Décision publiée le 04.05.2011
Plainte fondée
Le Jury de Déontologie Publicitaire,
– après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
– et, après en avoir délibéré, hors la présence des parties,
rend la décision suivante :
1.Les faits
Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi les 8 et 11 février 2011 de deux plaintes émanant de particuliers, afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur, d’une affiche publicitaire en faveur des rencontres féminines de handball à Besançon.
Ladite publicité représente une jeune femme vêtue d’un mini short, d’un tee-shirt et de talons hauts, tenant un ballon de hand-ball dans la main droite et un poudrier-miroir dans la main gauche. Elle est adossée à l’un des poteaux des cages de buts. Son visage n’apparaît que partiellement.
2.Les arguments des parties
– Les plaignants font valoir que la tenue et la posture de la femme tendent à assimiler celle-ci à une prostituée et véhiculent ainsi une vision sexiste et irrespectueuse de la femme.
L’un des plaignants ajoute que cette image comporte une connotation sexuelle et réductrice du sport féminin.
– L’annonceur a produit un argumentaire dans lequel il précise qu’un partenariat a été mis en place avec une formation universitaire de Besançon: 6 étudiantes sous la responsabilité d’un professeur étaient chargées de la réalisation de l’affiche ainsi que de la réalisation quotidienne d’une gazette, ce travail faisait l’objet également du mémoire de fin d’étude des étudiants.
Le fil conducteur de l’affiche devant être réalisée était « Originalité, féminité et handball ».
Les étudiantes ont présenté leur travail au comité d’organisation, celui-ci l’ayant validé avec l’accord du président de la ligue et leur professeur.
Lors de la présentation officielle devant des élus, les représentants du CROSS et de l’UNSS, aucun commentaire négatif n’a été porté à leur connaissance.
Un reportage télévisé a eu lieu lors de la compétition, principalement axé sur l’affiche, des jeunes filles participant à la compétition ont pu même énoncer qu’elles appréciaient le graphisme et que celle-ci représentait à leurs yeux « la jeune fille sportive 2011 ».
Le lendemain, l’entraîneur de l’équipe de France féminine est intervenu en direct dans le journal de France3 région et a répondu que l’affiche était conforme aux codes vestimentaires des jeunes actuels.
Un sondage a été réalisé pendant la compétition auprès des compétitrices qui ont toutes affirmé qu’elles aimaient bien cette affiche.
Deux entraîneurs ont, quant à eux, fait part de leur réserve sur le contenu de l’affiche.
Le mémoire des étudiantes est joint. L’affiche 2009 est également jointe. Au sein du mémoire, un paragraphe est consacré à la polémique autour de l’affiche.
Les auteurs du mémoire indiquent que quelques jours avant la compétition un des commanditaires leur a signalé que « l’affiche suscite quelques réactions négatives » et que très vite il leur a été annoncé que « la fédération Française de Handball exigeait que l’affiche soit retirée ». Finalement l’affiche n’a pas été retirée et la majeure partie des avis recueilli était en faveur de l’affiche.
– L’enseignant encadrant les étudiantes a souhaité préciser que l’affiche avait été soumise et validée par le donneur d’ordre et que lui-même, ayant des doutes sur la conformité de l’affiche avec les règles en vigueur, avait contacté l’ARPP laquelle a donné informellement « un avis négatif » sur ce visuel. Il précise avoir prévenu l’ensemble des donneurs d’ordre.
Enfin, il indique que les étudiantes qui ont réalisé cette affiche, n’ont jamais pensé à mal et que leurs erreurs doivent davantage être mises sur le compte de l’inexpérience plutôt qu’à une volonté de choquer.
– L’ARPP, contactée par cet enseignant par voie électronique puis par téléphone, a précisé qu’elle déconseillait ce type de représentation visuelle au regard des règles déontologiques relatives à l’image de la personne humaine.
3.Les motifs de la décision du Jury
La Recommandation « Image de la Personne Humaine » de l’ARPP dispose que :
« D’une façon générale, toute représentation dégradante ou humiliante de la personne humaine, explicite ou implicite, eswt exclue, notamment au travers de qualificatifs, d’attitudes, de postures, de gestes, de sons etc. attentatoires à la dignité humaine » – point 1/3 du paragraphe relatif à la dignité ;
« La publicité ne doit pas réduire la personne humaine, et en particulier la femme, à la fonction d’objet » – point 2-1 du paragraphe relatif aux « stéréotypes sexuels, sociaux et raciaux »
Le Jury considère que la représentation de la femme dans l’affiche publicitaire en cause, notamment sa posture, même si elle résulte du travail de jeunes étudiantes en vue notamment de l’obtention de leur diplôme agissant sans volonté de choquer et essayant de répondre à la thématique « Originalité, féminité et handball », propose une image à tout le moins réductrice et ambiguë de la femme pratiquant un sport.
Elle contrevient en ce sens aux règles déontologiques rappelées ci-dessus.
4.La décision du Jury
– La plainte est fondée ;
– La publicité en faveur des rencontres féminines de handball à Besançon contrevient aux points 1/3 et 2.1 de la Recommandation « Image de la personne humaine » de l’ARPP ;
– La présente décision sera communiquée aux plaignants, à l’annonceur et au support d’affichage concerné ainsi qu’à l’enseignant de l’IUT;
– Elle sera diffusée sur le site Internet du JDP.
Délibéré le vendredi 8 avril 2011 par Mme Hagelsteen, Présidente, Mme Michel-Amsellem, Vice-Présidente, MM Lacan, Benhaïm, Leers et Raffin.