Avis JDP n°230/12 – PRODUIT D’ISOLATION – Plainte rejetée

Décision publiée le 19.12.2012
Plainte rejetée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

– Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,

– après avoir entendu les représentants de la Commission chargée de formuler des avis techniques et des documents techniques d’application sur des procédés, matériaux, éléments ou équipements utilisés dans la construction (CCFAT), et de la société A,

– et après en avoir délibéré,

rend la décision suivante :

1.Les faits

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi le 1er octobre 2012 d’une plainte émanant de la Commission chargée de formuler des avis techniques et des documents techniques d’application sur des procédés, matériaux, éléments ou équipements utilisés dans la construction (CCFAT), afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité de la société A, relative à son produit isolant mince réflecteur Triso Super 12, diffusée dans le numéro de juin 2012 du périodique spécialisé dans la construction et sur le site Internet de la société auquel renvoie le site sur l’actualité du bâtiment.

Le visuel publié dans le magazine spécialisé dans la construction montre plusieurs hommes travaillant sur la toiture d’une maison et brandissant comme un étendard le produit Triso Super 12, déroulé.

Le texte en accroche est « Vous nous avez toujours fait confiance. Vous aviez raison », accompagné d’un logo indiquant « Avis technique – CERTIFIE ».

Ces éléments sont repris sur la première page du site Internet de la société A.

Dans la publicité publiée dans Le Moniteur figure, sous l’image, un double logo « BM TRADA Certification » et « UKAS ».

Il est précisé que la certification dont fait l’objet le produit « a été délivrée par le laboratoire BM Trada Certification sur la base d’un référentiel d’évaluation (BIP-001) qui a été accrédité par l’UKAS (United Kingdom Accreditation Service ») » et qu’une telle certification « est acceptée par les organismes d’accréditation de 34 pays dont le COFRAC (Comité français d’accréditation) en France du fait de leurs accords de reconnaissance mutuelle) ».

Tant la publicité diffusée dans le magazine spécialisé que sur Internet, font état des caractéristiques techniques du produit et de ce que la certification fait l’objet d’une reconnaissance par la France.

2.Les arguments des parties :

La CCFAT admet que sa plainte est tardive en ce qui concerne la publicité diffusée dans le magazine spécialisé en juin 2012, mais précise qu’il y a lieu pour le Jury de se prononcer sur la publicité mise en ligne sur Internet.

Elle considère que cette publicité est de nature à créer la confusion sur les avis techniques qu’elle délivre sur le fondement de l’arrêté du 21 mars 2012 qui la crée.

Elle soutient en outre que, si l’organisme BM Trada Certification a été dûment accrédité par l’organisme d’accréditation britannique UKAS, il n’en va pas de même du référentiel BIP-001 créé par cette société et inconnu dans les autres pays européens. La fiabilité et la valeur des tests dits « in situ » sur lesquels porte ce référentiel, par opposition aux tests en laboratoire, pour la détermination des équivalences en matière de résistance thermique, fait l’objet d’une réflexion au sein du comité européen de normalisation et de la CCFAT, qui n’est pas achevée.

La Commission indique par ailleurs que la performance thermique de l’isolant dont il est fait état sur le site spécialisé dans le bâtiment n’a été reconnue par BM Trada Certification que sous certaines réserves qui figurent seulement sur le certificat lui-même, et non sur la publicité, ce qui est de nature à induire en erreur le consommateur.

Elle fait enfin état d’une décision de l’organisme britannique en charge du contrôle des publicités (ASA) qui  a demandé à la société A de mettre fin à une publicité comportant des mentions analogues.

L’annonceur, la société A, estime que seule la publicité diffusée sur Internet peut être en cause et précise que celle-ci ne fait pas état, contrairement à la publicité publiée dans le magazine spécialisé, de l’accréditation du référentiel BIP-001 et de sa reconnaissance en France.

Elle rappelle que le site sur l’actualité du bâtiment, comme son propre site, s’adressent uniquement aux professionnels du bâtiment.

Elle  ajoute que l’ensemble des allégations la concernant et figurant sur ces sites sont véridiques, dès lors qu’elle a obtenu de la société BM TRADA Certification, accréditée par l’organisme accréditeur britannique UKAS, homologue du  COFRAC, un certificat de conformité qui est reconnu dans l’ensemble des Etats membres de l’Union européenne sur le fondement du 2. de l’article 11 du règlement n° 765/2008 du Parlement européen et du Conseil du 9 juillet 2008. Le COFRAC, informé de la délivrance de ce certificat, n’a émis aucune réserve, dès lors que seul le logo de l’UKAS, et non le logo du COFRAC, apparaissait sur les documents de la société A.

Elle ajoute que la mention d’une valeur d’isolation thermique équivalente à 210 millimètres de laine minérale est la stricte reprise des mentions figurant sur le certificat délivré par BM TRADA.

Affirmer que cette communication commerciale ne répondrait pas aux principes exposés à l’article 5 du Code ICC consolidé relatifs à la véracité conduirait nécessairement, selon elle, à refuser de reconnaître la portée des certificats ou rapports d’essais délivrés par l’organisme d’évaluation de la conformité accréditée pour le domaine d’évaluation de la conformité en question et à méconnaitre l’article 5 du règlement communautaire n° 764/2008 du 9 juillet 2008.

Elle précise que la décision de l’ASA lui enjoignant de mettre fin à une publicité analogue porte sur un produit différent de celui qui fait l’objet de la présente saisine et précise que la certification donnée par BM TRADA pour ce produit était antérieure à son accréditation par l’UKAS.

La société Actis soutient en outre que l’utilisation du terme « avis technique » ne prête pas à confusion et se rapporte clairement au certificat délivré par BM TRADA.

