Avis publié le 31 octobre 2025
ACTION – 1077/25
Plainte fondée
Le Jury de Déontologie Publicitaire,
- après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
- les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
- après avoir entendu les représentants de la société Action,
- et après en avoir débattu,
rend l’avis suivant :
- La plainte
Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 4 juillet 2025, d’une plainte émanant d’un particulier, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité de la société Action, pour promouvoir son offre de sous-vêtements et linge en coton.
La publicité en cause, diffusée à l’arrière d’un camion de la société, utilise le texte, en gros caractères sur fond vert : « Ce camion à double étage transporte nos chaussettes et serviettes en coton durable », « Meilleur pour l’environnement et votre porte-monnaie », suivi d’une pastille contenant une fleur de coton stylisée entourée de la mention « Made with responsible cotton ».
- Les arguments échangés
– Le plaignant énonce que Action lui semble méconnaître les recommandations de l’ARPP en matière de développement durable décrites dans l’animation graphique de la Recommandation « Développement durable » accessible sur Youtube, sur les points suivants : « Si je n’ai pas assez de preuves manifeste pour étayer l’argument écologique, je m’abstiens. », « Certaines promesses environnementales sont complexes, comme compensation carbone […] alors j’explique les termes et je renvoie si besoin vers une page dédiée du site de l’annonceur ».
Les termes « durable » et « meilleur pour l’environnement » auraient dû être explicités et étayés, éventuellement par un renvoi vers une page dédiée de l’annonceur.
Concernant les éléments visuels, à savoir le logo et le fond vert, le plaignant considère que ceux-ci ne sont pas conformes aux points « Si j’utilise le logo d’un annonceur, je veille à ne pas lui donner une apparence officielle, son origine doit être clairement indiquée. Un label délivré par les autorités publiques ne doit pas être confondu avec un label privé. » et « On fait attention aux signes forts, le vert, un arbre, un ours, attention ! Certains éléments naturels comportent un sens puissant pour le consommateur, on les réserve aux produits n’ayant aucun impact sur l’environnement. ».
– La société Action a été informée, par courriel du 10 juillet 2025 et par courrier recommandé avec accusé de réception du 15 juillet 2025, de la plainte dont copie leur a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.
Son représentant souligne qu’Action accorde une importance particulière au respect des obligations légales et déontologiques en matière de publicité, puisqu’elle a à cœur de délivrer aux consommateurs des informations exactes, loyales et transparentes. C’est pourquoi la société a été surprise par la plainte, estimant que sa communication ne viole aucune règle du Code de la Consommation, particulièrement les articles L.121-2 et suivants relatifs à la publicité trompeuse, ni les dispositions déontologiques de l’ARPP.
La société Action fait valoir que :
- Sur la mention « ce camion à double étage transporte » : la publicité met en avant la caractéristique de « double étage » des remorques, élément ignoré dans la plainte.
Ces véhicules – promus par la société depuis plusieurs années – présentent des avantages environnementaux significatifs, en ce qu’ils émettent des émissions de CO2 réduites de 40% par rapport à une remorque classique et réduisent ainsi le nombre de remorques nécessaires pour acheminer la marchandise.
Ces particularités sont explicitées sur le site Internet du fabricant de la remorque (BURGERS) et de ses distributeurs. L’ensemble de ces informations sont clairement lisibles et aisément accessibles au public sur Internet puisque la remorque appose explicitement la marque BURGERS avec un hyperlien renvoyant à leur site Internet.
Une telle pratique est donc en conformité avec l’article 4.3 de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP.
Par ailleurs, dans la mesure où l’ensemble de ces informations ne peuvent être intégrées directement dans le message publicitaire, un renvoi reste parfaitement conforme à l’article 4.4 de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP.
Il en résulte que la mention en question est vérifiable, claire et lisible. Par conséquent, elle ne saurait être qualifiée de trompeuse ni de contrevenante aux dispositions déontologiques en vigueur.
- Sur la mention « chaussettes et serviettes en coton durable » : les produits commercialisés par Action – et visibles sur le site Internet de la société – exposent de manière claire et détaillée les raisons pour lesquelles ils peuvent être qualifiés de « durables », conformément à l’article 4.3 de la recommandation « développement durable » de l’ARPP.
La société renvoie à une annonce qui contient un encart explicatif à ce sujet : https://www.action.com/fr-fr/p/3207118/serviette/. Cet encart renvoie également à une page spécifique explicitant ce qui est entendu par le terme « coton durable » : https://www.action.com/fr-fr/durabilite/le-coton-durable/.
