BIOCOOP – Internet – Plainte fondée – Demande de révision rejetée

Avis publié le 26 janvier 2023
BIOCOOP – 887/22
Plainte fondée
Demande de révision rejetée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • après avoir entendu les représentants du Syndicat des eaux de sources et des eaux minérales naturelles (SESEMN), plaignant, d’une part, et de la société Biocoop SA, d’autre part, lors d’une séance tenue sous la forme d’une visioconférence,
  • après en avoir débattu et avoir rendu un avis ayant fait l’objet d’une demande de révision,
  • après accomplissement de ses diligences par le Réviseur de la déontologie publicitaire dont la décision est annexée au présent avis,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 13 octobre 2022, d’une plainte émanant conjointement de la Maison des eaux minérales naturelles (MEMN) et du Syndicat des eaux de sources et des eaux minérales naturelles (SESEMN), afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur de publicités de la société Biocoop SA mettant en cause l’industrie de l’eau en bouteille.

Ces publicités, diffusées sur internet par différents canaux, consistent en des visuels et une vidéo qui montrent, dans les tons bleus, des bouteilles en plastique sur lesquelles apparaissent, en très gros caractères majuscules, le texte : « L’industrie de l’eau en bouteille ne produit qu’une seule chose : du plastique ». En plus petits caractères figure le texte : « 25 millions de bouteilles jetées chaque jour en France. C’est pourquoi, vous n’en trouverez pas chez Biocoop ». Apparaît enfin la signature : « Du bon sens et rien d’autre – Biocoop ».

La plainte met également en cause des commentaires de l’annonceur sur les réseaux sociaux, informant les internautes de la disponibilité de carafes filtrantes, de filtres à eau du robinet et de perles de céramique, les invitant à venir chez Biocoop pour y trouver une fontaine à eau bien pure et bien filtrée « au bon goût de zéro déchets ».

2. Les arguments échangés

Les organisations plaignantes énoncent que cette campagne, publiée depuis le 9 septembre 2022 sur le site internet de la société ainsi que sur ses réseaux sociaux, n’est pas conforme au code ICC, notamment à ses articles 4, 5 et 12 lesquels prévoient que la communication commerciale doit être loyale, ne doit pas être trompeuse, et ne doit pas dénigrer une personne ou une catégorie de personnes. Elle méconnaît également son chapitre D – « Allégations environnementales dans les communications commerciales ».

A titre liminaire, il est souligné que la campagne comporte, d’une part des affiches dont le slogan est « L’industrie de l’eau en bouteille ne produit qu’une seule chose : du plastique » et d’autre part, une vidéo sur un fond sonore d’usine mécanique, sur lequel une voix d’homme catastrophée reprend le slogan, afin de vendre d’autres produits proposés par l’enseigne, comme des carafes filtrantes, des pichets filtrants ou des filtres à eau. Ces produits sont présentés sur son site internet, mais également via les commentaires de Biocoop accompagnant les films et les publicités sur les réseaux sociaux.

Tout d’abord, la campagne contrevient aux dispositions de l’article 5 du code ICC. Le slogan « l’industrie de l’eau en bouteille ne produit qu’une seule chose : du plastique. 25 millions de bouteilles sont jetées aujourd’hui en France. C’est pourquoi, vous n’en trouverez pas chez nous » constitue une affirmation mensongère à plusieurs égards.

En effet, réduire l’industrie de l’eau en bouteille à l’un des contenant qu’elle propose est trompeur. L’industrie de l’eau en bouteille produit avant tout de l’eau minérale ou de l’eau de source, qui sont consommées pour répondre à un besoin du consommateur qui peut être gustatif ou thérapeutique. L’eau minérale contient des teneurs en minéraux et en oligoéléments fixes et susceptibles de leur donner certaines vertus thérapeutiques. Sa composition constante lui donne un goût mais aussi des vertus particulières. A titre d’exemple, la Contrex est naturellement riche en magnésium ; L’Hépar, pauvre en sodium et riche en magnésium et en calcium, facilite le transit.

En outre, les sources des eaux minérales naturelles ont été reconnues par l’académie de médecine et répondent à une réglementation extrêmement stricte du code de la santé publique. La protection de la source fait l’objet de mesures de protection extrêmement strictes afin de préserver la qualité de l’eau et de son environnement. L’eau de source est également d’origine souterraine. Elle est potable à l’état naturel et embouteillée à la source. A la différence des eaux minérales naturelles, la composition de l’eau de source n’est pas systématiquement stable. L’eau de source n’est pas traitée, contrairement à l’eau du robinet. Les eaux minérales naturelles et les eaux de sources répondent à des besoins différents de l’eau du robinet tant au regard de leurs caractéristiques respectives ci-avant développées qu’au regard de la disponibilité de l’eau potable à laquelle il n’est pas possible d’avoir accès partout en France et dont la qualité est inégale sur le territoire français.

