Avis JDP n° 556/19 – JEUX LOTERIES – Plainte fondée

Avis publié le 11 février 2019
Plainte fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • et après en avoir débattu,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 3 novembre 2018, d’une plainte émanant d’un particulier, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une vidéo publicitaire diffusée sur Internet, en faveur de la société annonceur, pour promouvoir son produit de loterie.

Le film publicitaire en cause présente un couple se tenant par la main et marchant dans une ruelle. L’homme s’agenouille devant la femme en lui tendant un écrin pour la demander en mariage, offre que décline la jeune femme en déclarant « T’es trop mignon de croire que je vais t’épouser alors que t’es même pas capable de me payer un resto ! Ta bague elle vaut même pas 1000 euros… ». Tout à coup l’homme reçoit une alerte sonore sur son téléphone portable et s’écrie « Je viens de gagner 500 000 euros sur X ! ». La femme se montre alors intéressée en disant « Mon amour c’est génial… On va se marier, on va avoir la vie de nos rêves ! ». L’homme s’étonne « Tu ne viens pas de rompre là ? » et la femme de répondre « C’était de l’humour, j’étais tellement émue par ta demande et d’ailleurs je te dis oui !! ». L’homme lui répond « Ah mais non » et s’en va en courant et en sautant de joie. Un panneau de fin indique « X – 100% gratuit ! ».

2. Les arguments échangés

– Le plaignant considère que cette publicité utilise une présentation vénale et cupide de la femme, de nature à influencer les plus jeunes. La femme est ainsi réduite à un être matérialiste, sans autre ambition.

– La société annonceur a, par courrier recommandé avec avis de réception du 10 décembre 2018, été informée de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle n’a pas présenté d’observations.

3. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle que la Recommandation « Image et respect de la personne » de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP), dispose que :

«2.3 La publicité ne peut valoriser, même indirectement, des sentiments ou des comportements d’exclusion, d’intolérance, de sexisme. »

Par ailleurs, le Code ICC consolidé sur les pratiques de publicité et de communication commerciale dispose, à son article 1er, que « Toute communication commerciale doit être conçue avec un juste sens de la responsabilité sociale et professionnelle » et à son article 4, que « La communication commerciale doit respecter la dignité humaine (…) ».

Le Jury relève que le film publicitaire en cause présente un couple se tenant par la main et marchant dans une ruelle. L’homme s’agenouille devant la femme en lui tendant un écrin pour la demander en mariage, offre que décline la jeune femme en déclarant « T’es trop mignon de croire que je vais t’épouser alors que t’es même pas capable de me payer un resto ! Ta bague elle vaut même pas 1000 euros… ». Tout à coup, l’homme reçoit une alerte sonore sur son téléphone portable et s’écrie « Je viens de gagner 500 000 euros sur X ! ». La femme se montre alors intéressée en disant « Mon amour c’est génial… On va se marier, on va avoir la vie de nos rêves ! ». L’homme s’étonne « Tu ne viens pas de rompre là ? » et la femme de répondre « C’était de l’humour, j’étais tellement émue par ta demande et d’ailleurs je te dis oui !! ». L’homme lui répond « Ah mais non » et s’en va en courant et en sautant de joie. Un panneau de fin indique « X – 100% gratuit ! ».

Le Jury comprend que ce film a voulu se fonder sur des codes sociaux, autour d’une situation de demande en mariage immédiatement identifiable par le public (l’homme un genou à terre ouvrant un écrin et déclarant sa flamme), avec des personnages caricaturaux.

Sous le couvert de l’humour, ce film présente avec complaisance une situation de stéréotype de genre dans laquelle l’homme est celui qui doit être riche, ne devenant digne d’intérêt que lorsqu’il a gagné 500 000 euros, et la femme est vénale, ne percevant le mariage que comme un mode de rémunération.

Une telle publicité véhicule une représentation dégradante des relations interpersonnelles, qui se fonde sur des stéréotypes sexistes construits sur l’immaturité caricaturale des personnages tant masculin que féminin. A cet égard, le Jury considère que le film n’est pas conçu, en l’espèce, avec un juste sens de la responsabilité sociale.

En conséquence, le Jury est d’avis que la publicité en cause méconnaît les dispositions précitées.

Avis adopté le 11 janvier 2019 par Mme Lieber, Présidente, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mmes Drecq et Lenain, MM. Depincé, Lacan, Leers et Lucas-Boursier.