Avis JDP n°467/17 – DEUX ROUES A MOTEUR – Plainte fondée

Avis publié le 21 août 2017
Plainte fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • et après en avoir débattu,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 16 mai 2017, d’une plainte émanant d’un particulier, afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur de plusieurs publicités en faveur de motos, diffusées sur Internet, sur la page Facebook ou la chaîne Youtube de l’annonceur.

Les publicités à examiner présentent un véhicule deux roues à moteur circulant sur des espaces piétons ou sur des voies non ouvertes à la circulation.

2. La procédure

La société annonceur a été informée, par courrier recommandé avec avis de réception du 23 mai 2017, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle a été également informée que cette affaire ferait l’objet d’un examen dans le cadre de la procédure simplifiée prévue à l’article 12 du règlement intérieur du Jury.

Le plaignant a transmis au secrétariat du Jury, par courrier électronique du 1er juin 2017, des éléments complémentaires à sa plainte, dans lequel il fait part de « certaines vidéos publicitaires… sur la chaîne Youtube (de l’annonceur) » ainsi que d’une image qui « semble tirée » d’une autre vidéo Youtube, en transmettant trois liens internet renvoyant vers des vidéos publicitaires diffusées sur Youtube.

Le Jury de Déontologie Publicitaire a adressé un courrier de réponse au plaignant, le 9 juin 2017, lui précisant que les nouveaux liens transmis diffèrent des éléments (liens et captures d’écran) mentionnés dans sa plainte initiale et sur la difficulté de déterminer précisément les vidéos sur lesquelles portent la plainte. Ce même courrier demandait au plaignant d’indiquer précisément et de fournir un récapitulatif précis des publicités visées par la saisine, ainsi que des images qu’il estime contraires aux principes déontologiques.

Il lui a été également précisé qu’en l’absence de retour de sa part, le Jury de Déontologie Publicitaire examinerait la plainte du 16 mai 2017, lors de sa séance du 7 juillet 2017, pour la partie considérée à ce jour comme recevable, c’est-à-dire les seuls éléments communiqués dans cette plainte initiale.

3. Les arguments échangés

Le plaignant considère que les publicités en cause véhiculent l’idée selon laquelle un deux-roues peut rouler partout : sur les trottoirs, sur des routes non ouvertes à la circulation, dans rues piétonnes. Il estime que ces publicités ont une influence sur le comportement des conducteurs et qu’elles encouragent la violence routière.- Le représentant de la succursale en France de la société fait valoir que le visuel publicitaire publié sur Facebook, est une photographie prise à Split en Croatie, il ne s’agit pas d’un trottoir mais d’une route secondaire pavée étroite rejoignant une route pavée principale, ainsi qu’en atteste la différence d’inclinaison du sol entre le premier plan et le second plan où circule le véhicule. Il ajoute que, dès que l’annonceur a pris conscience, lors de sa parution, que ce visuel pouvait  prêter à confusion, il l’a supprimé de sa page Facebook.

Concernant le visuel du véhicule affiché sur la page produit du site Internet de l’annonceur, il précise que la société ne peut pas le modifier à son niveau car elle n’a pas la main sur le contenu,  s’agissant d’une publication paneuropéenne gérée par le groupe, dont le siège est basé en Grande-Bretagne. A réception du courrier du Jury, l’information a toutefois été transmise au siège.

4. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle que la Recommandation « Deux roues à moteur » de l’ARPP dispose que :

« La publicité pour un deux roues à moteur doit, sous quelque forme que ce soit, respecter les règles déontologiques suivantes :

4. CODE DE LA ROUTE

Ne pas mettre en scène des deux roues à moteur en contravention avec les règles du Code de la route, ou les impératifs de sécurité (notamment, les utilisateurs de deux roues à moteur porteront toujours un casque homologué)…

6. ENVIRONNEMENT

Ne pas faire de publicité directe ou indirecte présentant une machine tout terrain en conflit avec le respect de l’environnement. »

D’autre part, la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP prévoit dans son point 9 « Impacts éco-citoyens » que :

« La publicité doit s’inscrire dans un contexte de responsabilité sociale en tenant compte notamment de la sensibilité  du corps social à un moment donné et du contexte de diffusion de la publicité.