Prétendre que l’industrie de l’eau en bouteille ne produit que du plastique est donc déjà une allégation mensongère puisque cette industrie produit une eau à ce point particulière que sa dénomination est protégée par le code de la santé publique.

En outre, le Jury de déontologie publicitaire constatera que l’accroche dénoncée est d’autant plus mensongère qu’elle omet que les eaux embouteillées peuvent également être vendues dans des bouteilles en verre, bouteilles que commercialise également Biocoop.

L’accroche de la publicité dénoncée est donc triplement fausse : on ne peut pas réduire un bien à son contenant ; elle est commercialisée tant dans des bouteilles plastique que dans des bouteilles en verre ; l’eau produite par « l’industrie de l’eau en bouteille » est si singulière que Biocoop a jugé nécessaire d’en commercialiser.

Par ailleurs, l’affirmation selon laquelle les bouteilles en plastique ne seraient pas commercialisées dans les enseignes Biocoop est également mensongère puisque Biocoop commercialise dans des bouteilles et emballages plastiques de nombreux produits, qu’il s’agisse de bouteilles, de flacons ou de pots, alors même qu’il existe pour ces produits des alternatives en verre ou en carton.

Ainsi, Biocoop commercialise des boissons, du lait, des yaourts, des sauces, de la moutarde, de la mayonnaise, des produits de beauté et toutes sortes de liquides dans des emballages plastiques, sans pour autant se préoccuper du plastique ainsi commercialisé, lequel n’est d’ailleurs pas toujours recyclable, contrairement au PET utilisé par les embouteilleurs d’eau.

En outre, la publicité contrevient aux dispositions de l’article 4 du Code ICC relatif à la loyauté : en l’espèce, la publicité abuse de la crédulité du consommateur en lui faisant croire que les eaux minérales naturelles et les eaux de sources ne seraient pas singulières et ne méritent d’ailleurs même pas d’être qualifiées de produits, les eaux étant réduites à l’un de leurs contenants qualifiés de déchet, tout en omettant les bénéfices qu’elles peuvent apporter à leurs consommateurs.

La prétendue exemplarité dont se targue Biocoop (et dont il a été démontré ci-avant qu’elle ne la respecte pas elle-même) de ne plus vendre de bouteilles plastiques, relayée par la formule
« Du bon sens et rien d’autre », constitue un appel au boycott destiné à influencer la décision du consommateur de se détourner vers les carafes filtrantes et filtres à eau vendus par l’enseigne qu’elle prétend être « zéro déchet », ce qui est également faux.

La publicité est également constitutive de dénigrement et contrevient aux dispositions de l’article 12 du code ICC : en l’espèce, le dénigrement résulte de l’assimilation des eaux conditionnées à l’un de leurs contenants afin d’attirer le mépris des consommateurs envers les eaux minérales naturelles et les eaux de sources.

Enfin, la publicité contrevient au Chapitre D du Code ICC, que Biocoop doit respecter dès lors qu’elle a axé sa campagne de publicité sur son souhait de ne pas vendre de bouteilles plastiques qualifiées de déchets. Or ces règles sont méconnues dès lors que les commentaires de Biocoop prétendent que les fontaines à eau permettraient de produire une eau « zéro déchet ». Il y a là, également, une méconnaissance de l’article 3.b) de la Recommandation Développement durable qui dispose « le message publicitaire ne doit pas suggérer indûment une absence totale d’impact négatif ». Ainsi, Biocoop affirme faussement sur Tweeter que les solutions proposées à la vente dans ses magasins seraient « zéro déchet ». Dans la même veine, Biocoop répond à ses commentateurs sur Facebook qui consomment de l’eau minérale naturelle ou de l’eau de source parce que l’eau du réseau n’est pas potable ou a mauvais goût, qu’ils peuvent lui substituer des filtres à eau proposés à la vente sur le site de Biocoop, ce qui est également mensonger.

Lors de la séance, le SESEMN a soutenu que la communication en cause constituait bien une publicité relevant de la compétence du Jury, notamment en ce qu’elle vise à influencer le comportement des consommateurs. Il a insisté sur les qualités sanitaires de l’eau de source et de l’eau minérale naturelle, en comparaison de l’eau du robinet, ainsi que sur l’ensemble des activités des sourciers et minéraliers, notamment pour protéger et puiser la ressource en eau. On ne peut pas réduire cette industrie au conditionnement : elle est un producteur au même titre que l’apiculteur pour le miel par exemple.

