JDP

Avis JDP n°72/10 – CONSTRUCTEUR AUTOMOBILE – Plainte rejetée

Décision publiée le 22.09.2010
Plainte rejetée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

– Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,

– après voir entendu le représentant de l’agence conseil en communication ; le plaignant et l’annonceur ayant été avertis de la date de la séance par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 juillet 2010,

– et après en avoir délibéré, hors la présence des parties,

rend la décision suivante :

1.Les faits

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi le 21 juillet 2010, par un particulier, afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur, d’un message publicitaire diffusé par messagerie électronique en faveur d’un site événementiel du constructeur automobile.

La publicité dénoncée est constituée d’une succession de messages instaurant un dialogue, adressés, notamment, sur la messagerie du plaignant.

Ces messages sont personnels et proviennent d’une personne, en l’espèce l’expéditrice, qui s’adresse directement au destinataire en utilisant son prénom et en citant le nom d’un proche de celui-ci. Le message est, libellé ainsi : « hello…, Je m’appelle Elodie, j’ai eu ton contact par X,  j’étais à une soirée de … mais on ne s’est pas parlé… du coup je ne sais pas si tu te souviens de moi mais ça me ferait plaisir si on pouvait se revoir. Voici mon facebook… A très vite. Elodie ».

Si le destinataire se connecte sur le profil de l’expéditrice, il peut constater que le contact X, cité dans le message et figurant comme ami sur la page facebook, est bien une personne qu’il connaît. Plus tard, il reçoit un deuxième courriel de l’expéditrice qui l’invite à une soirée et lui propose de visionner une vidéo enregistrée à ce sujet pour le convaincre. S’il visionne la vidéo, le destinataire, voit l’expéditrice commencer un simulacre de striptease, puis s’interrompre à la sonnerie d’un téléphone, répondre à l’interlocuteur « oui je l’ai invité, je suis en contact avec lui », alors, l’expéditrice tend l’écran du téléphone vers la « webcam » et le destinataire constate que l’interlocuteur téléphonique est son ami qui a servi d’intermédiaire. Puis, le message suivant apparaît : « Visiblement, toi aussi tu as gardé une âme de célibataire. Bienvenue au club ».

S’affiche ensuite automatiquement la page d’un site intitulé « on a tous une âme de célibataire » sur laquelle figure, entre autres, le sigle de la marque et la photo d’un véhicule.

Ce site propose alors au destinataire de piéger à son tour un ami avec la complicité d’un mannequin qu’il peut choisir entre plusieurs hommes et femmes dont la photo figure sur la page.

2.Les arguments des parties 

– Le plaignant considère que cette démarche est choquante et s’apparente à de la manipulation affective. Selon lui, ce message ne respecte pas les règles relatives à l’identification de la publicité.

– Le constructeur automobile, l’annonceur,  fait valoir que cette opération de communication respecte la déontologie et les préceptes de l’ARPP.

Sur la question de l’identification de la publicité, elle explique que si l’ensemble constitue bien de la publicité, le dispositif d’envoi évoqué n’est pas un message publicitaire puisqu’il s’agit d’un jeu organisé par elle auprès de personnes rencontrées lors de soirées événementielles organisées pour le lancement de son nouveau modèle,  et auxquelles il a été proposé de se connecter sur le site intitulé, dans l’esprit du produit, « On a tous une âme de célibataire » et créé dans le cadre de sa campagne.

Le constructeur automobile précise qu’aucun message n’est envoyé ni par elle ni par les agences en charge de la campagne à la personne concernée et conteste l’existence d’un mécanisme intrusif, le jeu ne fonctionnant qu’entre personnes qui se connaissent. Ce sont eux qui décident, ou non, de jouer et qui déclenchent, ou non, « le piège ». Ni le constructeur ni les agences ne peuvent donc être considérées comme responsables de l’utilisation qui est faite du procédé. Elle ajoute qu’à aucun moment de cette phase de jeu, il n’est fait la promotion du produit concerné, ni dans le message de prise de contact, ni sur le profil facebook du complice, ni dans le second courriel invitant la personne piégée à visionner la vidéo de révélation.

– Lors de la séance, le représentant de l’agence conseil en communication, auteur de cette publicité, a repris les explications développées par le constructeur automobile. Il a ajouté que le jeu ne relevait pas de la technique du « teasing », mais tendait plutôt à entraîner un effet de « buzz ».

Il a confirmé que l’agence de communication, mise en cause par le plaignant, avait seulement réalisé le site et n’était pas l’auteur de la publicité.

3.Les motifs de la décision du Jury

– Il résulte des dispositions déontologiques, notamment celles contenues dans la  Recommandation «Internet Support publicitaire» que :

« Tout annonceur, émetteur d’un message publicitaire sur l’Internet, doit être clairement identifiable. Cette identification doit être lisible et facile d’accès pour tout internaute.

L’identification peut se faire par la/les marque(s) de l’annonceur, ou tout autre signe distinctif rattaché sans ambiguïté à l’annonceur. »

« La publicité doit pouvoir être clairement identifiée comme telle, et ce quelle que soit la forme sous laquelle elle se présente. Cette identification peut se faire par tout moyen nettement perceptible permettant de rendre d’emblée non équivoque pour l’internaute la nature publicitaire du message».

« Aucun message publicitaire ne doit être de nature à dégrader la confiance que le public doit pouvoir porter à la publicité. A cet égard : La publicité ne doit pas être de nature à induire le consommateur en erreur sur l’offre réellement proposée et/ou sur l’entreprise à l’origine de l’offre.

Le Jury observe que si la dernière page auquel conduit le « jeu » constitue bien de la publicité, le mécanisme mis en place ne fonctionne qu’à l’initiative d’une personne qui connaît le destinataire et lui tend un « piège » inoffensif, relevant de la farce, auquel ce destinataire n’a aucune obligation d’adhérer. Cet instigateur sait que ce jeu est mis à sa disposition par le constructeur automobile et conduira le destinataire, s’il a accepté de jouer, à voir une page de publicité pour un produit de la marque. Il relève que durant toute la phase de jeu, aucune promotion pour le constructeur n’est faite, ni aucune invitation à un évènement de la marque n’est proposée, le mécanisme consistant en réalité à amener le destinataire vers la page de publicité du constructeur automobile qui est, elle, clairement identifiée.

Il résulte de ces éléments qu’en l’espèce, cette phase de jeu ne constitue pas de la publicité relevant de l’obligation d’identification rappelée ci-dessus et que la publicité en cause n’encourt pas le reproche de la plainte.

 En conséquence, le Jury considère que ce message publicitaire ne contrevient pas aux dispositions précitées.

4.La décision du Jury

– La plainte est rejetée ;

– La décision du Jury sera communiquée au plaignant, à l’annonceur, et aux agences de communication.

– elle sera diffusée sur le site Internet du JDP.

Délibéré le vendredi 10 septembre 2010 par Mme Hagelsteen, présidente, Mme Michel-Amsellem, Vice-présidente, Mmes Drecq et Moggio, MM. Benhaïm, Lacan, Leers et Raffin.

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