Enfin, cette société considère que la présente plainte s’inscrit dans une stratégie délibérée du CCFAT, en lien avec le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB), de bloquer son accès au marché des produits d’isolation, afin de préserver les parts de marché des fabricants et distributeurs de laine minérale.

Les responsables du site relatif à l’actualité du bâtiment ont été informés de la plainte par courrier recommandé du 13 novembre 2012. Ils n’ont pas présenté d’observations.

3.Les motifs de la décision du Jury

 Le Jury rappelle que le code consolidé sur les pratiques de publicité et de communication de marketing de la Chambre de Commerce Internationale (code ICC) énonce  en son article 3 un principe de loyauté selon lequel « La communication commerciale doit être conçue de manière à ne pas abuser de la confiance des  consommateurs ou à ne pas exploiter le manque d’expérience ou de connaissance des consommateurs. Tout facteur pertinent susceptible d’influencer la décision des consommateurs doit être signalé d’une manière et à un moment qui permettent aux consommateurs de le prendre en considération. ». L’article 5 du même code, relatif au principe de véracité, dispose que « La communication commerciale doit être véridique et ne peut être trompeuse. La communication commerciale ne doit contenir aucune affirmation, aucune assertion ou aucun traitement audio ou visuel qui soit de nature, directement ou indirectement, par voie d’omissions, d’ambiguïtés ou d’exagérations, à induire en erreur le consommateur… ».

Le Jury prend acte que la plainte n’est, en définitive, dirigée que contre la publicité mise en ligne sur le site Internet de la société A, auquel renvoie le site sur l’actualité du bâtiment. Il n’y a donc pas lieu pour lui de se prononcer sur les mentions qui ne figurent que dans la publicité diffusée dans le périodique spécialisé.

Il rappelle que le respect du principe de loyauté résultant de l’article 3 du code ICC doit s’apprécier compte tenu du public auquel s’adresse la publicité. En l’espèce, si les sites Internet en cause peuvent être consultés par des particuliers, ils s’adressent essentiellement aux professionnels du secteur du bâtiment, qui constituent un public éclairé et expérimenté.

Le Jury estime que le logo « Avis technique – CERTIFIE » ne peut, en l’espèce, induire en erreur ces professionnels sur la nature de cet avis.

D’une part, le terme d’ « avis technique » est générique, ne constitue pas une marque déposée et n’est pas propre aux évaluations émanant de la Commission chargée de formuler des avis techniques (CCFAT) créée par l’arrêté du 21 mars 2012 du ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, à laquelle la publicité ne fait aucune référence, directe ou indirecte.

D’autre part, il ressort clairement du site de la société A, auquel renvoie le site sur l’actualité du batiment, que cet avis technique émane, en l’espèce, non pas de la CCFAT, mais de l’organisme de certification « BM Trada Certification », auquel se rapporte le terme « Certifié » utilisé par la publicité litigieuse. Le logo litigieux ne méconnaît donc pas le principe de loyauté.

S’agissant de la mention du site Internet de la société A selon laquelle son produit Triso Super 12 est « certifié par BM Trada Certification avec reconnaissance française », le Jury constate, d’une part, que ce produit bénéficie bien d’un certificat délivré par cet organisme d’évaluation de la conformité, qui est accessible en ligne sur le même site, et, d’autre part, que l’article 11 du règlement communautaire n°765/2008 du 9 juillet 2008 prévoit que les attestations établies par les organismes de certification accrédités par l’organisme accréditeur de chaque Etat membre, dont l’UKAS britannique, font en principe l’objet d’une reconnaissance mutuelle d’équivalence au sein de l’Union.

Si, comme le soutient la CCFAT, l’accréditation délivrée par l’UKAS ne porte pas, en toute rigueur, sur le référentiel utilisé mais sur l’organisme BM TRADA Certification, les mentions litigieuses, qui distinguent clairement l’accréditation par l’UKAS et la certification par la société BM TRADA, n’apparaissent pas de nature à induire en erreur les professionnels du bâtiment.

Dans ces conditions, le Jury de déontologie publicitaire, auquel il n’appartient pas de porter une appréciation sur la validité ou la fiabilité du référentiel BIP-001 au regard duquel l’organisme BM TRADA Certification a été accrédité, considère, au vu des pièces qui lui ont été soumises, que les mentions litigieuses ne peuvent être regardées comme contrevenant au principe de véracité.

Il en va de même des indications relatives à la performance thermique du produit, dès lors que le certificat délivré par la société BM TRADA Certification, aisément accessible et téléchargeable sur le site, précise les conditions et réserves sous lesquelles l’équivalence de résistance thermique affichée par la publicité se vérifie.

Il appartient en tout état de cause aux professionnels du bâtiment qui envisagent de recourir à ce produit de s’informer de l’ensemble de ses spécifications techniques.

Enfin, le Jury précise qu’il ne lui appartient en aucun cas de se prononcer sur le respect par les entreprises des règles du droit de la concurrence ni d’intervenir dans les litiges relevant de la compétence de l’Autorité de la concurrence.

4.La décision du Jury

– La plainte est rejetée ;

– Le message publicitaire en cause est conforme aux articles 3 et 5 du code consolidé sur les pratiques de publicité et de communication de marketing de la Chambre de Commerce Internationale;

– La décision du Jury sera communiquée à la Commission chargée de formuler des avis techniques et des documents techniques d’application sur des procédés, matériaux, éléments ou équipements utilisés dans la construction (CCFAT) et à la société A ;

– Elle sera diffusée sur le site Internet du Jury de déontologie publicitaire.

Délibéré le vendredi 7 décembre 2012 par Mme Michel-Amsellem, Présidente, M Lallet, Vice-Président, Mmes Drecq et Moggio, ainsi que MM. Benhaïm, Carlo, Depincé, Lacan et Leers.