La société Biocoop a été informée, par courriel avec avis de réception du 28 octobre 2022, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle fait valoir, en préambule, l’engagement fort, historique et militant de Biocoop concernant notamment l’interdiction des bouteilles d’eau en plastique depuis 2017.

Après plusieurs années de débats et d’études de solutions alternatives, Biocoop a mis fin à la commercialisation d’eau en bouteille plastique. Elle considère qu’avec 25 millions de bouteilles d’eau à usage unique jetées chaque jour en France, ce procédé est une véritable aberration écologique. Tous les acteurs œuvrant pour la défense et la préservation de l’environnement sont d’ailleurs unanimes sur le sujet. Par conséquent, Biocoop, précurseur dans la démarche, est fière d’être le porte-parole et le messager militant de tous ces acteurs pour lutter contre cette catastrophe écologique sans commune mesure dont les impacts irréversibles sur l’environnement et la santé des consommateurs semblent échapper à la MEMN et la SESEMN.

Cet engagement militant se voit d’ailleurs petit à petit conforté et récompensé par l’entrée en vigueur progressive de nouvelles réglementations visant enfin à interdire les produits en plastique à usage unique pour lutter contre le gaspillage et la pollution de l’environnement. La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire du 10 février 2020 prévoit notamment la fin progressive de tous les emballages en plastique à usage unique d’ici 2040. Biocoop espère d’ailleurs que les bouteilles d’eau en plastique seront intégrées dans ce calendrier et continuera d’œuvrer en ce sens avec force et détermination.

L’objectif du Gouvernement est donc clair et sans équivoque : sortir du plastique jetable d’ici à 2040. Le visuel utilisé pour illustrer le propos de cette campagne gouvernementale officielle l’est tout autant et se passe de commentaires : une bouteille d’eau plastique échouée sur une plage…

Par conséquent, la prise de conscience est désormais collective et le sujet de la pollution par les bouteilles d’eau en plastique ne saurait être raisonnablement nié, même par l’industrie de l’eau en bouteille.

La société s’interroge sur le caractère prétendument « publicitaire » du slogan incriminé. Acteur militant depuis sa création en 1986, elle s’est toujours exprimée avec conviction, engagement et militantisme. Par conséquent, le slogan objet de la plainte relève pour Biocoop d’une pure liberté d’expression militante dans le respect de ses droits fondamentaux et de la réglementation, pour défendre le combat contre les emballages plastiques, sans aucune visée publicitaire. Biocoop dresse simplement un triste constat, sans prétention de promouvoir un produit. Bien au contraire.

Ce slogan militant ne poursuit, par lui-même, qu’un seul objectif : favoriser et encourager la consommation d’eau du robinet par le plus grand nombre afin de mettre fin à ce désastre écologique. Elle ne favorise donc à aucun moment la promotion de biens en vente chez Biocoop.

Les commentaires des équipes et clients de Biocoop sur les réseaux sociaux relevés par le plaignant, devront donc, par leur nature de simples commentaires, être dissociés et écartés de l’analyse de ce slogan par le Jury, et sont uniquement destinés à proposer des alternatives filtrantes aux consommateurs ne bénéficiant pas encore d’une qualité d’eau du robinet optimale afin de les accompagner dans cette indispensable transition.

Biocoop émet donc des réserves quant à la recevabilité de la saisine du Jury.

Sur le fond, la société réfute les griefs qui lui sont adressés.

Sur le caractère mensonger, le plaignant invoque une action positive de « production » d’une eau alors que l’activité de l’industrie de l’eau en bouteille se définit comme l’extraction, l’exploitation et le conditionnement d’une ressource présente à l’état naturel, comme le rappellent et s’en vantent d’ailleurs les différents acteurs du marché. Il n’est donc pas mensonger d’affirmer que la matière effectivement « produite » par cette industrie n’est que l’emballage, pas le contenu, et donc le plastique.

Le plaignant évoque par ailleurs que le slogan serait mensonger au motif que Biocoop vend encore certains produits dans des emballages plastiques, sans aucun rapport d’ailleurs avec les bouteilles d’eau en plastique et donc l’objet du slogan incriminé ni le combat mené. Or si Biocoop commercialise effectivement encore des produits dans des emballages plastiques, il ne s’agit jamais de produits non indispensables, et pour lesquels il existe une alternative aussi simple et accessible au plus grand nombre que d’ouvrir l’eau du robinet !

Certes, de nombreux emballages plastiques existent encore à date, Biocoop n’a pas la prétention d’affirmer le contraire, principalement pour la conservation des produits frais car la sortie du tout plastique pour certains produits, sans autre alternative, reste encore un défi de tous les jours pour l’industrie agroalimentaire, notamment lorsque l’on fait le pari de la réduction de l’ultra-transformation comme Biocoop.