La société Action fait valoir également qu’elle est membre de la Better Cotton Initiative (BCI), association visant à rendre la production de coton plus durable en améliorant les pratiques agricoles, les conditions sociales des producteurs et la traçabilité du coton dans la chaîne d’approvisionnement.
L’ensemble de ces informations sont accessibles via le site Internet action.com qui est indiqué dans la publicité apposée sur la remorque de transport.
Ce renvoi est ainsi conforme à l’article 4.4 de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP.
Dès lors, la société estime que l’utilisation de la mention « coton durable » ne saurait être qualifiée de trompeuse ni constituer une infraction aux dispositions déontologiques applicables.
- Sur l’utilisation généralisée de la couleur verte au sein de la publicité : aucune disposition légale n’interdit cet usage pour évoquer les thématiques environnementales.
Ce point ne peut être reproché à Action, d’autant que les informations environnementales présentées sur la publicité en question sont exactes.
- Sur l’utilisation du logo, qui représente une fleur de coton : ceci est conforme à l’article 8.3 de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP, lequel n’interdit pas l’utilisation d’un logo incorporant un élément de nature.
Par ailleurs, ledit logo illustre uniquement que certains articles transportés dans cette remorque sont fabriqués à partir du coton durable et ne renseigne en aucun cas sur les caractéristiques du véhicule, en accord avec l’article 8.4 de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP.
Ainsi, il apparaît difficilement concevable – sauf à faire preuve de mauvaise foi – qu’un consommateur normalement avisé puisse interpréter ce logo comme une indication relative à la fabrication de la remorque plutôt qu’à celle des articles en coton.
Enfin, le logo n’implique aucune approbation officielle ni certification tierce, telles que les certifications OEKO-TEX ou GOTS, conformément à l’article 6.2 de la Recommandation « Développement durable ».
Par conséquent, la société Action ne perçoit pas en quoi l’utilisation de cette fleur de coton – conçue par la société elle-même pour indiquer la composition de certains articles transportés – pourrait constituer une violation du Code de la Consommation ou les règles déontologiques en vigueur.
En conclusion, la société Action conteste les griefs formulés dans la plainte mais se déclare disposée à renforcer davantage la clarté et la transparence de sa communication. A cet effet, une rubrique spécifique pourrait être créée sur le site Internet, en complément de celle déjàconsacrée au coton durable afin de détailler les raisons pour lesquelles les remorques à double étage présentent un impact environnemental plus favorable qu’une remorque classique.
La société propose également de mettre en lumière le fait que ce type de remorque constitue, depuis de nombreuses années un des vecteurs de communication d’Action.
- L’analyse du Jury
Le Jury rappelle que la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP dispose :
- en son point « Véracité des actions » (point 2) :
- « 2.1 La publicité ne doit pas induire le public en erreur sur la réalité des actions de l’annonceur ni sur les propriétés de ses produits en matière de développement durable. (….)
- 2.3 L’annonceur doit être en mesure de justifier les arguments ayant trait au développement durable au moyen d’éléments objectifs, fiables, véridiques et vérifiables au moment de la publicité. »
- en son point « Proportionnalité des messages » (point 3) :
- « 2 Le message publicitaire doit être proportionné à l’ampleur des actions menées par l’annonceur en matière de développement durable ainsi qu’aux propriétés du produit dont il fait la promotion.
- en son point « Clarté du message » (point 4) :
-
- « 4.1 L’annonceur doit indiquer dans la publicité en quoi ses activités ou ses produits présentent les qualités revendiquées.(…)
- 3 Lorsqu’une explicitation est nécessaire, celle-ci doit être claire, lisible ou audible et, donc, répondre aux exigences de la Recommandation Mentions et renvois de l’ARPP. »
- en son point « Signes, labels, logos, symboles, auto-déclarations » (point 6) :
- « 6.1 Les signes ou symboles ne peuvent être utilisés que si leur origine est clairement indiquée et s’il n’existe aucun risque de confusion quant à leur signification.
Les précisions sur cette signification pourront être apportées aux conditions définies par l’article 4-3 de ce texte.
- « 6.1 Les signes ou symboles ne peuvent être utilisés que si leur origine est clairement indiquée et s’il n’existe aucun risque de confusion quant à leur signification.
-
- 2 Ces signes ne doivent pas être utilisés de manière à suggérer sans fondement une approbation officielle ou une certification par un tiers.
-
- 3 La publicité ne doit pas attribuer aux signes, logos ou symboles une valeur supérieure à leur portée effective.
