Avis publié le 29 janvier 2025
PEPETTE – 1046/25
Plainte fondée
Le Jury de Déontologie Publicitaire,
- après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
- les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
- après avoir entendu les représentants de la société Pepette, lors d’une séance tenue sous la forme d’une visioconférence,
- et après en avoir débattu,
rend l’avis suivant :
1. La plainte
Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 4 décembre 2024, d’une plainte émanant d’un particulier, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur de publicités diffusées sur le site Internet de la société Pepette, pour promouvoir son offre de produits d’alimentation pour chiens.
Les allégations publicitaires présentes sur le site Internet de la société et visées par la plainte sont notamment :
- « La vérité cachée de la petfood », « De la poudre de perlimpinpin »,
- les encarts intitulés « Une invention marketing », « Une cuisson destructrice », « Un menu inadapté »,
- la présentation des aliments Pepette comme « De la vraie nourriture pour chiens et chat « avec « les meilleurs taux de digestibilité du marché »,
- les allégations relatives à la santé telles que « réduction du risque de diabète, d’inflammations chroniques des intestins, de dermatite, d’infections urinaires, et d’autres maladies courantes », « soulager les démangeaisons, les irritations et améliorer la santé de la peau », …
2. Les arguments échangés
– Le plaignant relève que le site Internet de l’annonceur met en avant une image négative du petfood conventionnel en dénonçant sa « vérité » et qualifiant ces produits de « poudre de perlimpinpin ».
Il conteste la déclaration de l’annonceur concernant les croquettes conventionnelles présentées comme équivalentes à du fast food, une invention marketing avec des cuissons extrêmes qui favorisent l’apparition de molécules cancérogènes et des compositions inadaptées à des carnivores.
A contrario, la marque présente ses produits comme de la « vraie nourriture pour chiens et chats » par des recettes qui auraient « les meilleurs taux de digestibilité du marché ».
Elle promet également des résultats rapides pour changer la vie de l’animal, qu’elle détaille par la suite, au travers d’une bonne digestion et l’absence de composés néo-formés toxiques, un pelage soyeux grâce à des recettes naturelles alors qu’elles contiennent des additifs nutritionnels non naturels en justifiant que le frais soulagerait les problèmes dermatologiques et que la composition limiterait les allergies.
Les produits de Pepette offriraient un regain d’énergie grâce à une diminution des ballonnements ainsi qu’un système immunitaire renforcé promettant carrément « moins de visite chez le véto’ » mais aussi une vie plus longue à nos côtés par la « réduction du risque de diabète, d’inflammations chroniques des intestins, de dermatite, d’infections urinaires, et d’autres maladies courantes » et tout cela en 6 mois.
Le plaignant a également relevé que, sur son blog, Pepette promet que ses repas permettent de calmer l’anxiété pour un animal « détendu comme un chat au soleil » et réaffirme la possibilité de « soulager les démangeaisons, les irritations et améliorer la santé de la peau ».
Enfin Pepette promet un effet anti inflammatoire sur les douleurs articulaires via ses snacks articulations 100% naturels.
Le plaignant déplore que, malgré une plainte déjà déposée en 2023, la société semble ignorer les règles de déontologie publicitaire.
– La société Pepette a été informée, par courriel du 12 décembre 2024 et par courrier recommandé avec accusé de réception du 13 décembre 2024 de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.
Elle a été également informée que cette affaire ferait l’objet d’un examen dans le cadre de la procédure simplifiée prévue à l’article 13 du règlement intérieur du Jury.
La société Pepette précise que les allégations contenues dans la plainte anonyme du 4 décembre 2024, outre qu’elles ont pour unique but de nuire à son image de marque, s’inscrivent dans le cadre d’une refonte de son site Internet suite à un contrôle de la Direction départementale de protection des populations de PARIS (« DDPP 75 ») au cours de l’année 2024. Les mentions qui figurent aujourd’hui sur le site Internet ont donc été validées par la DDPP 75 (ainsi que par la DGCCRF) et/ou modifiées suite à son contrôle.