L’emballage a parfois aussi un rôle de préservation des produits et pallie la suppression des conservateurs ce qui n’est pas du tout applicable à l’eau en bouteille. Biocoop privilégie toujours des matériaux recyclés, issus de ressources renouvelables et/ou gérées durablement, réduit au maximum le poids de l’emballage et demeure le premier réseau de produits bio en vrac avec des engagements toujours plus forts, comme relancer le réemploi avec une cinquantaine de produits concernés et un objectif de 100% de produits en verre en 2023.

Sur le caractère déloyal du slogan – qui n’est par ailleurs pas une « communication commerciale » au sens de l’article 4 du code ICC visé, il ne peut être raisonnablement invoqué par le plaignant. Le consommateur, loin d’être crédule sur le sujet, est bien au contraire très largement averti, et n’a pas besoin de Biocoop pour être alerté sur les multiples dangers de l’eau en bouteille, et ce tant sur le plan environnemental avec la pollution générée par les emballages, que sur sa propre santé avec les nombreuses alertes des médias sur les résidus de plastiques relevés dans ces mêmes bouteilles d’eau.

Le consommateur, très largement informé, dispose donc d’un niveau de « connaissances » bien suffisant pour ne pas se laisser influencer, et sa perte de confiance dans l’industrie de l’eau en bouteille n’est pas le fruit des slogans de Biocoop. Les conditions de l’article invoqué ne sont donc pas remplies.

La société estime en outre qu’il ne faut pas confondre dénigrement et affirmation d’une simple vérité, aussi difficile soit-elle à entendre et accepter. Là encore, cet argument doit donc être écarté. Le dénigrement n’est pas le fruit de ce slogan. Ce qui est incriminé ici par Biocoop, ce sont les bouteilles en plastique générées par l’industrie de l’eau en bouteille. Le plaignant reconnaissant d’ailleurs lui-même que certains magasins indépendants Biocoop vendent certaines marques locales d’eau gazeuse en bouteille en verre, avec une consigne des bouteilles, ce qui démontre l’absence de dénigrement du produit en tant que tel.

Sur les allégations de contravention aux dispositions du chapitre D du Code ICC, Biocoop s’applique, contrairement à ce qu’indique le plaignant, à communiquer une information honnête et véridique, toujours étayée par des experts et s’appuyant sur des données scientifiques et environnementales reconnues et vérifiables, notamment sur les sites des organismes officiels.

A travers ce simple slogan, l’entreprise n’indique en aucune manière que les solutions et alternatives aux bouteilles d’eau en plastique qu’elle propose au consommateur seraient « zéro déchets ». Le plaignant semble confondre avec le Vrac, autre engagement fort de Biocoop.

Là encore, le Jury doit recentrer son analyse sur le slogan contesté, et non sur toute la littérature et les échanges sur les réseaux sociaux qui n’entrent pas dans le périmètre de la plainte.

En tout état de cause, Biocoop encourage le consommateur à privilégier des alternatives visant à la « réduction » de ses déchets, sans prétendre au « zéro déchet » même si cela reste un objectif vertueux à atteindre.

Quant à la potabilité de l’eau du robinet, le plaignant se contredit également dans son argumentaire. Il invoque tantôt l’absence d’accès à l’eau potable ou la « piètre qualité » de celle-ci pour une partie de la population afin de justifier le recours à l’eau en bouteille, et reproche dans le même exposé à Biocoop d’évoquer avec ses clients « une qualité d’eau qui laisse à désirer » pour proposer des alternatives filtrantes visant à en améliorer les qualités gustatives et à réduire les impacts des résidus nocifs. Là encore, ce constat de Biocoop s’appuie sur des sources fiables et vérifiables, conformes au chapitre D du code ICC.

Lors de la séance, la société Biocoop a indiqué qu’il s’agissait non d’une campagne promotionnelle, mais d’une campagne militante, qui ne visait pas à attaquer l’eau minérale naturelle et l’eau de source, ni ses producteurs. L’objectif était seulement d’alerter le consommateur sur les dangers liés au plastique. L’entreprise a fait le choix difficile de ne plus vendre d’eau en bouteille plastique, ce qui est un sacrifice financier pour la coopérative car ce produit rapporte de l’argent. Elle a préféré défendre une cause juste, celle de la réduction du plastique. Le distributeur a une responsabilité importante. Biocoop a précisé qu’elle ne vendait pas de fontaine à eau, mais qu’elle offrait la possibilité pour le client de venir puiser de l’eau gratuitement en magasin.