- en son point « vocabulaire » (point 7) :
- « 7.1 Les termes et expressions utilisés ne doivent pas induire le public en erreur sur la nature et la portée des propriétés du produit ou des actions de l’annonceur en matière de développement durable /
- 7.3 Dans le cas où il serait impossible de justifier des formulations globales (ex. : écologique, vert, éthique, responsable, préserver, équitable, durable, …), la publicité doit les relativiser en utilisant des formulations telles que “contribue à” ».
- et son point 8, relatif aux « présentations visuelles», que :
- « 8.1 Les éléments visuels ou sonores doivent être utilisés de manière proportionnée à l’argument écologique et aux éléments justificatifs qui l’appuient.
- 2 Ils ne doivent pas pouvoir être perçus comme une garantie d’innocuité si cette dernière ne peut être justifiée.
- 3 Sans exclure leur utilisation, l’emploi d’éléments naturels ou évoquant la nature ne doit pas induire en erreur sur les propriétés environnementales du produit ou des actions de l’annonceur. ».
Le Jury relève que la plainte porte sur les mentions de la publicité en cause qui sont relatives aux seuls produits transportés appartenant à la marque Action et non sur les caractéristiques du camion à double étage qui transporte ces mêmes produits. Toutefois, le Jury tient à préciser, au vu des explications de la société Action que, s’il devait examiner cette référence au camion à double étage comme « marqueur » d’une action en faveur du développement durable, cette seule affirmation lui paraitrait, en tout état de cause, manquer de clarté et de proportionnalité au sens de la Recommandation précitée puisque le fait qu’il soit à double étage ne constitue pas en lui-même une garantie « verte », d’autres paramètres liés au transport (nombre de camions, poids etc…) absents du message étant susceptibles d’entrer en ligne de compte pour apprécier précisément la notion de durabilité.
Il suit de ce qui précède que le Jury, pour répondre à la plainte, examine donc, dans le présent avis, les griefs qu’elle contient et qui concernent seulement les allégations relatives aux produits transportés et à leurs propriétés au titre du développement durable : « Ce camion à double étage transporte nos chaussettes et serviettes en coton durable » suivi en plus petits caractères de « Meilleur pour l’environnement et votre porte-monnaie », puis d’une pastille contenant une fleur de coton stylisée entourée de la mention « Made with responsible cotton ».
Le Jury constate que la publicité en cause concerne un modèle de camion où elle est présentée sur l’arrière de ce camion, coloré en vert cru, et qu’elle utilise à la fois des lettres grand format, bien visibles, ainsi qu’un logo en forme de pastille cerclée de la mention « Made with responsible cotton » représentant une fleur de coton, pour faire la promotion de produits « chaussettes et serviettes en coton durable » accompagné d’un slogan qui affirme « Meilleur pour l’environnement et votre porte-monnaie ».
Pour le Jury, ce visuel, tant par sa couleur ou par le logo utilisé que par les mentions du message relatives à la notion de durabilité associée à celle de responsabilité et à l’environnement, s’impose comme laissant à penser que la marque Action a une activité et une politique « vertes » de développement durable constitutive de son identité.
Il considère que le renvoi à « action.com », qui figure bien sur la publicité du camion, porte sur un site commercial et publicitaire dont le champ est très vaste et qui ne peut ainsi constituer un renvoi adapté de nature à éclairer le consommateur, suffisamment explicite au sens de la Recommandation, sur les mentions et le slogan précités, comme le ferait une page dédiée sur la politique verte de la marque.
Par ailleurs, il relève que la référence au groupe « Burgers » incrustée en bas du camion, outre le fait qu’elle concerne le camion qui n’est pas visé par la plainte, ne figure pas dans le message publicitaire lui-même et ne saurait donc constituer une information interne à la publicité.
Enfin, le Jury estime que le logo représentant une fleur de coton entourée de la mention « Made with responsible cotton » qui n’est pas un label officiel crée une confusion pour le consommateur et enfreint très précisément l’article 6.1 de la Recommandation précitée.
Le Jury estime donc que la publicité en cause n’est pas suffisamment claire, explicite ni proportionnée et qu’elle est également de nature à induire en erreur le public sur le caractère durable et les propriétés des produits comme sur la portée des actions de la société en cause pour un consommateur moyen.
En conséquence, le Jury est d’avis que cette publicité méconnaît les dispositions précitées de la Recommandation « Développement durable ».
Avis adopté le 10 octobre 2025 par Mme Tomé, Présidente, M. Aparisi, Vice-Président, Mmes Aubert de Vincelles, Boissier et Lenain, ainsi que MM. Le Gouvello, Lucas-Boursier et Thomelin.