Avis publié le 05 février 2018
Plainte fondée
Le Jury de Déontologie Publicitaire,
- Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
- les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
- après avoir entendu le représentant de la société annonceur,
- et après en avoir débattu,
rend l’avis suivant :
1. La procédure
La société annonceur a, par courrier recommandé avec avis de réception du 6 décembre 2017, été informée de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.
Elle a adressé des arguments en réponse à la plainte par courrier du 12 décembre 2017.
Compte tenu des précisions transmises, le plaignant a été informé de la possibilité de mise en œuvre de la procédure de règlement amiable prévue à l’article 13 du règlement intérieur du Jury de Déontologie Publicitaire. Le plaignant a refusé cette possibilité de règlement amiable.
2. La plainte
Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 5 novembre 2017, d’une plainte émanant d’un particulier, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité diffusée en presse, en faveur de la société annonceur pour promouvoir sa marque d’aspirateur silencieux.
Le visuel publicitaire en cause présente une femme de dos, assise au sol, jambes repliées en tailleur, les avant-bras reposés sur les genoux, en position de méditation, dans un intérieur épuré. Au premier plan, est présenté un aspirateur dont le fil de branchement et le tuyau sont déployés.
Le texte accompagnant cette image est « Un aspirateur ultra silencieux et tout aussi puissant… vraiment ? X vous répond…», « Diminuer le niveau sonore de 3 décibels revient à diviser par deux le son perçu » ainsi que, dans un encart, notamment les mentions suivantes : « Vous pourrez passer l’aspirateur pendant que votre mari regarde un match de foot, que vos enfants dorment ou font leurs devoirs et sans stresser vos animaux de compagnie. Quel bonheur n’est-ce-pas ? »
2. Les arguments échangés
– Le plaignant considère que cette publicité véhicule des clichés sexistes honteux.
– La société reconnaît que la formulation en cause est à la fois maladroite et inutile. Surtout, elle ne représente pas l’identité et les valeurs du groupe qui s’est toujours attaché à lutter contre tous les stéréotypes et à défendre l’égalité homme-femme en son sein et dans le cadre de ses activités et messages à l’attention du grand public.
La société s’engage à arrêter immédiatement la diffusion du message publicitaire incriminé et à redoubler de vigilance à l’égard de toutes ses communications extérieures.
– Le magazine reconnaît également que la formulation en cause est à la fois maladroite et inutile, et s’engage à une meilleure attention à l’avenir. Néanmoins, ses conditions générales de vente stipulent dans le paragraphe 3.3 que « la responsabilité du groupe ne saurait être engagée par les messages publicitaires qui sont diffusés sous la seule responsabilité de l’annonceur. »
3. L’analyse du Jury
Le Jury rappelle que la Recommandation « Image et respect de la personne » de l’ARPP dispose que :
« 2-2 La publicité ne doit pas cautionner l’idée de l’infériorité d’une personne en raison de son sexe, de son origine, de son appartenance à un groupe social, de son orientation ou identité sexuelle ou de tout autre critère de discrimination, notamment en réduisant son rôle et ses responsabilités dans la société.
2-3 La publicité ne peut valoriser, même indirectement, des sentiments ou des comportements d’exclusion, d’intolérance, de sexisme ».
Le Jury relève que la publicité en cause fait la promotion d’ « un aspirateur ultra silencieux et tout aussi puissant… », qui figure au premier plan sur le visuel tandis qu’une femme, au second plan, se tient dans une pause de yoga méditatif devant une fenêtre. Or cette publicité comporte, parmi les mentions inscrites sous le visuel, la phrase suivante « Avec SEULEMENT 58dB(A), soit l’équivalent du niveau sonore d’une conversation courante, UltraSilencer ZEN enchantera vos nettoyages quotidiens. Désormais, PLUS D’EXCUSES… Vous pourrez passer l’aspirateur pendant que votre mari regarde un match de foot, que vos enfants dorment ou font leurs devoirs ou sans stresser vos animaux de compagnie. Quel bonheur n’est-ce pas ? »
Elle cautionne ainsi l’idée que ce sont nécessairement les femmes qui doivent effectuer les tâches ménagères pendant que les hommes se livrent à des activités de loisirs, et ce faisant, réduit leur rôle et leur responsabilité dans la société et véhicule un stéréotype sexiste.
En conséquence, le Jury est d’avis que la publicité en cause méconnaît les dispositions de la Recommandation précitée.
Il prend acte de ce que l’annonceur s’est engagé à arrêter immédiatement la diffusion de message.
Avis adopté le 12 janvier 2018 par Mme Lieber, Présidente, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mme Drecq, MM. Benhaïm, Depincé, Lacan, Leers et Lucas-Boursier.