3. L’analyse du Jury

3.1. Sur le caractère publicitaire des communications critiquées

Le Jury constate que les communications mises en cause à titre principal par la plainte, à savoir des visuels et une vidéo, visent à promouvoir le choix de la société Biocoop de ne pas commercialiser de bouteilles d’eau en plastique en raison des conséquences environnementales de la consommation d’un tel produit. Une telle allégation étant destinée à valoriser l’image de l’entreprise et à inciter le public à recourir à ses services sur la base d’une adhésion aux valeurs ainsi exprimées, le caractère publicitaire de ces communications ne peut être contesté, quand bien même aurait-elle également une visée pédagogique ou s’inscrirait-elle dans une démarche d’opinion ou « militante », selon les termes de l’annonceur.

En outre, eu égard à leur formulation, les messages diffusés sur les réseaux sociaux incitant les internautes à se rendre en magasin pour utiliser des fontaines à eau ou pour acquérir des dispositifs de filtration que l’annonceur commercialise dans certaines boutiques revêtent également un caractère publicitaire.

Il en résulte que le Jury est compétent pour se prononcer sur cette plainte.

3.2. Sur les règles déontologiques invoquées

Selon le point 2.2. de son règlement intérieur, le Jury est notamment compétent pour se prononcer sur la conformité des publicités aux « principes généraux issus du Code ICC sur la publicité et les communications commerciales ». Ce même point précise que ces principes s’appliquent à toute publicité, commerciale ou non. Ainsi, la circonstance, mise en avant par l’annonceur, que la campagne publicitaire critiquée serait dépourvue de caractère commercial, ce qui est du reste contestable, est sans incidence sur l’applicabilité de ces principes généraux.

La plainte invoque trois principes repris aux articles 4, 5 et 12 du code ICC en ces termes :

« Article 4 – Loyauté

La communication commerciale doit être conçue de manière à ne pas abuser de la confiance des consommateurs ou à ne pas exploiter le manque d’expérience ou de connaissance des consommateurs. / Tout facteur pertinent susceptible d’influencer la décision des consommateurs doit être signalé d’une manière et à un moment qui permettent aux consommateurs de le prendre en considération. »

« Article 5 – Véracité

La communication commerciale doit être véridique et ne peut être trompeuse.

La communication commerciale ne doit contenir aucune affirmation, aucune assertion ou aucun traitement audio ou visuel qui soit de nature, directement ou indirectement, par voie d’omissions, d’ambiguïtés ou d’exagérations, à induire en erreur le consommateur (…). »

« Article 12 – Dénigrement

La communication commerciale ne doit pas dénigrer une quelconque personne ou catégorie de personnes, une entreprise, une organisation, une activité industrielle ou commerciale, une profession ou un produit, ou tenter de lui attirer le mépris ou le ridicule public. ».

Il ressort en outre du chapitre D du code ICC relatif aux allégations environnementales, que :

« ARTICLE D1 — PRÉSENTATION HONNÊTE ET VÉRIDIQUE

La communication commerciale doit être conçue de manière à ne pas profiter abusivement de l’intérêt des consommateurs pour l’environnement ou exploiter leur éventuel manque de connaissance sur l’environnement.

La communication commerciale ne doit contenir aucune affirmation ou aucun traitement visuel de nature à induire en erreur les consommateurs de quelque manière que ce soit quant aux aspects ou aux avantages environnementaux de produits ou quant à des actions entreprises par le professionnel en faveur de l’environnement.

Parmi ces pratiques figurent en particulier l’exagération d’attributs environnementaux, en présentant une amélioration marginale comme un gain majeur, par exemple, ou l’utilisation trompeuse de statistiques (« nous avons doublé le contenu recyclable de notre produit », alors que ce contenu ne représentait au départ qu’un faible pourcentage du produit).

La communication commerciale faisant référence à des produits ou à des activités spécifiques ne doit pas conduire, sans justification appropriée, à ce qu’elle s’étende à la performance globale d’une société, d’un groupe ou d’un secteur.

Toute allégation environnementale doit être pertinente pour le produit spécifique faisant l’objet de la promotion et se rapporter uniquement à des aspects qui existent déjà ou sont susceptibles d’être réalisés au cours de la vie du produit, y compris son élimination. Il convient d’établir clairement ce à quoi l’allégation se rapporte, par exemple le produit ou son emballage, ou l’un de leurs ingrédients spécifiques. Un aspect existant préalablement, mais non divulgué par le passé, ne doit pas être présenté comme une nouveauté.

Les allégations environnementales doivent être à jour et, le cas échéant, elles doivent être réexaminées au regard de l’évolution pertinente. Une allégation floue ou non spécifique sur une qualité environnementale, qui peut donner lieu à plusieurs significations pour les consommateurs, doit uniquement être formulée si elle est applicable, sans explicitation, à toutes les circonstances raisonnablement prévisibles.