En outre, la société fait valoir que :
- L’utilisation de la formule « poudre de perlimpinpin » constitue une simple emphase publicitaire insusceptible de tromper le consommateur.
- Les affirmations en lien avec les conséquences de la cuisson par extrusion (à plus de 130°C) nécessaire au processus de fabrication des croquettes – soit, l’apparition de molécules cancérogènes et la perte de vitamines et de nutriments – constituent des vérités scientifiques établies par différentes études prises en compte par la DDPP 75.
- La formule marketing « vraie nourriture » a été modifiée par celle de « nourriture fraîche » sur le site internet de Pepette (et ce, alors même qu’elle n’avait pas été considérée comme trompeuse par la DDPP 75).
- L’affirmation selon laquelle les repas fabriqués par Pepette ont les meilleurs taux de digestibilité du marché est fondée et repose sur une étude réalisée par le laboratoire indépendant ONIRIS. Cette affirmation a d’ailleurs été validée par la DDPP 75.
- Pepette ne promet pas « des résultats rapides pour changer sa vie » mais propose simplement, par le biais d’une formule marketing classique, à chaque potentiel consommateur de remplir un questionnaire dont la durée est estimée à 3 minutes.
- L’affirmation selon laquelle la nourriture proposée par Pepette, de par son taux d’humidité élevé, contribue à la qualité de la peau et du pelage des chiens et chats a été scientifiquement établie et d’ailleurs validée par la DDPP 75.
- Les affirmations relatives à « un système immunitaire renforcé » ou encore « une vie plus longue d’au moins deux années » constituent des vérités scientifiques concernant une alimentation à base de viande fraîche telle que proposée par Pepette. Cette affirmation a également été validée par la DDPP.
- Enfin, les snacks de Pepette ont divers effets bénéfiques pour les chiens : un effet apaisant grâce à l’action combinée du Lactium et de la camomille ou encore un effet anti-inflammatoire sur les douleurs articulaires.
Compte tenu des éléments qui précèdent, et des modifications récemment apportées par Pepette sur son site internet, la société en cause estime que la plainte apparaît parfaitement infondée.
Lors de la séance du 10 janvier 2025, elle a indiqué avoir modifié les publicités sur son site et indiqué que, de ce fait, les critiques de la plainte portent sur des mentions qui n’y sont plus présentes aujourd’hui.
3. L’analyse du Jury
Le Jury rappelle que la Recommandation « Alimentation pour animaux familiers » de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP), dispose,
- en son point 3 – Santé, que :
- « 3.1 Les allégations faisant référence au traitement, à la guérison ou à la prévention d’une maladie sont considérées comme des allégations médicales. Le produit est alors un « aliment médicamenteux » ce qui le place dans la catégorie des médicaments vétérinaires.
En conséquence, pour les aliments n’entrant pas dans cette catégorie, les termes tels que « traite, soigne, soulage ou guérit » sont prohibés.
- 2 Les allégations fonctionnelles sont autorisées lorsqu’elles soulignent l’apport bénéfique d’un aliment, d’un nutriment, composant ou additif portant sur la croissance, le développement ou les fonctions normales du corps.
Par exemple : contient du calcium pour des os forts et des dents saines / prévient la formation de tartre / limite l’apparition de boules de poils…
- 3Les allégations diététiques sont autorisées dès lors que les produits entrent dans le cadre de la réglementation communautaire concernant les aliments à objectifs nutritionnels particuliers (également dénommés « aliments diététiques»). Pour la communication commerciale de ces aliments, les termes tels que « aide, apporte, contribue, prévient, protège…» sont acceptés et font référence à une pathologie spécifique.
