JDP

SETON.FR – Internet – Plainte fondée

Avis publié le 10 mai 2023
SETON.FR – 912/23
Plainte fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 2 mars 2023, d’une plainte émanant d’un particulier, afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité en faveur de la société Brady Groupe SAS, pour son offre d’équipements et de signalétique de sécurité en entreprise, accessibles sur son site Internet Seton.fr.

La publicité, diffusée sur Internet, présente deux hommes souriants, en tenue de travail, dans un décor d’entrepôt. L’un tient un rouleau de film plastique transparent, dont il recouvre entièrement la tête de l’autre homme.

Le texte accompagnant cette image est « Films et Cerclage d’Emballage – Achat en ligne sécurisé » suivi de l’adresse du site Internet.

2. Les arguments échangés

Le plaignant énonce que cette image est dangereuse et peut être choquante, la conséquence de cette démonstration pouvant être tragique. Ce type d’image détourne l’usage du produit : alors que l’on pourrait s’attendre à une démonstration un peu plus professionnelle, l’absurdité de la situation est malsaine.

Il ajoute que ce type de publicité est diffusé sur un média à large public et peut être vu par des enfants.

La prévention des risques d’étouffement est largement diffusée en ce qui concerne les sacs plastiques et autres jeux et cette publicité est donc, de son point de vue, choquante et irresponsable.

La société Brady Groupe a été informée, par courriel avec accusé de réception du 9 mars 2023, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle a été également informée que cette affaire ferait l’objet d’un examen dans le cadre de la procédure simplifiée prévue à l’article 13 du règlement intérieur du Jury.

La société fait valoir que la publicité n’a pas été mise en ligne par les soins de ses équipes publicitaires et marketing, qui ont reçu des formations au sujet de la déontologie et prennent en compte ces principes lors de la création de ses communications publicitaires. La société ne tolère aucune déviation à la déontologie publicitaire.

Les investigations des équipes marketing auprès des prestataires externes de l’entreprise ont démontré qu’il s’agit d’une publicité générée par Microsoft Ads (aussi communément appelé Bing Ads).

Microsoft Ads est un service publicitaire que la société utilise pour générer du trafic sur ses sites e-commerce depuis le moteur de recherche Bing. Elle sélectionne des mots-clés pour lesquels elle souhaite apparaître (ceci est basé sur un système d’enchères et facturation au clic) puis elle fournit des annonces rédigées manuellement.

La société ne souhaite utiliser que des contenus textuels en ne capitalisant sur la publicité en dehors des résultats de moteur de recherche appelés « Search partners ». Ces partenaires sont filtrés manuellement pour assurer que l’entreprise n’apparaisse que sur des sites qualifiés et de bonne renommée.

La problématique avec la publicité en cause est qu’elle est issue de la fonctionnalité « Native Ads » de Microsoft Ads. Lorsqu’aucune image n’est associée à une annonce que l’entreprise soumet, Microsoft Ads se réserve le droit d’utiliser une image sélectionnée par l’intelligence artificielle afin de pouvoir afficher l’annonce rédigée par ses soins en dehors des résultats de recherche (en l’occurrence, ici, en dessous d’un article traitant d’actualités).

Le système d’intelligence artificielle que Microsoft a choisi d’implémenter il y a quelques semaines contient apparemment encore des erreurs et en particulier dans la sélection des images appropriées. A l’heure actuelle il n’existe aucun moyen de contrôle mis à disposition des annonceurs par Microsoft Ads de :

La campagne incriminée a été arrêtée immédiatement après le signalement de la plainte, le 13 mars 2023. L’annonceur condamne fermement ce contenu.

Les équipes marketing de la société sont entrées en contact avec les équipes de Microsoft Ads dans l’optique d’éviter que ce genre d’infraction au code de déontologie publicitaire ne puisse se reproduire. Selon les techniciens de Microsoft Ads, il semblerait qu’il y ait trois possibilités pour éviter que ce genre de publicité ne se reproduise dans le futur :

Les équipes et la direction de la société ont longuement discuté et décidé de restreindre l’utilisation des services de diffusion de publicité proposés par Microsoft Ads jusqu’au moment où elle aura pu assembler et envoyer ses propres images pour chacune de ses campagnes. Elle condamne une fois de plus la campagne incriminée générée par l’IA de Microsoft qu’elle a arrêtée immédiatement et décidé de restreindre l’utilisation de Microsoft Ads tant qu’elle n’aura pas de solution adaptée.

3. L’analyse du Jury

Le Jury relève que, selon les observations présentées par l’annonceur, la publicité critiquée n’a pas été conçue par lui ou à sa demande, mais par un système d’intelligence artificielle utilisé par le service Microsoft Ads auquel il recourt. A défaut pour la société de fournir des images à son partenaire, le modèle algorithmique aurait ainsi généré un visuel correspondant au produit commercialisé, mais dans une mise en scène aberrante, qu’il n’a pas validée et qu’il condamne.

Le Jury prend note de cette particularité mais estime que cette circonstance est sans incidence sur le caractère publicitaire de la communication et sur sa compétence pour se prononcer sur la plainte dont il est saisi. Cette publicité ayant été conçue et diffusée pour le compte de Seton, afin de mettre en valeur les produits que la marque commercialise, ce dernier doit être regardé comme l’annonceur. Il ne peut se soustraire à ses obligations au titre de la déontologie publicitaire alors qu’il a volontairement souscrit le service de conception et de diffusion publicitaires proposé par Microsoft Ads et qu’il doit ainsi, à l’égard des consommateurs et de l’ensemble des destinataires de ses communications commerciales, répondre des conséquences de ce choix d’entreprise, indépendamment de ses relations contractuelles avec Microsoft.

Le Jury rappelle que la Recommandation « Sécurité : situations et comportements dangereux » de l’ARPP prévoit dans son préambule que :

« Sauf justification pour des motifs éducatifs ou sociaux, la communication commerciale ne doit comporter aucune représentation ni aucune description de pratiques potentiellement dangereuses ou de situations où la santé et la sécurité ne sont pas respectées, selon les définitions des normes nationales locales. »

En outre, le point 1 prévoit que : « Les communications commerciales ne doivent pas mettre en scène des situations ou des comportements dangereux, susceptibles de l’être ou encore de nature à les encourager :

Le Jury relève que la publicité critiquée met en scène deux hommes dont l’un recouvre entièrement la tête du second avec du film d’emballage. Si les protagonistes apparaissent souriants, la pratique à laquelle il se livre n’en demeure pas moins particulièrement dangereuse en raison des risques d’étouffement qu’elle comporte. Cette communication étant diffusée sur internet, elle est en outre accessible aux mineurs qui sont particulièrement exposés à ce risque, a fortiori dans un contexte marqué par la multiplication des « défis » qu’ils peuvent se lancer les uns aux autres.

Ainsi que l’annonceur l’admet lui-même, le Jury est d’avis que cette publicité méconnaît la Recommandation précitée. Il prend note de la réaction rapide de la société Brady groupe, à réception de la plainte, consistant à faire retirer cette communication et à reconsidérer son recours à Microsoft Ads.

Avis adopté le 7 avril 2023 par le Jury de déontologie publicitaire, composé de M. Lallet, Président, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mmes Lenain, Charlot et Boissier, MM. Depincé, Le Gouvello, Lucas-Boursier et Thomelin.


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