Dans le cas contraire, une allégation environnementale générale doit être, soit qualifiée, soit évitée. En particulier, une allégation telle que « respectueux de l’environnement », « sûr pour l’environnement », « vert », « durable », « sobre en carbone » ou autres allégations impliquant qu’un produit ou une activité exerce un impact nul — ou un impact positif seulement — sur l’environnement, ne doit pas être utilisée sans explicitation, excepté s’il existe un niveau de preuve très élevé. Aussi longtemps qu’il n’existe aucune méthode définitive généralement acceptée pour mesurer la durabilité ou confirmer son accomplissement, aucune allégation ne doit être formulée sur sa réalisation.

Toute explicitation doit être claire, bien visible et aisément compréhensible ; elle doit apparaître à proximité immédiate de l’allégation qualifiée afin d’assurer que les deux éléments soient lus conjointement. …. ».

Le Jury rappelle enfin que la Recommandation « Développement durable » de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) prévoit que :

  • au titre de la véracité des actions (point 2) :

« 2.1. La publicité ne doit pas induire le public en erreur sur la réalité des actions de l’annonceur ni sur les propriétés de ses produits en matière de développement durable ; / 2.2. Les actions des annonceurs et les propriétés de leurs produits dans ce domaine doivent être significatives pour pouvoir être revendiquées ; / 2.3. L’annonceur doit être en mesure de justifier les arguments ayant trait au développement durable au moyen d’éléments sérieux, objectifs et vérifiables au moment de la publicité (…) »

  • au titre de la proportionnalité du message (point 3) :

« 3.1 Le message publicitaire doit exprimer avec justesse l’action de l’annonceur ou les propriétés de ses produits, en adéquation avec les éléments justificatifs transmissibles. (…) /

3.2 Le message publicitaire doit être proportionné à l’ampleur des actions menées par l’annonceur en matière de développement durable ainsi qu’aux propriétés du produit dont il fait la promotion. /

3.3. En particulier : (…) b/ Le message publicitaire ne saurait suggérer indûment une absence totale d’impact négatif ».

3.3. Sur la conformité des publicités critiquées à ces règles déontologiques

Le Jury relève que les visuels et la vidéo critiqués par la plainte entendent promouvoir le choix de l’annonceur, guidé par des motifs écologiques, de ne pas commercialiser de bouteilles d’eau en plastique, et vise à interpeller les consommateurs sur les inconvénients qui s’attachent à la consommation d’eau dans de tels contenants. Pour ce faire, cette vidéo et ces visuels comportent l’allégation selon laquelle l’industrie de l’eau en bouteille « ne produit qu’une seule chose : du plastique ». Le propos est appuyé par la référence aux « 25 millions de bouteilles jetées chaque jour en France ».

Le Jury estime qu’à l’évidence, le consommateur moyen ne peut se méprendre sur le fait que les opérateurs économiques qui produisent et distribuent des bouteilles d’eau en plastique ne se bornent pas à produire du plastique, mais fournissent aussi, et surtout, l’eau minérale naturelle qu’il consomme. En outre, la référence à « l’industrie de l’eau en bouteille » ne présente pas de caractère équivoque et, en particulier, n’inclut pas ici les bouteilles en verre dès lors qu’il est fait expressément référence au plastique et que le visuel représente des bouteilles en plastique.

En revanche, le Jury observe que les eaux minérales naturelles, le plus souvent conditionnées dans des bouteilles en plastique, présentent des caractéristiques qui les distinguent de l’eau du robinet, sur le plan gustatif comme nutritionnel. En particulier, elles sont généralement recommandées pour l’alimentation du nourrisson et elles peuvent être choisies pour des raisons sanitaires et médicales, en raison de leur teneur limitée ou élevée dans certains composants, alors que l’eau du robinet, même filtrée, peut, selon les territoires, ne pas répondre aux contraintes de certaines personnes. Or ces considérations sont totalement occultées par la vidéo et les visuels précités, qui font le choix de réduire l’industrie de l’eau en bouteille à la production de plastique. Le Jury considère que, en dépit des sérieux inconvénients que présente, pour l’environnement, la production de bouteilles d’eau en plastique, même recyclables, une telle présentation n’est pas admissible dès lors qu’elle est de nature à induire en erreur le public quant aux propriétés respectives de l’eau minérale et de l’eau du robinet et qu’elle dénigre un secteur d’activité auquel elle dénie tout autre impact que celui de produire des bouteilles en plastique qui seront ensuite « jetées » par millions, alors que ce secteur produit, outre des emplois, une eau pouvant présenter certaines qualités organoleptiques et thérapeutiques propres. Par suite, le Jury est d’avis que les visuels et la vidéo critiqués ne sont pas conformes aux principes généraux repris aux points 4, 5, 12 et D1 du code ICC.

