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U POWER – IMD Media Ltd – Télévision – Plainte non fondée

Avis publié le 5 janvier 2022
U POWER – 793/21
Plainte non fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 12 octobre 2021, d’une plainte émanant d’un particulier, afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité télévisée, émanant de la société U Group SRL, pour promouvoir son offre de vêtements, chaussures et accessoires professionnels de marque U-Power.

Le film publicitaire montre une femme blonde, à son domicile, qui tient son chien dans les bras. Elle accueille successivement plusieurs hommes, qui interviennent en tant que professionnels de la réparation et de l’entretien, vêtus des produits de la marque (un plombier, un électricien, un carreleur, un menuisier, un câbleur). Puis elle refuse l’accès à un nouveau professionnel qui ne porte pas les vêtements U Power.

Le texte accompagnant ces images est :

2. Les arguments échangés

Le plaignant considère que cette publicité met en scène cinq hommes, avec des airs de mannequins, qui « travaillent » et vont « secourir » tout en la draguant la femme « blonde, débile et facile ».

La forte connotation sexuelle qui émane de ce film publicitaire ne correspond pas au produit proposé.

La société U Group SRL, son agence de communication IMD Media Ltd, ainsi que le Syndicat National de la Publicité Télévisée (SNPTV) ont été informés, par courriel avec accusé de réception du 3 novembre 2021, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

La société U Group SRL se dit très surprise de cette plainte et du reproche de sexisme qu’elle comporte, qui ne correspond en rien au film critiqué, et alors qu’aucune plainte n’a jamais été transmise à la société U POWER dans les autres pays dans lesquels il est diffusé.

Elle rappelle qu’elle est spécialisée dans la vente de vêtements et de chaussures de travail et de protection et qu’elle a fait profondément évoluer l’image de ces produits ces dernières années, pour les rendre plus légers, plus confortables et plus esthétiques. Elle a fait appel à des designers et des stylistes connus dans le milieu de la mode et du luxe. La clientèle féminine de la société est de plus en plus importante et elle n’a aucun intérêt à la blesser.

En outre, la diversité et l’égalité entre les femmes et les hommes font partie des valeurs cardinales de l’entreprise.

La société précise qu’elle s’appuie depuis plusieurs années sur des campagnes audiovisuelles humoristiques qui présentent des personnages vêtus de ses produits dans des situations inattendues (un ouvrier en train de danser avec de larges chaussures de travail, un enfant qui offre des chaussures de travail au Père Noël pour sa tournée…). Le film publicitaire litigieux s’inscrit dans la continuité de ces précédentes
campagnes, en particulier d’un spot dans lequel est présente la même actrice (qui est une journaliste et présentatrice italienne évoluant dans le milieu sportif, très connue en Italie et qui comptabilise plus de 8 millions de « followers »), éclaboussée par un véhicule sur la chaussée. Un ouvrier habillé avec des produits de la marque U Power lui propose sa veste pour la couvrir. Elle pose alors une annonce sur Instagram pour le retrouver, ce qui explique que plusieurs hommes habillés en U-Power se présentent chez elle dans la publicité litigieuse.

Au total, la société estime que ce film publicitaire respecte la dignité humaine et ne s’expose à aucune critique fondée sur la discrimination à raison du sexe. La société, dont l’intention était de proposer une série de spots publicitaires humoristiques avec un scénario en fil conducteur, s’est contentée de présenter une jeune femme connue, vêtue dignement et en tout état de cause comme le sont la grande majorité des jeunes femmes (un jean et un top), chez elle. Elle est présentée dans son appartement en train de lire, ce qui est une occupation courante, et se contente de répondre aux personnes qui sonnent à sa porte. Rien dans le scénario ne permet de considérer qu’il s’agit d’une représentation dégradée de la femme, tant dans sa tenue que dans son attitude.

Lors de la séance, les représentants de la société ont insisté sur l’absence de volonté de dénigrer ou dévaloriser la femme, qui constitue une clientèle cible importante, sur la continuité logique entre le film publicitaire litigieux et un précédent spot, et sur la notoriété de l’actrice principale, qui est une présentatrice télévision italienne de premier plan, par ailleurs docteur en droit.

Le représentant du SNPTV a indiqué qu’à aucun moment les équipes n’avaient perçu dans ce film publicitaire une quelconque marque de sexisme.