9/1 La publicité doit proscrire toute représentation susceptible de banaliser, et a fortiori valoriser, des pratiques ou idées contraires aux objectifs du développement durable. A titre d’exemple :

a/ La publicité doit bannir toute évocation ou représentation de comportement contraire à la protection de l’environnement et à la préservation des ressources naturelles (gaspillage ou dégradation des ressources naturelles, endommagement de la biodiversité, pollution de l’air, de l’eau ou des sols, changement climatique etc…), sauf dans le cas où il s’agit de le dénoncer…

b/ La publicité ne saurait inciter, directement ou indirectement, à des modes de consommation excessive ou au gaspillage d’énergies et ressources naturelles. Elle ne saurait suggérer ou cautionner des agissements manifestement inconséquents ou irresponsables (…)

e/ La représentation, sous quelque forme que ce soit, de véhicules à moteur en milieu naturel devra clairement les positionner sur des voies ouvertes à la circulation. ».

À titre liminaire, le Jury rappelle qu’il n’est pas une juridiction et que la mission qui lui a été confiée par les représentants des professions de la publicité réunies au sein de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (l’ARPP) est de donner son avis sur le respect, dans les publicités diffusées depuis moins de deux mois, des recommandations déontologiques inspirées de celles de la Chambre de commerce international, que ces professions se donnent à elles-mêmes et s’engagent à respecter. Ces recommandations peuvent être plus exigeantes que ce qu’impose le respect de la loi.

Sur la recevabilité des éléments transmis

Le Jury observe que la plainte initiale visait expressément deux visuels, l’un figurant sur la page Facebook de la marque et l’autre sur le site internet, ces deux photos étant extraites de films publicitaires vers lesquels la plainte renvoyait par un lien.

Cet envoi a été complété par un message du plaignant du 1er juin 2017 par lequel il a précisé que certaines vidéos publicitaires se trouvant sur la chaîne Youtube européenne se trouvent aussi sur la chaîne Youtube France de la marque, et par lequel il renvoie, via trois autres liens hypertextes, à d’autres films publicitaires.

Le Jury a précisé au plaignant, dans un courrier du 9 juin 2017, que les nouveaux éléments différaient de ceux contenus dans la plainte initiale et lui a demandé par conséquent de déterminer précisément les vidéos sur lesquelles porte la plainte, ainsi que de fournir un récapitulatif des publicités visées par la saisine et des images que le plaignant estime contraires aux principes déontologiques. En l’absence de  réponse à ce courrier, seuls les éléments figurant dans la plainte initiale, qui sont d’une part, le visuel figurant sur la page Facebook de l’annonceur, d’autre part, le visuel portant la mention « l’aventure n’attend plus que vous » et figurant sur le site Internet sont recevables.

Sur les visuels publicitaires en cause

Le Jury relève que le premier visuel, publié sur la page Facebook de la marque, montre deux personnes à moto roulant sur un trottoir pavé, surélevé par rapport à la route. La photo est accompagnée de la mention « Découvrez le XXX et vivez des expériences de conduite inédites ». Si l’annonceur précise qu’il s’agit non pas d’un trottoir, mais d’une route secondaire pavée étroite rejoignant une route pavée principale, rien dans le visuel ne permet de corroborer cette affirmation. Le véhicule est donc présenté au public comme roulant sur un espace dédié à la circulation piétonne.

Le Jury est d’avis que, dans ces conditions, ce visuel ne respecte pas le point 4 de la Recommandation « Deux roues à moteur » de l’ARPP, précitée.

S’agissant du second visuel, le Jury relève que le conducteur de la moto roule dans un espace naturel, au milieu d’une gerbe d’eau. Le visuel est accompagné du texte « l’aventure n’attend plus que vous. Une machine qui va bien au-delà des frontières de la ville. La souplesse du X permet de combiner trajets quotidiens urbains et échappées hors des sentiers battus le week-end : à vous de jouer ! ».

La moto est, dans ce visuel, présentée comme circulant en milieu naturel sans être positionnée sur une voie ouverte à la circulation, ce qui n’est d’ailleurs pas contesté.

Le Jury rappelle que si la présentation de véhicules motorisés dans des espaces naturels est admise en publicité, ceci n’est possible que si elle est organisée de façon à montrer que le véhicule en cause se trouve sur une voie ouverte à la circulation. Ne pas respecter cette règle relaie une représentation de comportements contraires à la protection de l’environnement et à la préservation des ressources et les banalise.

Par conséquent, le Jury est d’avis que ce second visuel ne respecte ni le point 6 de la Recommandation « Deux roues à moteur », ni le point 9/1 de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP, particulièrement le e/.

En conséquence de ce qui précède, le Jury est d’avis que les publicités en cause ne respectent pas les dispositions des Recommandations précitées.

Avis adopté le vendredi 7 juillet 2017 par Mme Michel-Amsellem, Présidente, Mme Sophie-Justine Lieber, Vice-Présidente, Mmes Drecq et Moggio, MM. Benhaïm, Carlo, Depincé, Lacan et Leers.