S’agissant des messages diffusés par l’annonceur sur les réseaux sociaux, en lien avec cette campagne, le Jury considère qu’ils ne soulèvent pas de difficulté en tant qu’ils promeuvent des solutions de filtration d’eau du robinet. En revanche, il ne saurait être prétendu que ces solutions seraient « zéro déchet », comme le fait l’un des messages, alors que ces dispositifs se dégradent au fil du temps et sont, à l’issue de leur cycle de vie, mis au rebut. Une telle présentation, qui suggère indûment une absence d’impact négatif, méconnaît, aux yeux du Jury, le b) du point 3.3. de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP et les principes correspondants du code ICC.

Avis adopté le 2 décembre 2022 par M. Lallet, Président, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mmes Lenain et Boissier, ainsi que MM. Depincé, Le Gouvello et Lucas-Boursier.


La société Biocoop, à laquelle l’avis du JDP a été communiqué le 8 décembre 2022, a adressé, par courriel et courrier recommandé avec avis de réception du 22 décembre 2022, une demande de révision sur le fondement de l’article 22 du Règlement intérieur du Jury. Celle-ci a été rejetée par la décision du Réviseur de la déontologie publicitaire ci-dessous, annexée au présent avis, laquelle a été communiquée aux parties le 26 janvier 2023.

DECISION DU REVISEUR DE LA DEONTOLOGIE PUBLICITAIRE

A) Procédure

Le Jury de Déontologie Publicitaire (JDP) est saisi, le 13 octobre 2022, d’une plainte émanant conjointement de la Maison des eaux minérales naturelles (MEMN) et du Syndicat des eaux de sources et des eaux minérales naturelles (SESEMN), afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une campagne publicitaire de la société Biocoop SA.

La campagne publicitaire en cause, diffusée sur internet sous la forme de visuels et d’une vidéo, montre des images, colorisées en bleu, de bouteilles en plastique sur lesquelles apparait, en très gros caractères majuscules, le texte suivant : « L’industrie de l’eau en bouteille ne produit qu’une seule chose : du plastique ». En plus petits caractères figure le texte : « 25 millions de bouteilles jetées chaque jour en France. C’est pourquoi, vous n’en trouverez pas chez Biocoop ». La publicité comporte enfin la signature : « Du bon sens et rien d’autre – Biocoop ».

La plainte met également en cause des commentaires de l’annonceur sur les réseaux sociaux, informant les internautes de la disponibilité de carafes filtrantes, de filtres à eau du robinet et de perles de céramique, ou les invitant à venir chez Biocoop pour y trouver une fontaine à eau bien pure et bien filtrée « au bon goût de zéro déchets ».

Par un avis délibéré le 2 décembre 2022, le Jury estime que la campagne publicitaire critiquée méconnaît plusieurs règles déontologiques en vigueur.

Dans les délais prévus, Biocoop introduit une demande de Révision de cet avis ; celle-ci est transmise aux plaignants initiaux, qui peuvent ainsi faire valoir leurs observations.

A partir de ces éléments, le Réviseur de la déontologie publicitaire se rapproche du Président de la séance du JDP qui a élaboré l’avis dont la révision est demandée et il procède avec lui à une analyse contradictoire des faits et arguments sur lesquels le JDP a fondé son avis.

Après quoi, le Réviseur prend la décision suivante.

B) La demande en Révision s’appuie sur plusieurs moyens ou arguments.

1)  L’annonceur, en Révision, conteste à nouveau le caractère publicitaire de sa communication, au motif qu’il s’agit là, pour lui, “d’un véritable combat politique”, à caractère “militant”.

Mais comme l’a établi avec pertinence le Jury, le caractère “militant” de la communication Biocoop en litige ne lui ôte nullement un caractère publicitaire, puisque le message entend entre autres améliorer l’image vertueuse que l’annonceur, qui est par ailleurs un opérateur économique sur un marché concurrentiel, souhaite donner de lui-même, ou encore inviter les consommateurs à se rendre dans ses magasins afin d’y “acquérir des dispositifs de filtration qu’il commercialise dans certaines de ses boutiques”.

Ce moyen ne peut donc être retenu.

2) L’avis critiqué mentionne que les “eaux minérales naturelles [en incluant les eaux de source], le plus souvent conditionnées dans des bouteilles en plastique, présentent des caractéristiques qui la distinguent de l’eau du robinet, sur le plan gustatif comme nutritionnel” ;  à partir de ce constat, qui n’est pas contesté par Biocoop, le Jury observe que “ces considérations [celles qui distinguent les eaux minérales naturelles de l’eau du robinet] sont totalement occultées par la campagne litigieuse”.

C’est cette dernière affirmation du JDP que, en Révision, conteste l’annonceur.