L’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité (ARPP) indique que le film publicitaire en cause a été soumis à l’ARPP, en septembre 2021 dans le cadre du dispositif d’examen avant diffusion de la publicité télévisée. Il n’y a pas eu de demande de conseil préalable.

Lors de l’analyse de cette publicité pour avis, l’ARPP a relevé que :

L’ARPP rappelle que, au quotidien, ses services veillent à ce que les messages publicitaires ne contiennent pas de visuels ou d’allégations pouvant être perçus comme véhiculant des stéréotypes sexistes.

Les principes élémentaires rappelés à ce titre sont ceux contenus dans le Code ICC consolidé sur les pratiques de publicité et de communication commerciale et dans la Recommandation « Image et respect de la personne » de l’ARPP.

Cette publicité ne peut, selon l’ARPP, être perçue comme véhiculant un stéréotype sexiste à l’encontre de la femme ni enfermant les femmes et les hommes dans des rôles spécifiques et dégradants.

3. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle que la Recommandation « Image et respect de la personne » de l’ARPP dispose :

Le Jury relève que la publicité en cause, décrite au point 1, montre une jeune femme blonde au physique avantageux accueillir chez elle divers professionnels du bâtiment et du dépannage, joués par de jeunes hommes eux-mêmes séduisants. S’interrogeant sur leur présence, ils répondent qu’ils sont « l’homme U-Power » qu’elle recherchait. Alors que se présente à sa porte un jeune homme charmeur muni de matériel de bricolage mais sans vêtement U-Power, elle lui ferme la porte au nez en disant : « pas de U-Power ? On ne rentre pas ». La publicité se conclut par : « U-Power, impossible de résister ».

Le Jury constate que cette publicité joue sur le double registre de l’humour et de la séduction, et qu’elle repose sur les stéréotypes classiques de la cliente sexy et des beaux ouvriers charmeurs, présentés comme « l’homme U-Power » auquel il serait « impossible de résister ».

Toutefois, cette publicité ne peut être regardée comme réduisant la femme à la fonction d’objet. On peut certes s’étonner qu’elle laisse entrer chez elle des professionnels du bâtiment qu’elle n’a manifestement pas sollicités. L’absurdité de la mise en scène – qui ne se comprend qu’en lien avec un précédent spot diffusé par le même annonceur et mentionné dans ses observations rappelées au point 2 – ne permet toutefois pas d’y voir une apologie de l’idée selon laquelle les hommes, dans le secteur du bâtiment, pourraient librement disposer du domicile des femmes, qui en sont les clientes, sinon de ces dernières elles-mêmes. Les ouvriers représentés accomplissent des gestes cohérents avec le métier qu’ils disent exercer et ne se livrent à aucun acte à connotation sexuelle, ni ne tiennent de propos déplacés. En outre, la cliente décide d’elle-même, sur un ton résolu, d’éconduire le dernier homme qui se présente, en dépit de son physique et de son attitude enjôleuse, au motif qu’il n’est pas habillé en U-Power, et non pour des raisons esthétiques ou de nature sexuelle.

Pour les mêmes raisons, cette publicité ne cautionne pas l’idée de l’infériorité de la femme, dont l’attitude n’est pas dénigrée – à aucun moment n’est évoquée son éventuelle incompétence dans le bricolage, qui semble vivre confortablement et qui, tout en donnant le sentiment d’être dépassée par les évènements dans la première partie de la publicité, montre ensuite qu’elle sait décider de qui peut entrer chez elle (donc, le cas échéant, qui doit en sortir).

Enfin, en dépit des stéréotypes qu’elle véhicule, cette publicité, qui repose sur une mise en scène irréaliste et absurde, ne peut être regardée comme valorisant, même indirectement, un sentiment de sexisme, en l’absence de propos discriminatoire ou de dévalorisation du personnage féminin représenté.

Le Jury est donc d’avis que cette publicité ne méconnaît pas les règles déontologiques précitées.

Avis adopté le 10 décembre 2021 par M. Lallet, Président, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, et Mme Boissier, Charlot et Lenain, ainsi que MM. Depincé, Le Gouvello, Lucas-Boursier et Thomelin.

Pour visualiser la publicité U Power, cliquez ici.
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