Avis JDP n° 561/19 – RESTAURANT – Plainte fondée

Avis publié le 4 avril 2019
Plainte fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • et après en avoir débattu dans les conditions prévues par l’article 12 du règlement intérieur,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 14 février 2019, d’une plainte émanant d’un particulier, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publication sur le réseau social Facebook en faveur de la société annonceur, pour promouvoir une offre de son restaurant à l’occasion de la fête de la Saint-Valentin.

La publicité en cause montre une femme, dont ne sont visibles que les mains et le bas du visage présenté de profil, portant un sandwich hot-dog à sa bouche. Ses lèvres, peintes en rose, sont légèrement entrouvertes autour de la saucisse.

Les textes accompagnant ce visuel sont « Happy Valentine’s day… » , « Mesdames, en ce jour des amoureux, souvenez-vous que c’est Monsieur qui paiera l’addition du restaurant ce soir ».

2. Les arguments échangés

– Le plaignant considère que cette publicité est misogyne et sexiste, la femme étant présentée comme un objet qui doit se soumettre à une fellation pour remercier son ami de lui payer le restaurant. Il souligne qu’en outre la femme n’a pas de visage sur le visuel.

– La société annonceur a été informée, par courrier recommandé avec avis de réception du 20 février 2019, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle a été également informée que cette affaire ferait l’objet d’un examen dans le cadre de la procédure simplifiée prévue à l’article 12 du règlement intérieur du Jury.

Par courriel du 1er mars 2019, la société a indiqué que, seul bar à hot-dogs américains sur son lieu d’implantation, elle s’efforçait de véhiculer l’image d’un établissement original et différents des autres établissements de snaking. Ainsi, lors de chaque célébration calendaire (Noël, Jour de l’an, Carnaval, Halloween, Saint Valentin, fêtes des mères/pères…) son équipe se concerte afin de créer une publication se distinguant des publications communément rencontrées dans les médias.

C’est ainsi que la société a envisagé une publicité « sortant de l’ordinaire », qui représente une femme mangeant un hot-dog avec un commentaire « coquin ». Selon elle, le choix du visuel n’avait « pas pour but de dégrader la gente féminine », mais jouait sur la symbolique longiligne du hot-dog car l’annonceur ne souhaitait pas publier de photo plus « crue » ou grossière à connotation sexuelle.

L’annonceur précise que la publication est parue 48 heures sur la page Facebook avant d’être retirée et qu’il prendra en considération la Recommandation « Image et respect de la personne » dans ses futures publications.

3. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle que la Recommandation « Image et respect de la personne » de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP), dispose que :

« 1.1. La publicité ne doit pas être susceptible de heurter la sensibilité, choquer ou même provoquer le public en propageant une image de la personne humaine portant atteinte à sa dignité et à la décence.

2.1. La publicité ne doit pas réduire les personnes humaines, et en particulier les femmes, à la fonction d’objet .

2.3 La publicité ne peut valoriser, même indirectement, des sentiments ou des comportements d’exclusion, d’intolérance, de sexisme. »

Le Jury relève que la publicité en cause montre une femme, dont ne sont visibles que les mains, aux ongles peints, et le bas du visage présenté de profil, portant un sandwich hot-dog à sa bouche. Ses lèvres maquillées sont légèrement entrouvertes autour de la saucisse. Les textes accompagnant ce visuel sont « Happy Valentine’s day… », « Mesdames, en ce jour des amoureux, souvenez-vous que c’est Monsieur qui paiera l’addition du restaurant ce soir ».

Le Jury estime que le cadrage et la mise en scène de cette image évoquent inévitablement un acte de fellation. Si l’annonceur qualifie de « coquin » le commentaire sur le fait que l’homme « paiera l’addition », ce slogan évoque directement l’idée que la femme, en ce jour de Saint-Valentin, devra rémunérer de faveurs sexuelles le restaurant offert par « Monsieur ». L’image présentée s’appuie ainsi sur une utilisation sexualisée et marchande du corps de la femme, qui la réduit à la fonction d’objet sexuel, porte atteinte à sa dignité et peut être de nature à heurter la sensibilité du public.

En conséquence de ce qui précède, le Jury est d’avis que la publicité en cause ne respecte pas les points précités de la Recommandation « Image et respect de la personne » de l’ARPP.

Avis adopté le 8 mars 2019 par Mme Lieber, Présidente, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mmes Drecq et Lenain, MM. Depincé, Lacan, Leers et Lucas-Boursier.