A titre liminaire, il y a lieu de rappeler qu’en vertu du point 2.1 de son règlement intérieur, le rôle du Jury se limite à l’analyse déontologique du contenu des publicités visées par les plaintes dont il est saisi ; il ne lui appartient pas de se prononcer sur la pratique, les objectifs ou les mérites des organismes ou personnes qui ont participé à l’élaboration de ces publicités.

A la lumière de cette règle, et à partir du texte même de l’avis en débat, il ressort que la critique du Jury que vise la demande en Révision ne porte pas sur la société Biocoop elle-même ni sur l’ensemble de ses communications, mais seulement sur “la campagne [publicitaire] litigieuse”, celle dont le JDP a estimé être saisi, à savoir la vidéo et les affiches (visuels).

Le Réviseur observe certes que certaines des pages du site Internet Biocoop établissent, elles, des distinctions entre eau du robinet et eaux minérales, notamment sur le plan sanitaire. Toutefois, rien dans la vidéo ou les visuels de l’annonceur ne renvoie le consommateur à ces pages (ni même au site internet où elles se trouvent), de sorte que celles-ci ne peuvent être considérées comme faisant partie de la “campagne” dont le Jury a été saisi. Le Réviseur relève d’ailleurs que, ni dans ses observations en réponse à la plainte devant le Jury, ni dans sa demande de révision, Biocoop ne s’est référé à ces pages.

Dans ces conditions, le Jury ne peut se voir reprocher d’avoir estimé, de manière générale, que Biocoop, en tant qu’annonceur, ne prenait pas en considération la dimension gustative ou nutritionnelle de l’eau, en bouteille ou du robinet, car tel n’est pas le sens de son avis.

Pour la clarté de l’avis définitif, le Réviseur suggère au JDP de remplacer la référence à la “campagne litigieuse” (dans la phrase critiquée en Révision) par une référence aux visuels et à la vidéo et, plus généralement, de mieux faire apparaître que la plainte ne porte que sur ces derniers éléments publicitaires.

3) Dans son combat politique et militant contre les bouteilles en plastique utilisées pour la commercialisation de la plupart des eaux minérales ou de source, Biocoop, au bénéfice d’une vigoureuse hyperbole publicitaire, affirme – comme slogan de sa campagne – que “l’industrie de l’eau en bouteille ne produit qu’une seule chose : du plastique”.

Mais en méconnaissant ainsi toute l’activité économique opérée depuis la captation des eaux jusqu’à leur acheminement au consommateur et en la réduisant à la simple production de plastique, ce slogan dénature – ainsi que l’a établi le Jury – l’activité de cette industrie de manière dénigrante au sens de l’article 12 du Code ICC.

4) Dans un fil de discussion sur Tweeter, Biocoop suggère aux consommateurs : “Et pourquoi ne pas faire un tour dans votre [magasin] Biocoop ? Vous aurez peut-être la chance d’y trouver une fontaine à eau bien pure et bien filtrée, au bon gout de zéro déchets”.

En Révision, l’annonceur n’est donc pas fondé à reprocher au Jury de relever “que ces dispositifs [de filtration] se dégradent au fil du temps et sont, à l’issue de leur cycle de vie, mis au rebut”, pour en conclure, dans l’avis contesté, qu’une “telle présentation, qui suggère indûment une absence d’impact négatif, méconnait le b) du point 3.3. de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP et les principes correspondants du code ICC”.

De manière plus particulière, Biocoop ne peut soutenir que ses solutions “zéro déchets” seraient en fait des solutions qui tendent vers le “zéro déchets“, puisque c’est justement cette différence entre les deux allégations qui fonde l’esprit de la déontologie en vigueur.

C) Des analyses qui précèdent, il résulte que :

  • la demande de Révision de Biocoop est recevable et à ce titre sera mentionnée dans la rédaction finale de l’Avis du Jury ;
  • la critique sérieuse ou légitime (au sens de l’Article 22.1 du Règlement) invoquée contre l’Avis en litige ne peut être considérée comme fondée.

Par suite, il n’y a pas lieu de procéder à une seconde délibération de l’affaire en cause.

Il n’y a pas lieu non plus de réformer l’Avis contesté, sauf :

  • pour y mentionner la demande de Révision comme indiqué ci-dessus,
  • pour en préciser la rédaction quant à la teneur de la campagne publicitaire dont le Jury est saisi (comme mentionné ci-dessus),
  • pour y adjoindre en annexe la présente réponse.

Dès lors et pour conclure, l’Avis en cause, complété comme indiqué ci-dessus, deviendra définitif et sera publié sur le site du JDP – accompagné de la présente décision, laquelle constitue la réponse du Réviseur de la Déontologie Publicitaire à la demande de Biocoop.

Alain GRANGE-CABANE
Réviseur de la Déontologie Publicitaire


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