Par exemple : réduit les récidives de signes de cystite idiopathique féline / réduit le risque de formation des calculs d’oxalate de calcium et de struvite / enrichi en taurine et en L-Carnitine pour aider à soutenir le muscle cardiaque…
- 4 L’utilisation du terme « santé » doit être nécessairement contextualisée ou relativisée.
En outre, le Code « Publicité et Communication commerciale » de la Chambre de commerce internationale (dit code ICC) reprend en outre les principes généraux suivants :
- Article 5 – Véracité
« Les communications commerciales doivent être véridiques et non trompeuses.
Les communications commerciales ne doivent contenir aucune allégation susceptible d’induire le consommateur en erreur, quelle que soit la manière dont elle est véhiculée – par le texte, le son, les éléments visuels ou toute combinaison de ces éléments – et quelle que soit la manière dont l’effet trompeur se produit – directement ou par implication, omission, ambiguïté ou exagération. La combinaison des éléments utilisés dans une communication commerciale contribue à l’interprétation d’une allégation ».
- Article 14 – Comparaisons
« Les communications commerciales contenant des comparaisons doivent être soigneusement conçues pour ne pas induire en erreur et doivent respecter les principes de la concurrence loyale. Les points de comparaison doivent être fondés sur des faits vérifiables. Les avantages en termes de produits ou de prix qui sont démontrables en soi ne doivent pas être exagérés ou dramatisés. Les comparaisons doivent indiquer clairement s’il s’agit du produit d’un concurrent ou d’une autre version du même produit. »
- Article 17 – Dénigrement
« Les communications commerciales ne doivent pas dénigrer une personne ou un groupe de personnes, une entreprise, une organisation, une activité industrielle ou commerciale, une profession ou un produit, ni chercher à les exposer au mépris public ou au ridicule. »
Le Jury relève que, pour promouvoir son offre de produits d’alimentation pour chiens et chats à base de produits frais et de recettes dites « élaborées par des vétérinaires et experts nutritionnistes », le site internet de la société Pepette, dans les éléments communiqués à l’appui de la plainte :
-d’une part, fait référence aux croquettes industrielles et à la « vérité cachée de la petfood », présentée comme une « invention marketing » inadaptée, utilisant un mode de cuisson « destructrice », nocive pour la santé animale » – « perte de vitamines […] apparition de molécules cancérogènes » ;
-d’autre part, présente « les bénéfices santé » de ce que la marque propose comme étant « la vraie nourriture pour chiens et chats » et entend décliner, sous forme de présentation par chapitres et images distincts « les 6 bénéfices santé que procurent une alimentation fraîche »- il s’agit du poids maitrisé, de la bonne digestion, du pelage soyeux, du système immunitaire renforcé, d’une vie plus longue- lesquels vont « changer la vie » des animaux, changement que leurs propriétaires vont « constater au bout de quelques jours seulement ».
A titre liminaire, tout d’abord, le Jury rappelle que c’est aux seules Recommandations et prescriptions d’ordre déontologique en matière de publicité qu’il est amené à confronter les messages visés par la plainte. A cet égard, le fait que certaines allégations aient été « validées » par la DDPP ainsi que l’affirme l’annonceur, alors qu’il s’agit d’un autre champ de compétences n’est pas déterminant.
Ensuite, le Jury précise qu’en vertu de l’article 11.1. 1°de son Règlement Intérieur pour être recevable « la publicité critiquée doit avoir été diffusée ou être accessible deux mois au plus avant la réception de la plainte. Ce délai de deux mois court à compter de la première diffusion de cette publicité ou de toute diffusion postérieure par ou pour le compte de l’annonceur ».
Le Jury relève que si la société Pepette a évoqué au cours de la séance du 10 janvier 2025 le fait qu’elle a modifié son site internet ce qui rendrait obsolètes les allégations critiquées dans la plainte, elle n’a apporté aucun élément probant quant à la date à laquelle elle aurait procédé à ces modifications. Elle est au contraire restée très vague, évoquant des corrections « au fil de l’eau », intervenues « depuis des semaines ou des mois » sans autre précision.
