditions commerciales équitables. Cette vérification permet de vérifier l’impact du programme Cocoa Life sur les communautés agricoles et garantit sa transparence.

Enfin, la société estime que le logo Cocoa Life est dépourvu d’ambiguïté.

Pour illustrer le programme Cocoa Life, Mondelēz s’est dotée d’un logo rond, dans lequel le nom “cocoa life” ressort clairement en lettres blanches sur fond vert, et, au centre, est représenté le cœur d’une fleur de cacaotier, dont les cinq pétales correspondent aux cinq axes principaux du programme Cocoa Life, que sont l’agriculture, la communauté, les conditions de vie, la jeunesse et l’environnement. Ces cinq piliers sont interdépendants, et cette transmission de l’un à l’autre est illustrée par la forme donnée aux pétales. L’origine du logo est donc clairement indiquée, et ne prête pas à confusion quant à sa signification : il s’agit du logo utilisé par Mondelēz dans toute communication pour identifier son programme.

L’utilisation de ce logo par Mondelēz n’est donc pas de nature à induire en erreur le consommateur et respecte la Recommandation « Développement Durable ».

Lors de la séance, la représentante du groupe Mondelēz a repris en substance l’argumentation écrite. Elle a confirmé que Cocoa Life constituait un « programme propriétaire » mais donnant lieu à une certification externe. Elle a insisté sur le fait que l’adjectif « durable » s’attachait seulement à l’approvisionnement.

  1. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle que la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP dispose :

  • au titre de la proportionnalité (point 3) :
    • « 1. Le message publicitaire doit exprimer avec justesse l’action de l’annonceur ou les propriétés de ses produits, en adéquation avec les éléments transmissibles. / La réalité de ces actions ou propriétés peut s’apprécier au regard des différents piliers du développement durable, des différents types d’impacts possibles et des différentes étapes de la vie du produit ;
    • 2. Le message publicitaire doit être proportionné à l’ampleur des actions menées par l’annonceur en matière de développement durable ainsi qu’aux propriétés du produit dont il fait la promotion; »
  • au titre de la « clarté du message » (point 4) : « 1. L’annonceur doit indiquer dans la publicité en quoi ses activités ou ses produits présentent les qualités revendiquées».
  • au titre des signes, labels, logos, symboles et auto-déclarations (point 6) : « 1. Les signes ou symboles ne peuvent être utilisés que si leur origine est clairement indiquée et s’il n’existe aucun risque de confusion quant à leur signification».
  • au titre du « vocabulaire » (point 7) :
    • « 7.1 Les termes et expressions utilisés ne doivent pas induire le public en erreur sur la nature et la portée des propriétés du produit ou des actions de l’annonceur en matière de développement durable /
    • 7.3 Dans le cas où il serait impossible de justifier des formulations globales (ex. : écologique, vert, éthique, responsable, préserver, équitable, durable, …), la publicité doit les relativiser en utilisant des formulations telles que “contribue à”.».

Le Jury relève que l’affichage litigieux met en valeur une barre chocolatée de la marque Côte d’Or par le recours à l’allégation « Approvisionnement 100 % durable », surmontée par un logo représentant, en blanc sur fond vert, une fleur de cacaotier, et comportant les mots « Cocoa Life ».

En l’absence de précision de l’annonceur, le Jury n’est pas en mesure de déterminer la teneur des mentions figurant en très petits caractères et à la verticale sur le côté de la publicité. Il ne ressort pas des observations de la société qu’elles consisteraient à expliciter l’allégation de durabilité de l’approvisionnement que comporte la publicité ou la signification du logo « Cocoa life », pas plus qu’elles ne renverraient au site internet de l’entreprise. La circonstance que l’emballage des barres chocolatées vendues par l’annonceur, notamment celle qui est promue par la publicité critiquée, comporte des explications et un lien vers le site « Cocoa life », est sans incidence dès lors que ces informations ne sont pas visibles sur cette publicité, qui ne reproduit que très partiellement l’emballage du produit. Ainsi, cette publicité n’indique pas en quoi le produit promu ou l’activité de Mondelez présenterait les qualités revendiquées, en méconnaissance du point 4 de la Recommandation « Développement durable ».

Pour les mêmes raisons, dès lors que l’origine du logo « Cocoa life » n’est pas clairement indiquée, cette publicité méconnaît également le point 6.1. de la même Recommandation, quand bien même le symbole n’entretiendrait-il pas de confusion avec un logo officiel.

Enfin, le Jury constate que l’annonceur a lancé une démarche baptisée « Cocoa Life » qui vise à promouvoir un approvisionnement en fèves de cacao conforme aux principes du développement durable, tant dans leur dimension écologique qu’économique, sociale et sociétale. Ce programme, doté de 400 millions de dollars sur dix ans, comporte un ensemble d’actions détaillées sur le site internet de l’annonceur et synthétisées dans les observations présentées au Jury. Tout en relevant l’importance de l’investissement ainsi consenti, l’ampleur des actions menées et les progrès accomplis, tels qu’ils ressortent des évaluations réalisées par des organismes tiers, le Jury constate que rien n’étaye le fait qu’à la date de diffusion de la publicité litigieuse, l’approvisionnement en cacao de l’annonceur serait « 100 % durable » et, notamment, que les dix indicateurs clés utilisés pour évaluer la performance du programme Cocoa Life afficheraient des résultats maximaux ou optimaux, sans aucune marge de progrès, et que les conditions de culture et de transport des fèves de cacao ne compromettraient ainsi en rien « l’aptitude des générations futures à couvrir leurs propres besoins ». Une telle allégation, qui constitue une formulation globale non justifiée et non relativisée, apparaît disproportionnée au regard de la réalité des impacts environnementaux et socio-économiques de l’approvisionnement en cacao, en dépit des actions d’atténuation engagés. Elle méconnaît ainsi les points 3 et 7 de la même Recommandation.

En conséquence de ce qui précède, le Jury est d’avis que la publicité en cause méconnaît les règles déontologiques précitées.

Avis adopté le 1er juillet 2022 par M. Lallet, Président, Mmes Lenain et Charlot, ainsi que MM. Le Gouvello et Thomelin.


Publicité Côte d’Or