Le Jury considère donc que la plainte est recevable et que, pour rendre son avis, il peut se fonder sur les éléments visuels et textes contenus dans la plainte dont il constate d’ailleurs que, pour partie, certaines allégations demeurent inchangées au moment de l’examen de la plainte à la date de sa séance.
En premier lieu, le Jury constate qu’il s’agit de présenter de simples recettes composées d’aliments frais mais qui ne sont ni des médicaments vétérinaires, ni des aliments diététiques. Elles sont ici directement associées à de véritables bénéfices pour la santé, non seulement entendue au sens large (pelage plus soyeux ou apports nutritionnels) mais également au sens le plus strict puisqu’elles auraient une véritable action thérapeutique ou curative, qui plus est rapide.
De nombreuses allusions non relativisées sont ainsi faites à une telle vertu thérapeutique puisque lesdits aliments seraient de nature à « nourrir les bonnes bactéries » des intestins, « donner des défenses immunitaires » mais aussi « soulager les problèmes dermatologiques », « soulager les démangeaisons, améliorer la santé de la peau » « limiter les allergies », même « calmer l’anxiété ». Plus encore ils entraîneraient une « réduction du risque de diabète, d’inflammations chroniques des intestins, de dermatites, d’infections urinaires et d’autres maladies courantes ». Le Jury précise qu’au matin de la séance du Jury, cette dernière phrase était mot pour mot consultable sur le site internet de même que plusieurs des affirmations portant sur les bienfaits curatifs, même si elles n’étaient pas formulées à l’identique.
De telles allégations, qui font référence à la prévention de pathologies et aux vertus thérapeutiques pour les animaux de compagnie des aliments commercialisés, constituent des allégations médicales qui ne peuvent être associées à des produits ne constituant pas des médicaments vétérinaires. Elles contreviennent donc au point 3 de la même Recommandation.
En second lieu, présenter ces qualités thérapeutiques et non seulement nutritionnelles ou de bien-être comme résultant de véritables vérités scientifiques, suggérant même –dans sa conclusion- que les aliments proposés pourraient remplacer un « calmant » acheté en pharmacie, entretient une confusion trompeuse et contrevient au principe de véracité.
Le Jury relève d’ailleurs que la marque a repris à l’identique l’allégation qui ne repose toujours sur aucune preuve scientifique véritable selon laquelle les produits utilisés seraient « la combinaison secrète pour moins de visites chez le véto (même si on les aime) et une vie plus longue d’au moins 2 ans en moyenne ». Un précédent avis a pourtant considéré qu’elle était contraire à ce même principe de véracité. (Avis publié le 6 juin 2023 PEPETTE – 920/ 23).
En troisième et dernier lieu, le Jury estime que la société Pepette en affirmant vouloir dévoiler « La vérité cachée de la petfood » pour dénoncer celle élaborée par des concurrents qui commercialisent des croquettes, qu’elle assimile tous d’un seul bloc, sans aucune nuance et de manière péjorative, non seulement à une « invention marketing » à de la « poudre de perlimpinpin » ou à une alimentation animale « inadaptée » comparée à ce qu’elle propose elle-même, mais bien à une alimentation qu’elle qualifie implicitement de dangereuse car potentiellement cancérigène, se livre ainsi à la fois à une comparaison dont les termes négatifs sont exagérés et dramatisés au sens de l’article 14 du code ICC précité mais également à un véritable dénigrement au sens de l’article 17 du même Code.
En conséquence de ce qui précède, le Jury est d’avis que la publicité en cause méconnait les dispositions déontologiques précitées.
Avis adopté le 10 janvier 2025 par Mme Tomé, Présidente, M. Aparisi, Vice-Président, Mmes Aubert de Vincelles, Boissier, Charlot et Lenain, ainsi que MM. Le Gouvello, Lucas-Boursier et Thomelin.
Publicité Pepette
